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Nous nous situons aux alentours de mai 1558.
Il fait de plus en plus chaud les gens prennent plaisir à sortir dans les jardins.

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MessageSujet: « Seules sont perdues d'avance les batailles qu'on ne livre pas. » ♦ Avec Ginger  « Seules sont perdues d'avance les batailles qu'on ne livre pas. » ♦ Avec Ginger Icon_minitimeLun 22 Avr - 12:21
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Mary Grey traversa les couloirs de Whitehall Palace en courant, bousculant quelques personnes sur son passage et entraînant des regards amusées, agacés ou curieux de la part des particuliers qui se trouvaient là. Mais fidèle à son impulsivité coutumière, elle n'en avait cure, et continuait sur son chemin sans prendre garde à quoi que se soit.

Elle venait de quitter les écuries : sa mère et sa soeur avaient fait sceller leurs chevaux pour se rendre en promenade dans la campagne des abords de la ville ; mais ne tenant pas plus que ça à rester avec sa génitrice, la jeune Lady avait prétexté un mal de tête et obtenu l'autorisation de rester ici. Ce qui, de toute manière, ne devait pas déranger Frances Brandon outre mesure, elle qui avait tant de mal à tolérer la fougue et la vivacité masculine de sa dernière née.

Mary était, comme à son habitude, habillée comme un garçon : blouse blanc cassé et pantalon noir rentré dans des bottes d'équitation légères et confortables. Encore une tenue qui avait le don d'horripiler sa mère, alors que jamais son père ne lui avait fait le moindre reproche. Son père... Henry Grey lui manquait affreusement. Il était toujours prisonnier à la Tour, et Mary se demandait quand elle pourrait enfin aller le voir. Pour cela, il lui fallait une autorisation de la Reine, or la fillette doutait fortement qu'elle la lui donne. Au reste, elle avait bien trop peur d'elle pour aller la lui demander.

Précipitamment, elle poussa la porte des appartements qu'elle partageait avec sa soeur et s'y enferma. Mary n'aimait pas cet endroit : c'était beau et luxueux, mais étouffant, comme une prison. Certes, c'était sans nul doute infiniment plus confortable que la cellule de Lord Grey, à la Tour, mais Mary avait l'impression désagréable d'être sans cesse épiée, sans cesse surveillée. Voilà ce qui arrive, quand une famille tombe en disgrâce...

Mary avait bien l'intention de profiter de sa solitude, ce matin-là. Le temps était frais, clair et radieux ; et si elle s'était trouvée dans le Suffolk, elle aurait été la première à sortir en courant. Mais elle était à Londres, et n'avait nul autre endroit que ses appartements pour s'isoler et faire ce que sa mère déplorait par dessus tout : s'entraîner aux armes.

La fillette en possédait quelques unes, dissimulées sous son matelas. Personne ne savait qu'elles étaient là, à l'exception de Katherine, Ginger et Mary elle même. Et la Lady savait qu'elle pouvait compter sur la discrétion de sa soeur et de sa chère suivante. Avec rapidité, elle attrapa son épée par le pommeau et regagna le salon principal, s'assura que la porte était bien close et que personne ne pouvait la voir depuis la fenêtre, au risque de la calomnier auprès de sa mère, et se mit en position d'attaque.

Son père et Richard Hurtwood lui avaient enseigné tous ses gestes, précis et vifs, qui faisaient un bon chevalier. Mary était petite, mince à l'extrême et rapide : un atour considérable. Elle ferma les yeux un instant et repensa à tous ses moments partagés avec son cher père et son non moins cher maître d'armes. Se remémorant leurs voix, leurs recommandations, elle envoya quelques coups dans le vide.

Face à un adversaire imaginaire, elle n'était plus Lady Mary Grey, mais bien le chevalier qu'elle rêvait de devenir, du haut de ses huit ans. Garde. Marche. Fente. Attaque. Flèche. Repli. Attaque. Bond avant. Halte. Repli. Marche arrière. Marche avant. Ballestra. Fente. Et ainsi de suite. Au fil de ses mouvements, Mary oubliait tout : sa condition de semi-prisonnière, l'enfermement de son père et sa soeur, la disgrâce des siens, l'animosité de sa mère à son égard. Plus rien n'avait d'importance, sinon son épée et le combattant fictif qui se défendait face à elle.


Dernière édition par Mary Grey le Mar 23 Avr - 10:31, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: « Seules sont perdues d'avance les batailles qu'on ne livre pas. » ♦ Avec Ginger  « Seules sont perdues d'avance les batailles qu'on ne livre pas. » ♦ Avec Ginger Icon_minitimeLun 22 Avr - 18:24

    Depuis sa naissance, Ginger avait toujours vécu dans un palais, celui des Grey, où elle avait vu le jours. Elle y avait vécu avec ses parents, et les autres domestiques, dans les chambres qui leur étaient alouées. Cependant, rien ne l'avait préparé au faste de Whithall Palace, le château des rois d'Angleterre. Certes, les quartiers des domestiques n'étaient guère plus reluisants que dans le Suffolk, mais elle passait ses journées dans des appartements extrêmement luxueux, dont ceux des filles Grey, les Ladies Katherine et Mary. Son existence n'était pas désagréable vu sa petite naissance, mais elle ne pouvait s'empêcher d'être inquiète. Qu'adviendrait-il des Grey, maintenant qu'ils avaient été écartés du pouvoir ?

    Lord Grey était en prison, de même que sa fille aînée, tandis que les deux cadettes étaient pupilles de la couronne. La reine Mary avait placé les Grey sous son entière domination, et n'avait que l'embarras du choix si jamais il y avait le moindre signe de rebellion. Des otages avec, au dessus de leur tête, une immense épée de Damoclès : la hache du bourreau. Et tout cela pour quoi ? Pour l'ambition et le pouvoir. Ah, quel plaisir était-ce que d'appartenir aux petites gens ! La vie de Ginger était bien plus libre que celle de Mary, sa jeune maîtresse. Certes, on la surveillait tout de même un peu, après tout, elle était au service des Grey, mais ce n'était rien comparé à la surveillance dont faisaient l'objet des appartements tous proches de ceux de la reine. Des gardes y étaient souvent en faction, et la plupart des servantes qui y passaient avaient l'oreille de Mary Tudor, elle mise à part. Elle était l'une des dernières domestique de confiance des Grey, et sans doute la dernière à pouvoir approcher leurs filles.

    Discrète, Ginger savait heureusement se faire oublier. De bon matin, après le lever de Mary Grey, elle avait changé les draps de son lit, une fois son petit déjeuner redescendu aux cuisines. Lesdis draps avaient été trempés et lavés par ses soins, puis essorés et séchés, tout cela par la jeune servante qui craignait toujours que quelqu'un, par vengeance ou représailles pour "l'hérésie" de Jane Grey, n'empoisonne le tissus sur lequel sa maîtresse posait sa peau, selon une méthode que lui avait rapportée un marmiton, apparemment bien au parfum des méthodes de "succession" ayant cours en ces temps troublés. Une fois le lit refait et parfumé elle avait entreprit de tout bien ranger, aérer malgré la chaleur, et nettoyé. Mary n'était toujours pas rentrée, comme à son habitude, mais elle savait que quelqu'un avait toujours un oeil sur elle, ce l'inquiétait autant que de la rassurer. Servir une Lady comme Mary Grey pouvait paraître épuisant d'un premier abord, mais comme elle appréciait la fillette, et que celle-ci l'appréciait en retour, c'était loin d'être désagréable. Elle flâna donc quelques minutes, laissant le soleil pénétrer la pièce. On toqua alors à la porte avec force. Ginger se fit un masque de discrétion servile et alla ouvrir, courbée comme pour saluer, marquant ainsi sa soumission, quel que soit le personnage qui était là.

    C'était un garde, un de ceux qui surveillait les appartements. Il tenait dans ses mains un volumineux paquet enroulé dans une étoffe, signe que le colis était fragile. Le regard du garde la transperça.

    - Un paquet de Lady Frances Brandon à l'attention de Miladies Katherine et Mary Grey, annonça t'il pompeusement.

    - Miladies Katherine et Mary sont absentes, Monsieur. Puis-je transmettre ?

    Sans un mot de plus, le garde lui donna le paquet, assez lourd, et referma la porte, sans doute faussement enthousiastes de retourner à ses occupations ô combien plus attrayantes, à savoir surveiller une porte et observer les allers et venues des membres de la famille royale. Ginger posa le volumineux paquet sur une table en bois précieux trônant au centre de la pièce et l'ouvrit. Il s'agissait essentiellement d'ouvrages de chevalerie et d'amour courtois comme en raffolait Katherine, et dans une moindre mesure, Mary (pour les histoires de chevaliers), ainsi que de fils, d'échevaux et d'aiguilles, la couture étant l'activité qui sied le plus à une fille de bonne famille. Sachant que Mary n'en voudrait pas, elle alla ranger le matériel de couture dans la chambre de Katherine, sa servante étant partie la chaperonner dans les jardins. Elle remarqua alors un mot parmi les bobines, comme laissé précipitamment, enroulé autour du fil, un mot qui avait sans doute échappé aux gardes qui fouillaient tout ce qui passait par la porte des appartements, faute de quoi on lui en aurait parlé. Un mot de Lady Frances priant sa fille cadette de la retrouver dans la roseraie, l'endroit sans doute le plus plaisant du palais. Elle entendit alors la porte s'ouvrir avec fracas, signe que Lady Mary était rentrée. Suivit le chuintement de l'acier, caractéristique d'une lame que l'on sortait. Sans doute s’entraînait-elle, sa chambre étant la seule pièce sûre. Ginger prit bien le temps d'ordonner les aiguilles avant de rejoindre Lady Grey, histoire que Lady Katherine ne se blesse pas en les sortant de son trousseau. Quand elle regagna la chambre de sa maîtresse, celle-ci ferraillait contre un adversaire imaginaire, à la manière des hommes de la garde royale, que la fillette rêvait de rejoindre un jour. Elle se plaça à distance, pour ne pas risquer de se blesser.

    - Milady ? Je sais que vous avez horreur que l'on vous dérange, mais je craint qu'il ne faille écourter votre entrainement matinal.

    Ginger sourit, ce qu'elle n'osait faire qu'avec Lady Mary et les autres domestiques du palais. La jeune fille était une maîtresse si différente des autres qu'elle pouvait se permettre de l'apprécier, tout en gardant un langage distant. La voir brandir une épée était un spectacle qu'elle se prenait souvent à contempler.

    - Lady Frances vous prie de la retrouver avant le déjeuner dans la Roseraie. Elle a précisé dans son mot vouloir vous apprécier habillée comme une véritable Lady, en citant ses paroles. Je dois donc vous préparer au plus vite, je ne puis point désobéir à Lady Frances.

    Car si Ginger était dévouée à Mary, l'autorité de Lady Frances était absolue, et en lui désobéissant, elle risquait sa place auprès des Grey. Sans plus attendre, elle extirpa d'une armoire une magnifique robe et prépara la coiffeuse de Lady Mary

Spoiler:
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MessageSujet: Re: « Seules sont perdues d'avance les batailles qu'on ne livre pas. » ♦ Avec Ginger  « Seules sont perdues d'avance les batailles qu'on ne livre pas. » ♦ Avec Ginger Icon_minitimeMar 23 Avr - 10:30
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C'est impressionnant comme pratiquer l'activité qui nous passionne nous fait perdre toute notion du temps et de l'espace. Prenez Lady Mary Grey, par exemple : toute à son entrainement, elle n'était plus vraiment elle même... Ou plutôt si, elle était elle-même, elle était le chevalier qu'elle rêvait de devenir. Sa condition féminine n'importait plus, pas plus que le reste. Quand Mary avait une épée en main, elle oubliait tout le reste.

Même les murs de sa chambre disparaissaient, laissant place, dans l'imaginaire de la fillette, à l'imposant parc qui ceinturait le domaine des Grey, dans le Suffolk. Autant il ne se passait pas une demi-journée sans que Mary ne se perde dans Whitehall, autant elle était capable de tracer son chemin dans son domaine natal les yeux fermés, tant elle le connaissait par coeur a force de l'avoir arpenté de part en part.

Toujours, Mary avait aimé son domaine, et rejeté la Cour Royale, à l'instar de son père. Sa mère, qui y avait des contacts (et non des moindres), sa mère seule semblait y être à sa place. De toute manière, les trois filles Grey n'étaient guère sorties du Suffolk : Jane et Katherine avaient attendu le jour de leurs noces, Mary celui de l'emprisonnement de son père. Ici, à Whitehall Palace, tout lui semblait hostile. Les gens l'épiaient, détaillant ses moindres faits et gestes, la regardaient de haut, elle, la fille du traître. Fort heureusement pour elle, elle savait qu'elle pouvait faire confiance à certains : sa cousine Elizabeth et Lady Mary Sidney, toutes deux vivant une situation similaire à la sienne, Richard Hurtwood dont elle sentait la présence protectrice autour d'elle, et Ginger, sa loyale suivante.

"Milady ? Je sais que vous avez horreur que l'on vous dérange, mais je craint qu'il ne faille écourter votre entrainement matinal."

L'information mit un temps à parvenir aux oreilles de Mary qui, prise dans son combat, se rendait difficilement compte du monde autour d'elle.

Ginger ! Mary s'arrêta en plein élan, alors qu'elle s'apprêtait à enfoncer sa lame dans la gorge de l'adversaire fantomatique face à elle, pour se tourner d'un bloc vers la jeune suivante. Elle avait le souffle court et les cheveux en bataille, et il lui fallut un peu de temps pour que son coeur reprenne un rythme plus normal et qu'elle puisse articuler quelques paroles.

"Pourquoi cela ?"

Le ton était déçu et suppliant, ce ton qu'on ne trouve que chez les enfants auxquels ont fait miroiter une surprise pour finalement la leur retirer. Ginger n'était pas en cause, évidemment, mais Mary avait tellement attendu cette matinée de solitude que la déception de la voir si rapidement écourtée était amère.

"- Lady Frances vous prie de la retrouver avant le déjeuner dans la Roseraie. Elle a précisé dans son mot vouloir vous apprécier habillée comme une véritable Lady, en citant ses paroles. Je dois donc vous préparer au plus vite, je ne puis point désobéir à Lady Frances.
- Oh non ! Et dire que je croyais avoir la paix, ce matin !"


Mary bougonnait encore quand Ginger sortit d'une armoire une très belle robe, d'un bleu sombre et brillant, pour la placer sur le dossier d'un fauteuil avant de préparer la coiffeuse. Mary eut une grimace. Sa mère ! Habillée comme une Lady ! C'était une mauvaise farce ! Frances Brandon savait que sa dernière née détestait au plus haut point les robes, les bijoux et les parures qui font d'ordinaire tant le plaisirs aux représentantes du sexe féminin. Sauf à Mary : Mary était l'exception qui confirmait la règle, chose que sa mère ne semblait pas apte à comprendre.

Avec l'aide de Ginger, Mary se débarrassa de sa blouse et retira ses bottes.

"Dites moi, Ginger... Madame ma mère vous a t'elle fait savoir les raisons pour lesquelles elle désirait me voir ?... Car en réalité, elle est sortie avec Katherine depuis peu il me semble, je ne pensais pas qu'elle écourte sa promenade uniquement pour le plaisir de me donner un rendez-vous."

Mary Grey gardait ses sourcils froncés ; effectivement, elle s'interrogeait. Pourquoi sa mère, qui avait toujours refusé sa compagnie, demandait-elle à la voir ? De façon aussi soudaine qui plus est ? Une idée vint à l'esprit de la petite Lady, qui évidemment l'exprima tout haut puisqu'elle se savait en confiance.

"Vous croyez que cela a un rapport quelconque avec mon père ? Avec ma soeur ? Peut-être la Reine a t-elle enfin décidé de les libérer... Ou de les mettre à mort ?"

Un frisson parcourut l'échine de Mary Grey. La perspective était si terrible qu'elle n'osait y songer. Et pourtant, le danger était bien réel.
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MessageSujet: Re: « Seules sont perdues d'avance les batailles qu'on ne livre pas. » ♦ Avec Ginger  « Seules sont perdues d'avance les batailles qu'on ne livre pas. » ♦ Avec Ginger Icon_minitimeMer 24 Avr - 8:41


    Ginger sortit d'un pli de sa robe le mot de Lady Frances et le relut avec attention, peut-être qu'elle aurait laissé un sous entendu permettant de déduire le motif de sa demande. Il était vrai qu'elle n'approuvait pas le moins du monde sa fille cadette dans sa voie, aussi, cela ne pouvait être qu'important. Aussi loin qu'elle s'en souvenait, Lady Frances avait été une amie de Mary Tudor, peut-être que cette dernière avait eu la bonté de l'avertir avant de rendre sa décision publique, qu'elle soit bonne ou mauvaise. Mais bien sûr, il ne s'agissait que de spéculations, elle n'osait pas vraiment s'avancer. Mais il s'agissait du plus banal des mots, écrit avec un soin tout particulier certes, de façon à ce que Ginger n'ait aucun mal à le déchiffrer, en de grandes lettres fines comme seuls les aristocrates arrivent à les tracer. Il n'y avait nul message subliminal, les tournures de phrases étaient épurées et élaborées au minimum. Elle tendit le mot à Mary pour qu'elle puisse s'enquérir elle-même de la demande de sa mère.

    - Je n'ai reçu que ce mot Milady, dissimulé parmi des aiguilles et des bobines qu'elle destinait sans doute à Lady Katherine votre soeur. Je pense que Lady Frances souhaite faire cette rencontre dans la plus stricte intimité.

    La seule évidence. Si le mot était caché, il était là pour une bonne raison. A savoir, éviter que la jeune Mary soit escortée par un régiment de la garde royale qui surveillerait tout l'entretien pour aller le rapporter à la reine. Et il était même sûr que Mary se ferait moins remarquer avec des vêtements de femme qu'avec ses bas et ses chemises d'homme. Quoi que voulait dire Lady Frances à sa fille cadette, elle voulait faire cela dans le cadre le plus privé possible. A cette heure de la journée, il faisait une chaleur étouffante dans la Roseraie, d'autant plus que le parfum des fleurs devait être si fort qu'il en était désagréable, peu de dames et de messieurs y seraient, le cadre rêvé, ou presque, pour un entretient. Une fois de plus, Ginger ne put que saluer intérieurement l'intelligence de Lady Frances Brandon, qui connaissait si bien les rouages de la cour, l'art de l'espionnage et celui des intrigues pour pouvoir s'y soustraire. Que ce soit de bonnes ou de mauvaises nouvelles, elles s'ébruiteraient moins vite que les autres grâce aux précautions de la mère de Mary pour s'entretenir avec sa fille, ou avec ses filles peut-être. Lady Katherine était peut-être déjà là-bas avec sa mère.

    - En tout cas, cette entrevue ne pouvait être faite que maintenant. Lady Frances a tout prévu, pour une fois, vous vous sentirez peut-être moins surveillée Milady.

    Ginger évitait du mieux qu'elle pouvait la sentence de Sa Majesté, peut-être par crainte. Les bruits du château au sujet de Lady Jane s'intensifiaient et se révélaient très pessimistes. Elle ne représentait plus qu'un vague danger pour la reine, et encore, tellement moindre qu'elle n'aurait pas à s'en inquiéter, avec Lord Grey dans un cachot de surcroît, cependant on murmurait partout qu'elle ne passerai pas un an, que la hache du bourreau aurait raison de sa tête et de celle de son père. Ginger ne voulait pas croire à tous ces racontars, mais c'était hélas si réaliste qu'elle ne pouvait se voiler la face. La reine ne reculerait devant rien pour préserver son trône. Même sa demi-soeur Elizabeth, cette jeune fille de dix-neuf ans, risquait sa tête juste parce qu'elle existait et qu'elle partageait le sang de Mary Tudor. Aucun prétendant au trône n'était à l'abris de voir sa tête voler, séparée de son cou. Mais cela, elle n'osait pas le dire à sa jeune maîtresse.

    - Vous savez, je ne pense pas que la reine fasse exécuter votre père et votre soeur. Ils ne sont plus une menace, d'autant plus que vous et votre soeur êtes pupilles de la couronne.

    Ginger n'était pas née avec le don du mensonge. Son trouble risquait de se voir sur son visage. Elle entreprit de saisir l'étoffe de la robe et de la brosser pour se donner une contenance autant que pour supprimer les faux plis qui étaient présents. La robe était superbe. Une de ces tenues que Ginger aurait adoré porter, ne serait-ce qu'une fois dans sa vie pour oublier qu'elle était soumise aux grands de ce monde. Elle enleva ensuite l'épée des mains de Mary pour aller la dissimuler sous le matelas, comme d'usage. L'arme pesait lourd dans sa main, si bien qu'elle usa des deux pour la soutenir. La jeune Mary, encore si petite, devait être bien musclée pour pouvoir la porter avec l'aisance qui était la sienne. Elle avait un don c'était indéniable. Il y avait sous ce matelas plusieurs lames, dont la plupart étaient un cadeau de Lord Grey, de l'époque où toute la famille vivait encore dans leur domaine du Suffolk. Ginger n'y connaissait absolument rien, mais elle admirait le travail qui était fait sur ces épées comme du travail d'orfèvre. Elle s'arracha à leur contemplation et aida sa jeune maîtresse à lacer le corsage de sa robe.
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MessageSujet: Re: « Seules sont perdues d'avance les batailles qu'on ne livre pas. » ♦ Avec Ginger  « Seules sont perdues d'avance les batailles qu'on ne livre pas. » ♦ Avec Ginger Icon_minitimeJeu 25 Avr - 15:55
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Ginger relut le pli avant de le tendre à sa jeune maîtresse. Face au miroir d'argent, Mary Grey affichait une mine sombre ; en réalité, sa contrariété était bien réelle et tournait autour d'une seule et même question : qu'est ce que sa mère pouvait lui vouloir ? Vivement, elle s'empara du petit mot, qu'elle lut avec attention. Non point qu'elle doutât de la parole de Ginger, Mary avait une confiance des plus totales en sa suivante, mais elle relire le mot était une assurance supplémentaire des désirs de sa mère.

" - Je n'ai reçu que ce mot Milady, dissimulé parmi des aiguilles et des bobines qu'elle destinait sans doute à Lady Katherine votre soeur. Je pense que Lady Frances souhaite faire cette rencontre dans la plus stricte intimité.
- Les bobines étaient assurément pour Katherine, Mère sait pertinemment que moins je les touche et mieux je me porte. Quant au mot... Si elle est partie ce matin avec Katherine pour me faire venir ensuite, c'est bien qu'elle a une importante nouvelle a nous communiquer. Je dois dire que Mère a une connaissance incroyable de la façon dont les choses fonctionnent à la cour... Dommage qu'elle n'ait pas transmis son savoir à Jane."


La fillette eut une grimace. Frances était bien la dernière à être responsable du sort de Jane, la preuve était qu'elle se démenait comme une diablesse pour la faire sortir de sa geôle. Mais parfois, Mary ne pouvait s'empêcher de penser que si ses parents avaient été moins ambitieux, où si leur mère avait expliqué à sa fille aînée les rouages dissimulés derrières les nébuleuses de la Cour, les choses se seraient passées autrement.

Mais ce qi était fait était fait ; et Henry Grey disait souvent à sa fille que "avec des "si", on peut refaire le monde". Il avait raison, car maintenant, se plaindre sur des actions passées n'avait strictement aucune utilité.

" - En tout cas, cette entrevue ne pouvait être faite que maintenant. Lady Frances a tout prévu, pour une fois, vous vous sentirez peut-être moins surveillée Milady.
- Je n'y avais pas pensé... Au moins, ce sera le point positif de cette entrevue. Connaissant ma mère, je doute fort qu'il y en ait d'autres, alors concentrons-nous sur celui-ci !"


Mary sourit à Ginger dans le miroir, mais n'ayant jamais eut le talent de sa mère pour dissimuler ses émotions derrière un masque de pierre, elle ne parvenait pas à cacher son trouble, sa nervosité. Une entrevue privée avec Frances Brandon et Katherine Grey ne pouvait signifier qu'une nouvelle importante, or, vu les temps qui courraient, cette nouvelle concernait forcément Jane ou Henry. Bonne ou mauvaise, là était toute la question. A la remarque de Ginger, Mary haussa les sourcils.

"C'est ce que pense Katherine également, de même que les rares personnes de la Cour encore fidèles à notre cause et auxquels j'ai pu parler. Quant à Mère, j'avoue ignorer son avis, et ce n'est certes pas à moi qu'elle ira le confier. J'espère que vous avez raison... Je VEUX croire que vous avez raison mais... J'ai peur. Père m'a parlé de ce qui était arrivé aux Reines Anne Boleyn et Katherine Howard, de ce qui était arrivé aux rebelles catholiques du Nord quand ils se sont rebellés contre la destruction des monastères. Et Mary est la fille d'Henry VIII... Elle fera n'importe quoi pour garder son trône."

Ginger arrangea les plis de la robe de Mary avant d'aller ranger son épée parmi les autres, sous le matelas. La jeune Lady regarda disparaître l'objet avec une étrange pincée de regret. Quand aurait-elle l'occasion de la sortir à nouveau ? Comme toutes les autres, elle lui avait été offerte par Henry Grey, son père adoré. Qu'adviendrait-il d'eux tous, si la Reine décidait qu'en fin de compte, Jane Grey et son père étaient une réelle menace pour eux tous ?

"Au moins, Katherine et moi ne sommes pas les seules à être dans une mauvaise posture. Lady Elizabeth, ma chère cousine, l'est tout autant que nous. Elle aussi est épiée constamment. Elle aussi craint pour sa tête" sourit tristement la fillette alors que Ginger lui vint en aide pour lacer son corsage.

Observatrice, l'intérêt de Ginger pour les épées n'avait pas échappé à la petite demoiselle. Désireuse de faire dévier la conversation sur un sujet plus joyeux, elle demanda en souriant gaiement :

"Les épées vous plaisent-elles ?"


Dernière édition par Mary Grey le Mer 1 Mai - 15:35, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: « Seules sont perdues d'avance les batailles qu'on ne livre pas. » ♦ Avec Ginger  « Seules sont perdues d'avance les batailles qu'on ne livre pas. » ♦ Avec Ginger Icon_minitimeLun 29 Avr - 12:06

    Spoiler:

    Ginger sourit à Mary de la manière la plus crédible qu'elle pouvait le faire. Pour une enfant, elle la trouvait déjà bien mûre, presque autant qu'elle qui avait dix ans de plus. Etait-ce les épreuves traversées ? Parfois, Ginger regrettait que sa jeune maîtresse ne soit pas une petite fille comme les autres qui n'avait guère besoin de se soucier du lendemain, où alors juste du temps qu'il ferait pour ne pas compromettre ses escapades, qui se plaindrait de temps en temps de sa mère et des contraintes qu'elle lui imposait. Mais il était bien beau de rêver ainsi, souvent, c'était pour échapper à la réalité, oublier qu'on était quelqu'un pour créer un soi alternatif, qui va très bien, qui vit dans un monde parfait. Mais le retour à la réalité est douloureux, comme une grande gifle qui vous retourne la figure. Ginger espérait que Mary ne vivait pas dans ce monde là aussi, comme le faisait beaucoup de gens que leur vie ne satisfaisait pas. Cependant, elle même le faisait parfois. Elle n'était pas malheureuse, mais compatissait énormément au sort de ses maîtres, les Grey : un siège bancal, suspendu au dessus d'un précipice, et que la reine Mary pouvait soit ramener en sécurité soit pousser du doigt pour le faire tomber. Si elle devait se positionner sur ce singulier assemblage, elle se verrait sur les deux pieds restés à terre, toujours là, mais craignant de tomber avec le reste. Au-delà de ces étranges métaphores, la jeune servante savait qu'elle ne pouvait se mesurer aux grands de ce monde comme si c'était normal. Elle était une petite servante, née dans la petite chambre d'un grand château, de parents dont personne ne retiendrait jamais le nom. C'était bien connu, elle même ne se souvenait pas des noms de tous ses aïeux, alors que les Grey arboraient fièrement leur arbre généalogique en se vantant des hauts faits de leurs ancêtres. Que pouvait-elle faire ? A part soulager du mieux qu'elle le pouvait la peine de Mary Grey en la servant dignement, elle ne voyait absolument pas. Pas question d'essayer de délivrer Lady Jane. Et comment ferait-elle ? Lady Frances saurait sans doute mieux, surtout si c'était pour le bien de sa fille. Cependant, Ginger doutait qu'elle y parvienne. Libérer Jane serait perçu par le peuple comme une preuve de faiblesse de la part de la nouvelle reine, ce qui créerait un vent de sympathie pour la pauvre jeune fille, et une nouvelle tentative des Grey, un jour de reprendre ce maudit trône. Et quand bien même ? Mary Tudor ne pouvait se permettre cela, pas avant quelques années en tous cas, le temps de consolider sa position, ce qui a été passablement compromis par son retour à l'ancienne religion, prônée par son père Henri VIII. Ginger avait une oreille dans tous les coins du château, car nul n'est aussi bien informé que les domestiques. Elle savait qu'en plus d'une reprise des contacts amicaux avec les autres monarchies et avec les états pontificaux, cette contre réforme avait soulevé une immense partie du peuple. Ce pays était en proie à des troubles qui n'iraient pas en s'améliorant, loin de là. Ginger savait que sous peu, toutes ces tensions cumulées créeraient des troubles à Londres.

    En remettant de l'ordre dans le lit que la dissimulation des épées avaient quelque peu froissé, Ginger entendit Mary lui demander si les épées lui plaisaient. Elle rougit, car le savoir vivre des domestiques imposaient de ne jamais manifester un intérêt quelconque envers les affaires des nobles ou des riches que l'on sert. Mais puisque Lady Mary le lui avait demandé, elle allait répondre le plus honnêtement qu'il était possible.

    - Je n'ai jamais tenu une épée Milady. Mais quand j'étais petite, j'allais souvent voir les hommes de votre père s’entraîner dans la cour et plus tard j'observais vos séances avec Sir Hurtwood. Je dois admettre que c'est un art plutôt intéressant que celui de l'escrime, et beau avec cela. Cela ressemble, à mon humble avis, à une forme de danse très élaborée au même titre que le danse de cour. Ceci-dit, je ne pense pas que ce soit pour moi Milady, c'est une discipline pour les mieux nés que moi. Comme vous. Même si vous êtes une Lady.

    Sur ces mots, elle sera le corsage dans le dos de Mary Grey de manière à lui donner un port plus altier. Les codes vestimentaires étaient censés donner une certaine image de ceux qui s'habillent bien. Le bleu était une couleur discrète mais royale qui dénotait l'humilité, en opposition avec le rouge qu'aimaient les souverains. C'était une tenue parfaite. Le corsage était également extrêmement important. Il définissait le comportement et la stature de celle qui le portait. Lâche, il montrait la soumission, serré et ferme, il montrait la détermination, la noblesse. Une simple robe, inerte, pouvait envoyer un message puissant. Après avoir passé des années à habiller Mary, Ginger connaissait tous les codes que pouvaient fournir une robe bien mise et bien portée. Sa jeune maîtresse devait affirmer son sang royal avec cette robe, afin que personne n'oublia que même prisonnière, elle restait digne. Les gens se devaient de la considérer encore comme un membre de la famille royale, et en cela, méritant le respect.

    Considérant la coiffure hirsute qu'arborait Mary, elle la guida doucement vers la coiffeuse, la fit asseoir sur le tabouret et entreprit, en premier lieu, de démêler ses cheveux, semblables à des touffes de pailles en bataille. Outre sa connaissance des toilettes, Ginger pouvait se vanter sans être trop présomptueuse de savoir bien se débrouiller avec les coiffures à la mode. Elle voyait tous les jours quelles coiffures portaient les Ladies, lesquelles semblaient plaire aux hommes, et celles qu'il fallait avoir pour être à la mode. Etant très jeune, les servantes les plus âgées lui enseignaient le soir comment tresser les cheveux, les relever sur le haut du crâne, ou comment les boucler avec un fer. Lady Mary n'étant encore qu'une enfant, il n'y avait nul besoin de coiffures élaborées, mais Ginger comptait bien rester au service de sa bien aimée maîtresse encore de longues années, et continuer à la servir bien après son mariage. En effet, il était certain que Lady Frances trouverait très vite un parti convenable pour sa cadette quand elle en aurait l'âge. Elle savait aussi que Mary se rebellerait, car c'était dans sa nature. Son sang était celui d'une rebelle, réticente à toute autorité et contre la moindre discrimination sexuelle, surtout en matière de chevalerie. Son tempérament le ferait peut-être un jour se déguiser en homme pour réaliser ses rêves. Qui pouvait savoir ? Elle même étaient trop jeunes. Ginger remit en ordre les dernières mèches devenues soyeuses, pour peu de temps malheureusement. Elle osa tout de même s'entretenir avec sa maîtresse au sujet de son avenir;

    - Milady ! Je ne pense pas que vous puissiez un jour devenir chevalier, même si je sais que vous le souhaitez de tout votre coeur. Y avez vous déjà pensé ? Ou peut-être savez vous déjà comment vous allez vous y prendre pour y parvenir. Quoi qu'il en soit, je voulais vous dire que vous pourrez toujours compter sur ma loyauté indéfectible.

    Elle baissa automatiquement les yeux. Combien de fois sa mère l'avait-elle mise en garde sur ce genre de comportement ? Un nombre incalculable de fois sans doute. Elle ne devait pas questionner sa maîtresse, et encore moins manifester des sentiments à son égards, elle le savait. Mais elle aimait trop cette petite fille pour s'en priver, et c'était trop dûr de résister. Et était-ce mal que de souhaiter le bonheur de son employeur ?
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MessageSujet: Re: « Seules sont perdues d'avance les batailles qu'on ne livre pas. » ♦ Avec Ginger  « Seules sont perdues d'avance les batailles qu'on ne livre pas. » ♦ Avec Ginger Icon_minitimeMer 1 Mai - 16:30
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" - Je n'ai jamais tenu une épée Milady. Mais quand j'étais petite, j'allais souvent voir les hommes de votre père s’entraîner dans la cour et plus tard j'observais vos séances avec Sir Hurtwood. Je dois admettre que c'est un art plutôt intéressant que celui de l'escrime, et beau avec cela. Cela ressemble, à mon humble avis, à une forme de danse très élaborée au même titre que le danse de cour. Ceci-dit, je ne pense pas que ce soit pour moi Milady, c'est une discipline pour les mieux nés que moi. Comme vous. Même si vous êtes une Lady.
- C'est une danse ! En tout cas, c'est un art qui demande la même précision, la même concentration. L'enchaînement des mouvements est de fait très élaborée et complexe, et tellement belle !"
Sourit la petite Lady, ravie de pouvoir parler de sa passion -si peu admise dans la communauté féminine- pour l'escrime et les épées.

Quant à Henry Grey, le père de Mary, il lui avait fallu un petit temps avant qu'il n'admette le talent de sa dernière née pour les arts de l'épée, sa passion pour les armes et la chevalerie. Néanmoins, il avait digéré la pilule assez facilement et toute sa vie, Mary Grey se souviendrait de ce merveilleux Noël de ses quatre ans où il lui avait offert sa première épée. Elle avait été forgée spécialement pour elle, petite et légère, aussi fine qu'une aiguille. La fillette, ce jour-là, avait sans doute été l'enfant la plus heureuse du monde. D'autres armes étaient venues compléter sa collection après coup, pour l'essentiel offertes par son père, une ou deux par Richard Hurtwood, d'autres qu'elle-même s'était payées. Aux yeux de la jeune Lady, ses objets valaient infiniment plus que les parures et soieries tant appréciées par Frances Brandon et ses deux aînées. Les épées étaient des bijoux à part entière, tout aussi belles et infiniment plus utiles qu'une paire de boucles d'oreilles en diamants.

"Vous savez, j'ai commencé en observant, moi aussi. Je refaisais les gestes des soldats de Père avec un bâton, jusqu'à ce qu'il me voie faire et demande à Sir Hurtwood de m'apprendre vraiment." Avec un grand sourire, elle ajouta : "Je pourrais vous apprendre, si cela vous plaît !"

Elle avait appris quelques mouvements à sa grande amie Agnès Cavendish, tout aussi sauvage et impétueuse qu'elle même, à ceci près qu'Agnès avait une mère compréhensive qui la laissait faire. Souvent, Mary avait jalousé Agnès d'avoir une telle mère : Dieu sait que la fillette aurait voulu que Frances ressemble plus à Antanasya. Pour le reste, Mary devait remercier Richard Hurtwood et son père, Lord Grey, qui l'avaient entraînée comme on entraîne un chevalier. Depuis son arrivée à Whitehall, elle était incapable de s'entraîner comme avant, dans le Suffolk, mais avait trouvé du réconfort dans ses entrevues avec Henry Stuart et Lawrence Vaughn. Du haut de ses huit ans et en dépit des neuf ans de différence entre elle et Ginger, elle se sentait capable d'apprendre quelques mouvements à la jeune suivante.

"J'aurais aimé être un Lord. Je ne veux pas être une Lady. Je ne veux pas être comme Mère, Katherine ou Jane, à être utilisée comme un pion. J'aurais aimé être un garçon, parce-que si j'avais été un garçon, rien de tout cela ne serait arrivé. J'aurais pu provoquer en duel tous ceux qui s'en prennent à ma famille et je leur aurait fait ravaler leur insolence. Quand je serais chevalier, je vengerais tous les torts faits aux miens !"

Si Frances Brandon l'avait entendue, elle se serait mise à hurler au scandale, pour autant que le laçage de son corset, serré au maximum, le lui aurait permis. Ce genre de choses, la petite Lady avait appris à les dissimuler, même si il n'était pas dans sa nature de réfléchir avant de parler. Pour elle, s'était un peu le contraire : la demoiselle était impulsive et parlait sans réfléchir. Si cette manie avait le don d'horripiler sa mère et l'aînée de ses soeurs, elle amusait son père. Richard Hurtwood n'avait jamais fait à Mary la moindre remarque, pas plus que Katherine ou Ginger. Afin d'éviter les représailles maternelles, elle préférait cependant garder le silence sur ses projets d'avenir.

Mary avait vu ses deux soeurs mariées le même jour, Katherine a douze ans seulement. Evidemment, elle n'était pas sans se rendre compte que son tour viendrait bientôt. Après le mariage de Jane et sa cadette, elle s'était retrouvée seule avec ses deux parents et s'étaient inquiétée : et elle, allait-on la marier aussi ? La peur de sa mère l'empêchait de lui poser de questions, mais elle s'était ouverte à son père. Celui-ci lui avait dit que pour l'instant, il en était hors de question. Perspicace, la fillette s'était bien rendue compte que les épousailles de Katherine ne lui plaisaient pas forcément. Lord Grey avait d'ailleurs été incapable de cacher son soulagement quand son mari l'avait répudiée, chose que Frances ne lui avait point encore pardonné. Mary avait été heureuse de retrouver sa soeur tant chérie, mais aurait bien voulu aller provoquer en duel à l'épée le misérable qui l'avait jetée dehors comme une vulgaire catin. Quand elle sera chevalier, il serait le premier qu'elle passerait au fil de sa lame. On se déshonore pas un Grey !

" - Je ne pense pas que vous puissiez un jour devenir chevalier, même si je sais que vous le souhaitez de tout votre coeur. Y avez vous déjà pensé ? Ou peut-être savez vous déjà comment vous allez vous y prendre pour y parvenir.
- C'est mon voeu le plus cher depuis toujours ; je prie pour cela tous les soirs et tous les matins, à chaque fois que Mère me traîne à la messe ! En plus de la libération de Père et Jane, s'entend... Et Sir Hurtwood dit que j'aurais ma place, Lawrence Vaughn aussi. C'est ce qu'on va faire, avec Agnès, même si on doit se déguiser en garçons. De toute manière, je serais sans doute plus à ma place déguisée en garçon à me battre pour l'Angleterre qu'assise dans un fauteuil avec une robe de soie, à boire le thé en attendant qu'un éventuel mari rentre de la guerre. La guerre, je veux la faire, pas la regarder ! Et après le déshonneur jeté sur ma famille, je doute que faire alliance avec les Grey soit du goût de tout le monde. C'est quand même incroyable : nous sommes une famille ancienne et titrée, je suis la petite nièce d'Henry VIII, et tout ce qu'on retiendra de nous sera ce fichu complot ! Remarquez, connaissant madame ma mère, je suis sûre qu'elle dénichera Dieu sait quel parti pour moi... Mais je pourrais toujours dire "non" au dernier moment et partir quand même, ha !"


Personne ne la ferait renoncer à ses rêves, et surtout pas sa mère. Qu'elle essaie ! Mary Grey n'était pas née pour être femme de Seigneur, mais pour être Seigneur. Son père lui avait souvent dit qu'elle était le fils qu'il n'avait jamais eu. Il était juste hors de question qu'elle se laisse guider par le bout du nez juste parce-qu'elle était une fille ! Et ça, ni sa mère ni quiconque n'y changeraient quoi que ce soit.

" - Quoi qu'il en soit, je voulais vous dire que vous pourrez toujours compter sur ma loyauté indéfectible.
- Merci, Ginger. Vous savez, je crois bien que vous êtes une des rares personnes de Whitehall qui n'espère pas la chute définitive des miens. Je vous connais depuis toujours et si il y a bien une personne en qui j'ai confiance, c'est vous !"


De fait, Mary Grey avait totalement confiance en sa suivante. Combien de fois ne l'avait-elle pas aidée à masquer les traces de boue sur ses vêtements, couverte pour justifier ses absences auprès de sa mère ? Aussi loin que remontent ses souvenirs, Ginger l'avait aidée. tout ce que Mary souhaitait, c'était que la chute des Grey ne mettent pas Miss Ross en porte-à-faux.

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