Sujet: Piège au clair de lune ♠ Philppa & Sybille Sam 30 Mai - 14:26
Piège au clair de lune
- La réunion aura lieu au cimetière, dans un des caveaux de l'allée centrale surmonté d'une statue de l'archange Gabriel. - Très bien, à quelle heure exactement ? - Pendant les complies, les catholiques seront occupés et ne devraient pas penser à nous. Pourriez-vous prévenir certains de nos frères et sœurs ? - Oui bien sûr. Qui dois je mettre au courant ? - Philippa Tewkesbury ainsi que ...
Sybille n'écouta que d'une seule oreille les autres noms que lui donnait le messager et s'attarda sur le premier cité. Ses sourcils froncés, sa bouche pincée ne laissèrent alors aucun doute possible sur l'effort que lui coûterait cette mission. La jeune Parker comptait beaucoup d'ennemis, mais aucun d'entre eux ne pouvait être plus venimeux que la famille de cette lady. On peut lutter contre une animosité récente, en revanche une haine ancestrale se trouve bien plus délicate et difficile à apaiser.
Celle qui opposait les deux grandes lignées des Parker et des Tewkesbury remontait à l'avènement des Tudor, les descendants de Richard III ne pouvaient tolérer de croiser des parents de Margaret Beaufort, un sentiment d'ailleurs réciproque. Depuis trois générations les coups bas ne cessaient de pleuvoir de toute part. Le dernier en date avait opposé le père de Philippa et celui de Sybille. Un duel pour le moins sanglant en avait découlé au cours duquel les deux hommes furent sévèrement touchés. Quelques temps plus tard, l'on avait appris le décès de lord Tewkesbury d'une mauvaise fièvre très certainement causée par sa blessure. C'est alors que Sybille décida de mettre un terme à ce cercle vicieux et rendit visite à la fille de l'ennemi. Il leur fallait la paix ou du moins un semblant de paix qu'importait si elles aussi ne s'aimaient pas. Philippa abonda dans ce sens et depuis un silence plat plutôt que des insultes régnait sur leurs deux maisons. Quelle belle victoire !
A vrai dire, la jeune Parker se serait pleinement satisfaite de cet état de fait, pourquoi avait-il fallu que cette … fille rejoigne la cause protestante ? Sans doute était-ce pour vivre un peu d'adrénaline, pour sentir elle-même dans ses entrailles ce que son grand père avait eu dans les siennes ! N'avait-elle pas été la petite fille toujours soumise, telle une brebis suivant son troupeau en toute circonstances ? Quelle différence avec elle qui s'était très vite affranchie de l'autorité parentale ! Excédée par cette seule pensée de gamine capricieuse, Sybille en roula des yeux. Par conséquent, une question légitime se posait, pouvait-on véritablement faire confiance à ce genre d'individus ? Elle n'ignorait pas que Philippa se trouvait dans l'entourage de la duchesse de Devonshire, Antanasya avait un très bon discernement mais peut-être que la jeune fille avec son visage d'ange était parvenue à la duper ? Et si, ses intentions étaient pires ? Et si pour se venger d'elle et de sa famille, Philippa était capable de livrer des protestants ? En cette période de terreur où les persécutions s'enchaînaient, on ne pouvait prendre un tel risque !
Toute la journée tout en frappant aux portes des fidèles protestants qu'elle devait mettre au courant, la belle retourna le problème dans tous les sens. Que faire ? Le plus judicieux était sans doute de mettre à l'épreuve la loyauté de Philippa. C'est pourquoi, quand elle se présenta à sa demeure londonienne, Sybille lui transmit un mauvais message.
- Bonjour, à la cabane de la clairière des bois pendant les vêpres. Soyez à l'heure, lui avait-elle appris d'un ton sec avant de s'en repartir aussitôt.
En somme, la jeune baronne lui donnait rendez-vous trois heures avant le véritable rendez-vous et à autre endroit. Un bon stratagème en soi puisqu'il serait entre dix sept heures et dix neuf heures, or il ferait déjà nuit en cette saison. De quoi, si Philippa était réellement une traîtresse envisager un guet apens et de l'organiser même avec des espions de la reine. Elle avait tout la journée pour ça, puisque nous étions encore au petit matin.
C'est donc fébrile que les heures de la journée s'écoulèrent pour Sybille avec la lenteur de siècles. Lorsque le soleil vers les quatre heures de l'après midi commença à décliner, la jeune femme se rendit à cheval dans la forêt. Il fallait qu'elle soit présente sur les lieux avant l'intéressée.
A son arrivée, le crépuscule était tombé. Après avoir attaché sa monture à un arbre, elle alluma et déposa sa lanterne à l'intérieur de la maisonnette abandonnée pour faire croire à une présence, puis se dissimula derrière des buissons emmitouflée dans son imposante cape en fourrure. De cet endroit, elle pouvait tout distinguer grâce à la lune.
Les mains moites et particulièrement aux aguets, il ne lui restait plus qu'à attendre.
Sujet: Re: Piège au clair de lune ♠ Philppa & Sybille Sam 6 Juin - 20:48
Piège au clair de lune sybille & philippa
"Êtes vous bien sûre que ce soit une bonne idée, miss ?"
Philippa soupira. Cette question, elle y avait eu droit de la part d'environ dix personnes depuis que son intendant lui avait transmis le lieu et l'heure de cette réunion secrète tenue par quelques uns des Protestants du pays, histoire de rappeler à Mary Tudor qu'en dépit de ses vigoureux efforts, la Réforme était en marche, et qu'elle ne réussirait à rien sinon à les rendre plus vindicatifs encore. Elle ne pensa même pas à s'offusquer du "miss", qu'en réalité elle préférait nettement au "milady" d'usage. Et alors qu'un pli soucieux barrait le front du soldat qui s'était adressé à elle, la brunette ne put que lui sourire avec gentillesse. Elle n'arrivait pas à lui en vouloir, et pour cause : il se faisait du souci pour elle. L'homme était lui-même sympathisant de la cause Protestante, les trois derniers Ducs de Gloucester avaient veillé à ce que l'ensemble de leur personnel s'accordent à leurs idées, aux prix de bien des renvois d'ailleurs. Philippa savait aussi que ce n'était pas la réunion en soi qui posait problème, mais la personne qui avait transmis la nouvelle.
"Allons," répondit-elle, "il n'y a aucune raison pour que Lady Parker tente quoi que ce soit, vous le savez bien... - Non, je ne le sais pas," répliqua-t-il abruptement, "et sauf votre respect, vous non plus."
Second soupir de Philippa. Arriverait-elle jamais à convaincre ses interlocuteurs, alliés ou non, qu'elle n'était plus une enfant, qu'ils serait bon que tous s'en souviennent ? "Lady Parker et moi," reprit la presque Duchesse, "avons décidé de mettre nos différents de côté, l'avenir de nos familles et du Protestantisme passent avant tout le reste, et les rancunes familiales ne sont bonnes à rien, surtout en ces temps ou l'entraide est plus que nécessaire." De bien belles paroles assurément, mais auxquelles la brunette n'adhérait qu'à demi. Certes, elle était bien d'accord pour que Parker et Tewkesbury cessent enfin de se tirer dans les pattes : leur dernière querelle avait mené son père tendrement aimé vers son tombeau, et avait bien failli mener le père de Sybille vers le sien. C'était à elles, Philippa et Sybille, de faire en sorte que ce genre de conflits n'interviennent plus. Lady Parker n'avait pas de frère à charge, mais Philippa oui : à elle de faire comprendre à Stephen que dorénavant, toute intention belliqueuse envers les Barons Morley était à bannir. Et pour ce, quoi de mieux qu'une alliance fondée sur la Religion Protestante chère aux coeurs des deux jeunes femmes ?
Mais entre l'arrière-petite-nièce de Margaret Beaufort et l'arrière-arrière-petite-fille de Richard III, le courant n'était pas près de passer pour de bon. A peine arrivaient-elles à rester une heure dans la même pièce sans s'envoyer des regards chargés de reproches et de noirs sous-entendus. "Quand aura lieu la réunion ? - Pendant les vêpres, à la cabane de la clairière des bois," dit la brune, se remémorant des paroles de son intendant. "Je vous accompagne. - Pas question. Restez ici, je pars seule." Il ouvrit la bouche pour objecter, sans doute, mais elle l'interrompit d'un geste. "J'ai dit : seule. J'emmène mon arc et un poignard au cas où, c'est promis, mais je ne veux personne avec moi. Dîtes au palefrenier de faire sceller mon cheval, je pars dans une heure. Et je ne souffrirais aucune objection. Exécution." Et alors que le soldat obéissait sans discuter, comprenant sans doute que la jeune femme était déterminée et que, en digne fille de son père et petite-fille de son grand-père, elle ne se laisserait pas convaincre facilement, Philippa eut un sourire satisfait et retourna à sa tapisserie.
Une heure plus tard, elle quittait la demeure londonienne sous le regard inquiet des domestiques. Le soir commençait à recouvrir les terres anglaises, et fort heureusement il ne neigeait pas. L'air, cependant, était glacial : Philippa se félicita d'avoir pris un manteau assez chaud et sans la moindre peur, s'enfonça dans les ténèbres de la forêt. Elle n'était pas inquiète outre mesure : sa nature la poussait plus à la confiance qu'à la méfiance, elle croyait dur comme fer en la cause qu'elle défendait dans l'ombre, et savait sa maisonnée assez loyale pour la couvrir en cas de problème. Le trajet ne fut pas long. En arrivant à la fameuse cabane, il faisait presque nuit noire, et si la demoiselle y voyait convenablement puisque sa vision s'était peu à peu habituée à l'obscurité, elle ne put retenir un sourire en voyant la lumière briller doucement à l'intérieur. Rapidement, elle descendit de cheval et sangla les rênes de l'animal à un arbre juste à côté de la porte d'entrée. Elle s'étonna un instant de ne pas voir davantage de monde, mais convint qu'elle devait être la deuxième personne arrivée sur les lieux, la première étant celle qui avait allumé et placé là cette lanterne. Elle résolut de laisser arc et flèches sous la selle du cheval, mais conserva son poignard puisqu'elle avait promis de garder au moins une arme. Sans attendre plus longtemps, elle toqua à la porte et entra immédiatement.
Vide.
Qu'était-ce encore que tout ceci ? Presque involontairement, la brune eut un murmure : "serait-ce un piège ?"