La "triste" nouvelle a été annoncée depuis quelques heures déjà. La Reine Mary a été retrouvé morte, assassinée. La majorité du peuple anglais est choquée par cette nouvelle et pleure cette reine "si bonne et si attentionnée". Quelle hypocrisie ! Hier encore, bon nombre de londoniens se peignait d'une nouvelle hausse d'impôt prévue et là, ils la pleurent et l'encensent.

Pour ma part, pour me fondre dans la masse de courtisan, je feins la tristesse. Néanmoins, il en est tout autre : en réalité, je jubile. Avec l'arrivée sur le trône de la Princesse Elizabeth, la Compagnie va pouvoir de nouveau s'accroître et l'Angleterre va pouvoir ravir la domination des mers à ces foutus espagnols. "La Reine est morte, vive la Reine !" Comme on dit en France !

Cependant, le chef de la police, William Clarence, m'a demandé de l'assister dans ses recherches du coupable. A mon grand dépit, je n'ai pu refuser sans paraître suspecte.

Me consacrant de mauvais coeur à la tâche qui m'a été assignée, je me dirige vers la salle du Conseil. Je reconnais avoir choisi cet endroit au hasard, ne sachant pas trop où commencer.

A ma plus grande surprise, en plus de trouver cette salle déserte de ministre, j'y crois le capitaine Mortimer. Je manque de pâlir à sa vue, non pas de dégout, mais par crainte qu'on éventre mon secret. Aussi, déterminée d'en finir rapidement, je me dirige vers lui pour entamer la discussion. Tandis que je me rapproche, je note la présence d'un revolver non loin de lui. La situation pourrait difficilement devenir plus compliquée !

-Monsieur Mortimer, que faites-vous ici ? Chuchote-je en m'approchant de lui. Ne devriez-vous pas être en vie ? A moins que vous soyez lié à ce qu'il vient se passer ? Chuchote-je sur un ton encore plus bas dans la crainte qu'on se fasse voir.

Non pas que j'irais le dénoncer, après tout, il s'agit de l'un de mes meilleurs fournisseurs. Le voir en prison réduirait considérablement mes affaires et cela serait fâcheux !

Je ne cache pas un sourire lorsque le capitaine dit être heureux de la mort de la Reine. Seulement, même si je le pense également, je me dois de prendre un air outrée et de déclarer :

-Capitaine, comment osez-vous dire du mal de feu la Reine ?

Cependant, si mon ton est outré, il n'est guère difficile de deviner que je joue la comédie. Je peux bien laisser entrevoir mes opinions, il s'agit de quelqu'un de relativement sûr.

Seulement à mon grand désarroi, il me dit qu'il ne l'a pas tué. Je l'aurais bien fait une avance pour le remercier de son acte si ça avait été le cas. De dépit, je suis sur le point de tendre la main vers l'arme à feu pour l'examiner avant de me raviser en entendant les propos de Mortimer. Quelque chose est suspect dans ses paroles.

-Que faisiez-vous au château hier soir ? Demande-je en fronçant les sourcils. Cela ne vous ressemble guère de venir à Whitehall, à moins que vous ayez une bonne raison !

De ce que je connaissais de Mortimer, il agissait toujours avec une raison à l'esprit. Qu'il soit à Whitehall et non au bordel est bizarre. Reste à savoir dans quel sens le bizarre est.

-N'ayez crainte. Parlez sans peur, je ne rapporterai pas notre conversation. Promis-je en espérant l'inciter à parler.

Je ne cache pas une moue lorsque je l'entends dire qu'il me cherchait. Il est vrai que je m'attendais à une autre réponse de sa part ! Il doit avoir un contrat juteux à me proposer pour venir me rejoindre en des lieux si peu sûr pour ce genre de transaction.

D'un côté, je reconnais être soulagée par le fait que Jack Mortimer ne trempe pas dans cette sombre affaire. Cela aurait fâcheux, si, une fois attrapé, on en vienne à remonter à moi pour cause d'un malentendu. De plus j'aimerais beaucoup garder ma tête sur mes épaules.

De l'autre côté, si le capitaine est innocent du crime, qui est le coupable ?

Si je me fis à son témoignage, ce serait une femme avec des cheveux bruns et de petite taille. Si son témoignage est correct, cela réduit la liste des suspects. Cependant, beaucoup de femmes à la Cour peuvent correspondre à cette description.

Toutefois, je remercie Jack Mortimer pour ce renseignement et l'invite à venir me voir dans ma résidence londonienne s'il veut parler affaire avec moi.

Sur ces mots, je délaisse le capitaine pour porter mon attention examiner l'arme à feu se trouvant non loin. Je préfère examiner tout ce qui se trouve ici avant d'aller dans un autre lieu. Il serait gênant de tout reprendre du début à cause d'un manque d'attention à cette pièce !

Silencieuse, j'écoute Jack continuait à dire qu'il rêve de voir cette jolie femme dans son lit. Cependant, mon esprit est à l'affut et commence à rayer quelques noms de la liste des coupables potentiels. Grâce aux différents éléments donnés par Jack, je parviens à garder uniquement trois personnes parmi la liste que Clarence m'a donné : Sybille Parker, Margaret Seymour et Katherine Lennox, bien que je tende à vouloir l'éliminer de la liste. Néanmoins, je préfère ne pas faire de conclusion hâtive.

Toutefois, il ne me semble pas hasardeux de dire que le crime n'a ni été fait avec cette arme à feu que j'ai examiné, ni se soit déroulé dans la salle du conseil.

Mes yeux scrutent à nouveau rapidement la salle du conseil. De toutes évidences, je ne trouverais rien de plus ici et je ne pense pas que Jack soit encore bavard. Aussi, cela ne sert à rien de m'attarder davantage.

Avec un sourire, je remercie Jack de son aide avant de lui conseiller de partir rapidement avant de se retrouver injustement en prison à cause de sa réputation. Une fois cela fait, je lisse ma robe où un pli s'était formé avant de me diriger vers les jardins en quête d'informations. Le choix de ce lieu pour la suite de l'investigation est fait un peu au hasard, je le reconnais, même s'il est vrai que l'information du pirate a tout de même aidé dans mon choix.

Sans grande surprise, à mon arrivée dans les jardins, je rencontre deux gardes royaux. Même si la politique de feu la Reine était hasardeuse, je reconnais que ses gardes n'ont pas fait d'histoire pour me dire ce qu'ils savaient. Le visage figé dans une politesse polie, mon esprit réfléchit rapidement en mettant bout à bout les diverses informations.

De toutes évidences, ce bougre de Mortimer ne m'a pas menti puisque les gardes, sans le savoir, confirme son témoignage. En observant rapidement les jardins, je me rends compte que ce n'est de toutes évidences pas ici qu'a eu lieu le meurtre. Il n'y a pas l'ombre d'une trace d'agression sur la Reine. Toutefois, il est intéressant de souligner que Margaret Seymour a peut-être vu le meurtrier, si tant est ce dernier ne l'a pas attaqué par derrière. Si je viens à la croiser, je lui poserai la question afin de corroborer mon hypothèse. Toutefois, je ne ferais pas de geste trop rapide. Si Sybille Parker est véritablement la coupable comme je le pense, vaut mieux ne pas éveiller ses soupçons !

Quant à l'arme... Je n'ai pour le moment peu d'idées. Peut-être un chandelier ? Il aurait pu ainsi servir à la fois pour assommer la petite fille et tuer la Reine...

Pour le lieu, je ne saurais véritablement que quand je m'y trouverais. Peut-être est-ce les écuries ? Cela ferait un bon alibi si, comme le dit Jack, la personne est une noble. Toutefois, je préfère diriger mes pas vers la chapelle. Après tout, la Reine était connue pour sa grande piété et aurait pu peut-être chercher protection auprès de Dieu.

Forte de cette idée, je salue d'un sourire les gardes pour leur aide avant de me diriger vers la chapelle...

Alors que j'arrive dans la chapelle, des cris, amplifiées par les échos de ce lieu de culte, me parviennent. Alertée par cela, je me précipite au devant, soulevant mes jupons pour me permettre de courir plus vite. Ce n'est guère convenable pour une comtesse mais pour l'heure, le plus important est d'éviter un autre assassinat. Mes mots peuvent paraître dur, mais je ne peux guère parler en d'autres termes au vu de la conversation que j'ai surprise.

Alors que je ralentis mon allure afin de paraître aussi digne que ce doit une lady pour me laisser le temps de reprendre mon aplomb, je déclare froidement lorsque je suis proche de ces dames :

-Oseriez-vous troublé le calme de ce lieu saint, telle de vulgaire païennes que vous n'êtes pas ?

Je prends soin de placer Margaret dans mon dos pour la protéger d'une éventuelle attaque. Je veux guère avoir à subir les foudres de sa mère pour n'avoir pas réussi à la défendre !

-Lady Parker... Pourquoi vous en prenez-vous à une enfant ? Le meurtre de feu la Reine ne vous a donc point suffi pour assouvir vos plus noirs secrets ? Siffle-je sur de moi.

En bonne comédienne, elle prend un air offusqué mais je ne lui laisse guère le temps de s'indigner que je continue avec audace :

-Oui, je vous accuse Lady Sybille Parker d'avoir tuer notre feu Reine Mary, dans les écuries royales avec l'aide d'un chandelier, ce même chandelier qui a servi à assommer Lady Margaret Seymour, témoin de votre sombre méfait !

Je retiens mon souffle avec appréhension. Même si je sais que j'ai raison, je ne peux m'empêcher d'angoisser à l'idée que je pourrais être responsable de la mise à mort d'une potentielle innocente. Je ne me fais guère d'illusion si la culpabilité de Lady Parker est prouvée : sa tête risque de ne guère rester longtemps sur ses épaules !