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Nous nous situons aux alentours de mai 1558.
Il fait de plus en plus chaud les gens prennent plaisir à sortir dans les jardins.

Si vous souhaitez jouer un étranger, privilégiez les Espagnols et les Ecossais.
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MessageSujet: you can't choose what stays and what fades away | Mary  you can't choose what stays and what fades away | Mary Icon_minitimeVen 31 Oct - 20:06
you can't choose what stays and what fades away | Mary Gui10 you can't choose what stays and what fades away | Mary Mary10
Guildford & Mary
« Dura Lex, sed Lex »




Les mensonges avaient un prix, qu’il fallait bien payer tôt ou tard. Certains plus que d’autres requéraient une compensation qu’une vie entière n’aurait su acquitter, que ce soit un amour à jamais perdu, une tête placée sur le billot si l’Etat se trouvait être la victime, quantité d’or, de gloire ou de bonheur mal acquis. La roue tournait toujours, même si on l’oubliait, si bien que personne ne se trouvait exempté d’une certaine forme de justice… Quitte à ce que le temps fasse son œuvre, mettant des années, voire des décennies à accomplir sa revanche. Personne n’était à l’abri, car Dieu n’oubliait pas, pas plus qu’il ne laisserait après votre mort une dette impayée : votre âme en serait la rançon, tout autant que l’avenir de votre lignée…

Fort heureusement, Guildford n’avait pas encore franchi la frontière invisible le condamnant à lutter désespérément contre un ennemi aussi intangible qu’imbattable. Cette ligne rouge, le noble semblait la frôler sans s’en apercevoir, certain d’accomplir ce qui était juste : qu’importait les moyens, si l’objectif se voyait atteint ? Et le résultat qu’il visait ne laissait aucun doute quant à sa nécessité : le Ciel avait béni les Croisades en leur temps, il en serait de même avec son entreprise, uniquement tournée vers la prospérité du Royaume d’Angleterre, et plus particulièrement de ses parties les plus septentrionales. Si aucun intérêt personnel ni intention méprisable n’entachait sa volonté, pourquoi donc la fatalité le punirait-elle pour accepter de se salir les mains, là où tous préféraient pudiquement fermer les yeux ? Son seul réel péché serait sans doute celui d’orgueil, le poussant à croire que seul, uniquement appuyé par quelques discrets soutiens à la Cour, et avec pour dernier recours d’appuyer les complots visant à destituer Mary Tudor du trône. Comme si Saint Michel, se lançant bravement à l’encontre du Dragon, vendait une portion de son âme au Diable pour réussir sa noble tâche… Fleming serait-il un jour jugé condamnable ? Ses actes revêtiraient-ils un jour la triste appellation de « crimes » ? Seul l’avenir le dirait, car tel un promeneur cheminant en plein brouillard et sans lanterne, l’Anglais n’avait aucun indice sûr quant à ce de quoi seraient constitués les mois à venir. Gouffre sans fond ou couronne de lauriers, les deux extrêmes comme tous les intermédiaires entre eux restaient possibles.

Le mieux à faire demeurait de garder le cap, quoi qu’il puisse advenir, ce qui se traduisait par le bannissement de toute idée de renoncement, mais également par, en conséquence, le fait d’avoir à essuyer maints inconforts nés de cette tromperie continuelles. Aux ronds de jambe continuels à singer auprès des courtisans s’ajoutaient la sobrement indéfectible allégeance envers leur suzeraine que le Lord affichait de façon perpétuelle dès qu’il se trouvait en public, mais également ce qu’il coûtait de jouer aux fidèles sujets de Sa Majesté : cette dernière, s’appuyant sur lui, s’en remettait à sa diligence afin de gérer le domaine de la famille Dudley, énième lignée tombée en disgrâce sous le coup du caprice glacé de la Reine. Gui n’avait jamais rien eu contre cette famille, avec laquelle au demeurant il avait par le passé partagé une relation cordiale ; il n’avait cependant eu d’autre choix que d’accepter la charge de régisseur de leurs terres, et avec les remerciements empreints d’humble reconnaissance de rigueur. Un ouvrage dont le bien né se serait bien passé… ce que malheureusement, ce dernier n’avait pas le luxe de pouvoir exprimer, se retrouvant du coup associé bien malgré lui aux inimitiés qui fustigeaient les Dudley depuis de longues semaines déjà.

En tant que nouveau protecteur de la propriété de ses anciennes connaissances, l’aristocrate s’était vu contraint par la force des choses à prendre la route afin d’aller impulser les travaux de reconstruction du château, qui n’avaient jusque-là été que de très discrets balbutiements. Après tout, n’avait-il pas réussi semblable prodige en faisant renaître de ses cendres –au sens figuré autant qu’au sens propre- la demeure des Fleming lorsque son digne héritier en avait récupéré la possession en même temps que son titre ? Certains esprits des plus suspicieux y auraient vu un habile moyen de l’éloigner de Londres, subterfuge né de l’esprit lui-même de Mary Ière, ou bien habilement suggéré par quelque opposant des plus vénéneux… Quoi qu’il en fût, ce ne serait pas depuis Warwick que Guildford le découvrirait. Il lui faudrait attendre d’être de retour à la capitale pour éventuellement se pencher sur la question ; pour l’heure, ses affaires plus ou moins officieuses se trouvaient momentanément en berne, à son grand déplaisir. Pour couronner le tout, il ne pouvait même pas alléger sa contrariété par le hardi projet d’en profiter pour rendre visite à sa chère sœur, compte-tenu du fait que Warwick ne se situait qu’à mi-chemin entre Londres et le Northumberland, bien trop au Sud encore pour lui servir de plausible prétexte pour une escapade informelle. Ce séjour s’annonçait passablement pénible… D’autant plus que l’envoyé de la Reine ne se faisait aucune illusion quant à l’accueil qui lui serait réservé : si certains gens de maison auraient le bon ton de garder leur avis pour eux, d’autres se draperaient de suffisance silencieuse, le jugeant en secret du regard lorsqu’ils s’imagineraient ne pas être vus. Qu’une poignée jouât les lèches-bottes obséquieux envers le nouveau maître des lieux, à vrai dire, l’enchantait encore moins, et ce fut donc d’une humeur passablement sombre que Fleming prit ses quartiers dans l’unique aile encore parfaitement habitable de la noble bâtisse.

Force était de reconnaître que la partie n’avait rien de gagné d’avance. En cela, la personne qui avait suggéré que son expérience passée s’avèrerait utile ne s’était pas fourvoyée : de sérieuses rénovations apparaissaient plus que nécessaires, afin d’éviter que le peu restant encore en un état relativement correct ne finisse de tomber en ruine. Le maître d’œuvre fut un des premiers habitants du château que le nouveau venu rencontrât, homme travailleur ne se mêlant pas de politique. Sa rigueur plut de suite à Fleming, qui établit la tenue d’un entretien journalier entre l’artisan et lui, au matin, afin de se mettre au fait de ce qui serait accompli durant la journée par la petite armée d’ouvriers et d’apprentis dont le sieur avait la responsabilité.

Et ce matin-là n’échappait pas à la règle. Dix heures approchaient, mais Gui était déjà sur le pied de guerre depuis un bon moment, s’absorbant dans la professionnalité et le discret plaisir né de la besogne bien menée afin que le temps ne semblât pas s’étirer à l’infini, aussi pesant que désespérant. Debout devant une table recouverte de plans sur laquelle il s'appuyait de ses paumes, le sang bleu s’était perdu dans l’examen de la dernière proposition en date de leur architecte, concernant le toit de la petite chapelle qu’il serait bien vu d’ajouter à l’édifice, catholicisme porté aux nues par le régime en place obligeant. Encore dubitatif quant à la réelle plus-value de la chose, Gui ignorait encore que ce tracas ne serait que ridiculement minime en comparaison de ce qui l’attendait…








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Mary Sidney
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♕ Métier : Dame de la Cour, Mécène et Comploteuse. ♕ Age : 27 ans. ♕ Religion : Protestante. ♕ L'avatar a été fait par : Maquizz ♕ Mon nombre de messages est : 291 ♕ Mon nombre de Livres Sterling : 0 ♕ Je suis arrivé(e) sur TGA le : 17/03/2013 ♕ Mon pseudo web est : Menthe. ♕ Mes autres visages : Thomas Howard

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MessageSujet: Re: you can't choose what stays and what fades away | Mary  you can't choose what stays and what fades away | Mary Icon_minitimeLun 10 Nov - 21:09



You can't choose what stays and what fades away



Ce matin là comme tous les autres, la ville de Coventry s'éveilla dès les premières lueurs du jour. Dans les heures qui suivirent, les rues de la cité se retrouvèrent encombrées par les habitants se pressant à leurs tâches, bruyantes, parfois malodorantes ou périlleuses, mais néanmoins tellement lucratives—du moins pour la plupart—expliquait Mrs Everett à son invitée. Pensez donc ! Le commerce du tissu avait vu le jour au XIVème siècle entre ces murs et voilà que deux siècles plus tard, il était plus florissant que jamais ! Les marchands se pressaient à Coventry pour s'y établir et la laine—non pas cette horrible laine rêche des moutons Ecossais, mais celle, plus douce, de moutons bien Anglais—affluait chaque jour pour y être filée et transformée en vêtement. On pouvait même trouver sur les étals des marchands des soieries aux couleurs des plus chatoyantes qui seraient, Mrs Everett n'avait aucun doute là-dessus, du plus bel effet à la cour. Mais alors que Mrs Everett babillait et s'extasiait à son aise sur la renommée de Coventry, son invitée ne l'écoutait que distraitement. Le regard porté tantôt sur la fenêtre du parloir, tantôt sur son interlocutrice à laquelle elle glissait de temps à autre quelques vagues exclamations de surprise, elle ne cessait de songer à la tâche qu'elle s'était assignée en venant ici. Lady Mary Sidney était arrivée la veille à Coventry sous le prétexte de rendre visite aux Everett, l'une des rares familles de la région qui n'avait pas pris soin de couper les ponts avec les Dudley après leur disgrâce. Même si Mary s'attendait à un accueil plutôt chaleureux, elle n'avait cependant pas imaginé une seule seconde la joie que sa venue provoquerait. Mrs Everett lui avait joyeusement fait visiter la maison tout en vantant les profits que son époux, l'un des marchands les plus importants de la ville, faisait chaque jour, et lui avait présenté un à un les enfants Everett. Toujours aussi polie, Lady Sidney avait patiemment écouté l'énumération des noms de la très nombreuse fratrie, rendant à Mrs Everett son sourire lorsque cette dernière annonça fièrement que son aîné, absent ce jour-là, se trouvait à Cambridge pour ses études. On offrit bien évidemment l'hospitalité à Mary—allons donc, on ne ferait tout de même pas l'affront d'envoyer la fille de John Dudley coucher à l'auberge!—et cette dernière passa donc la soirée à s'enquérir de la vie que menait la famille à Coventry, et décrivant, à la demande des demoiselles Everett, les tenues élégantes qu'avaient porté les femmes de la cour à l'occasion du mariage de la reine, le tout avec une minutie presque passionnée, mais qui hélas dissimulait en fait une grande lassitude.

En réalité, Lady Mary Sidney n'avait eu aucune envie de rendre visite aux Everett. Non pas qu'elle ne les aimait pas, après tout, Mrs Everett l'amusait assez, mais en ces temps de troubles et étant enceinte de plusieurs mois déjà, Mary n'avait programmé ce voyage que dans le but de régler une question bien épineuse au château de Warwick. La demeure, siège ancestral des comtes de Warwick, avait appartenu à son père, mais depuis le Bill of Attainder promulgué contre les Dudley, toutes les possessions de la famille étaient passées aux mains de la couronne, laquelle ayant jugé bon de les offrir à quelques partisans ou les faire administrer par des catholiques. Mary avait été d'ailleurs furieuse en apprenant la nouvelle mais à présent que son frère John était devenu la nouvelle figure de proue du clan Dudley, la colère s'était muée en inquiétude. Et si John finissait par être libéré, aurait-il le droit de porter le titre de comte de Warwick qui lui revenait ? Et qu'en serait-il pour le domaine ? Le comte de Warwick ne pouvait décemment pas se retrouver sans ses terres ! Cette pensée, Mary la ressassait encore et encore pendant les heures qui suivirent sa dernière entrevue avec Mrs Everett, entrevue durant laquelle elle avait poliment refusé de faire le tour de Coventry, et demandé innocemment à ce qu'on lui prête des cheveux pour atteler à son carrosse—ceux qui l'avaient amenée la veille dans le Warwickshire étaient encore fatigués de leur voyage depuis la capitale—afin qu'elle puisse se rendre au château de Warwick. Et alors que l'attelage la portait, elle et sa suivante Rebecca, vers l'ancienne possession de sa famille, Mary ne put s'empêcher de frissonner en songeant à l'expression horrifiée qui s'était peinte sur le visage de Mrs Everett après qu'elle ait formulé ce désir.

Lorsqu'enfin le carrosse atteignit le château, Mary en descendit rapidement, pressée de se dégourdir les jambes après avoir enduré les remous du voyage. Rebecca avait beau avoir garni les banquettes de coussins, la traversée s'était avérée éprouvante, du fait des nombreuses bosses et ornières de la route. Passant une main sur son ventre comme pour signifier à son enfant que le périple s'achevait, Lady Sidney resserra sa cape sur ses épaules, prenant soin de dissimuler son état, et s'avança seule vers la demeure. Sur le chemin, elle ne put s'empêcher de constater avec tristesse l'état de délabrement du château. Des blocs de pierre jonchaient au sol, et si elle n'avait pas connu le lieu et la solidité de la structure de la demeure familiale, elle aurait juré que des pans de murs s'écrouleraient avant qu'elle n'ait pu atteindre la porte d'entrée. Le lierre grimpait ça et là sur la pierre blanche, dévorant petit à petit le château. Mais où diable étaient passés les jardiniers ? Son cœur se serra lorsqu'elle aperçut l'ours tenant un tronc d'arbre, le blason des comtes de Warwick, à moitié enfoui sous du lierre. Mais alors qu'elle s'approchait de la gravure pour la délivrer de sa prison végétale, la porte d'entrée grinça et le visage d'une domestique, autrefois employée par John Dudley père, se découpa dans l'ouverture.

'Lady Mary ? C'est vous ?' demanda-t-elle, les yeux écarquillés. 'Oui Martha, c'est bien moi. Je suis heureuse de te voir ici. Pourrais-je... Pourrais-je voir ton maître ?' La servante ouvrit plus grand la porte pour laisser rentrer Mary, qu'elle fixait d'un air où se mêlaient à la fois admiration et inquiétude. 'Moi de même my lady, mais... le maître ? Alors vous savez... ?' 'Oui Martha, je sais. Mais justement, j'aimerais le voir pour discuter. Pourrais-tu me conduire à lui ?' La domestique s'inclina et fit signe à Mary de la suivre. Sur le chemin qui devait la mener à Guildford Fleming—puisque c'était ainsi que se nommait le nouveau 'propriétaire' du château—Lady Sidney sentit son cœur battre plus vite. L'angoisse et l'anxiété la gagnaient à mesure qu'elle approchait de cet homme. Ses pensées tourbillonnaient, allant de John à son père, en passant par son époux, Henry. Aucun d'eux ne savait qu'elle se trouvait là. Elle avait gardé son plan secret. 'Comment est-il ? Est-ce qu'il te traite bien ?' demanda-t-elle anxieusement à Martha. 'Il est... silencieux. On ne le voit pas beaucoup en fait. Je lui fais à manger mais la journée, je ne sais pas à quoi il s'occupe. A ce que je sais, il ne bat aucun domestique.' Voilà qui était une bonne nouvelle, songea Mary, toujours aussi nerveuse. Enfin, elle arriva dans une petite pièce, l'une des rares encore habitable, et aperçut ce Fleming, penché sur une table, visiblement absorbé dans la contemplation de ce qui ressemblait à une carte. Il n'avait pas remarqué Mary et celle-ci l'observa quelques secondes avant de se racler la gorge et de s'avancer d'un pas assuré. 'Lord Fleming ? Lord Guildford Fleming ? Je suis Lady Mary Sidney, la sœur de John Dudley, comte de Warwick,' dit-elle en s'inclinant. Elle avait beau avoir peur, sa voix sonnait comme celle d'une femme de la cour, à la fois sûre d'elle et presque taquine, comme si elle et ce Fleming échangeaient quelques bons mots à propos de la maladresse d'un courtisan. 'Pourrais-je savoir ce que vous comptez faire de la demeure de mon frère ?'

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MessageSujet: Re: you can't choose what stays and what fades away | Mary  you can't choose what stays and what fades away | Mary Icon_minitimeMar 20 Jan - 19:08
Il fallait bien peu de choses pour bouleverser une histoire. Certains parlaient d’un minuscule grain de sable capable de bloquer une imposante machine, d’autres d’un inoffensif papillon ont les ailes d’un battement faisaient s’abattre sur des pays lointains de terribles cataclysmes, mais ça n’était au final que de beaux traits d’esprit, d’élégantes métaphores que les précieux se répétaient à l’envie, pour se donner un genre, de l’allure érudite. Guildford, lui, connaissait bien ces détails insignifiants qui, comme pour se venger de n’être point remarqués par le commun des mortels, décidaient de bouleverser les plans établis par le Tout Puissant, brisant au passage quantité de vies innocentes. Les guerres n’en étaient qu’un bref aperçu, une infime portion : si certains soldats de rang de par leur jeune âge ne réalisaient pas pleinement ce qu’il coûtait de protéger son pays aux portes du champ de bataille, ceux qui survivraient garderaient à jamais gravé dans le cœur un pragmatisme de granite qui les rendrait capable de résister à tout, contre vent et marée. Non, dans ce registre, Fleming n’aurait pu que songer à l’étincelle qui, des années auparavant, avait donné naissance à l’incendie qui avait ravagé le château de son enfance, ou encore au très probablement risible quiproquo ayant amené les peuples anglais et écossais à se haïr au point de s’entretuer dès que l’occasion se présentait, et dont l’origine remontait à si loin que ceux qui se rappelaient encore avec exactitude la cause exacte de cette inimitié tenace reposaient dans la tombe. De ce sentiment de haine impalpable naissait sans cesse une violence mal réprimée qui, aussi intangible fût-elle, avait provoqué la mort de ses parents et la destruction de son innocence, en une leçon qu’il n’oublierait jamais, et qui l’avait armé contre de futurs assauts de ces petits riens dévastateurs. Il s’agissait d’une sorte de sixième sens, un instinct primaire gravé au fer rouge dans le recoin le plus sombre de son inconscient, apte à lui susurrer l’arrivée d’orages encore lointain quoi qu’approchant dans sa direction. Leur monde se révélait si sombre que cette voix ne se taisait jamais tout à fait, en un chuchotis continu propice à cultiver cynisme tirant sur une hostile froideur.

Ce jour-là, Fleming avait-il pressenti à l’image d’une Pythie qu’une visiteuse impromptue viendrait troubler la fragile à peine instaurée au château ? Oh, quand bien même son instinct se trouvait-il digne de respect, le don de préscience ne faisait pas encore partie des multiples cordes à son arc. Et puis l’évènement était tout de même plus notable –et donc moins aisément prévisible-, autrement plus qu’un potentiel ralentissement sur le chantier causé par un retard d’approvisionnement en matériel de construction, ou par un regrettable accident frappant un des ouvriers. Ce fut donc un regard circonspect qui gratifia la nouvelle venue alors qu’il relevait la tête : cette arrivée n’avait pas été prévue, et ne pouvait signifier que deux choses, l’annonce d’une bonne ou d’une funeste nouvelle. Aux vues de la nature du messager, une noble voyageuse dont le masque d’assurance avenante parvenait presque à voiler la lueur légèrement anxieuse de ses iris, la première option ne semblait pas la plus pertinente, en respect de cette loi universelle voulant qu’entre un naufrage et un miracle, l’Univers choisisse toujours de provoquer le premier de préférence.

-C’est moi-même, répondit l’Anglais avec un flegme de roc tout en redressant sa haute stature. Mes hommages, ma dame.

Si certains avaient déjà la sensation que ces formules toute faites avaient depuis longtemps perdu de leur sincérité à force d’être utilisées par des courtisans au cœur envenimé, il aurait pu croire tenir en cette phrase un argument de poids en faveur de leurs théories les plus désillusionnées. Gui ne se montrait ni impoli ni irrévérent, loin de là, mais aucune chaleur n’habitait ses propos, pas même hypocrite. Au fond, la Reine Mary était loin d’avoir fait le plus mauvais choix concernant la personne à qui attribuer la gestion du domaine de Warwick : si le Lord ne portait pas complètement l’actuelle suzeraine en son cœur, au moins n’était-il nullement du bois de ceux se laissant corrompre, attendrir ou seulement inquiéter par les opposants au régime qui auraient chercher à le détourner de sa mission. Un homme fait de glace et au cœur de pierre valait mieux que tous les courtisans les plus gracieux quand il fallait jouer les Cerbères… Quoi qu’il vaille mieux alors ne pas oublier qu’un molosse pouvait parfaitement se retourner contre son maître et mordre sauvagement la main nourricière.

En tout cas, pour l’heure, Guildford assumait sans sourciller ses fonctions, contournant nonchalamment la table derrière laquelle il s’était tenu pour mieux supprimer cet obstacle entre eux : implicitement, son inconscient le faisait ainsi témoigner qu’il n’avait besoin d’aucune protection lors d’un face à face avec l’ex-membre d’une famille lésée au-delà de toute expression par la Tudor dont il tenait lieu entre ces murs de représentant. Bras croisé, ce fut d’ailleurs une vérité qu’il ne manqua pas de posément lui rappeler tout en répondant à sa question, son inflexibilité se devinant sous sa cordialité :

-Ce que Sa Majesté la Reine attend de moi, rien de plus, rien de moins.


Ce qui sous-entendait que si la jeune femme désirait se plaindre ou tempêter contre l’injustice d’un système qui ne s’était pas gêné pour broyer les siens, que cette dernière s’adresse donc à la principale concernée, à savoir la souveraine elle-même. Bien évidemment, il s’avérait plus aisé de venir exprimer son mécontentement auprès du dernier maillon de la chaîne hiérarchique, qui lui au moins ne risquait pas de l’envoyer croupir dans une geôle de la Tour à l’image de bien des hommes de sa lignée, n’est-ce pas… Car Gui ne s’y trompait pas : s’il avait été en bon termes avec les Dudley dans une autre vie, l’ombre de la Reine Mary planait à présent sur lui, le marquant d’un sceau qui ne lui vaudrait plus que dédain retenu et reproches tus. Pour sauver sa contrée des Ecossais, le Lord serait cependant prêt à endurer les pires injures, inlassablement.

-Godric ! appela Fleming avec une raideur quasi militaire, sa voix grave roulant sur les pierres de la salle avec la rudesse du tonnerre. Un siège pour Lady Sydney.

Malgré tout, malgré son rôle, son allure imprenable et l’hiver hurlant dans ses veines, Guildford n’était pas un monstre, pas tout à fait, et veillerait à ce que la future mère ne soit pas plus indisposée par la situation que ce qui malheureusement ne saurait être évité.
Dans un coin, son jeune commis commença de s’affairer avec une certaine fébrilité, à la recherche de ce qu’on venait de lui demander avec autant de célérité que possible pour mieux contenter son glaçant seigneur.
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MessageSujet: Re: you can't choose what stays and what fades away | Mary  you can't choose what stays and what fades away | Mary Icon_minitimeDim 1 Fév - 19:01



You can't choose what stays and what fades away

Lady Sidney avait beau être une familière des lieux, Warwick Castle, tel qu'il était à présent sous le joug de l'envahisseur, l'intimidait au plus au point. L'endroit, où résonnaient autrefois l'écho des pas de serviteurs empressés courant dans les couloirs, des voix d'acteurs récitant de longues tirades d'un ton théâtral ou encore de la musique et des danses exécutées au cours de quelques masques, était aujourd'hui désespérément silencieux. Tellement silencieux d'ailleurs, qu'il sembla à la jeune femme entendre le vent qui s'élevait à l'extérieur. Ou était-ce des fissures s'étirant ici et là entre les épais murs de pierre que lui parvenait ce murmure glacé ? La jeune femme préféra ne pas s'interroger outre mesure à ce sujet, craignant de découvrir ce qui lui paraissait néanmoins évident : Warwick Castle tombait en ruines. Cela était déjà le cas du temps où le Duc de Northumberland avait habité ces lieux. Mary se souvenait encore des pièces que l'on avait condamnées, par peur que le plafond ne s'écroule ou qu'un pan de mur ne se détache. Et si son cœur se serrait à la vue d'une telle décrépitude, elle était encore plus bouleversée par l'idée que le domaine—aussi délabré fut-il—soit à présent sous la responsabilité de ce Fleming. Les rumeurs qu'elles avaient entendues à propos de ce dernier n'auguraient rien de bon. On le disait froid, dur, et inflexible, bien loin de l'archétype du parfait courtisan, archétype parfois ridicule mais que Mary avait pris l'habitude de côtoyer. Les nombreuses années qu'elle avait passées à la cour lui avaient enseigné les règles du jeu des politesses et de l'intrigue. Lady Dudley, puisque c'était ainsi qu'on l'appelait en ce temps, avait appris très tôt, suivant les traces de sa mère et l'exemple incontesté qu'était son père, à sourire, à danser, à se parer de mystère en se cachant derrière un éventail, s'incliner devant les plus titrés, flatter, complimenter à outrance, rire au bon moment et s'éclipser si nécessaire. En somme, se montrer sans se dévoiler, c'était tout ce qu'il fallait pour faire d'elle une parfaite femme de cour. Mary aurait certainement pu utiliser l'un de ces stratagèmes subtils propres aux intrigantes pour amener ce Fleming là où elle le souhaitait, si seulement ce dernier n'avait point été un homme du Nord, brutal, entêté et guère familier des politesses de la cour. C'était du moins ce qu'elle se disait tandis qu'elle observait sans s'en donner l'air l'individu en face d'elle. Elle cilla légèrement lorsqu'il contourna la table sur laquelle il était encore penché quelques secondes plus tôt—occupant là une place que Mary savait appartenir à son frère John, l'héritier Dudley—et s'approcha d'elle, affichant sa haute stature et dardant sur elle son regard froid.

Toute femme qu'elle était, Lady Sidney tint bon face à ce qu'elle jugeait comme une tentative pour l'impressionner et lui faire reprendre la route aussi soudainement qu'elle était arrivée. Elle releva légèrement son visage, et fixa l'homme dans les yeux, bien déterminée à y trouver là une once de sympathie ou de faiblesse qu'elle pourrait utiliser à son avantage. Hélas, les iris sombres dans lesquelles elle planta son regard ne lui révélèrent rien, si ce n'est que l'homme qui se tenait là devant elle disputait sa froideur avec celle d'une statue. Son cœur eut-il été fait de pierre, que Mary n'en aurait pas été étonnée. En comparaison, les roches de granit devaient avoir la douceur d'un oreiller en plume. Tout en ce Fleming respirait la rudesse du Nord de l'Angleterre, cette province obscure qu'une jeune femme voguant entre le Kent et la capitale avait coutume de considérer—à l'instar de nombre de ses semblables—comme arriérée et dépourvue de toute morale. La réponse que lui adressa finalement Fleming concernant sa présence en ces lieux lui fit d'ailleurs l'effet d'un soufflet. Comment ? Cet homme comptait-il donc demeurer à l'état de serviteur de la reine usurpatrice et se complaire ainsi dans une bassesse innommable ?

Lady Sidney ouvrit la bouche pour répliquer quelque chose que sa raison n'avait certainement pas eu le temps de valider, mais fut coupée—fort heureusement, il faut le dire, car cela lui donna le temps nécessaire pour digérer l'affront qu'on venait de lui faire—par Lord Fleming qui, d'une voix forte, réclama un siège pour celle qui faisait à présent office d'invitée à Warwick Castle. A nouveau, la fierté de Mary fut atteinte en plein cœur. Non content de lui rappeler une nouvelle fois la sentence qui avait été assénée l'année dernière aux Dudley, ce maudit Bill of Attainder qu'un Parlement de lâches avait eu tôt fait de ratifier, voilà que Fleming la ramenait à un statut qu'elle détestait de toute son âme, celui d'une faible femme tout juste bonne à donner des enfants à son époux. Et si Mary s'était toujours montrée heureuse de se retrouver enceinte—après plusieurs années de mariage et les questions anxieuses que lui posaient par intermittence les membres de la famille Sidney, c'était surtout un soulagement—elle n'acceptait qu'à grand peine le regard que l'on portait à présent sur elle. Pestant intérieurement à l'encontre de son interlocuteur un peu trop attentif à son goût—elle aurait pourtant juré avoir dissimulé correctement son ventre—elle fronça les sourcils tandis que le malheureux serviteur interpellé par Fleming se hâtait de lui dégoter un siège.

Blessée dans son orgueil, Mary ne put s'empêcher de prononcer des paroles qu'elle regretterait sans doute par la suite : 'Je vois que vous êtes déterminé à servir votre reine. Pourrais-je alors vous demander quelle offense vous avez commis à son encontre pour vous retrouver ainsi gardien de ce lieu ? Son ton se fit alors plus ironique. Auriez-vous tenté de déposer Francis Talbot afin d'obtenir la présidence du Conseil du Nord ? Car à en voir votre présence en ces lieux, j'imagine que le Comte de Shrewsbury ne s'est point laissé faire et que la reine lui aura donné raison...' Si John Dudley père l'avait entendue, nul doute qu'il aurait lui même été offensé par ses paroles. Certes, Warwick Castle tombait en ruine, mais n'en restait pas moins la demeure du Comte de Warwick, et à ce titre, ne méritait point que l'on souligne encore plus l'état déjà misérable dans lequel il se trouvait. Troublée par ses propres paroles, Lady Sidney redoubla d'efforts pour garder contenance, se refusant là toute défaite. Elle était une Dudley, pardi ! Lorsque Godric finit par lui apporter le siège que lui commandait son maître, la jeune femme remercia le serviteur d'un sourire chaleureux mais demeura debout, droite comme un i.

'Je vous remercie de votre courtoisie Lord Fleming, mais sachez que je ne suis ni malade ni mourante, et de ce fait parfaitement capable de me tenir sur mes deux jambes. J'ai voyagé de Londres jusqu'au comté de Warwick dans cet état, je peux donc demeurer debout et discuter avec vous des raisons qui vous ont poussé, ou forcé, à accepter de récupérer la propriété d'un homme qui, si je ne m'abuse, faisait encore partie de vos connaissances il n'y a pas si longtemps...' Enfin, le pavé venait d'être lancé dans la mare.

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