Ça grouille de rats !

Les jours d'été avaient aujourd'hui disparu pour laisser place à la délicate brise de l'automne. Le vert des arbres commençait à prendre des teintes orangé, mais malgré la disparition de la grande chaleur, pour moi, c'était une journée superbe. En effet, le soleil trônait haut dans le ciel et malgré un léger vent, la chaleur perdurait, même si c'était bien peu comparé à l'été. Cette journée ensoleillée aurait été parfaite pour sortir, se promener, parcourir les campagnes à cheval, mais non, j'avais décidé de me rendre à La Tour de Londres. Un endroit loin d'être plaisant, d'autant plus lorsque l'on se rendait dans le côté des cellules et quelque peu lugubre. Etrange de choisir de passer son après-midi dans cette Tour, alors que je pourrais faire bon nombre d'autre chose, mais voilà, c'était là mon choix et je n'avais pas décidé d'en changer.

Au lieu de porter ma tenue en cuir rouge, que je n’avais de cesse de porter ces derniers temps, j’avais décidé de me vêtir d’une robe. Là encore, mon choix semblait quelque peu bizarre lorsqu’on pensait à l’endroit où je me rendais, mais je n’allais tout de même pas me rendre à la prison vêtue comme une guerrière qui donnait des airs d’assassins, non ? Je désirais passer inaperçu et pour cela, se vêtir comme toutes femmes normales était le meilleur moyen de parvenir à mes fins. Mais, même si je portais une robe, je n’avais pu me délaisser de mes armes. A l’un de mes mollets était attaché une dague et à l’autre un petit poignard : nous n’étions jamais trop prudent. Et puis, lorsqu’on a l’habitude de toujours porter des armes, sortir sans elles, c’était comme sortir nu. Tout du moins, c’était ainsi que cela se passait pour moi.

C’est avec une réelle facilitée que je passais les gardes. A croire qu’une simple histoire sur ma raison de vouloir voir l’un des détenus se trouvait être suffisante pour que je puisse continuer mon chemin sans encombre. Bah ! A force de voir des visiteurs passer, ils devaient bien commencer à être lasse et à baisser leur garde. Non pas que je veuille du mal à celui que je visitais, quoi que, mais bon, c’était quelque peu étonnant dans mon esprit. Après tout, il ne faudrait pas que les prisonniers qui étaient détenus ici s’évadent ou se fasse tuer, non ? Quoi qu’il en soit, entre les cellules je poursuivis mon chemin pour finalement m’arrêter devant l’une d’entre elles et la parcourir du regard.

« Lord Dudley. » Lançais-je comme moyen de lui montrer le fait qu'il avait un visiteur. Même s'il s'agissait là d'un ennemi, le voir dans un si piètre état me faisait de la peine. Moi qui avais l'habitude de le voir fier, toujours bien habillé, toujours bien coiffé, toujours près à courtiser. En même temps, vivre en prison n'était pas là chose aisé et rien que parce qu'il parvenait à tenir depuis de longues semaines, une petite étincelle dans mes yeux, lui valut mon respect.

HRP:

Ça grouille de rats !

Face à Robert Dudley qui se trouvait dans sa cellule pareil à un rat je me tenais, arborant un étrange sourire. Il me faut avouer que la surprise qui était passé dans ses yeux lorsqu'il m'avait reconnu en tant que son visiteur m'avais fait intérieurement rire. En même temps, voir l'une de ses ennemies faces à sois, n'est en rien là une chose anodine et courante. Et encore moins lorsque l'on se retrouve en prison. Quoi qu'il soit, j'étais là, il était là et je sentais bien que cet après-midi ne serait en rien un moment agréable à vivre. Mais à ce moment-là, j'ignorais à quel point elle serait épouvantable, voir horrible. La première phrase que laissa échapper Robert eut pour simple effet de me faire rire avec mépris. Dérision quand tu nous tiens ! « A votre place, je n'aurais guère ajouté le mot malheureusement, car si vous veniez à mourir je préférerais que ce soit de ma main que de celle d'un autre. » Rétorquais-je en gardant sur mes lèvres un sourire emplit de moquerie. En effet, s'il venait à être exécuté, je préférerais que ce soit moi qui tienne la hache du bourreau. Tuer un ennemi doit être une chose quelque peu enivrante, même si, et je m'en doutais, le remord pourrait s'en suivre. Après tout, même si j'agissais de manière froide, je n'en restais pas moi un être humain avec sentiments, émotions et tuer de sang froid ne pourrait que me faire ressentir de la culpabilité.

Alors que j'attendais sa réplique avec impatience, pour pouvoir le remballer et ainsi l'écraser au mieux sur le sol froid de sa cellule à l'aide de mes mots, des rats se mirent à converger vers nous. Rats que je ne remarquais tout d'abord pas, car ces petites créatures poilues se trouvaient en dessous de mon champ de vision qui se trouvait focaliser sur Robert. Soudainement, une morsure sur le pied survint et par réflexe je bougeais ce dernier. Dans une chose molle je tapais et c'est avec horreur que je baissais mon regard vers ces bêtes noires qui donnaient l'impression d'être affamé et qu'ils désiraient nous manger. « Mais c'est quoi ça ?! » M'écriais-je et tournant un regard horrifié vers Robert je constatais qu'il faisait face aux mêmes problèmes. Dans tous les sens je me mis à taper pour tenter au mieux de les éloigner, mais il en venait toujours plus. Comme s'il s'agissait là d'une armée de rats chargé de nous dévorer vivant. Rapidement je me mis à maudire la robe que j'avais choisie de mettre et les souliers qui allaient avec. Car comparé aux chaussures que je mettais d'habitude, celles-ci étaient faites de toiles et laissaient donc la peau être plus facilement touchée par ces rats. Quant à la robe elle ne me laissait pas la totalité de mes mouvements et se trouvait être un bon moyen pour ces rats de monter sur ma peau.

La sensation de pattes qui couraient sur l’une de mes jambes me fit frémir et pousser un petit cri. Secouant mes jambes dans tous les sens, je parvins à faire tomber le rat qui était parvenu à monter. Rapidement je me baissais, pour finalement parvenir à prendre le poignard et la dague accrochés à mes chevilles. Je me mis alors à faire un massacre. Espérant fortement que le fait d’entendre certains d’entre eux agoniser à la suite d’un coup de lame les ferait fuir. Oubliant que Robert était un ennemi pendant plusieurs secondes, je fis passer mon poignard par les barreaux pour le lui donner. « Aidez-vous de cela. » A croire que de se retrouver face à un ennemi commun pouvait souder durant un bref moment deux personnes.

Ça grouille de rats !

De prédateur. J'étais devenue proie. Sensation étrange qu'était cette dernière, car jamais, ô grand jamais, je n'avais accepté de tomber à une place aussi faible dans la hiérarchie. En effet, je m'étais toujours battue pour avoir le dessus et ainsi perdurer. Agissant bien souvent comme un homme, ce qui m'avait permis de ne pas devenir la victime des plus forts. Et pourtant...J'étais devenue en un rien de temps la proie de créatures bien plus petite que moi...Des rats. Tout autour de mes pieds ils se trouvaient, semblant vouloir me dévorer vivante, se piétinant les uns sur les autres pour pouvoir être le premier à goutter a de la chair humaine. Et ainsi, face à cette armée de rat, un sentiment depuis bien longtemps oublié vint s'animer au fond de moi : la crainte, mais plus encore, la peur. Je bougeais dans tous les sens pour essayer de les repousser, jurait, mais rien n'y faisait. Ils semblaient venir en masse, pareil à un flot inépuisable. J'étais tellement obnubilée par ces rats carnivores, que les propos de Robert ne parvinrent à mes oreilles. Paroles que j'aurais certainement brisées si j'en avais eu la possibilité.

Au bout d'un certain temps, j'eus enfin l'idée de soulever légèrement ma robe pour attraper la dague et le poignard que j'avais emporté avec moi, accrochés à mes chevilles. Toute en maudissant les rats et en priant pour qu'ils partent, je me mis à les poignarder un par un. Mais même là, ils semblaient perdurer, comme si lorsque j'en tuais un, trois autres venaient prendre sa place. Soudainement, une morsure se fit sentir. Violente. Puissante. Comme si le rat avait voulu m'arracher une partie de ma peau lors de sa morsure, mais sa mâchoire était bien trop petite pour pouvoir me l'enlever de cette façon. Un cri aigu s'échappa alors de mes lèvres. Cri qui donnait l'impression que je n'étais autre qu'une fillette apeurer parce qui est en train de lui arriver. J'étais redevenue une fillette. Criant de désespoir et de terreur. Frappant dans le vide pour pouvoir éloigner mes vives craintes.

La supplication de Robert me ramena à la réalité. J'avais oublié pendant un instant que Robert était lui aussi aux prises de ces créatures poilus et que contrairement à moi, ne savait pas forcement se servir du poignard que je lui avais donné. En effet, je m'étais tellement plongé dans mon combat intérieur avec ma crainte, et dans mon combat extérieur avec nos petits compagnons, que j'avais oublié tout le reste. En temps normal, je lui aurais dit de se débrouiller, qu'il n'avait cas mourir dévorer par ces rats. Mais pas là... En courant je m'éloignais de sa cellule et de ces rats, sans vraiment lui dire ce que je comptais faire, peut-être croyait-il que je l'abandonnais à son triste sors. Mais non, je courais dans la Tour, cherchant désespérément un garde. Finalement, j'en vis un, celui qui m'avait laissé entrer voir Robert et qui se chargeait des clés des cellules. A bout de souffle je parvins à lui dire ces quelques mots. « S'il...vous...plait....Aidez-nous....Des....Rats... » Incrédule, il me regardait, cherchant à comprendre ce que je cherchais à lui dire. Sa réponse prenant trop de temps, j'attrapais les clés qu'il gardait et me précipitait dans les couloirs.

Derrière moi, le garde vociférait, cherchant à m'attraper pour me faire comprendre que cela ne se faisait pas et que c'était trahison que de vouloir libérer un prisonnier. Mais je ne pouvais faire autrement. Je ne pouvais le laisser tout seul là-bas, et ce, même si c'était un ennemi. Arrivé devant sa cellule, un nouveau cri s'échappa de mes lèvres, car lorsqu'ils me virent arrivés, les rats vinrent à ma rencontre. Faisant abstraction de cela. Je cherchais frénétiquement la clé qui parviendrait à ouvrir sa cellule. Je la trouvais après plusieurs secondes qui me parurent une éternité. Je plaçais alors la clé dans la serrure, la tournant en grimaçant à cause de ces pattes qui semblaient vagabonder sur mon corps, et enfin, poussant la porte de la cellule, laissant ainsi à Robert la possibilité de sortir. « Mademoiselle ! Vous n'avez pas le droit de.... Mais... Que sont ces... choses ? » Le garde m'avait rattrapé, suivi de plusieurs autres garde. Des propos exclamatifs sortirent de leurs lèvres, car ils étaient abasourdit par tous les rats qui se tenaient sur le sol. Je lançais alors à l'un des gardes la clé de la cellule pour bien lui montrer que je l'avais prise à cause d'un cas d'extrême urgence et non pour faire s'évader un prisonnier. La gorge serrée je posais mon regard sur Robert qui était dans un état pire que moi.

HRP:

Ça grouille de rats !

Après avoir ouvert la porte de la cellule où se trouvait Robert en compagnie d'un nombre impressionnant de rat, j'avais reculé contre le mur pour finalement toucher ce dernier et me laisser glisser comme une vulgaire larve. Aussi étonnant que cela puisse paraitre, j'étais épuisée. Epuisée d'avoir joué avec mes jambes pour que les rats ne montent pas. Epuisée d'avoir ensuite jonglé avec une lame pour les tuer, sans grand résultat. Epuisée d'avoir couru dans la Tour de Londres pour chercher un garde, ou plutôt les clés que ce dernier portait, et ainsi ouvrir la cellule. Epuisée, moi qui avais l'habitude de m'entraîner jour après jour. Non... ce n'était pas de l'épuisement, cela ne se pouvait, c'était juste une retombé brutale de l'adrénaline qui avait coulé en moi dès l'instant où j'avais vu ces rats. Une retombée qui avait eu pour effet de me couper toutes envies de rester debout, et plus encore de marcher. J'avais l'impression que je pourrais rester assise, contre le mur, face à la cellule que le jeune Lord, ainsi que les rats, venaient tout juste de quitter. Et pourtant, je ne pouvais rester indéfiniment à cet endroit. Après tout, il s'agit de la Tour de Londres, d'une prison, et non pas d'une auberge pour se reposer.

Tandis que je reprenais mon souffle, je posais mon regard sur Robert, qui se trouvait allongé sur le ventre, depuis que l'un des soldats l'avait tiré jusqu'à cet endroit, et qui semblait encore plus chamboulé que moi, ce qui pouvait parfaitement se comprendre. Après tout, il avait été plus victime des rats que moi, et se pouvait se voir au niveau de ses mains où se trouvaient des traces de morsures. Une respiration, et j'ouvris la bouche pour parler « Tu... Vous allez mieux ? » Autrement dit : votre état moral va mieux maintenant que vous êtes certain de ne plus finir dévorer par des rats ? Je l'avoue, je n'étais pas très doué pour m'exprimer. J'étais plus habille à jongler avec des épées qu'avec des mots. D'autant moins doué pour m'exprimer gentiment avec un homme que j'avais haï jusqu'alors. En effet, depuis cet étrange épisode, quelque chose en moi m'avait soufflé que ce n'était pas lui le responsable du meurtre de mon père. Même s'il restait un Dudley, et donc un ennemi de la famille Wentworth, je ne pouvais m'empêcher de me dire que si nos vies avaient été différentes, nous nous serions certainement appréciés. Après tout, nous étions pas mal complémentaires. Une catholique, un protestant. Une guerrière, un poète.

HRP:

Spoiler:

Ça grouille de rats !

« Ma chère, ces nobles sont si trouillards que des petits rats suffisent à les rendre au silence. Quoique ce soit une bonne nouvelle parce que cela parle trop généralement ... Bon, je reviens. Ils font quoi eux encore ? » A ces mots, je fronçais légèrement les sourcils, car sans s'en rendre compte, ce garde avait insulté mon propre milieu, et ainsi ma propre personne. Sans s'en rendre compte, en effet, puisqu'ainsi vêtue je donnais plus l'air d'être une paysanne qu'une grande dame. Lentement, je ravalais alors ma colère, l'enferment au plus profond de moi car si je venais à exploser, je risquais fort de me retrouver dans la cellule adjacente à Robert. Ce qui n'était bien évidemment pas mon plus grand rêve... Au contraire ! Je savais fort bien que si je venais à être ainsi enfermé, pareille à un animal, j'aurais tôt fait de devenir folle, car moi il me faut ma liberté de mouvement, d'action, sans elle je suis perdue et je me mets lentement à dériver vers les coins sombres de mon esprit. Aussi fus-je ravie de voir que lorsque le garde s'éloigna, je ne m'étais pas jeté à sa gorge, l'une de mes dagues à la main. Après avoir eu cette petite satisfaction personnelle de ne pas l'avoir pris au quart de tour, je reposais mon regard sur un Robert qui venais à nouveau d'être mordu. Autant dire que c'était loin d'être sa veine aujourd'hui... « Je hais ces rats ! Je vais trrrrès bien ... Oui, très bien si vous voulez le savoir Isolde. Et non, je ne vais pas mourir à moins que cette blessure s'infecte ... Dommage non ? » Un léger rire s'échappa de mes lèvres, lorsque le ton agacé de Dudley parvient à mes oreilles. Certes, il n'avait pas réussi à trouver ses mots tantôt, face au garde, mais, il avait retrouvé là, tous ses mots armés. Pourquoi avais-je ris ? Tout simplement, car maintenant que nous avions vécu cet étrange et horrible aventure ensemble, je me voyais mal me réjouir de sa mort, même si cela, il ne pouvait en aucun cas le savoir. « Très dommage ! En effet... » Rétorquais-je sous le même style de ton sarcastique qu'il avait choisi de prendre pour répondre à ma question qui m'a fois n'avait pas été si méchante que cela, au contraire, elle avait pour une fois été gentille. Il faut croire que mon mauvais caractère à son égard, s'était quelque peu diminué, pour donner un caractère plus concilient, même si je n'enlevais en rien le mordant de mes phrases.

« Comment t'as fait pour faire entrer des rats ici eh ? T'as laissé de la nourriture traîner ? Si c'est une manière pour vous échapper Lord Dudley, sachez qu'elle a échoué. Tout le monde est sur un pied d'alerte. » Avec des yeux écarquillés, je regardais le garde, qui était arrivé ici sans vraiment s'annoncer et qui avait frappé Robert, pour une raison des plus obscures, car comment aurait-il pu vouloir amener une armée de rats ici qui aurait eu tôt fait de le dévorer vivant ? C'était complètement absurde ! Bien que j'avais réussi à me contrôler lors de sa première pique, je ne pu me résoudre à laisser passer cette attaque à l'égard d'un homme qui n'avait rien demandé. Aussi me levais-je, pour me placer face au garde, entre Robert et lui, comme pour protéger de mon corps le prisonnier. « Ce que vous dites est totalement aberrant lorsqu'on regarde de plus près l'état de ce Lord ! S'il avait voulu s'enfuir, il n'aurait certainement pas choisi une technique qui pourrait ainsi lui coûter la vie ! De plus, comment voulez-vous qu'il tente à s'échapper dans un pareil état ? Il ne parvint même pas à tenir sur ses jambes ! Sans compter que les coups que vous lui assenez le rendent d'autant plus incapable de bouger. Cet homme ne mérite pas des coups, mais une aide médicale. Essayez un peu de vous imaginer ce que viendrait à penser notre grande Reine si cet important prisonnier venait à mourir à cause de votre inaptitude de voir ce qui saute aux yeux ! » Mes yeux plongés dans ceux du garde semblaient lancer des éclaires, car j'étais là, on ne peut plus sérieuse. Certes, il s'agissait d'un Dudley, soit un membre de la famille que je détestais le plus, mais je n'allais pas pour autant laisser un stupide garde agir de cette manière avec lui. Il ne le méritait nullement. Personne ne le méritait.

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