Le soleil venait de se lever. Je me trouvais au Devonshire ce jour-là, passer un agréable moment en famille. J'étais un père et époux heureux, entouré de ceux qui comptaient le plus pour moi, ceux que j'aimais plus que tout au monde. Il n'y avait rien de plus à demander. Même si je souriais face à eux, à l'intérieur de moi régnait une certaine peur, cette peur de l'avenir. Qu'allions nous devenir ? Je remettais nos vies dans les mains de Dieu, et priait chaque jour pour que cette situation ne cesse, pour qu'on puisse enfin vivre tranquillement, et surtout ouvertement. On ne devrait jamais nous cacher ni avoir peur à cause de notre foi. Malheureusement cela a été la conséquence majeure des dérives du catholicisme. Nous les protestants avions décidé de ne plus vivre dans la corruption catholique, mais suivre l'écrit sacré. Les catholiques s'étaient écartés de la parole sainte, et nous devions leur rappeler quel était le droit chemin. Seulement, cela menait à une terrible guerre, et beaucoup y ont perdu la vie, nombres de nos amis furent exécutés sur le buché par notre Reine. Seulement, comment expliquer ça aux enfants ? Comment à la fois leur inculquer les vraies valeur protestantes tout en leur disant qu'il fallait être catholique pour les beaux yeux de la Reine Mary ? Cela avait été dur pour Anya leur mère et moi. Nous vivions donc dans la peur, les enfants vivaient dans l'inconnu, tandis que beaucoup rêvaient de quelque chose de grand. Malheureusement, dans ce monde où l'on vit, on ne pouvait quasiment rien faire contre les grands, et au fur et à mesure que le temps passe, l'espoir s'affaissait et nous nous affaiblissions.

Nous étions dans une situation critique, et surtout nous les Cavendish, même si je tentais de jouer un tout autre rôle à la Cour, un rôle qui pouvait tous nous sauver, ce que j'espérais. Je gardais toujours ce masque de fidèle à la Reine. J'étais seulement fidèle à la notre Royaume. Je repensais à toutes ces chances minimes pour que l'on puisse s'en sortir. Cette chance là ne pouvait être que la princesse Elizabeth. Même si on se sentait désespérés, même si on devait s'assoir en silence, et qu'à chaque fois nous réfléchissions à quelque chose de terrifiant, on savait qu'au fond de nous la peur perdra. Justement, la foi permettait de rester éveillés et de combattre. Parfois le calme est violent, et on a ces pensées si souvent qu'on voudrait briser ce silence pour être à nouveau fiers de ce que nous étions, ce en quoi nous croyions.

Après avoir bien déjeuné, je me dirigeais vers mon bureau. Même si je venais de revenir de Londres, j'avais encore pas mal de boulot, d'affaires à régler et de lettres à envoyer. Plusieurs tas de feuilles se trouvaient sur mon bureau en face de moi, et je tentais tant bien que mal de m'y retrouver quand tout à coup une jolie petite tête apparu près de la porte. "Je t'ai vu !" disais-je à Georgiana, ma petite dernière, tout en lui faisant un clin d'oeil. "Qu'y-a-t-il ma petite princesse ?" repris-je en la voyant rire tout en continuant d'écrire.



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J'espérais qu'une bonne journée s'annonçât, et pouvoir profiter d'un moment de tranquillité en famille au domaine du Devonshire, là où je me sentais le mieux sans aucun doute. Pendant notre enfance, beaucoup disaient que notre peur diminuait en grandissant, je pensais tout l'inverse. Je le remarquais bien avec mes propres enfants, aussi innocents qu'ils pouvaient être, étaient tout autant ignorants de la situation extérieure, et ne pouvait donc point avoir peur. Pour ma part, je reconnaissais avoir peur de notre avenir, mais surtout des agissements récents d'Anya. Je savais cependant que cela devait être nécessaire et que de toutes façons je n'allais pas la convaincre d'arrêter, elle était imparable et ne renonçait jamais. C'était ce que l'on devait faire, nous tous protestants qui devaient croire en notre avenir et ne surtout pas baisser les bras parce que parfois il faut saigner pour savoir que nous sommes réellement vivants et que nous avions une âme. Mais à chaque fois que je regardais mes enfants, je me disais que je ne pouvais point leur imposer une vie sans leurs parents qui pouvaient à tout moment être ciblés comme protestants. Je repensais alors au bon vieux temps, voulant revenir en arrière.

Je repensais à tout cela dans mon bureau face au désordre dû à mon travail quand une petite tête fit son entrée. Je souriais tout à coup, et le découragement qui me prît diminua parce que c'était pour mes enfants que je me battais. Je ne pouvais remercier assez feu mon père de m'avoir inculqué une telle éducation qui nous avait sauvé tant de fois ces derniers temps. Georgiana se tenait là près de la porte, tout en riant. Elle ne perdit pas de temps pour entrer et me rejoindre près de mon bureau pour me tendre des jolies fraises. "Je te remercie Georgiana !" lui répondis-je tout en prenant les fraises pour les poser sur le bureau tout en remarquant qu'il n'y avait pas que des fraises, mais également un trèfle à quatre feuilles. "Oh ma petite, tu es chanceuse d'avoir trouvé une si belle rareté ! Elle est pour moi ?" continuais-je tout en la posant délicatement sur le bureau, là où rien ne pouvait l'abîmer. Je faisais assoir Georgiana sur mes genoux tout en lui donnant un baiser sur la joue. Passer du temps avec elle me mettait toujours en joie. Je savais aussi qu'elle adorait venir m'écouter ici, ce qui, je fus persuadé, allait la rendre intelligente.

"Veux-tu que je te raconte des secrets sur mon dernier voyage à Londres ?" demandais-je à celle qui était surement la plus sage de la fratrie Cavendish. Elle était ma petite fille adorée, et j'allais tout faire en mon pouvoir pour que mes enfants ne manquaient de rien. Le temps passait tellement vite que déjà je repensais au jour où il fallait trouver un époux pour mes filles qui grandissaient très vite.



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Georgiana était la petite dernière de la fratrie ducale du Devonshire, ma petite princesse, une petite perle, un ange. Je la voyais grandir, de plus en plus, l'air ému et presque nostalgique. Ma fille, ma bataille. C'était surtout pour mes enfants que je me battais, ils étaient ma seule raison de vivre, et je leur inculquais l'éducation que mon père m'avait lui-même transmis, et avec l'arrivée de Thomas, le petit dernier, je pouvais presque partir serein, confiant concernant la succession et la gestion des terres du Devonshire et la pérennité du titre ducal. Mes enfants j'en faisait ma priorité, et ces derniers temps ce fut de plus en plus compliqué. On ne pouvait pas vivre sans encombre, on ne pouvait pas croire librement à ce qu'on pensait être le vrai chemin, la vérité. C'était difficile à la fois d'être protestant convaincu et à la fois de mettre un masque pour inculquer les valeurs catholiques à ses enfants pour des raisons de sécurité. Malheureusement j'avais peur que les enfants deviennent aveugles face au lavage de cerveau catholique et qu'ils deviennent catholiques par la suite. Ce n'était pas ce que je voulais pour mes enfants, mais si on les éduquait selon les idées protestantes, cela aurait été très dangereux pour nous.

Je souriais, mon visage s'illuminait en présence de Georgiana. Elle était venue me voir à mon bureau, comme elle le faisait assez souvent lorsque je me trouvais à notre domaine du Devonshire. J'avais beaucoup de travail, beaucoup de choses à faire, et de lettres à envoyer, mais je trouvais toujours le temps de passer du temps avec ma famille, jusqu'à ce que le temps nous manque. "Il n'y a qu'une jolie petite princesse à son père pour en trouver une." ajoutais-je après avoir pris le trèfle. J'espérais que cela puisse être un signe. Je voulais que mes enfants soient les plus influents d'Angleterre, qu'ils soient à la hauteur de notre titre, de notre famille. Je la pris sur mes genoux, comme je le faisais si souvent. Je réfléchissais à une histoire que je pouvais raconter à ma chère fille sur Londres. "Tout juste. C'est un secret alors ferme les yeux et dit haut et fort que tu ne le diras à personne n'est-ce pas ?" lui répondis-je presque en chuchotant. "J'ai découvert un passage secret !". Je lui faisais un clin d'oeil. Elle était un rayon de soleil, et je me sentais bien mieux quand je passais du temps avec elle.


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