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Nous nous situons aux alentours de mai 1558.
Il fait de plus en plus chaud les gens prennent plaisir à sortir dans les jardins.

Si vous souhaitez jouer un étranger, privilégiez les Espagnols et les Ecossais.
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MessageSujet: This house no longer feels like home ♦ Elizabeth & Katherine.  This house no longer feels like home ♦ Elizabeth & Katherine. Icon_minitimeJeu 14 Mai - 9:33
En silence, je rangeais les livres dans la malle et la bouclais soigneusement. Un coup d'oeil autour de moi m'assura que tout était en ordre. Je ne faisais aucun cas des recommandations maternelles, incessantes depuis qu'elle avait rejoint les appartements que ma soeur et moi partagions, aux premières heures de la matinée. Je n'avais jamais été de celles qui se levaient tard, a fortiori lorsque je m'en allais de la capitale : mieux valait se lever tôt et profiter des couloirs déserts de Whitehall, partir de Londres avant que la cohue n'envahisse les rues. J'avais espéré aussi éviter ma mère, mais ç'avait été peine perdue. Aussi avais-je pris le parti de la laisser déverser son flot de paroles sans y prêter attention, préférant vaquer à mes occupations. Une petite malle pour ces ouvrages que je comptais offrir à ma cousine, une autre plus large pour les vêtements. Assez étrangement, je n'avais point eu de difficultés à convaincre Mary Ière de me laisser quitter Londres pour l'Oxfordshire et Woodstock Palace : sans doute était-elle assez occupée entre son époux, l'enfant à naître, les exactions contre les protestants. Mon coeur eut un raté. Parfois, il me semblait encore entendre les cris du pauvre homme brûlé en place publique devant mes yeux, quelques semaines plus tôt. J'avais tenu le choc mieux que je le pensais, en apparence du moins, mais cette mort s'ajoutait à toutes celles - trop nombreuses - qui troublaient mon sommeil. Et alors que ma mère me rappelait pour la énième fois que la manière exacte de s'adresser à ma cousine Elizabeth était par le titre de Lady et non celui de Princesse, une servante m'aida à passer mon manteau, et j'attrapais mes gants. Inutile de préciser que ma mère avait parlé dans le vide pendant ces vingt dernières minutes. "Bonne journée, Mère," furent les seuls mots qui franchirent mes lèvres avant de quitter la pièce sans me retourner.

Le jour s'éveillait lentement sur l'Angleterre. Evidemment, mon voyage et mon séjour à Woodstock ne se feraient pas sans l'escorte de plusieurs gardes mandés par la souveraine, au cas où Elizabeth et moi avions l'idée de comploter contre sa royale personne. C'est absurde, songeais-je, Woodstock doit être une des places fortes les mieux gardées du pays, depuis que ma cousine y séjourne. J'avais terriblement hâte de la revoir. Les livres de la malle n'avaient été que le meilleur prétexte pour lui rendre visite. Des théologiens très catholiques et forts appréciés de Mary Tudor, expliquant par tous les moyens possibles la suprématie de Rome, l'importance des sept sacrements, la transsubstantiation du Christ, et toutes ces superstitions si fortement décriées par mon père. Je n'avais pas lu une ligne de ces ouvrages - je peinais déjà à lire le Tristan et Iseult que j'aimais particulièrement - mais ma cadette l'avait fait pour moi, et les avaient jugés affreux. Mais la reine avait apprécié l'idée, et je ne doutais pas que ma cousine comprendrait le prétexte. Voilà plusieurs mois que je ne l'avais pas vue, depuis le mariage de Philippe et Mary, et sa présence me manquait. Pour moi, elle était devenue un modèle à suivre, elle était forte, indépendante, elle était ce que j'aspirais à être : une survivante. Je savais que certains, parmi les protestants les plus zélés, doutaient de ses convictions religieuses, et parfois préféraient m'imaginer, moi, sur le trône. Sottises. Je n'étais pas faite pour être reine. Je ne voulais pas le couronne, pas de gloire, je ne désirais que la paix et le bonheur.

Mais en ces temps troublés où l'Angleterre s'enfonçait dans les ténèbres du fanatisme catholique, je ne voyais qu'une seule souveraine digne de ce titre : Elizabeth.

Comme à mon habitude, j'attendis d'avoir passé les murs de la ville pour sortir de mon carrosse et monter à cheval : les gardes n'en furent guère surpris, l'essentiel d'entre eux m'avaient déjà accompagnée lors de ma dernière escapade hors de la capitale, lorsque je m'étais rendue à Penshurt Place en novembre. Plus Londres s'effaçait derrière moi et mieux je me sentais. Cette ville était synonyme de malheur. Quand donc pourrais-je enfin quitter définitivement ces lieux maudits ? Chaque sortie était une bénédiction, en dépit de la protection rapprochée imposée par la souveraine. Ou sont-ils plutôt là pour me surveiller ? Les deux, cela va sans dire. Mais je n'étais pas assez folle, ou assez téméraire, pour m'en plaindre. Jusqu'à présent, me faire discrète m'avait réussi. Je ne tenais pas à me mettre en porte-à-faux auprès de Mary Tudor, même si j’exécrais chacun de ses gestes. Et alors que je chevauchais vers l'Oxfordshire en silence, je songeais à l'apaisement que la campagne pouvait me procurer, loin de la foule et des puanteurs de la ville. Ici, l'air était sain et vivifiant, et en fermant les yeux, je me sentais presque libre, comme je l'avais été autrefois, chez mon père. Mais il me suffirait d'ouvrir les yeux pour que prenne fin le rêve. On ne revient jamais en arrière, même avec toute la bonne volonté du monde. Le trajet vers Woodstock fut plus long que celui vers Penshurt, mais je ne m'en plaignis point : chaque foulée m'éloignait de Londres et me rapprochait de ma cousine. J'espérais qu'elle se plaisait dans cette résidence, où l'on disait le confort quelque peu sommaire. Les gardes parlaient entre eux, je ne les écoutais que distraitement, toute à mon bonheur de regarder le vent danser entre les branches nues des arbres et les étendues blanchies par la neige. Sciemment, j'avais relégué le fantôme du condamné par le feu au tréfonds de mon esprit : l'heure n'était pas aux lamentations, pour une fois que j'étais loin des damnés murs de cette capitale-prison où l'on m'avait enfermée. Au reste, les morts hantaient assez mes nuits, ce n'était pas pour qu'ils hantent mes jours. Finalement, les tours de Woodstock Palace apparurent au loin.

Je talonnais mon cheval, qui partit au petit trot. Les longs mois passés sans chevaucher de distance plus vaste que celle séparant Whitehall de la Tour de Londres se faisaient sentir : mon dos était ankylosé, mes jambes douloureuses. Quelques années plus tôt, j'étais capable de chevaucher d'Ipswich à Bradgate Park et de faire le chemin inverse sur la journée, mais un an et demi passés à Londres avaient suffi pour annihiler l'essentiel de mon endurance. Je hais cette ville. Je hais cette vie. Mais pour quelques temps, tout ceci serait loin de moi. J'avais vu juste quand à Woodstock : à peine eus-je les portes dans mon champ de vision que je fus frappée par la ribambelle de gardes à l'entrée. Ceux qui m'accompagnaient étaient finalement bien inutiles. Je passais les grilles, descendis de cheval avec l'aide d'un garde et accomplis les présentations formelles avec mon plus beau sourire. Mes prunelles papillonnaient d'un point à l'autre des lieux, guettant la chevelure rousse de ma chère cousine.
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Elizabeth Tudor
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♕ Métier : Princesse d'Angleterre ♕ Age : 25 ans ♕ Religion : Celle que me dictera ma souveraine. ♕ L'avatar a été fait par : fassophy ♕ Mon nombre de messages est : 3524 ♕ Mon nombre de Livres Sterling : 11 ♕ Je suis arrivé(e) sur TGA le : 11/09/2012 ♕ Mon pseudo web est : Mari-Jane ♕ Mes autres visages : Antanasya Cavendish - Constance Bennet - Edward Seymour This house no longer feels like home ♦ Elizabeth & Katherine. Tumblr_oe67vtSxjf1tvdu5mo1_250

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MessageSujet: Re: This house no longer feels like home ♦ Elizabeth & Katherine.  This house no longer feels like home ♦ Elizabeth & Katherine. Icon_minitimeSam 23 Mai - 13:17

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Janvier 1555.
Palais de Woodstock.


En ce mois de janvier 1555, l’Oxforshire portait un doux manteau blanc, rendant l’atmosphère plus froide, plus glaciale, au sein même du palais de Woodstock. Tous les habitants aux alentours savaient qu’une princesse était gardée au château. Une princesse qu’on avait emprisonnée l’année passée, une princesse que l’on aimait regarder, quand elle passait à cheval. Une princesse qu’on aimait acclamer. Une femme que l’on voyait comme une martyre anglaise. La fille du terrible Henry VIII avait été décriée durant toute sa jeunesse, bâtarde, elle avait gagné le rang de princesse grâce à son paternel et depuis, même si on la regardait avec défiance on ne pouvait pas nier que le peuple l’aimait. Les pauvres gens aimaient les tristes histoires et Elizabeth en était l’une des héroïnes. Quand ils la voyaient, ils étaient beaucoup à murmurer la fin tragique de sa mère, dont elle portait les yeux. On parlait aussi du caractère violent du père, dont elle possédait les mêmes cheveux roux. Pour tous ceux qui avaient déjà vu un portrait d’Henry VIII dans sa prime jeunesse, il était indéniable, sa fille Elizabeth n’était pas la bâtarde que tout le monde disait être. L’histoire aurait pu s’en tenir là, la princesse aurait pu vivre tranquillement dans son palais d’Hatfield, qu’on disait, qu’elle aimait tant, mais la trahison et le complot a fini par la rattraper. La cour parlait, la cour l’accusait, Elizabeth était la coupable. Le peuple l’acclamait, le peuple pleurait sa princesse qu’on allait condamner à mort. Emprisonnée à la Tour, on craignait qu’elle subisse le même châtiment que sa mère, mais la clémence de la reine avait parlé. Elizabeth était libre et enfermée dans sa tour dorée en Oxfordshire.

En cette journée, Elizabeth était en train de préparer, avec l’une de ses dames de compagnie, la chambre de sa cousine Katherine, qui allait passer quelques jours en sa compagnie. La jeune fille faisait le voyage depuis Londres et le palais de Whitehall, en hiver, la traversée aura sûrement été pénible et la princesse tenait à ce qu’une belle chambre accueille la jeune Katherine. Si Elizabeth a eu un passé tragique, la jolie blonde qu’était Katherine n’était pas en reste, en l’espace d’un an, elle avait vu son père, sa sœur et son beau-frère emprisonné. Son paternel avait quitté la Tour, pour mieux y rentrer, à la suite de la révolte Wyatt. Puis en quelques jours elle avait perdu trois membres de sa famille, froidement exécutés, à la Tour de Londres. Même si elle n’avait jamais été réellement proche de ses cousines Grey, Elizabeth les considérait comme des membres de sa famille et à ses yeux, trop de sang Tudor avait coulé. Jane Grey avait peut-être usurpé le trône, mais deux mains l’y ont poussé, celles de John Dudley Sr et de son propre père. Elle n’était qu’une jeune fille innocente, poussée sur le jeu des trônes et elle avait tout perdu. Elizabeth avait beaucoup prié pour cette cousine, qui avait maintenant rejoint les cieux, mais elle ne pouvait rien faire pour les deux autres sœurs Grey. Frances Brandon avait eu l’idée, à la grande honte de tous, de se remarier avec un homme, un mois à peine, après la mort de son mari. Elizabeth n’aimait pas cette cousine, contrairement à son père, elle était la froideur incarnée, elle n’avait aucun instinct maternel pour ses filles, qu’elle n’avait eu de cesse de maltraiter, même à la cour. Même si Mary Grey était restée à Whitehall, la jolie rousse était enjouée de savoir que pour quelques temps, elle allait pouvoir soustraire Katherine, à sa terrible mère.
Le feu avait été allumé, de nouveaux draps avaient été dressés et toute la poussière avait été retirée de la chambre. Une douce chaleur y régnait et Elizabeth avait ajouté sa petite touche personnelle, en disposant sur une petite table, un tout nouveau livre de contes, qu’elle avait adoré lire ces derniers jours. Katherine serait sûrement heureuse de pouvoir se distraire avec un tel ouvrage. Les journées pouvaient parfois être très longues à Woodstock et par moment, Elizabeth n’était pas toujours disponibles pour ses hôtes, puisqu’elle recevait des conseillers de la reine. La jeune femme qui dirigeait cette maisonnée avec beaucoup d’application s’occupait ainsi à ses tâches, puis à son éducation. Depuis un moment, elle s’exerçait à la langue espagnole, pour pouvoir converser avec son beau-frère et elle avait même eu le loisir d’envoyer une lettre en espagnol, aux souverains, pour les féliciter du bonheur qui les attendait.

« Princesse Elizabeth, l’équipage de lady Katherine Grey vient d’être vu à proximité du château. » Alice, la fidèle servante de la princesse venait d’entrer pour lui indiquer que la jeune cousine d’Elizabeth était présente. Les deux jeunes femmes quittèrent la chambre, qui était fin prête pour sa future occupante et la princesse demanda à ce qu’on lui apporte une cape bien chaude et une coiffe. Elle tenait à accueillir elle-même sa cousine.
Vêtue de ses blanches fourrures, Elizabeth alla jusqu’au perron du château de Woodstock et attendit en compagnie de ses deux dames de compagnie. Le cheval de lady Katherine et son attelage venait de franchir les grilles et la rousse put apercevoir que sa cousine était elle-même sur un cheval. Descendue de son cheval, Katherine termina le chemin jusqu’aux portes du palais, à pied. L’allée avait été dénneigé par les jardiniers, pour faciliter l’accès au château, par les nombreuses personnes qui y venaient.

« Lady Katherine, c’est un plaisir de vous accueillir à Woodstock. » Elle descendit les dernières marches qui la séparer de sa cousine et lui prit son bras, comme une sœur l’aurait fait. « Alice veillez à ce qu’on installe les affaires de ma cousine dans sa chambre. » Elle donna ses ordres, pour qu’on s’occupe des chevaux, puis elle entra, à l’intérieur en compagnie de sa cousine. « J’espère que vous avez fait bon voyage, malgré ce froid ? » Demanda Elizabeth alors qu’on leurs retirait leurs fourrures. « Venez, allons-nous réchauffer. » Elle conduisit Katherine à l’étage, jusqu’à un chaleureux petit salon où une servante disposée des petits gâteaux et du vin chaud. « J’ai l’impression que nous ne nous sommes pas vues depuis des années, vous avez beaucoup changés et grandies aussi. » Elle souriait chaleureusement et indiqua à sa cousine de s’installer à ses côtés, dans un grand fauteuil aux couleurs des Tudor.


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MessageSujet: Re: This house no longer feels like home ♦ Elizabeth & Katherine.  This house no longer feels like home ♦ Elizabeth & Katherine. Icon_minitimeSam 13 Juin - 21:14
Lorsqu'un éclair de bronze apparut dans mon champ de vision, je ne pus retenir un sourire à la fois heureux et soulagé. Heureux, car la vue de cette cousine que j'avais hélas si peu connue dans mon enfance me réjouissait toujours, soulagée car au premier coup d'oeil, elle semblait aller bien. J'ignorais ce à quoi je m'attendais au juste, mais sachant qu'Elizabeth était prisonnière d'une demeure qui n'était pas la sienne, j'aurais pu retrouver une jeune femme amaigrie, le teint plus pâle, le regard plein de tourments. Peut-être était-ce ainsi que Mary Tudor espérait retrouver sa cadette : faible, fatiguée, exsangue. Sauf que ma cousine n'était pas de cette trempe-là, non, et bien au contraire. La jeune femme qui vint m'accueillir était en pleine forme, souriante et visiblement joyeuse, avec des yeux brillants et un teint de pêche. Ma joie à la revoir ne fit que redoubler, et lorsqu'elle déclara que m'accueillir était un plaisir, je sentis mon coeur battre un tantinet plus fort."Merci à vous," dis-je sans me départir de mon grand sourire sincère, "d'avoir accepté de me recevoir. Vous revoir est un immense plaisir, ma chère cousine !" Et ce même entourées de gardes qui seraient, à n'en pas douter, plus prompts à nous dénoncer qu'à nous sauver la mise. Alors qu'Elizabeth me prenait le bras et me guidais vers l'intérieur de sa demeure, j'adressais un sourire à la dénommée Alice, probablement une de ses dames de compagnie, et suivais ma cousine en retenant à grand peine l'envie de sautiller joyeusement comme une enfant un matin de Noël.

"- J’espère que vous avez fait bon voyage, malgré ce froid ?
- Excellent, je vous remercie. L'air est tellement plus pur lorsque Londres s'éloigne que j'en ai oublié les températures."
Quoique, jetant un rapide coup d'oeil à mes mains, rougies au niveau des phalanges malgré les gants, j'eus un haussement d'épaules : "enfin, presque. Je crois qu'un peu de chaleur ne me fera aucun mal."

Et à nouveau, j’emboîtais le pas de ma cousine jusqu'à un ravissant petit salon à l'étage où divers gâteaux et boissons chaudes nous attendaient. Ma petite chevauchée depuis Londres se faisait terriblement sentir : la douleur, ténue mais bien présente, partait du bas de mon dos pour gagner mes cuisses, mes genoux et mes mollets. Même mes omoplates me faisaient souffrir. A croire que Londres avait sapé toute ma vitalité, toute mon énergie. J'ignorais si nous pourrions nous promener à cheval, Elizabeth et moi : le froid était dense et coupant, et nous étions toutes les deux des prisonnières sans en porter véritablement le nom ; quoique j'aurais préféré rester sous bonne garde à Woodstock avec elle qu'entre les murs de Whitehall. Les couloirs bondés, la ville insalubre et dangereuse, la continuelle présence de ma mère, tout ceci me donnait parfois des colères, souvent l'envie de m'asseoir et pleurer. Heureusement, j'y avais Mary. Et ici, Elizabeth. Mais elle, qui avait-elle pour l'aider et la soutenir ? Je songeais aux dames de compagnie dont j'avais aperçu quelques visages à l'entrée : une parmi elle était-elle ici de son plein gré, par amitié pour la princesse, ou avaient-elles toutes été mandées par Mary Tudor ?
Je pris place aux côtés de ma cousine dans un confortable fauteuil aux couleurs des Tudor, la plus grande famille d'Angleterre à l'heure où nous étions, la famille royale. Elizabeth en portait le nom, j'en faisais partie aussi par ma mère, nièce du redoutable Henry VIII. Tudor, Grey, peu de choses nous différenciaient au fond, sinon ces quelques lettres. Les fantômes de nos ancêtres hantaient encore les sphères du pouvoir et nous devions être dignes de leurs actes de grandeur en corrigeant dans la droiture leurs faiblesses : une leçon dans laquelle mon père m'avait bercée toute ma vie. Nous avions nos malheurs, aussi, non des moindres : je doutais qu'une honorable famille de bourgeois puisse se targuer d'avoir vu autant de morts qu'Elizabeth, ou moi depuis un an. Et pourtant nous portions nos noms comme des flambeaux, comme si le simple fait de les mentionner nous protégerait de tout mal... Parfois, je soupçonnais le contraire, en réalité. Mais ces noms pouvaient être maudits, ce sang pouvait sceller à jamais notre destin, j'en étais fière. Parce-qu'il ne pouvait pas en être autrement : résumer les familles royales aux mots de complots, meurtres, trahisons était réducteur, et même complètement stupide. Certes, peu de grands en ce monde n'avaient pas de sang sur les mains. Mais bon nombre d'entre eux étaient soit des grands hommes, soi des femmes d'honneur. Ne pouvant évidemment pas figurer dans la première catégorie, j'employais tous mes efforts à intégrer la seconde, où ma cousine officiait déjà à mes yeux.

Je me sentis légèrement rougir à sa remarque. Depuis que j'avais passé les frontières de l'Oxfordshire quelques heures plus tôt, mon sourire n'avait fait que s'élargir, et en cet instant, il semblait presque cousu à mes lèvres : "trop longtemps à mon goût !" Fis-je. "La dernière fois, je crois que c'était le jour du mariage de la reine. A moins que vous ne soyez revenue à Londres entre temps ?" Si tel était le cas, je n'avais point eu le plaisir de l'y voir. Mary Tudor cherchait-elle à ce que sa soeur, ou moi, fréquentions le moins de monde possible ? C'était là une option fort envisageable. "Vous n'avez pas beaucoup changé," répondis-je sans cesser de sourire - le pourrais-je un jour ? - "quoique vous êtes encore plus belle que la dernière fois. C'est réjouissant." Sans doute était-ce terriblement puéril de ma part, mais voir ma chère cousine embellir à chacune de nos nouvelles rencontres alors que sa soeur me faisait de plus en plus penser à une chouette hargneuse me plaisait énormément. "Vous plaisez-vous en Oxfordshire ? J'espère qu'on vous laisse sortir vous promener en campagne, de temps en temps," demandais-je en songeant à la ribambelle de soldats qui gardaient les lieux nuit et jour. Même si rien ne me semblait pire qu'être enfermée à Londres, devoir passer ses journées entre les murs froids d'un château isolé, aussi confortable soit-il, devait être terriblement ennuyeux. Quoique, Elizabeth était bien meilleure lectrice que je l'étais. Une pensée en menant une autre, l'image de la malle contenant les ouvrages destinés à la princesse me revint en mémoire. "J'ai vos livres !" M'exclamais-je soudain. "Ils ont été approuvés par la reine en personne, et je crois qu'ils sont intéressants." Je sentis mes joues virer au cramoisi. Intéressants, des livres de théologie catholique ? Je n'en avais pas lu une ligne, et la grimace dégoûtée de ma cadette avait suffi à m'en dissuader. J'ignorais si Elizabeth approuverait ou non leur contenu, mais au moins pour la forme, elle les accepterait. Sentant qu'il me faudrait peut-être expliquer ce rougissement, j'énonçais : "je vous avoue que je ne les ai pas lus, mais ma soeur m'a résumé quelques passages... Au moins, si on ne vous autorise pas à sortir, on ne vous empêchera pas de lire !"
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Elizabeth Tudor
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MessageSujet: Re: This house no longer feels like home ♦ Elizabeth & Katherine.  This house no longer feels like home ♦ Elizabeth & Katherine. Icon_minitimeDim 21 Juin - 15:20

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Janvier 1555.
Palais de Woodstock.


Elizabeth Tudor aurait pu jalouser ses cousines Grey. Jane, Katherine et Mary, les filles de Frances Brandon et de Henry Grey, les petites filles de Mary d’Angleterre et les arrières petites filles d’Henri VII Tudor et de son épouse Elizabeth d’York, avaient toujours eu tous ce qu’elles voulaient. Il était de notoriété publique, que les filles Grey avaient toujours été mieux traitées que les princesses Tudor, du temps où leur père les avait déclaré bâtarde. Mieux traitées, par le passé, victime aujourd’hui. Les filles Grey avaient déjà tant souffert, d’abord de la perte de leur sœur ainée et ensuite de leur père. Les jeunes filles étaient toutes les deux considérées comme des parias, des menaces qui pouvaient à tout moment récupérer le trône, mais n’importe qui, qui les connaissait, pouvait voir dans leurs yeux, qu’elle n’avait nullement envie de cette couronne empoisonnée. Pour Edward, cela avait été son fardeau et il en était mort. Une fois son décès, comme le stipulé le testament d’Henry le Huitième, Mary devait porter cette lourde couronne. Elle parvenait à supporter ce fardeau, mais aux yeux d’Elizabeth, même si c’était un crime de lèse-majesté de le penser, Mary n’était pas faite pour gouverner un royaume. Elle se laissait trop aller à ses passions, alors qu’une reine, qui en plus porte le poids de son sexe, doit rester discrète et forte face à toutes les épreuves. Elizabeth ne savait pas ce que le destin lui réservait, elle ne savait pas si un jour elle serait reine, après tout, elle avait fort peu de chance de l’être, puisque sa sœur attendait le prochain héritier de la couronne. D’un côté, elle se sentait soulagée par cette prochaine naissance, puisqu’elle savait qu’un jour elle parviendrait à se libérer de ses chaines et à vivre libre. De l’autre, son cœur ne cessait de lui dire que la couronne était pour elle, qu’elle la méritait plus que tout au monde, qu’elle était prête pour la porter, mais la méritait-elle vraiment ?
Tout à ses pensées, Elizabeth Tudor accueillit sa jeune cousine Katherine Grey, dans sa demeure. Le voyage fut long pour la jeune fille et la rousse avait tout fait pour que le séjour de l’héritière Grey, se déroule le mieux possible.
« Le plaisir est partagé chère cousine. J’espère que vous m’apportez de bonnes nouvelles de la cour. D’habitude les conseillers de la reine n’évoquent avec moi que les nouveaux décrets, mis en place. Ils n’ont pas encore compris que quelques nouvelles, plus légères me feraient tout autant plaisir. » Souriait la jeune femme tout en invitant Katherine à entrer et à venir se réchauffer au cœur même du palais de Woodstock.
Bien que le train de vie de la princesse Elizabeth ne soit pas aussi royal qu’à la cour, elle menait une vie confortable, dans un château qui l’était tout autant. La rousse regrettait seulement une chose, que les portes ne soient pas assez ouvertes, pour lui offrir plus de moments de liberté.
« Même si l’air est plus respirable, le froid de nos campagnes peut être redoutable, je n’aimerai pas être la cause d’une maladie. » Disait la jeune femme, tout en demandant à un serviteur de rajouter des buches dans la cheminée. L’atmosphère dans le salon était déjà douce, avec ses nombreux meubles, ses tentures et ses murs recouverts de bois. On ne pouvait pas être mieux, même si certains jours, le château manquait de chaleur humaine. Au moins, la présence de Katherine Grey allait remédier à cela durant les prochains jours.

Tout en laissant à sa cousine le temps de s’installer et de se restaurer, Elizabeth prit la peine de la détailler. La jeune Katherine Grey avait beaucoup changé, depuis son dernier séjour à la cour. Elle avait grandi, elle commençait aussi à perdre son visage de jeune fille, pour devenir une vraie femme. Par chance, Katherine n’avait rien pris de sa mère, elle était douce alors que Frances Brandon était aussi froide que la glace. Elle avait des traits fins, alors que ceux de sa mère était durs. Katherine était une magnifique jeune fille et plus tard, une fois que les scandales familiaux seraient passés, elle aurait sûrement de nombreux prétendants.
« Oui, je ne suis pas revenue à Londres depuis août dernier et je ne sais pas quand la reine me rappellera à elle. Peut-être reviendrais-je au moment des couches de sa majesté. » Disait la jeune femme pensive.
Elle était presque certaine que la reine la rappellerait pour qu’Elizabeth la félicite de la naissance de son héritier, si aucun malheur n’arrive jusqu’à ce moment.
« Oui je ne change guère, on me dit plus soucieuse, plus sérieuse, mais jamais plus belle, je vous remercie pour ce compliment Katherine, même si celui-ci ne s’applique qu’à vous. » Renchérit la princesse. « Avez-vous de nouveaux prétendants ? » Demanda la jeune femme curieuse de savoir, si la reine permettait à d’autres hommes de pouvoir courtiser Katherine Grey.

« Je ne vais pas vous mentir Katherine, je sors peu de ce château, dont je connais aujourd’hui les moindre recoins. D’ailleurs, je ne sors jamais seule, j’ai toujours une dame à mes côtés, ou un garde. Je pense, qu’ils imaginent que je vais fomenter un complot de là où je me trouve. C’est tellement ridicule. » Expliqua Elizabeth, tout en voulant rester la plus honnête possible. Après tout, pourquoi comploterait-elle contre sa sœur ? Elle ne l’avait jamais fait, elle ne se mettrait certainement pas à le faire aujourd’hui, surtout que même en ne faisant rien, elle risquait sa vie, chaque jour.
Elizabeth fut heureuse d’apprendre que Katherine avait ramené ses précieux ouvrages. Même s’ils n’étaient pas ses favoris, elle avait au moins la chance de pouvoir lire et ainsi se distraire. Dernièrement, elle tâchait de renforcer ses acquis en langues étrangères, surtout en Espagnol, ce qui avait tendance à plaire aux souverains.
« Je vous remercie Katherine. Cependant, je crains qu’ils ne soient guère intéressants, mais ils sauront me distraire. Au moins, cette prison me permet de me distraire et aussi d’améliorer mon français et mon espagnol. » Riait la jeune femme tout en insistant sur ce dernier mot. « Et vous Katherine, avez-vous fait quelques progrès ? » Demanda Elizabeth qui connaissait bien les difficultés de sa cousine à propos de la lecture.


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MessageSujet: Re: This house no longer feels like home ♦ Elizabeth & Katherine.  This house no longer feels like home ♦ Elizabeth & Katherine. Icon_minitimeDim 16 Aoû - 19:40
Les malheurs qui s'étaient abattus sur ma famille semblaient avoir démarré à mes yeux dès l'instant où j'avais franchi les portes de Whitehall Palace en tant que pupille de la Reine Mary. Depuis juillet 1553, j'avais l'effoyable impression que nous - ma soeur Mary et moi-même - voguions de Charybde en Scylla. Les noms des morts se succédaient, et le nôtre n'était jamais très loin : John Dudley, le beau-père de Jane, l'allié de mon père. Thomas Wyatt le Jeune, qui avait mené une rebellion en notre nom pour bouter Mary Ière hors du trône. Mon père, ma soeur, mon beau-frère. John Dudley fils. Et d'autres malheurs, au milieu, qui ne faisaient que rajouter à mon désespoir : le mariage de ma mère, dix jours après l'exécution de mon père. La naissance, puis la mort, de la petite Elizabeth Stokes, que je peinais encore à considérer comme ma demi-soeur. La Cour de Londres devenait pour moi la représentation terrestre de ce à quoi ressemblait l'Enfer. Plût à Dieu que cet Enfer-ci soit le dernier que j'aie à traverser, et qu'à ma mort je rejoindre immédiatement Jane au Paradis ! Vivre à Londres m'avait cependant permis de faire de belles rencontres : l'écossaise Agnès Livingstone, Rosemary Blackwood, et surtout ma cousine Elizabeth. Ma mère, le seul enfant survivant de Charles Brandon duc de Suffolk et de sa première épouse, la princesse Mary d'Angleterre, avait toujours tenu en grand mépris la seconde fille de son royal oncle. Elle avait été élevée avec l'actuelle souveraine et n'avait jamais supporté que celle-ci soit déclarée bâtarde à la naissance de la fille d'Anne Boleyn. Des années et des années durant, je l'avais entendue accuser la seconde épouse d'Henry VIII de tous les maux, incluant leur fille dans son équation pleine de colère et de ressentiment, tirant un plaisir malsain en sachant que nous, ses trois filles, connaissions un train de vie meilleur que celui de la malheureuse princesse. Mais désormais, ma mère pouvait dire ce qu'elle voulait, je ne lui prêtais pas une demi-minute d'attention, et peu m'importaient les soi-disant crimes d'Anne Boleyn. De mes deux cousines Tudor, Elizabeth était la seule à m'avoir témoigné à la fois gentillesse et respect, et cela, je ne pourrais jamais l'oublier. Séjourner à Woodstock était pour moi synonyme de deux plaisirs trop peu connus depuis plusieurs mois : revoir ma cousine préférée et m'éloigner de cette Cour où je n'avais jamais eu ma place.

"Ce doit être en effet bien ennuyeux," souris-je en apprenant que les seules nouvelles que la presque prisonnière de l'Oxfordshire recevait de Londres ne concernaient que les arrangements et procédures juridiques adoptées par la reine. "Soit ! Je ferais de mon mieux pour me souvenir de tous les ragots de Cour, je ne puis juger de la véracité de la moitié d'entre eux, mais ils seront toujours plus distrayants. Du moins, je l'espère !"
Une nouvelle preuve qu'en dépit des volontés de certains farfelus, je ne pourrais jamais porter la couronne. La simple idée de donner des ordres et de prendre des décisions me donnait des palpitations, la seule indépendance que je me permettais était de choisir mes robes le matin, alors m'imaginer à la tête d'un royaume était de nature à me donner des cauchemars la nuit, et autant de sueurs froides le jour ! L'Angleterre méritait infiniment mieux que de m'avoir à sa tête, c'était certain ! "Il est vrai que le froid se fait moins ressentir à Londres, mais dans certaines rues la puanteur est telle qu'elle doit causer au moins autant de maladies que les températures de la campagne." Cependant, je ne pus que lancer un regard appréciateur aux bûches rajoutées dans la cheminée. Il était vrai que l'air de l'extérieur était glacial, et je soupçonnais les hivers de l'Oxfordshire d'être plus rudes que ceux que j'avais connus dans le Suffolk, qui pouvaient pourtant s'avérer difficiles selon les années. Woodstock Palace était certes devenu une forteresse impénétrable à beaucoup de visiteurs, c'était aussi un bon rempart contre le froid : me revenaient en mémoire certains recoins de Whitehall ouverts aux quatre vents, alors qu'ici, se plaindre des températures me semblait complètement déplacé. A moins que ce soit ma haine de Londres et du palais de la reine qui gâte complètement mes impressions ? Une chose était certaine, je me sentais nettement mieux entre les quatre murs de Woodstock et en compagnie d'Elizabeth qu'à Whitehall sous le regard de la reine et - pire que tout - ma mère. N'y aurait-il eu ma soeur Mary, j'aurais volontiers demandé à la souveraine de me laisser séjourner ici... Mais jamais elle n'aurait pris le risque d'accepter. Ce qui, par conséquent, rendait ce genre d'idées de ma part complètement inutiles.

Mon sourire se fit plus pincé lorsque Elizabeth, pensivement, parla d'un retour à Londres lors des couches de la reine. Ce n'était pas le retour en soi qui me posait problème - au contraire, je me réjouissais d'un potentiel retour de ma cousine - mais bien la raison de ce retour. L'Angleterre ne maritait pas une souveraine aussi pitoyable que je le serais sûrement, mais elle méritait assurément mieux qu'un Habsbourg, un espagnol, à sa tête. Mais ma bonne humeur revint vite : j'étais trop loin de Londres et de la source de mes problèmes, incarnés en la royale personne de Mary Tudor, pour m'appessantir sur mes malheurs. Au reste, je doutais qu'Elizabeth ait besoin d'une invitée désespérée et de mauvaise compagnie. Ce fut donc un air de joie sincère qui se peignit par lui-même sur mon visage : "la reine invitera sans doute tous les grands du royaume à son chevet pour une telle occasion. Je serais ravie de vous revoir !" Sans doute, en tant que dame de compagnie et pupille, aurais-je à l'assister comme j'avais assité ma mère lorsque la petite Elizabeth était née. A moins que la reine redoute que j'assassine son précieux bébé à peine aurait-il mis le nez dehors ? Cette idée était des plus absurdes. Abominable et irréaliste. Mais Dieu savait où pouvait nous mener la paranoïa de Mary Tudor. La remarque d'Elizabeth quant à ma joliesse - sans doute bien réelle, ma mère avare de compliments m'avait souvent qualifiée de jolie - et sa question me firent rosir les joues involontairement, je n'avais jamais su réagir aux compliments. Quant aux prétendants, c'était là un sujet qui faisait rosir l'essentiel des jeunes filles de quatorze ans, et je ne faisais pas exception : "parler de prétendants serait suranné, je le crains," souris-je, "mais pour tout vous dire, Sa Majesté m'a récemment encouragée à rencontré un Lord du nord de l'Angleterre, Lord Percy. J'ignore toutefois si elle souhaite que cela porte à conséquence, quant aux souhaits de Lord Thomas sur cette affaire, ils me sont inconnus. Le connaissez-vous ?" Je m'étais efforcée de garder un ton léger, ce qui n'avais pas été bien difficile étant donné que je me sentais particulièrement à l'aise et en heureuse compagnie. Néanmoins, la crainte que m'inspirait ledit Lord me donnait des tremblements que je contenais à grand-peine, et j'avais terriblement envie de connaître l'opinion d'Elizabeth à ce sujet. "Et si je puis me permettre, ma cousine, la reine a-t-elle des projets vous concernant ? Aucun bruit de cette sorte ne m'est parvenu, et si je puis me permettre, je me réjouis que l'alliance avec le prince de Suède ait pris fin. Je crois que j'aurais été malade de chagrin de vous voir partir si loin !" Au reste, la reine devait être à la fois très occupée par son propre mariage, sa grossesse, ainsi que par la crainte de voir Elizabeth gagner en puissance par une union prestigieuse pour songer à la marier. Ce qui, je devais l'avouer, ne me peinait que peu : sans doute était-ce égoïste de ma part, mais ma cousine avait pris une grande importance à mes yeux depuis le funeste été 1553, et je redoutais de la voir partir au loin.

Les paroles d'Elizabeth concernant sa situation de prisonnière à Woodstock confirmait mes doutes sérieux quant aux soupçons déraisonnés que la reine fomentait au sujet de sa cadette et sur la paranoïa dont elle pouvait faire preuve : "je vous l'accorde, c'est complètement fou. En arrivant, j'ai été frappée par le nombre de gardes, je crois qu'il y en a à peine moins qu'à Whitehall." A ceci près, songeais-je, que les gardes de Whitehall protégeaient la reine, et que ceux de Woodstock surveillaient Elizabeth. "Comploter est bien la dernière chose que vous pouvez faire ici," dis-je en parcourant la pièce du regard. "Avec tout le respect que j'ai pour les conseillers de la reine" - Elizabeth comprendrait sans doute que mes paroles visaient bien la souveraine, mais nul n'en aurait de preuve, et certainement pas celles et ceux qui nous entouraient ou écoutaient aux portes - "je les trouve fort malaisés, voire ridicules, de vous traiter de la sorte." Mais c'était là le lot de tous ceux qui, volontairement ou non, pouvaient remettre en cause le pouvoir de Mary Tudor en des temps si troublés. C'était mon cas, celui de ma soeur, celui de ma cousine, celui de presque tous les protestants du pays, sauf ceux qui avaient réagi suffisamment tôt pour retourner leur veste, ou qui jouissaient d'un certain prestige auprès du roi consort.
"Eh bien," fis-je avec un petit rire avant de baisser un peu la voix, "la grimace de Mary a été assez équivoque pour m'éclairer quant à l'intérêt réel de ces ouvrages, mais au moins parviendrez-vous peut-être à vaincre l'ennui ? Je vous le souhaite, en tout cas, rester enfermer dans un château, aussi grand soit-il, doit être pesant au bout d'un moment." Moi qui n'avait jamais été très portée sur la lecture, par la force des choses et les avanies de la nature, voyait difficilement ce que l'on pouvait faire, enfermé pendant de longues semaines à l'intérieur, sans côtoyer l'extérieur autrement que dans un pré-carré donné, et en compagnie hélas pas toujours agréable. "Hélas," soupirais-je en répondant à ma cousine, "pas autant que je l'eusse souhaité ! Le français n'est pas vraiment un problème pour moi, heureusement, car s'il n'existait que l'espagnol comme langue étrangère, je serais fort mal en point ! Quelle pénitence : je n'arrive pas à retenir trois mots sur une liste de quatre, c'est déplorable. Mais vous, ma cousine, avez, je crois, des facilités pour ces disciplines, progressez-vous en espagnol ? J'ai rarement vu la Cour aussi portée sur les langues méridionales" - remarque fort peu représentative, puisque je ne fréquentais la Cour que depuis un an et demi - "et quiconque cause un minimum avec notre roi consort dans sa langue maternelle gagne aussitôt des points. Autant vous dire que je ne suis pas prête de gagner l'estime de quiconque !" Achevais-je en riant. Mieux valait en rire, après tout, autrement je passerais ma vie à pleurer sur ce qui semblait déterminé à rester hors de ma portée : les lettres, les langues, les humanités d'une manière générale. Quel désespoir d'entendre tant de personnes bien aimées - Elizabeth bien sûr, mais aussi Lady Sidney, Lady Radclyffe, ou encore ma soeur Mary et, autrefois, mon aînée Jane - vanter les mérites de disciplines qui se refusaient à moi !
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