Depuis cette fameuse chasse dans la forêt, je n'avais pas fait de sortie publique, du moins, pas vraiment à vrai dire, parce que je n'en voyais pas l'intérêt. Je continuais à m'entraîner avec mon épée, parce que je ne me voyais pas faire autre chose à présent. Mon but en venant ici était de convaincre la reine de se marier avec Philippe. C'était à présent chose faite, alors je devais prendre un peu de temps pour ma personne. J'essayais de séduire Jane, Jane Dormer car elle me plaisait mais les choses n'étaient pas aussi simple que je l'aurais voulu malheureusement. J'étais un peu pressé, mais en vérité, il me faudrait cultiver de la patience, beaucoup de patience même avant de faire quoique ce soit. J'étais à la cours de Whitehall pour encore un bout de temps, j'en avais bien peur. Cela ne me gênait pas plus que cela à vrai dire mais j'aurais aimé pouvoir revenir en Espagne le temps de quelques semaines. Mais ce n'était pas possible, ma présence ici était requise, je n'étais pas l'un des proches conseillers du roi pour rien du tout. Si jamais je lui disais que je m'en allais, cela pourrait être vu comme une trahison de sa part, et je n'avais nullement envie de subit les conséquences de cela, surtout que je n'en avais aucun intérêt à tirer.

Bref, nous étions en début d'après-midi en cette fin décembre 1554, il y avait de la neige, un peu, il faisait froid, et nous étions dehors. J'étais pour le moment assez seul, je n'avais nullement envie de faire l'aventurier sur la glace qui était là, parce qu'elle finirait pas craquer à un moment ou un autre et je n'avais pas envie d'être pris pour un imbécile à me retrouver sur celle-ci lorsqu'elle craquera. Je regardais donc, un peu de loin, ceux qui s'amusait sur cette glace. J'écoutais les bruits de couloirs à propos de la reine et du roi. Il y avait beaucoup de faux, mais un peu de vrai aussi. La reine était-elle véritablement enceinte ? Je n'en savais rien, elle était assez âgée pour cela alors elle pouvait l'être mais quel serait l'espérance de vie de l'enfant à venir ? Et qui nous dit que cela sera un héritier et non une jeune demoiselle ? Est ce que le couple royal allait bien ? Je n'avais pas de réponses à tout cela. Est ce que j'en désirais seulement une ? Je ne savais pas non plus, mais je me trouvais là, marchant dans le jardin à penser à tout cela avec de nombreuses autres personnes. Peut être qu'une solution sera trouver, peut être que des choses nous serons confirmées ou infirmée au contraire, c'était la surprise.

Comme je l'avais malheureusement supposé lors de cette chasse, il a été confirmé que la Reine Mary est enceinte de sa bouche même. C'est vrai que cela est des plus fâcheux pour la Compagnie si un enfant en bonne santé venait à naître, encore plus si c'est un garçon. Je pense que la pire chose qui puisse arriver soit que la Reine meurt en couches et qu'hypothétiquement, l'espagnol prenne le pouvoir au nom de l'enfant. Diantre ! Même une mainmise encore plus accrue de ce "cher" Gardiner sur le gouvernement serait plus enviable que la subordination de l'Angleterre à l'Espagne !

Enfin, advienne que pourra ! La Reine n'a pas encore accouché et bien des choses peuvent se produire lors des accouchements. Qui dit que Dieu n'a pas prévu de faire mourir l'enfant et la Reine pour permettre l'accession au trône de la Princesse Elizabeth ? Je ne devrais pas souhaiter de telles choses pour un être innocent comme le nourrisson pas encore né mais... Seigneur ! Pour l'Angleterre, cela est sans doute l'une des choses les plus souhaitables, je pense !

Doucement, je sors une de mes mains gantées de dessous ma cape fourrée rouge afin de voir des flocons se poser sur l'étoffe. Bien que Mary Tudor ait choisi de se reposer, nombre de personnes ont choisi d'affronter le froid pour profiter de cette neige. J'aurais préféré rester auprès d'une cheminée au feu crépitant mais il est vrai que de voir la neige tombée a quelque chose d'apaisant, bien que l'animation soit très présente autour de moi. A cause d'un léger coup de vent, je me décide de remettre prestement ma main dans la chaleur de ma cape et d'enfoncer mon nez dans l'écharpe de couleur rose que j'ai serré autour de ma capuche relevé de ma cape. J'aime beaucoup ce morceau d'étoffe, bien qu'il ne possède pas l'un de ses motifs à la mode, elle a l'immense avantage de pouvoir s'accorder avec beaucoup de chose.

En plissant les yeux, je tente de reconnaître une de mes connaissances parmi la foule rassemblée autour de ce lac gelé. Mais il est bien difficile pour moi de le faire, tant beaucoup de personnes ont les capuches de leur cape relevée.

La Reine était enceinte. C'était en tout cas ce que le tout-Londres déblatérait depuis un certain temps, et ce qui expliquait sans doute mon humeur plus détestable encore que d'habitude. S'il y avait bien une chose que j'avais redoutée, c'était celle-là... D'autant que je n'y avait jamais vraiment cru. J'y avais pensé en me disant que c'était la pire catastrophe qui pouvait arriver, après les noces de la Reine avec l'autre espagnol stupide, mais si on m'avait dit que cela arriverait bel et bien... J'eus un grognement maussade. Et comme si cela ne suffisait pas, voilà que mes chers collaborateurs de la Garde Royale m'avaient, comme je l'avais anticipé, mis sur cette affaire d'attentats. Le pactole à la clef était joli, je n'avais pas été long à accepter. Et voilà comment je m'étais retrouvé, en cet après-midi neigeux, dans les jardins de Whitehall Palace, au milieu de courtisans. Les flocons s'écroulaient comme une pluie de printemps, et il était difficile de distinguer les visages des uns et des autres, d'autant que la plupart avaient, comme moi, rabattu leurs capuches sur leurs traits pour se protéger du froid. J'étais entièrement vêtu de noir, comme à mon habitude, et me hâtais d'oublier que pour un peu, l'on pouvait me confondre avec un espagnol. Que quiconque ait l'audace de me prendre pour un de ces colonisateurs détestables ! Il en serait pour ses frais avant même d'avoir eu le temps de finir sa phrase. Non loin de moi, justement, je distinguais un des hommes de la suite de Philippe de Habsbourg, et presque aussitôt, une silhouette familière et une voix que je reconnus d'emblée... Lady Lavinia Tyburn. Qui parlait espagnol. Je ne comprenais pas un traître mot de son charabia, mais je sentis ma mâchoire se crisper, comme à chaque fois que les sons méditerranéens parvenaient à mes oreilles. D'autres personnes allaient et venaient, certaines que je connaissais de vue. J'avais l'habitude d'être une ombre, une de ces personnes que l'on n'entend pas, que l'on ne voit pas, qui frappait sans que quiconque s'y attende. Je savais qui était qui, même parmi les grands de ce monde, sans que l'on sache qui j'étais, moi. Ça faisait partie du métier.

La soeur du Duc de Devonshire, la veuve d'Edward Seymour, la Comtesse de Lancastre, et une des dames de Compagnie de la princesse Elizabeth. Sans oublier Lady Tyburn et l'espagnol avec qui elle avait engagé la discussion. Entre autres. S'il était difficile d'identifier les visages, je me repérais aux sons, aux voix, aux silhouettes que l'on distinguait sans trop de peine, malgré le mauvais temps. Lorsqu'on ne peut se fier à l'un de ses sens, on s'appuie sur les autres, c'était une leçon que j'avais rapidement apprise. En voyant quelqu'un glisser sur la glace du lac et s'échouer lamentablement par terre, j'eus un sourire moqueur. Quelle idée, aussi, de jouer les aventuriers de la sorte ! Ils étaient nombreux à s'y risquer, pourtant, malgré la chute quasi-systématique. L'humanité fonctionnait parfois de manière bien étrange... J'eus un soupir. L'après-midi promettait d'être long et pénible, mais je me souvins avoir eu la même réflexion lors de la joute... Et chacun savait comment les choses s'étaient terminées. Un nouvel attentat aurait-il lieu ici ? Serais-je à nouveau un témoin inerte, ou avais-je une chance de mettre la main sur ce terroriste ? Non que le sort du terroriste me pose un quelconque problème. C'était un protestant, à n'en point douter, sans doute s'opposait-il à l'alliance anglo-espagnole. Ce en quoi je ne pouvais absolument pas lui en vouloir. Mais en dépit de cette convergence d'opinions, si j'attrapais le responsable, je savais que je le traînerais aussi sec à John Herbert. La somme promise en échange était trop belle pour que je la laisse passer, tant pis pour le reste. Et en parlant d'argent, voilà que mon regard tomba sur une autre silhouette familière, celle d'Helen Bird. Contrairement à bien d'autres ici présent, donc je connaissais le nom mais à qui je n'avais jamais adressé la parole, la Comtesse d'Albermale tenait une place d'importance dans la liste de mes employeurs. Plus d'une fois, elle m'avait payé rubis sur l'ongle pour que je m'occupe du cas de ceux qui avaient sciemment oublié de la payer, ou ceux qui fouinaient d'un peu trop près. Jamais je n'avais eu à tuer, elle avait été formelle sur ce point, et n'était pas à une bourse d'or près pour acheter mon silence quant à sa Compagnie maritime... Qui ne devait pas tourner très fort, avec le rapprochement entre l'Angleterre et l'Empire de Charles Quint. Sans doute la grossesse de la Reine lui plaisait autant qu'à moi.

Pris d'une soudaine et incompréhensible volonté de sociabilité, et constatant qu'à priori, aucun terroriste ne ferait son apparition dans l'immédiat, je m'approchais de la Lady. "Bien le bonjour, Lady Bird," entamais-je sur le ton de la conversation, comme si nous avions l'habitude de nous fréquenter alors que ce n'était pas vraiment le cas. "Beau temps, n'est-ce-pas ? Enfin, en omettant la neige, le froid et les nuages." En somme, il faisait un temps de chien. "Vous êtes venue célébrer la prochaine naissance de l'héritier du trône, je suppose ?" Parfois, je me demandais si Ironie n'était pas mon second prénom.

Être mère. Je n’avais pas encore eu la chance de le devenir. Pas comme ma sœur. Je me réjouissais pour la Reine d’apprendre qu’elle allait pouvoir, enfin, chérir entre ses bras le futur héritier de la couronne. J’imaginais les désillusions de ma sœur face à ce petit catholique qui allait naître et ferait pâlir tous les protestants. Éloignant toujours un peu plus Elizabeth Tudor du pouvoir. Ce poids me pesait de plus en plus, lorsqu’on m’avait appris la nouvelle cela me mit encore plus devant la vérité : mon ventre restait stérile. Des femmes mouraient en couches. Des enfants en bas-âge. Le malheur s’abattait dans certains foyers à cause de cela et moi je me lamentais, évitant du regard mon ventre non fécond. Les remarques des autres me demandant, sans cesse, comment se faisait-il qu’un petit John Junior n’était toujours pas là… Encore un défaut que j’avais et une qualité que ma sœur avait. La vie était mal faite. Autrefois, le cygne aujourd’hui le vilain petit canard. Caitlyn voyait tout le mal que cela me faisait, étais-je maudite ? L’aînée contrainte et forcée de toujours passer en seconde position ? Deuxième à se marier, deuxième à avoir des enfants ? Mon esprit était torturé par toutes ses pensées qui me hantaient. Elle m’avait donc proposée de l’accompagner pour les festivités en l’honneur de la Reine, de son enfant à venir, de cette nouvelle qui réjouissait tous ses fidèles. J’avais accepté. Cela me changerait. Cela ferait enrager William de nous voir toutes les deux. Je n’y voyais que du bon.

Le lac gelé. Il faisait froid. La fourrure noire était de mise. Je reconnu les mèches blondes de l’inquiétante Helen Bird, cela faisait déjà un petit moment que je devais aller lui parler. Nous avions pris un mauvais départ toutes les deux et c’était regrettable. Nous allions faire partie de la même famille, elle et moi, je devais rectifier le tir pour éviter qu’Antanasya ai une nouvelle fois l’avantage ! « C’est vous la fiancée de mon frère n’est-ce pas ? Edward Heywood. » Un ton peu amicale comme à mon habitude mais, je me repris aussitôt, lui lançant un petit sourire. « Je suis très heureuse de vous voir rejoindre les Heywood. Je ne pouvais rêver meilleure promise pour mon frère. Votre cape est ravissante. Ravissante. » Mes paroles étaient sincères, j’avais quelques doutes au sujet d’Helen Bird mais elle respirait une grande force, une force que j’avais, on voyait que la Comtesse d’Albermale avait du caractère et ce n’était pas pour me déplaire. Ancienne protestante, aujourd’hui catholique, je taisais mes premiers aprioris j’avais promit à Edward d’apprendre à connaître cette fiancée qui selon ses dires pourraient devenir une de mes grandes amies. Je saluais Richard Ballantrae qui était à ses côtés. « Nous n’avons pas le plaisir de nous connaitre… » Je laissais ma phrase en suspend… « Veuillez m’excuser un court instant. »

Je m’étais précipitée vers Anne Stanhope. « Anne, je suis ravis de vous voir ici, vous avez l’air contrarié, quelque chose ne va pas ? Ce sont vos filles qui s’amusent là-bas ? Venez Anne, allons rejoindre les autres. Nous pourrons nous moquer des personnes qui tombent. » Je commençais déjà à pouffer de rire rien qu’à cette idée-là. Tel un petit chiot voulant jouer avec un plus vieux, je faisais preuve de beaucoup de fougue par rapport à Anne. Je faisais des grands signes aux enfants de ma très chère Anne que je trainais presque par le bras pour qu’elle rejoigne les autres. « J’irais peut-être les rejoindre moi aussi, ça donne envie de les voir ainsi s’amuser mais en attendant il me faut du champagne ! Fêtons l’arrivée de ce nouveau-né comme il se doit ! » Mes sourires étaient faux, ma joie de vivre un mensonge, si Anne était contrariée moi aussi je l’étais mais, c’était jour de fêtes aujourd’hui et je ne pouvais pas me permettre de faire mauvaise figure. Vu l’âge de Mary Tudor, peut-être que cet enfant serait le dernier ? Le seul unique et héritier. Il fallait en profiter. Partager les joies que la Reine devait ressentir, elle au moins, elle avait la chance d’être devenir mère. De porter un enfant dans ses bras. De le chérir et de l’aimer.

Contrairement à toute attente, je parviens à reconnaître dans la foule Mr Ballantrae. Ce brave homme est l'un de mes plus solides appuis quand il s'agit de faire taire les personnes bien trop fouineuse envers la Compagnie ou de recevoir mon argent. Cet argent se faisait bien moins présent que sous le règne précédant, même si je n'avais pas encore réduit mon train de vie, je ne pouvais plus me permettre de perdre de la monnaie inutilement. Autant dire que les tractations commerciales se faisaient de plus en plus rude à chaque nouvelle transaction. Toutefois, je reconnais être bien gênée de sa présence. J'ai toujours pris soin de séparer la Compagnie des affaires de Cour pour éviter des soupçons inutiles. Le voir donc m'approcher peut me mettre dans une situation fâcheuse. Je peux déjà sentir les regards de Lady Seymour que j'ai aperçu non loin. Elle n'a jamais apprécié que des personnes n'étant pas du même rang se fréquentent. Bien qu'elle soit une amie chère à mon coeur, je ne compte guère lui avouer la vérité concernant la relation entre Mr Ballantrae et moi-même mais plutôt lui avouer qu'il me sert d'escorte de temps à autre. J'espère que cela pourra suffire à la contenter pour ne pas qu'elle me prive de manière définitive de l'un des derniers vestiges de ma vie passée de femme mariée.

Néanmoins, au fur et à mesure que les mots sortent de la bouche de Mr Ballantrae, j'ai bien du mal à cacher mon sourire. Il est en effet guère difficile de comprendre le point de vue de l'homme même si on ne le connaît pas. Non pas que je compte le dénoncer, je partage moi-même son avis.

-Mr Ballantrae, salue-je à mon tour, voilà bien longtemps que nous nous sommes point vu.

Piètre mensonge puisque je fais plus que souvent appel à ces services ces temps-ci mais la Cour n'a pas besoin de le savoir.

-On ne peut donc rien vous cacher, monsieur ! Ris-je en me renfonçant un peu plus dans la protection de mon écharpe. A croire que c'est la nouvelle mode que de laisser le feu accueillant d'une cheminée apaisant les sens pour braver un froid vivifiant l'âme. Certaines modes sont incompréhensibles, vous ne trouvez pas ?

Le sourire qui accompagne ma phrase ne laisse planer aucun doute sur mon avis concernant cette fête. Pourquoi devrais-je cacher par des sous-entendus voilés que j'apprécie davantage ma cheminée que le froid ? Cela n'aurait aucun sens : quelle personne censée apprécie davantage le froid que la chaleur du soleil ?

-Toutefois, on ne peut que prier pour que la grossesse de Sa Majesté la Reine se déroule au mieux. Nombre de femmes, tant reine que simple paysanne, ont malheureusement péri lors des accouchements difficiles avec malheureusement leurs enfants.

Cette vérité est énoncée sur un ton neutre. Inutile de débattre longuement sur des possibilités qui ont aucune chance d'aboutir, cela serait alimenté des rumeurs souvent infondé. Le bruit court que le retrait de la Reine de la Cour serait du à la maladie et non une grossesse. Je n'en crois guère un mot : trop de signes ont été perceptibles depuis cette chasse pour que ce soit une maladie, sans compter l'obsession de la reine pour avoir un héritier... Non définitivement, ce ne sont que des rumeurs sans fondement.

Sur ces entre faits arrivent Lady Shéridan. Cette dernière me rappelle alors un autre de mes soucis actuels, à savoir les tractations avec la famille d'Heywood quant à un futur mariage avec eux. Même si l'idée est appuyée par la duchesse du Devonshire notamment, les fiançailles n'ont pas encore eu lieu en raison de l'enjeu de la Compagnie. Il m'est en effet tout simplement insupportable que je perde le contrôle même de la Compagnie et c'est pourquoi qu'avant toutes déclarations officielles, je me dois de discuter sur tous les points de l'éventuel contrat de mariage, n'en déplaise à l'éventuelle future belle-famille !

-Lady Shéridan ! Salue-je à mon tour. C'est un plaisir de vous voir, nous avons eu que trop peu d'occasion par le passé de nous rencontrer. J'ose espérer que cela n'en sera plus ainsi dans le futur. Toutefois, même s'il est vrai que votre frère et moi-même évoquions un éventuel avenir commun prochainement, rien n'a été officialisé. Vous comprenez, mon père se fait légèrement souffrant à cause de ses traumatismes et je n'ai guère le coeur à me concentrer sur cela.

Même si mon coeur se serre de remord face à un tel mensonge puisque j'ai reçu une missive me rapportant que mon père est dans une forme épatante, je ne veux guère hâtée les évènements qui arriveront bien assez rapidement, je pense.

-Je vous retourne le compliment Lady Shéridan ! Cette fourrure est très belle. Que diriez-vous d'aller faire les boutiques à l'occasion dans Londres ? Je suis certaine que nous parviendrons à échanger des adresses de boutiques que l'une et l'autre ne connaissions pas !

Cette phrase a été déclarée peu avant que la lady se dirige vers Lady Seymour pour la saluer. Tandis qu'elle s'éloigne, j'adresse de manière discrète, bien que légèrement autoritaire, ses mots à Mr Ballantrae :

-Monsieur, il est hors de question que nos réelles affaires soient connus, je tiens à ma tête. Si on vient à nous questionner quant à notre rencontre, disons que vous m'escortez à l'occasion quand je rends visite à mon père, le comte de Carlisle.

Prévenons tous risques, cela vaudra mieux pour nous deux !

Pour le moment, j'étais seul, du moins, je ne parlais avec personne dans ce jardin alors que de nombreuses personnes étaient là, certaines s'amusant sur le lac gelé, d'autres parlant simplement mais je n'étais proche de personne alors, je ne faisais rien de plus que de marcher parce que je devais me trouver ici, et non ailleurs. Les rumeurs étaient là, nombreuses, mais je ne savais rien de plus que cela, parce que je n'aime pas colporter ce genre de choses avant que ça ne soit véritablement certains. Je sais, je suis comme ça, mais c'est ce qui me semble le mieux à faire, vraiment surtout que cela concerne quand même directement mon ami le roi, alors je ne peux pas faire ce que je veux parce que les autres le font, j'ai une morale, et un peu plus de décence que cela. C'est alors que mon regard se posa sur une chevelure que je connaissais bien, qui durant un temps avait fait partie de ce que j'appréciais le plus dans ce monde, mais les choses changent, enfin, pas totalement, enfin, c'est assez difficile à dire, disons que c'est compliqué parce qu'il y avait à présent Jane Dormer dans l'équation, et puis, il y avait le jeune fils de Lavinia, je ne savais pas si j'étais véritablement prêt à être père, chaque chose en son temps alors avant de concevoir un enfant, je devais faire en sorte de me marier et de trouver la perle rare comme j'avais réussi à le faire pour mon ami Philippe qui allait être apparemment un heureux père de famille selon ce qui se disait dans le coin. En tout cas Lavinia m’interpella dans ma langue natale ce qui eut le don de me faire sourire. Je me retournais donc vers elle, lui faisant un petit baise main comme tout bon gentleman le ferrait.

" C'est également un plaisir de vous revoir Miss Tyburn. Vous aussi vous venez vous dégourdir un peu les jambes ? Ce lac gelé ne vous tente pas ? "

Moi, en tout cas, il ne me tentait pas le moins du monde. Si jamais je devais combattre pour mon pays et que cela était un obstacle inévitable, alors je le ferrais sans problème, je le savais clairement mais là, ce n'était pas quelques choses d'enviable alors je ne marcherais pas dessus pour tout l'or du monde. Je voyais une autre femme faire un petit sourire à Lavinia, peut être que nous devrions rejoindre tout le monde n'est ce pas ? Ce n'était pas que je n'appréciais pas la compagnie de la jeune femme mais peut être serait-il mieux pour tous de nous réunir en un seul point à proximité de ce lac ?

" Ne devrions-nous pas rejoindre les autres ? Il parait que nous sommes là pour une raison bien particulière. "

Mais je n'évoquais pas vraiment la raison. Elle n'était pas là par hasard, pour me parler simplement de la pluie et du beau temps ou de son enfant, du moins, je l'espérais. En tout cas, je m'avançais vers ce petit groupe composé de quelques personnes.

Debout aux côtés d'Helen Bird, j'avais une vue presque imprenable sur l'ensemble de la foule. La neige était toujours aussi drue, autant que pouvait l'être la pluie, sur nos contrées. Un instant, j'en vins à espérer que le froid soit si intense qu'il fasse fuir tous les espagnols du pays, mais en songeant qu'il ferait fuir aussi Luisa, je renonçais à l'idée. Et eut aussitôt un grognement discret : il valait mieux pour elle qu'elle fuie, qu'elle parte très loin de moi et de ma vie, elle n'avait pas besoins de dangers supplémentaires. Lorsque Lady Bird me fit remarquer que nous ne nous étions pas vus depuis longtemps, j'eus un sourire entendu... Qui s'élargit à sa remarque suivante. "Si l'on pouvait me cacher quoi que ce soit, je ne serais pas très doué dans mon travail," fis-je sans me départir de mon air réjoui. "Pour moi, toute mode est incompréhensible, je dois vous l'avouer. Mais je dois bien m'incliner devant celle-ci : c'est à cela que nous reconnaissons les fidèles sujets de Sa Majesté la Reine." La bonne blague. Si Mortimer m'entendait, il se serait étranglé de rire avec sa bière. Certes, je n'avais rien contre Mary Ière, au contraire, elle était Tudor et je lui devais le respect. Mon souci venait du fait qu'en plus d'être à moitié espagnole, il avait fallu qu'elle nous impose le Prince des abrutis comme Roi consort. Et qu'elle ruine, au passage, toute chance de l'Angleterre de recouvrer sa gloire d'antan. En nous mettant à la merci des Asturies, nous n'avions pas la moindre chance de constituer une plus puissante armée et une flotte digne de ce nom. Bientôt, seuls le Black Lantern et les navires de la Companie Shields seraient valables ; même le Mary Rose était à pleurer, car livré aux bons soins de nos amis espagnols. Très sincèrement, si un Coup d'Etat visant à mettre Jack Mortimer sur le trône venait à se fomenter, je n'hésiterais pas longtemps à le rejoindre. Et le marmot à naître n'arrangeait pas les choses, bien au contraire... "C'est ce que l'on dit, en effet," répondis-je à Lady Helen lorsqu'elle parla des accouchements difficiles que bien des femmes pouvaient connaître. Un instant, je songeais à ma mère et à tous les enfants qu'elle avait perdus, à Joane Barrow qui était dans le même cas et me rappelait terriblement la femme qui m'avait donné la vie, qui je n'avais plus revue depuis une décennie. Terrain glissant, mon gars, tu trouveras un autre moment pour y penser. En fait, l'idéal serait de ne plus y penser du tout. Mais j'avais beau essayer, je n'y arrivais pas tout à fait. "Reste à espérer que le lot commun de bien des femmes ne s'applique pas à notre souveraine." Nom d'un chien, ce soir, j'irais mettre un cierge à l'église pour que surtout, Dieu n'entende pas ma prière. Ou pour qu'il la prenne pour ce qu'elle était : du vent.

Sur ces entrefaites, voilà qu'arrive la flamboyante Comtesse de Lancastre, qui engage la discussion avec Lady Bird. Je me tiens en retrait, m'attendant à passer inaperçu, comme à mon habitude. Qui se soucie de l'ombre en noir qui ne dit mot ? Trop peu de gens, tant mieux pour moi, hélas pour eux. Je tends l'oreille toutefois, glanant toute information qui pourrait m'être utile... Mais lorsque ces dames commencent à parler chiffons, je renonce définitivement. A priori, Lady Sheridan ne m'apprendra rien que je souhaite savoir, sinon l'adresse de Dieu savait quel drapier, et une affaire concernant son frère et le potentiel mariage de Lady Helen. Comme je ne me soucie aucunement de la vie privée de mes employeurs, la dernière information m'est aussi inutile que la première. Laissant mon regard errer sur les autres visages, je vois les filles Seymour s'amuser sous le regard attentif de leur mère, et Lady Tyburn qui roucoule toujours avec l'espagnol. Diable, ou va le monde, si même elle se met à faire ami-ami avec eux ? Quoique, je ferais peut-être bien de ne pas trop l'ouvrir sur ce sujet, j'ai épousé une espagnole. Bourré comme un coing, certes, mais avec la bague au doigt. Bague que je ne portais presque jamais, soi-dit en passant. Lorsque Lady Sheridan s'adressa directement à moi, j'eus un léger mouvement de surprise. D'habitude, c'était moi qui m'adressait aux gens, pas l'inverse. Les gens ne me remarquaient pas. Ou quand ils s'adressaient à moi, ce n'était certainement pas pour me demander qui j'étais. "Non, en effet," répondis-je. Elle ne me connaissait pas, en savait même pas mon nom. Moi, en revanche, je connaissais le sien. Lady Sheridan était dans le même cas que bien d'autres personnes ici : je savais bien des choses sur eux tous, et eux tous ignoraient mon existence. "Mon nom est Richard Amesbury, je travaille pour la Garde Royale." La meilleure couverture qui soit. Et Amesbury était un des prête-noms que j'avais l'habitude d'utiliser lors de mes sorties au grand jour. Officiellement, Richard Amesbury était écuyer pour le compte de la Garde. La Comtesse s'éloigne en direction de la Duchesse de Somerset ; et j'approuve les directives d'Helen Bird.

"Il n'est pas rare qu'un homme de la Garde Royale accompagne une Lady en détresse, n'est ce pas ?" Souris-je, sachant fort bien que Lady Helen est tout sauf une demoiselle en détresse. "Je tiens aussi à ma tête, madame" - et à celle de ma femme, accessoirement - "peut-être n'avons nous pas les mêmes ennemis" - quoique, depuis l'arrivée des espagnols, ce n'est pas tout à fait certain - "mais je puis vous assurer que les miens ne seront pas en reste non plus. J'approuve totalement votre prudence. Est-il vrai que votre père est mal en point ?" Je n'étais pas foncièrement altruiste, mais si je pouvais éviter de raconter n'importe quoi au sujet du Comte de Carlisle et compromettre ma couverture, ce serait nettement mieux. Après tout, ni Lady Bird ni moi-même ne tenions à perdre au change.

Il faisait froid, certes mais je ne le craignais pas trop, du moins, quand j'étais en situation de combat, parce que j'avais eu l'occasion de combattre par des températures très basses, pourtant, j'avais le sang chaud, celui de l'Espagne. En vérité, je détestais le temps par ici, il n'y avait pas assez de soleil de ce que j'avais pu voir depuis presque une année déjà. Le temps passe incroyablement vite, je m'en rends compte chaque jour mais je fais avec. Aujourd'hui comme il y avait du monde dehors et qu'on racontait des choses, j'étais là. Le lac gelé ne me tentait pas le moins du monde, je n'avais pas envie de passer à travers la glace qui devait être bien fine par endroit même si les températures n'étaient guère clémentes. Je demandais donc à la jeune femme si le lac ne la tentait pas, mais apparemment ce n'était pas le cas du tout. Elle me dit que non, surtout avec son fils qui était encore bien jeune, alors je comprenais parfaitement ce qu'elle voulait dire même si je n'étais pas encore père, je n'étais pas encore marié à vrai dire. Lavinia faisait pour ainsi dire partie de ces prétendantes à mon coeur, peut être qu'elle arriverait à le faire chavirer mais pour le moment, une parmi toutes avec un doigts d'avance pour ainsi dire et ce n'était pas la jeune femme que j'avais à mes côtés. Pourtant, je n'avais pas encore fait mon choix, je n'avais pas dit oui à Jane, je n'avais pas dit non à Lavinia, mais mon coeur était partagé, je me laissais le temps de choisir correctement. M'ayant répondu clairement, je lui proposais de rejoindre un petit groupe plutôt que de rester essentiellement tout les deux bien que sa compagnie ne me déplaisent nullement. Elle semblait étonnée de cette annonce que je lui disais, peut être n'avait-elle pas eu vent du bébé royal trop obnubilée par son propre fils ? C'était une possibilité, en tout cas, nous allions donc rejoindre les autres.

Pourtant, je n'eus pas le temps de véritablement le faire que des cris se firent entendre, le lac gelé ne l'était pas tant que ça et des gens étaient en train de tomber dans l'eau, non plus sur la glace. Je voyais des regards désespérés, d'autres amusés, d'autres encore plus grave que je ne l'aurais imaginé. Mais je ne vis que les visages en détresse et les corps qui semblaient s'enfoncer dans l'eau qui devaient être très froides. Les chances de survie de ceux et celles qui étaient tombés dans l'eau n'étaient pas très grandes. Ils n'avaient que quelques minutes. Sans réfléchir plus que ça, j'enlevais sur moi, ce qui représentait un poids trop lourds et je m'aventurais doucement sur les morceaux de glace qui étaient encore là, tenant le coup, tenant le poids de mon corps. Je ne plongeais pas encore dans l'eau, mais s'il y en avait besoin, je le ferrais. Je mettais mes deux mains dans l'eau sortant dans un premier temps une jeune demoiselle que je ne connaissais pas spécialement. Elle était assez légère pour que je la tire à bout de bras sur la berge. J'espérais que quelqu'un, sa mère si elle n'était pas dans l'eau s'occupe d'elle et trouve des couvertures afin de la réchauffer. Puis je réussis à prendre une main d'adulte, une main qui venait de lâcher prise, la jeune femme commençait à s'enfoncer. Je la maintenais aux abords de la surface, mais sa tête était encore sous l'eau. Je tirais de toutes mes forces pour que sa tête émerge le plus rapidement possible afin qu'elle puisse respirer même si le froid lui contracterait sans doute la poitrine dans cette eau gelée. Je ne pourrais pas sauver tout le monde, j'en avais bien peur, mais si je pouvais sauver le maximum de personne, ce serait bien.

Les remarques de Richard ont le don de m'amener un sourire non voulu sur mes lèvres. Décidément, je ne pouvais m'empêcher d'être en total adéquation avec l'avis de l'homme. La comédie qu'on est des fois amené à jouer peut bien finir à amuser les acteurs de celles-ci, non ?

-Vous avez raison, Mr Ballantrae. Sa Majesté la Reine est bien plus résistante qu'il n'y paraît. Prions Dieu pour qu'il exauce notre souhait !

Ma phrase pouvait être pris dans le sens qui arrange le plus mon interlocuteur à savoir maintenir l'idée que je suis une bonne catholique ou si je suis une protestante cachée qui attend avec angoisse l'issu de la grossesse royale. Je n'ai toutefois guère de crainte concernant le fait que l'homme saura entendre ce que je veux qu'il entende.

Seulement cette conversation plein d'esprit est interrompue par l'arrivée de Lady Shéridan. Si sa question concernant un futur mariage de ma part avec mon frère m'irrite au plus haut point, je ne peux que comprendre sa volonté que nous ayons une relation des plus cordiales dans l'avenir. Cela ne change tout de même rien dans le fait que je ne veux guère voir intervenir d'autres personnes dans mon mariage éventuel sous quelques prétextes !

-A la condition que je puisse vous appeler Héléna, très chère ! Déclare-je avec un sourire en lui donnant la permission de l'appeler par mon prénom. J'éprouve une grande hâte à vous appeler également ma soeur, seulement, comprenez-moi... Je ne veux guère me montrer trop enthousiaste à cette idée si c'est pour voir mes espoirs d'alliance avec votre famille ruinée. Néanmoins, sachez que, quoi qu'il advienne, je serais ravie de vous compter parmi mes amies, quand bien même ne pourrais-je vous appeler ma soeur.

Si mon père m'entendait, il n'aurait eu surement de cesse de ricaner. Moi, impatiente d'une nouvelle union ? Cela va faire des semaines que mon père rêve que j'accepte la demande en mariage d'un cousin pour que le titre de mon feu époux perdure dans la famille. Mais il est vrai que, quitte à m'engager dans un nouveau mariage, autant bien choisir sa nouvelle parenté. Il faut donc dire qu'un mariage avec les Heywood aurait de ce côté cet immense avantage d'être des gens cultivés et raffinés à l'instar d'Héléna, à contrario de ce James qui ne pense qu'à se curer le nez en public. Non, décidément Père, je ne peux me marier avec un tel abruti !

Avec l'éloignement de la comtesse en direction de Lady Seymour, je peux m'en profiter de mettre au point une stratégie commune avec Mr Ballantrae. Il aurait été fâcheux pour nos deux têtes si nous sommes pas au diapason dans nos propos.

-N'ayez crainte, Mr Amesbury, dis-je en utilisant son nom d'emprunt, mon père se porte comme un jeune homme, à ceci près qu'il peine à enfiler sans l'aide de notre servante sa chemise les matins. Je ne veux seulement guère que d'autres personnes que Lord Heywood ou moi-même ayons à dire quelques chose sur la tenue d'un éventuel mariage.

A cet aveux, ma mine devient sombre. Inutile de s'attarder davantage sur une éventualité qui va bientôt avoir lieu.

-Et puis, il est vrai que nous, pauvres femmes faibles, sommes toujours ravies d'être en présence d'un garde si compétent pour notre sécurité !

Ces mots sont prononcés alors que je vois Lady Seymour se diriger vers nous dans le but très certainement de me saluer.

-Lady Seymour ! La joie est partagée de vous voir également ! Nos rencontres sont que trop éphémères pour ne pas apprécier celle-ci ! Salue-je sincèrement. Vos enfants sont-ils bien portants ?

Ma demande n'était pas feinte d'un quelconque intérêt pervers. J'ai toujours eu une profonde affection pour les enfants de la Lady me faisant face, même si, je dois l'admettre, je me sens plus proche de certains que d'autres.

-La personne qui m'accompagne est Richard Amesbury. Il est membre de la garde royale. Dis-je en présentant Ballantrae sans qu'on puisse deviner que c'est un mensonge convenu entre nous. Mr Amesbury a eu la gentillesse de mettre à mon service ses qualités exceptionnelles pour assurer ma protection ce jour. Sa présence à mes côtés a le don de tranquilliser le moindre de mes soucis concernant ma sécurité qui sont déjà quasiment inexistant face à l'attention de notre souveraine pour notre bien-être.

Je ne peux que prier Dieu pour que mon jeu d'acteur soit parfait... Néanmoins, je ne me fais pas de soucis à ce sujet : n'y a-t-il pas une grande part de vérité dans le fait que Mr Ballantrae a le don de véritablement tranquilliser mes angoisses concernant d'éventuels dangers pour la Compagnie ?

Seulement, nos discussions insouciantes sont soudain interrompus par un affolement autour de nous. Perplexe face à ce qui se passe, je mets du temps avant de comprendre la scène. Lorsque l'explication me parvient, je manque de jurer de manière plus qu'inconvenante pour une lady. Dieu ! Je savais que j'aurais du rester auprès de ma cheminée aujourd'hui ! Sans demander mon reste, je me précipite sur la rive pour ne pas ne me retrouver piéger sous la glace, chose que je parviens à faire.

Toutefois, en me retournant, je vois Héléna et Margaret, une des filles de Lady Seymour, disparaître sous la glace. Je pouffe un cri d'effroi qui n'est pas feint. Rebroussant chemin, j'arrive à la hauteur d'un homme qui s'est précipité pour les aider à sortir. Margaret est la première à sortir. Dès que celle-ci est sortie, je soupire de soulagement, certaine que sa mère ne tardera guère à la réchauffer. Néanmoins, celui qui tente de sortir Héléna de l'eau semble éprouver bien des difficultés à le faire.

-Richard, allez l'aider, je vous en prie ! Ordonne-je avec un ton désespéré.

En cet instant, je me sens plus qu'impuissante face à la situation. Pourvu que Lady Shéridan s'en sorte !

La seule réaction que j'eus à la réponse d'Helen Bird fut un grand sourire largement entendu. Qu'y avait-il de plus à ajouter ? Nous avions déjà tout dit, restait maintenant à prier pour "que Dieu exerce notre souhait," comme l'avait si bien dit Lady Bird. Sur ledit souhait, mon interlocutrice et moi-même étions en parfait accord, au moins n'était-ce pas pour nous un dialogue de sourds. Je commençais vraiment à me demander s'il ne serait pas temps pour moi de fréquenter les Eglises à un autre dessein que celui de l'annulation de mon mariage... Prier pour que Mary Tudor ne mette jamais son petit Habsbourg au monde me semblait de moins en moins absurde. Mes raisons d'espérer n'étaient toutefois pas les mêmes que mon employeuse, quoique elle ne l'ait jamais ouvertement évoqué depuis le couronnement de Mary Ière. Pour moi, seul un Tudor pouvait prétendre régner sur l'Angleterre, peu m'importait son bord religieux, puisque moi même n'en avait pas. Jane Grey ne s'appelait pas Tudor, elle n'avait pas sa place sur le trône de Saint Edward. Mary, si. Sa soeur Elizabeth aussi. Par contre, le rejeton aux trois-quarts espagnols avait encore moins sa place que la gamine Grey. Au moins celle-ci était une véritable anglaise... Un Habsbourg, le petit-fils de Charles Quint et fils du Prince - futur roi - d'Espagne, sur le trône d'Angleterre ? Plutôt crever dix fois, les gars ! Quant à Lady Bird, je ne pouvais que deviner qu'elle penchait du côté protestant. Je n'avais aucune preuve et ne cherchais pas à en avoir la moindre, elle payait trop bien pour que je songe un seul instant à me débarrasser du contrat, mais le simple fait de marchander avec Mortimer pour couper court au commerce espagnol en disait long. Alors que Lady Helen engageait la discussion avec la Comtesse de Lancastre, conversation qui glissa rapidement vers des histoires de mariage qui ne me concernaient en rien, je détaillais l'ensemble de la scène qui se jouait autour de nous.

Anodin, en apparence. Il semblait que notre protestant pyromane ne soit pas déterminé à venir se montrer aujourd'hui, si j'en croyais l'ambiance visiblement joyeuse et pleine d'allégresse qui régnait sur les jardins en dépit du froid. Mais rien n'avait prévu qu'il vienne lors de la joute non plus, c'était pourquoi je devais me montrer vigilent. J'ignorais qui je cherchais au juste - après tout, la personne responsable de l'attentat ne se promenait pas partout avec une pancarte indiquant "je suis le terroriste réformateur, attrapez-moi !" - mais plus je faisais preuve d'attention, mieux ce serait. Tout compte faits, je n'aurais sans doute aucune chance de coffrer aujourd'hui l'amateur de poudre. Depuis le temps que j'étais dans le milieu, j'avais fini par comprendre qu'avant de pêcher le poisson, on se renseigne sur lui. Son habitat, son mode de vie, ses fréquentations, sa personne. Les poissons ont tous, forcément, des faiblesses, c'était le propre des poissons. S'il faisait son apparition aujourd'hui, il y aurait des blessés, des morts peut-être, mais il ne compterait ni parmi les uns ni parmi les autres. Pour moi, ce serait surtout la première étape dans ma recherche, ma traque, appelez ça comme vous le voudrez, ma pêche au terroriste. La somme d'argent promise en attirait plus d'un, moi en tête, et la Garde était trop scrupuleuse pour ne pas la verser ne serait-ce qu'à un centime près. Lady Sheridan partie, Helen et moi nous mettons d'accord sur l'attitude à adopter, histoire de ne pas être immédiatement sur la ligne de mire. "Entendu," répondis-je en apprenant l'état de santé, somme toute pas si désastreux, du père de Lady Helen. "Si j'envisage une reconversion professionnelle," fis-je avec ironie en réaction à sa dernière phrase, "je m'en irais vers la Garde Royale !" Rien que pour voir la tête que ferait Mortimer s'il me voyait apparaître avec l'armure des Gardes, ça valait le coup de l'envisager. Et parce-qu'une Lady en cache toujours une autre, voilà que mon employeuse - officielle et officieuse, quoique les affaires ne soient pas les mêmes d'un côté et de l'autre - reçoit une autre visite. Et non des moindres : Anne Seymour, duchesse de Somerset.

Son sourire était impayable, et je fus pris d'une brusque envie de rire en entendant ses paroles. Ce qu'elle devait imaginer était non seulement à mille lieues de la réalité, mais me semblait tellement absurde qu'il en était risible. Je regrettais - une fois n'est pas coutume - de ne pas avoir pris mon alliance. La duchesse aurait eu de quoi jaser pour les trois prochaines semaines. Entre le sourire d'Anne Seymour et les paroles d'Helen, je me vois vraiment obligé de me mordre l'intérieur de la joue pour ne pas éclater de rire. Quant je pense que l'Eglise excommunie les comédiens ! Qu'ils viennent voir un peur par ici à quoi ressemble le vrai théâtre ! D'ailleurs, je ne suis pas en reste : alors que ces dames parlent enfants - après avoir parlé fourrures et mariage, parfois ce sont vraiment toutes les mêmes - je me fonds dans l'ombre et continue de détailler les lieux, indifférent au bavardages des deux Ladies, comme tout bon soldat le serait. Le sinistre craquement de la glace interrompt tout, et les rires se changent en cris. Helen a le même réflexe que moi, celui de reculer vers la rive, mais Anne Seymour semble bien se moquer des dangers, puisque au lieu de se mettre en sécurité, la voilà qui se jette vers le lac en criant comme une hystérique et en écartant violemment de sa route quiconque avait le malheur de s'y trouver. Et Edward Seymour a passé vingt ans avec elle ? Diantre, il devrait être canonisé ! Quoique, la voyant serrer sa fille dans ses bras, je songeais qu'elle avait agi en mère avant tout. Resté sur le bord, je tentais de voir qui faisait quoi, qui était où. Avec toute cette panique, chacun s'agitait en tous sens. Au moins avais-je la certitude que le pyromane des joutes n'y était pour rien dans tout cela. C'est la voix d'Helen Bird qui coupa court à mes pensées : "Richard, allez l'aider, je vous en prie !"

Aider qui ? En moins d'une demi-seconde, je suivis le regard de Lady Helen et tombais sur la silhouette immergée de la Comtesse de Lancastre. L'Espagnol de tout à l'heure est déjà sur place, mais entre le froid intense de la glace et le poids des vêtements gorgés d'eau, la tâche est loin d'être accomplie. J'ai bien envie de répliquer que généralement, je ne sauve pas les gens, je préfère les conduire à la potence, mais la panique se lit sur le visage de mon employeuse, et je songe qu'après tout, après avoir aidé Marguerite de Bourbon lors de la joute, je pouvais bien tenter quelque chose pour Héléna Sheridan. "Voyez si vous pouvez appeler un homme de la Garde pour nous aider," fis-je à Lady Bird avant de partir en direction de l'Espagnol et de la Comtesse immergée. Ils n'étaient, somme toute, pas bien loin, et les rejoindre ne fut pas long, même si les courses et les bousculades, doublées de la glace qui continuait à se briser, ne rendaient pas la chose aisée. J'arrivais assez vite non loin d'Anne Seymour, auprès de l'Espagnol qui essayait tant bien que mal de sortir Lady Sheridan du lac. "A nous deux, on devrait y arriver, non ?" lui lançais-je sans autre forme de cérémonie - ne m'en demandez pas trop quand même, je n'allais pas faire de manières devant un espagnol - avant de m'agenouiller et d’attraper le bras de la jeune femme pour la hisser, de concert avec l'autre homme, vers la surface. Si j'avais su que je ferais un semblant d'équipe avec un espagnol...

Frigorifiée. En état de choc. J’étais blanche comme si j’étais déjà morte. Je voyais la surface. Une ombre, peut-être plusieurs. Des bras dans l’eau glacée. J’étais pétrifiée. De peur. De froid. Je ne sentais plus mes jambes. Je voulais attraper leurs mains mais, je ne pouvais pas. J’y pensais de toutes mes forces, de tout mon être. ‘’Héléna, ressaisis-toi’’ ‘’Reprends toi’’ J’ignorais depuis combien de temps, je coulais et pourtant une foule de question m’était passée par la tête, toute ma vie avait défilé devant mes yeux en une fraction de secondes. Dehors, c’était la panique. Margaret semblait être sauve et je sentais au plus profond de moi une certaine satisfaction d’avoir sauvé une vie. J’entendais des échos au loin, des bruits sourds que je ne reconnaissais pas. Des bouts de glace tombaient encore. Je sombrais dans cette eau glacée. Je ne méritais pas de vivre. La vie avait malgré-tout voulu me sauver. Une main m’attrapa le poignet alors que je commençais à perdre connaissance. Je suffoquais. J’étais un poids mort, je devais peser deux fois plus qu’à l’accoutumer. Je ne respirais plus. Les secondes me paraissaient être des minutes, les minutes des heures.

D’un coup, je sentis le froid me glaçait le visage. Une fine brise touchait mon visage. J’entendais les cris, les sanglots, les pleurs. La panique avait envahi le lac gelé. Il ne restait que peu de personnes sur le lac à présent. Je voyais au loin des flammes et des personnes qui couraient dans tous les sens. Je ne comprenais pas. J’étais assise, la tête baissée sur la glace. Gomez et Richard à mes côtés. Ma voix était figée. Les mots restaient bloquer dans ma gorge. Tous mes membres tremblaient, je claquais des dents. J’étais trempée jusqu’aux os. Je relevais doucement le regard vers mes deux sauveurs. Anne était là avec Margaret, son visage faisait peur. Elle avait du paniquer pour ses filles.
« On… on s’en va ? » dis-je d’une toute petite voix telle une enfant de cinq ans qui venait de tomber dans un puits. Je n’étais pas blessée, juste énormément secouée et chamboulée. Je ne me rendais pas compte ce qu’il se passait. Je m’appuyais sur Gomez et Richard pour pouvoir me relever et sortir de cet enfer. J’étais traumatisée. Je lançais un regard dans l’eau glacée que je venais de quitter. J’avais beaucoup de chance et si je pouvais être encore là aujourd’hui, c’était grâce à eux. « Merci… » lançais-je doucement aux deux hommes à mes côtés. Je ne pouvais pas en dire plus, j’étais épuisée. Je n’avais même plus la force de parler, je les remercierais plus tard.

Je regardais Anne, je sentais des larmes glissées le long de ma joue. C’était trop d’émotions pour moi, je voulais rentrer. Je voyais Helen au loin l’air paniqué, nous étions encore loin d’elle et je craignais que la glace se casse un peu plus sous nos pieds. Je me rendais compte des risques qu’ils avaient pris pour moi. Ils auraient du me laisser me noyer. Mes ennemis auraient été débarrassés de moi. Le monde n’aurait tourné que mieux. Je regardais les deux hommes d’un air interrogateur, un regard qui voulait dire ‘’ comment allons-nous faire pour sortir de là ?’’ Ils étaient des gentlemen et je n’oublierais jamais ce qu’ils ont fait pour moi. Je me relevais difficilement, je voulais sortir de là et retrouver enfin la terre ferme. Je me demandais ce qu’il fallait faire pour trouver enfin le bonheur ? Le toucher du bout des doigts pendant un instant avant que la vie vous l’arrache sans crier garde.

Pour mon plus grand soulagement, je peux voir Mr Ballantrae allait aider à sauver Héléna. L'angoisse tord mes entrailles à l'idée qu'elle puisse perdre la vie. Quand je vois la tête de la jeune femme émergée du lac, je relâche mon souffle que je n'ai pas remarqué avoir retenu durant tout ce temps. Oh seigneur, merci ! Merci d'avoir pire le sauvetage d'Héléna !

L'inquiétude pour le moment en partie dissipée, je n'ai pas pu m'empêcher de froncer les sourcils en apercevant à nouveau l'homme qui s'est porté au secours de la fille de Lady Anne et de la comtesse. Son visage m'est connu, j'en suis certaine mais où pourrais-je l'avoir vu auparavant ? Ce manque d'information m'aurait surement agacé en temps normal. Toutefois, ce n'est pour le moment que le cadet de mes soucis. Je me sens bien plus inquiète pour la comtesse et la jeune fille qu'on vient de repêcher à l'eau.

Me tenant sur la rive enneigée, ce n'est que par une grande volonté que je ne m'élance pas vers le groupe pour m'enquérir de leur santé. La glace est fragile et qui sait combien de temps elle pourra tenir.

-Lady Seymour, Héléna, Messieurs ! Finis-je par crier d'impatience à cause de mon inactivité. Regagnez la rive pour me rejoindre avant que la glace ne se brise davantage, je vous en conjure !

Ce ne fut que lorsqu'ils arrivèrent à mes côtés que je me permis de me détendre un peu. Le danger est en partie écarté, ils ne risquent plus de mourir noyer dans ce lac gelé, même si le froid pourrait se montrer encore fatal. Malgré le froid, je n'hésite guère longtemps avant d'ôter la cape humide d'Héléna pour la remplacer par la mienne, sec, sur ses épaules. Mon étoffe la protégera bien plus du froid que la sienne.

-Venez, Héléna, il faut nous hâter de vous trouver une place auprès d'un feu en compagnie de Margaret. Dis-je en l'aidant à marcher à travers la neige. N'ayez crainte, je reste à vos côtés.

Mes dernières paroles à son égard se veut les plus rassurantes possibles. Même si je nourris à son égard une certaine méfiance à cause de ces questions se rapportant un peu à la compagnie, je lui apporte tout mon soutien dans cette épreuve qui a failli lui couté la vie. A cause de cela, je ne peux que prier pour que la Reine se montre intransigeante envers les coupables. Ce n'est plus une question de religion, il s'agit simplement que la justice soit rendue.

Quoiqu'il en soit, je tâcherais de faire payer à Mr Ballantrae une boisson, en remerciement de son aide pour sauver cette dame. Ce ne me semble pas inapproprié : après tout, il aurait très bien pu refuser la tâche que je lui demandais pour sauver sa propre vie !

Dès que la glace avait cédé sous le poids de la jeune femme, je n'avais pas réfléchi me rendant vers elle pour la sauver, pour l'aider à ne pas mourir. J'étais un preux chevalier et je devais le prouver aux yeux de tout ceux qui étaient présent, même si je ne le faisais nullement pour en retirer une quelconque gloire, ce n'était pas mon genre. J'étais un homme d'honneur, fait pour servir sa patrie, ou pour sauver des gens, peu importe ce qui pourrait m'en coûter. Je ne m'étais pas embarrassé de cérémonie pour couper court à la possible conversation que je pouvais avoir à ce moment là, je n'avais pas de temps à perdre sur cette glace qui se faisait de plus en plus fragile, qui se morcelait encore et encore. Pour le moment, elle tenait en partie le coup mais ça ne durerait pas éternellement. Ainsi, si j'avais été le plus prompt à me diriger sur le lac, à présent, j'étais rejoint par cette homme que je ne connaissais pas vraiment. Était-il anglais ? Écossais peut être ? Je n'en avais pas la moindre idée, mais il aurait très bien pu être un de mes ennemis à ce moment là que son aide aurait été la bienvenue. Le poids de la jeune femme était incroyablement élevé, il faut dire que son corps lesté de ces vêtements trempés n'aidait en rien à faire d'elle un poids plume. Mais à deux ce fut une réussite. Nous venions de la sortir de l'eau même si elle n'était pas en état de faire quoique ce soit. On ne l'y prendrait sans doute plus à s'amuser sur un lac gelé à présent. Je ne m'y serais jamais amusé personnellement sauf si cela avait été le seul passage praticable pour me rendre d'un point à un autre. Mais en l'occurrence, je n'en aurais pas eu besoin. La comtesse avait terriblement froid, mais nous n'étions pas en sécurité. Si elle était en dehors de l'eau, elle n'était pas sur la rive, mais seulement sur la glace. Je la soutenais pour que nous marchions doucement mais prudemment jusqu'au bord, nous quatre. Ce n'était pas une mince affaire, mais si nous agissions lentement, cela se ferrait sûrement, sans encombre ou presque pour que nous puissions arriver jusqu'au bord de ce lac gelé. L'hiver commençait à se faire sentir, mais le lac n'était pas assez gelé pour résister à autant de poids. Et dire que cette journée semblait être placée sous le signe de la bonne humeur, ce n'était plus le cas. Cependant, il n'y aurait pas de mort, pas aujourd'hui, mais seulement des blessés. Je ne connaissais pas l'étendu des dégâts pour la comtesse, mais peut être que ce froid lui ferrait du mal. Elle n'était pas resté très longtemps dans l'eau, fort heureusement, mais une chose était certaine, il lui faudrait du repos. Elle balbutia un petit merci, mais ce n'était pas grand chose, pour moi, je n'avais fait que mon devoir, et encore, n'importe qui aurait du avoir ce réflexe. Je ne sais pas si l'homme à mes côtés avait agit d'instinct ou si on l'avait poussé à agir, mais si c'était la deuxième solution, je ne donnais pas cher de sa peau dans le futur. Mais peut être avais-je une vision des choses bien trop droite pour que tout le monde puisse la posséder. L'honneur était quelques choses d'important pour moi ainsi, si je n'avais pas tenté de la sauver, je l'aurais grandement bafoué, et je dois avouer que je n'en avais pas envie. Je ne tenais pas à ternir ma réputation à cause d'agissement comme celui-ci. N'importe qui se doit d'aider son prochain, n'étais-ce pas là quelques choses qui se trouvait dans la Bible, que l'on soit catholique ou protestant ou que sais-je encore ? Je n'étais sans doute pas l'homme le plus pieux du pays mais cela était quelques choses d'important pour moi. Le froid en tout cas se faisait encore plus ressentir qu'auparavant. Il serait judicieux de rentrer à l'intérieur et de se réchauffer, tous autant que nous étions.

" Oui, il est en effet judicieux de rentrer à l'intérieur, afin que nous puissions nous réchauffer. Nous avons échapper au pire. Je m'en serais voulu si vous y étiez restés. "

Je parlais à ceux qui étaient à mes côtés, notamment à la Comtesse puisqu'elle avait plongé bien malgré elle dans l'eau, mais aussi aux autres qui avaient été là pour tenter de la sauver, pour tenter de sauver ceux qui étaient en danger.