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Nous nous situons aux alentours de mai 1558.
Il fait de plus en plus chaud les gens prennent plaisir à sortir dans les jardins.

Si vous souhaitez jouer un étranger, privilégiez les Espagnols et les Ecossais.
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MessageSujet: I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford  I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford Icon_minitimeMer 29 Mai - 21:13

I can't unlike you, sorry.
Enfermé dans ses appartements, Lorenzaccio tentait désespérément de se concentrer sur le livre qui se trouvait entre ses mains, depuis maintenant plus d’une heure. Mais lire Lucrèce par une si belle journée relevait de la torture, et, voyant le ciel bleu au dehors qui semblait le narguer, le jeune homme avait du mal à déchiffrer le latin.

« In gramine molli propter aquae rivum sub ramis arboris altae non magnis opibus jucunde corpora curant, praesertim cum tempestas adridet et anni tempora conspergunt viridantis floribus herbas. »

« Près de la rive d’un ruisseau, sous les rameaux d’un arbre élancé, sans grands frais agréablement, ils prennent soin de leur corps, surtout si le temps est agréable Et si l’époque de l’année Parsème de fleurs les herbes verdoyantes. »

Si même Lucrèce se mettait à parler d’un déjeuner sur l’herbe, il n’y avait vraiment plus rien à faire. Afin de se donner bonne conscience, Lorenzaccio décida de prendre le passage qu’il venait de lire pour un signe qu’il devait sortir, et reposa le poème sur son lit, où il était allongé, et se releva promptement, avant d’aller jeter un coup d’œil par la fenêtre. Le climat anglais, d’habitude si froid par rapport à celui de Rome, semblait s’être adouci aujourd’hui. Un Soleil superbe, presque digne de sa chère Italie et qu’une brise agréable venait tempérer, brillait. Cette journée était décidément superbe, et malgré les nuages noirs qui se massaient à l’horizon, l’Italien se décida pour une promenade à cheval, en solitaire. Il avait besoin de réfléchir, car le beau temps n’était pas la seule cause de sa distraction, et il ne restait pas enfermé que pour Lucrèce. Mais malgré ses efforts, il était clair qu’il ne pourrait pas rester en place.
Lorenzaccio avait tenté de rester dans sa chambre pour la simple et bonne raison qu’il évitait autant que possible Anne. La jeune femme, qu’il avait tout d’abord abordée dans le seul et unique but de la séduire, sans vouloir aller plus loin, semblait s’être attachée à lui. Lui avait été charmé par ses airs féériques, par son aura de douceur et de sensibilité, ainsi que par sa beauté angélique.

Mais lorsqu’une de ses colères incontrôlables éclatait, Anne ne s’enfuyait pas comme les autres, en attendant qu’il se soit calmé. Elle l’avait vu jeter des objets contre le mur, renverser des tables, trembler de colère, il lui avait hurlé dessus. Elle connaissait les pires facettes de sa personnalité, mais jamais, jamais elle n’était partie. Elle tentait à chaque fois de le calmer, sans succès parfois, mais toujours sans relâche, et se trouvait toujours là quand il revenait à lui-même. Alors, honteux, Lorenzaccio la priait de le pardonner, ce qu’elle lui accordait à chaque fois.
Cependant, malgré son apparent stoïcisme, le jeune homme voyait bien que chacun de ses débordements la bouleversaient. Il avait tenté maintes et maintes fois de la raisonner, de lui expliquer qu’elle n’était pas en mesure de le contrôler. Mais cela semblait impossible.

Alors, pris de remords, et certain qu’Anne méritait mieux que de supporter la colère d’un fou, Lorenzaccio s’était tout simplement éloigné d’elle. Depuis deux semaines maintenant, il ne lui avait pas adressé la parole, se débrouillant pour ne pas croiser ses pas, évitant les lieux où elle était susceptible de se rendre. Et cela fonctionnait plutôt bien, le seul bémol étant qu’il pensait toujours à elle, à sa gentillesse, et à sa touchante candeur.

Pour l’instant, l’italien n’avait rien trouvé de mieux que de se rendre dans la forêt, à cheval. Pour ce faire, il enfila un ample vêtement de couleur bleu foncé, tirant sur le gris, brodé d’or, dont les larges manches se resserraient aux avant-bras. Il fixa les lacets de devant, avant de se chausser de bottes de cuir noir, et se munir également de gants adaptés à l’équitation. Le jeune homme se rendit ensuite dans les écuries, où il sella lui-même son cheval, afin que cela prenne moins de temps, plutôt que d’appeler un de ces palefreniers qu’il trouvait incompétent. Ceci fait, il enfourcha son cheval, une élégante bête dont la couleur de la robe, sombre, était indéfinissable, et sortit du Palais en trottant.

Rejoindre la forêt pris du temps, et quand il arriva, une masse de nuages sombres s’était agglutiné au dessus de sa tête. Lorenzaccio pesta, mais décida de rester tout de même, quitte à se faire piéger par une averse, car avoir fait tout ce chemin pour rien l’agaçait profondément. Il mit son cheval au pas, tout en observant le paysage autour de lui, cherchant l’endroit idéal où s’assoir pour réfléchir. Le jeune homme avait besoin de se retrouver en tête à tête avec lui-même, afin d’effectuer une mise au point, et de mettre au point un nouveau plan pour éviter Anne. Peut-être réussirait-il à trouver un prétexte afin de s’éloigner de Londres quelques semaines, le temps qu’elle l’oublie et ne pense plus à le chercher ?

Plongé dans ses pensées, le brun ne regardait même plus où il allait, quand il eu le sentiment qu’une tornade blonde s’abattit juste devant lui. Il eut à peine le temps de s’apercevoir que quelqu’un avait dégringolé d’un arbre devant lui, que son cheval se cabra, car il avait été aussi surpris que son maître. Lorenzaccio n’était pas le meilleur cavalier au monde, mais il réussit à éviter de blesser la jeune fille à terre, en faisant dévier son cheval. Une fois celui-ci calmé, il se retourna vers l’inconnue, afin de lui faire une petite leçon de morale. Mais les mots moururent sur ses lèvres. Ces cheveux blonds, ce petit visage de poupée qu’on sort de sa boîte, cet air rêveur.

C’était Anne.

Lorenzaccio descendit précipitamment de sa monture, se prenant presque le pied dans un étrier tant il était inquiet. Il s’approcha promptement de la jeune fille, et mit un genou à terre afin de se trouver à sa hauteur, celle-ci se trouvant encore sur l’herbe. Il craignait de l’avoir blessé avec son cheval, ou qu’elle se soit rompu quelque chose en tombant de sa branche.

- Anne, est-ce-que vous allez bien ? s’exclama-t-il, inquiet.

Il détailla rapidement la belle, qui, mis à part une robe un peu salie, semblait être en un seul morceau, ce qui était une chance. Rassuré, il songea enfin à se demander ce qu’elle pouvait bien faire dans cette forêt, perchée sur une branche. Tentait-elle d’apercevoir un elfe, était-ce encore le fruit de son imagination qui l’avait poussée à venir ici ? Décidément, elle était incorrigible!

- Allons, prenez appuie sur moi pour vous relever.

Il lui offrit son bras, afin qu’elle puisse s’y appuyer pour se redresser plus aisément. A ce moment, Lorenzaccio ne savait pas trop s’il devait se réjouir ou s’inquiéter d’être tombé sur la jeune femme. Certes, il cherchait à lui échapper, mais il se réjouissait tant de pouvoir passer du temps en sa compagnie que cela lui était à présent égal. S’arrangeant avec sa conscience, en se disant que tout cela n’était après tout qu’un effet du hasard, il offrit son plus beau sourire à Anne, bien décidé à profiter de cette occasion pour goûter à l’agréable compagnie de la jeune fille.




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MessageSujet: Re: I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford  I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford Icon_minitimeJeu 4 Juil - 21:05
Anne résidait à Londres auprès de sa sœur Catherine. Devenue plus âgée, elle profitait de ce sublime vent de liberté que lui offrait de plus en plus sa sœur. La belle blonde était comme un petit oiseau chantant et volant où le vent le porterait, mais s’il venait à être enfermé dans une cage, il dépérirait et son chant ne se ferait plus jamais entendre. Et depuis qu’elle était loin de l’Essex, elle n’avait plus à souffrir la surveillance de son frère Henry qui ne cessait de s’inquiéter de la grande naïveté de sa cadette. Il la jugeait trop peu mature et avait d’ailleurs longtemps hésité avant de la laisser quitter le domicile familial pour Londres. Il avait dû se plier devant l’insistance inépuisable d’Anne surtout en sachant qu'elle serait auprès de Catherine. La jeune femme se caractérisait surtout par une humeur égale et agréable en toute circonstance, mais elle pouvait parfois se montrer extrêmement têtue. Lorsqu’elle avait une idée en tête, peu de gens pouvait l’en dissuader. Cependant, ce qui avait principalement motivé l’accord de son frère était que sa présence à Londres était plus que nécessaire.

En effet, beaucoup d’événements s’étaient déroulés depuis plusieurs semaines. L’arrivée de la reine Mary Tudor au pouvoir avait déjà été fait marquant. Mais ce qui avait le plus réjoui Anne, avait été ses retrouvailles avec la princesse Elizabeth. Après autant d’années de séparation, la blondinette n’aurait pu être plus heureuse de se trouver à nouveau avec sa cousine tant chérie. Depuis, sa joie et son excitation n’avaient pas dépéri. Une égale impatience l’étreignait lorsqu’elle songeait au fait de devenir la future dame de compagnie de la princesse d’Angleterre. Elle serait enfin aux côtés de cette cousine qui lui avait été arrachée et qui lui avait tant manqué. Elle vivrait à la cour, un environnement qui l’intriguait plus que de mesure. Elle pourrait résider pleinement à Londres, dans cette ville qui suscitait toute son allégresse et qui nourrissait sa rêverie et son imaginaire. La capitale était à ses yeux un endroit magnifique et fabuleux. Il était le lieu d’aventures enivrantes et c’était ici qu’elle pensait un jour trouver l’homme qui ferait battre son cœur à tout jamais. Elle y voyait à chaque instant des choses extraordinaires, ou du moins, sa manière de les voir les rendait merveilleuses. Un monde nouveau s’offrait à elle. Un monde qui ressemblait à s’y méprendre à ceux décrits dans les pages des livres qu’elle parcourait tous les jours.

Mais même si elle affectionnait la ville, aucun sentiment, si fort soit-il ne pourrait être comparable à celui qui montait en elle quand elle se trouvait dans la forêt. Les bois étaient son sanctuaire, son jardin secret. Elle y lisait, elle y écrivait et elle reproduisait des aventures comme un enfant jouant aux chevaliers l’aurait fait. Se munissant d’un bâton elle se battait contre des ennemis invisibles avant de secourir la belle en détresse. Le bien triomphant inlassablement du mal même dans les situations les plus désespérées. C’était ce qui plaisait à Anne. Et ce fut ne ce jour d'automne qu’elle se rendit une fois de plus dans les comtés environnants de Londres.

En cette journée qui se félicitait pourtant d’être prometteuse, Anne partit dès l’aube pour gagner les bois le plus tôt possible.  Elle avait prévu de la lecture et de quoi se sustenter durant la journée dans une sacoche de cuir dont elle avait fait l’acquisition au marché. Son pas léger et dansant la mena dans les profondeurs de la forêt où parfois ses yeux croyaient apercevoir quelques elfes malicieux ou des lutins espiègles. Son regard s’envolait même pour admirer ce qu’elle pensait être de gracieuses fées. Pourtant, même si ses yeux contemplaient le monde enchanté qui s’offrait à elle, ses pensées étaient exclusivement dirigées vers un seul être : Lorenzo.

Anne n’avait connu cet homme que très récemment mais il lui fut immédiatement agréable. La blonde appréciait sa compagnie car il ne voyait son imagination comme un manque de maturité. Cela semblait plutôt provoquer son amusement et  il s’était finalement attaché à elle. Elle avait pourtant été le témoin de ses plus noires colères. Toutefois, Anne ne le voyait pas comme un être maléfique qu’il fallait fuir à tout prix. Elle préférait penser qu’il était comme l’un de ses héros de livre auquel il faut venir en aide. Elle savait que lui fuite serait la pire des punitions pour des hommes comme Lorenzo. La blonde avait tellement souffert de la solitude qu’elle savait que ce n’était pas là la solution adéquate. La peur l’éperonnait à chaque fois mais elle faisait tout pour la contenir et venir en aide à cet homme si cher à son cœur. Pour rien au monde elle ne l’aurait abandonné et elle cherchait régulièrement sa compagnie. Mais voilà désormais plusieurs semaines qu’Anne déplorait ne plus avoir de nouvelles de lui. Lorenzo avait la fâcheuse manie de se mettre dans des situations dangereuses et la blonde ne pouvait s’empêcher de penser qu’il aurait pu lui arriver malheur. Puis elle se ressaisissait du mieux qu’elle pouvait en se disant que Lorenzo était comme un héros de roman et qu’il ne pouvait mourir. Elle s’accrochait corps et âme à cette idée rassurante. Elle refusait de souffrir une fois de plus la mort de quelqu’un qu’elle aimait. Elle avait déjà trop perdu.

Le soleil s’approchant de son zénith, Anne en profita pour s’établir à l’ombre d’un arbre pour se restaurer et entamer sa lecture. S’étant assise, elle cueillit une violette dont elle orna sa chevelure blonde et se plaça confortablement. Tandis qu’elle mangeait sa pomme, elle était toute absorbée à sa lecture, ne voyant le soleil au-dessus se voiler peu à peu. Puis un passage de son roman accrocha tout particulièrement son attention. Si elle en croyait le récit du personnage, ce dernier pouvait apercevoir les anges danser entre les nuages. Anne se mit immédiatement en tête de tenter l’expérience. Ils pourraient peut-être l’aider à retrouver Lorenzo. Pourquoi ne pourrait-elle pas les apercevoir à son tour comme elle croyait discerner des silhouettes d’elfes à travers les fourrés ?

La blonde rangea son ouvrage dans son sac qu’elle fit passer par-dessus son épaule. Elle préférait prendre ses affaires de peur quelques lutins farceurs ne viennent à lui dérober. Elle s’attela ensuite à gravir l’imposant arbre auquel elle s’était adossée pour la lecture. Ayant usé ses souliers à l’exercice de l’escalade étant enfant, il lui fit aisé de grimper en clignement de cil aux branches qui s’offraient à elle. En peu de temps, elle fut au sommet et put admirer la vue imprenable qu’elle avait sur la forêt. Mais son regard fut rapidement rappelé par les cieux où elle devait trouver des anges. Malheureusement, alors que la journée avait si bien commencé, de noirs nuages assombrissaient l’horizon. Anne eut une petite moue contrite mais elle ne s’avouait pas vaincue pour autant. Elle devait voir les anges si elle voulait leur demander de le garder en vie. Posant son pied sur un branche plus haute, mais plus fine, elle prit appuie afin de se propulser plus en hauteur de la cime. Cependant, à peine eut-elle le temps de se hisser pour observer de plus près le ciel que le bois craqua sous son pied. Surprise par cette soudaine perte qu’équilibre, Anne n’eut pas la possibilité de se rattraper aux branchages et elle tomba à la renverse. Cette sensation de chute en arrière lui ôta la parole et son cri s’étrangla dans sa gorge. Heureusement, les branches amortirent sa dégringolade et lorsqu’elle toucha enfin terre, elle eut la félicité de ne s’être brisée aucun os.

Un hennissement strident et des martèlements de sabots l’accueillirent au sol et elle porta instinctivement ses mains à sa tête, se recroquevillant sur elle-même pour se protéger d’un éventuel coup mais le cavalier semblait avoir réussi à maîtriser son destrier à temps. Elle se risqua finalement à ouvrir un œil et un homme brun apparut soudain dans son champ de vision. Son cœur rata un battement en reconnaissant Lorenzo. Un sourire illumina son visage et elle en éluda même la question de Lorenzo. Elle préféra prendre le bras qu’il lui offrait afin de se redresser.

"Lorenzo c’est vous ! Vous êtes sain et sauf, fit-elle avec soulagement en passant une main sur son si beau visage. J’ai eu si peur qu’il vous soit arrivé malheur. J’étais montée à l’arbre pour essayer de parler aux anges et de leur demander votre retour."

Anne se tut un instant. Elle retira sa main, se rendant soudain compte que ce geste familier pourrait paraître inconvenant envers un homme. Elle baissa les yeux, puis les releva, ne pouvant détacher son regard du sien.

"Je suis heureuse de constater que les anges ont entendu mes prières même si je n’ai pas pu les voir, annonça-t-elle avec un timide sourire. J’espère toutefois ne pas avoir trop effrayé votre cheval."

HRP : Je suis désolée pour mon retard, en tout cas j'espère que ton bacs'est bien passé Smile


Dernière édition par Anne Stafford le Ven 30 Aoû - 15:30, édité 3 fois
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MessageSujet: Re: I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford  I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford Icon_minitimeDim 14 Juil - 18:16

I can't unlike you, sorry.
- Je suis heureuse de constater que les anges ont entendu mes prières même si je n’ai pas pu les voir

Ainsi, il lui avait manqué pendant ces dernières semaines. Lorsqu’il entendit la belle Anne confesser qu’elle l’avait cherché, allant même jusqu’à inventer de demander conseil à des créatures imaginaires, le cœur de Lorenzaccio se gonfla de joie. ll n’avait jamais manqué à personne : sa famille entière le rejetait, il avait bien quelques amis, certes, et ne manquait pas d’entourage, mais il se résumait à des compagnons de beuverie ou à des conquêtes ; cette sensation nouvelle d’être nécessaire, ou ne serais-ce que cher à quelqu’un le troubla. D’autant plus qu’à ses yeux, la jeune femme n’était pas n’importe qui, aussi, il lui rendit un sourire sincère, sans détacher ses yeux bleus des siens. Lorsqu’il s’autorisa enfin à soutirer son regard à celui d’Anne, ce fut pour constater que son chignon s’était défait, et que ses beaux cheveux blonds se déversaient maintenant sur ses épaules, offrant des reflets dorés là où les quelques rayons de Soleil se posaient. S’autorisant à glisser une de ses mèches entre son pouce et son index, l’Italien l’effleura de ses lèvres avec un petit sourire en coin, accompagné d’une légère révérence, en guise de salut. Il était redevenu maître de lui-même.

- J’allais oublier de vous saluer, chère Anne.

Gardant la mèche blonde d’Anne entre ses doigts, il lui sourit une nouvelle fois, se voulant rassurant.

- Vous ne devriez pas venir dans les bois seule, vous pourriez faire de mauvaises rencontres.

Le jeune homme était sincère : certes, on pouvait fort bien le compter dans la liste des mauvaises rencontres à ne pas faire seule dans un bois alors lorsqu’on est une jolie demoiselle, cependant, elle aurait très bien pu tomber sur pire, des brigands, par exemple.

- Permettez-moi de vous escorter afin de veiller à votre sécurité. Ou à défaut, de vous raccompagner à Londres, je ne veux pas vous savoir seule ici.

C’est cet instant que choisit le cheval, resté sans cavalier, pour se manifester, mécontent que son maître le délaissât au profit d’Anne. Il frappa plusieurs fois la terre de ses sabots, faisant se retourner Lorenzaccio, qui eut une idée. La jeune blonde aimait les histoires de chevaliers par dessus tout, il le savait bien. Se détournant d’elle quelques instants, il s’approcha de la bête, la pris par les rênes, avant de flatter son encolure, puis fit signe à Anne d’approcher.

- Il s’appelle César, commenta-t-il. Une promenade à cheval vous tenterait ?

L’italien voulait lui faire plaisir, jouer les chevaliers qui emmènent leur princesse au loin, vers l’horizon. Il était peut-être loin de l’idéal du prince charmant qu’elle se faisait, mais sa candeur était si adorable qu’il ne pouvait s’empêcher d’ajouter de l’eau au moulin de son imagination. Il attendit son approbation, avant de la saisir par la taille, pour la hisser en amazone sur la selle. Elle était légère, il eut moins de mal qu’il ne l’aurait pensé, et ce geste aurait pu paraître fort inconvenant, mais la jeune femme était si belle, auréolée de ses cheveux blonds libérés des coiffures « convenables », qu’il n’y accorda aucune importance. Prenant appui sur un étrier, il se hissa derrière elle, en croupe. Il dû se pencher pour atteindre les rênes, qu’il tenait d’une main dans le dos d’Anne : le cheval était en général obéissant, cela suffirait. Il mit son destrier au pas, progressant lentement entre les arbres, s’autorisant à admirer la belle Anne à la dérobée.

- Allez vous enfin me dire ce que vous faisiez seule dans cet arbre ?

De là où il se trouvait, il pouvait seulement voir sa chevelure dorée ainsi qu’une petite parcelle de son visage, étant donné qu’il était plus grand qu’elle. L’italien était à présent plongé dans une douce rêverie, bercé par le pas régulier de sa monture et la présence bienfaisante d’Anne. Lorsqu’il était avec elle, il en venait même à oublier le monde extérieur, et tous les problèmes qui le peuplaient : sa famille qui le haïssait, les duels qu’il devait honorer, son éloignement de l’Italie. Son pays lui manquait, surtout Rome, sa ville d’adoption, celle qui l’avait vu grandir, la cité éternelle. L’Angleterre lui paraissait bien fade comparée aux beautés de la Toscane ou du Latium. Il se consolait en se disant que le jour où il remettrait définitivement les pieds dans les états pontificaux, rien ne pourrait plus jamais l’en déloger. De plus, il avait fait tant de rencontres ici, qu’il aurait manqué s’il était resté dans son pays, dont celle avec Anne. Et rencontrer en elle tant de bienveillance après tant de malveillance valait bien quelques années d’exil.
C’est avec un demi-sourire qu’il pensa qu’on se moquerait bien de lui, le fier et terrifiant Lorenzaccio, dans Rome, si l’on savait qu’il était mis à mal par une petite blondinette qui imaginait voir des elfes et des anges dans les bois. Sans cesse troublé en sa présence, le jeune homme ne savait pas au juste pourquoi il éprouvait tant de tendresse pour elle. Qu’importe, le mal était fait, il s’était attaché à la jeune fille, qui semblait réussir à faire ressortir un bon côté qui résidait en lui et dont il ne soupçonnait même pas l’existence. Elle l’appelait même Lorenzo, comme si le suffixe dépréciatif ajouté à son prénom n’avait pas lieu d’être.

Lui ne souhaitait que son bonheur, quitte à se tenir éloigné d’elle, comme il avait tenté de le faire pendant plusieurs semaines. Alors si il pouvait la rendre un tant soit peu heureuse en entrant dans son jeu imaginaire, il le faisait volontiers. Après tout, n’avait-il pas lui-même joué un rôle pendant des années, jusqu’à ce qu’il devienne lui-même ? Il avait tant et si bien joué les méchants qu’il avait finit par en devenir un, de méchant. Le vilain petit canard était devenu un cygne comme son idéal, mais il se rendait maintenant compte que le mal qu’il faisait autour de lui portait préjudice à ceux auxquels il tenait, comme Anne, par exemple, également à sa jeune sœur avant son départ.
Un éclat violet dans les cheveux blonds de la jeune fille attira son regard : la violette qu’elle avait glissée dans sa coiffure s’était délogée et était venue se loger sur sa nuque. Avec un sourire, le jeune homme s’en saisit pour la déposer délicatement derrière l’oreille d’Anne, tout en levant un regard soucieux vers le ciel, surpris par le soudain manque de luminosité. De gros nuages noirs et menaçants s’étaient massés au dessus de leurs têtes pendant la promenade, et les premières gouttes tombèrent bientôt.

- Il va falloir s’abriter, observa-t-il, l’orage menace et il n’y a que des arbres aux alentours.

Réfléchissant à un abri provisoire, Lorenzaccio se pencha, ouvrit la sacoche de cuire suspendue à la selle pour en retirer son manteau, une lourde cape sombre ornée d’un liserai doré, qu’il plaça sur les épaules de la jeune fille. Il noua distraitement les cordons qui la maintenaient en place et tira la capuche sur sa tête. La pluie se faisait plus forte, et le tonnerre, accompagné de quelques éclairs, grondait, il leur fallait trouver de quoi s’abriter au plus vite.





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MessageSujet: Re: I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford  I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford Icon_minitimeMer 24 Juil - 18:54
Anne s’abîmait dans la contemplation des yeux du beau Lorenzo. Il semblait presque que c’était un miracle qu’il se trouvât devant elle aujourd’hui. Elle avait tant craint pour sa vie que sa joie ne pouvait être plus complète. Les anges l’avaient écoutée et ils avaient exaucé son souhait. Elle se promettait de prier avec ferveur la prochaine fois qu’elle se rendrait à l’église. Elle ne parvenait à effacer le sourire qui s’était délicieusement peint sur son visage.
Le temps sembla s’étirer comme par enchantement, leurs doux regards plongés l’un dans l’autre. Les joues de la blonde rosirent légèrement lorsque l’italien saisit l’une des mèches de sa chevelure défaite. Le son de sa voix et son accent étranger la firent tout à coup frissonner. Elle lui accorda une charmante inclination du port de tête quand celui-ci lui fit une révérence. Elle avait la sensation d’être une princesse aux yeux de l’homme.
Son sourire s’étira d’autant plus lorsqu’il s’inquiéta pour sa sécurité.

« Vous ne devriez pas vous inquiéter pour moi. Il est vrai que les lutins des forêts sont farceurs mais j’ai su déjouer leurs tours plus d’une fois ! »

Anne avait répondu avec une innocente fierté, essayant de prouver qu’elle n’avait pas peur et qu’elle était courageuse. Elle ne voulait pas paraître faible au regard de cet homme qu’elle aimait tant, sans pour autant s’élever au-dessus de lui. Elle voulait simplement prouver sa vaillance. Ses yeux se dérobèrent soudain à ceux de Lorenzo et ses joues s’embrasèrent.

« Et puis je sais qu’il ne peut rien m’arriver car il y aura toujours les anges pour vous mener jusqu’à moi. »

A peine eut-elle achevé sa phrase que son cœur s’emballa. Elle pouvait le sentir, rebondir avec force au creux de sa poitrine. Mais Lorenzo n’était pas comme les autres hommes et elle voulait lui prouver. Peut-être ne se considérait-il pas comme un prince, mais le cours des événements laissaient de plus en plus croire à la blonde qu’il pourrait bien être le sauveur qu’elle avait toujours attendu. Après tout, n’avait-elle pas rêvé autrefois qu’il arriverait de lointaines contrées pour lui offrir un monde merveilleux ? Et cet univers enchanté était l’Italie ?
Anne avait lu tant d’ouvrage à son propos. Ce pays était souvent le théâtre de nombres de ses rêveries. Il était l’endroit parfait : magique, chaud et le sanctuaire de l’amour. La blonde avait pu observer les paysages latins grâce aux œuvres de Philippa. Elle en avait été si enchantée, qu’elle avait acheté déjà plusieurs toiles et dessins dont elle ornait sa chambre. Elle pouvait passer des heures à les contempler.
Le cheval se rappela soudain leur présence et Lorenzo se détourna aussitôt. Il s’approcha de la bête avant d’inciter Anne à s’approcher. Elle s’avança timidement, sachant que la monture pourrait se souvenir que c’était elle qui avait causé sa précédente frayeur mais il n’en fit rien. Lorenzo le présenta à la jeune femme.

« Bonjour César, fit-elle doucement en caressant la sombre robe de l’animal. Comme tu es beau ! »

Anne était charmée par César. Les chevaux étaient toujours les plus fidèles destriers des héros. Ils étaient toujours à leurs côtés dans les plus périlleuses missions de leurs maîtres. Ils faisaient parti de ces bêtes majestueuses et courageuses qu’Anne admirait.
Lorenzo sortit la blonde de sa contemplation en lui proposant une promenade. Son cœur se gonfla instantanément de joie et son éclatant sourire répondit pour elle. Tout ce qui se passait été bien plus qu’elle n’aurait pu l’espérer en sortant de sa chambre ce matin.
Anne n’eut pas le temps de s’approcher de l’étrier que Lorenzo la saisissait pas la taille et la hissait sur la selle comme si elle n’avait pas pesé plus lourd qu’une plume. Elle fut vivement impressionnée par sa force et la rapidité fulgurante avec laquelle elle s’était retrouvée sur le dos du cheval. Elle s’accrocha immédiatement à la selle, tandis que Lorenzo montait en croupe derrière elle. Ses doigts caressaient délicatement la crinière de l’animal qui s’était mis au pas. La jeune fille ferma alors les yeux, profitant de l’enivrante sensation que lui provoquait cette expérience d’équitation.
Lorenzo se rappela tout à coup à lui, l’extirpant de sa rêverie passagère.

« J’étais partie en promenade dans la forêt et je me suis établie sous cet arbre pour manger un peu et lire. Quand soudain, j’ai lu dans mon roman que le personnage avait parlé aux anges et que son souhait avait été exaucé. Je me suis alors dit que je pourrais très certainement faire la même chose. Je suis montée dans l’arbre pour trouver les anges dans le ciel. Malheureusement, les nuages voilaient l’horizon. Je me suis hissée un peu plus pour être sûre qu’ils entendent ma prière mais une branche moins solide a cédé sous mon poids et je suis tombée. Je peux cependant remercier le ciel que mon vœu ait été exaucé... Vous êtes là maintenant. »

Anne acheva son explication d’une voix timide. Elle se trouvait d’ailleurs rassurée de ne pouvoir croiser le regard de Lorenzo après cette confession. Elle entortilla négligemment ses doigts dans la crinière épaisse du cheval. Pourtant elle devait lui faire part de ce qu’elle ressentait pour lui. Elle lui portait une telle affection qu’elle n’osait même pas songer au jour où il devrait regagner ses contrées natales. Elle espérait que ce moment n’arriverait jamais, mais elle ne perdait pas de vu que ce n’était qu’un espoir fou.
Soudain, elle sentit une goutte de pluie s’échouer sur le bout de son nez tandis que sa violette retrouvait délicatement sa place initiale. Anne porta instinctivement la main à son oreille et frôla celle de Lorenzo. Son cœur rata un battement à ce subversif contact.

« Où étiez-vous donc tout ce temps ? Vous est-il arrivé des malheurs ? ne put s’empêcher de demander Anne avec une pointe d’inquiétude dans la voix, se détournant légèrement vers Lorenzo. »

La jeune fille avait parlé pendant que l’homme cherchait dans l’une de ses sacoches. Il en tira bientôt une somptueuse cape noire décoré d’or qu’il déposa immédiatement sur les épaules d’Anne. Elle observa les mains de l’italien nouer habilement le cordon autour du cou de la blonde, avant qu’elles ne s’échappent de son champ de vision pour rabattre la capuche sur sa tête.
La pluie s’intensifia rapidement et des éclairs commencèrent à déchirer le ciel. Lorenzo avait raison : il leur fallait trouver un abri. La monture continuait à progresser à travers les arbres. Anne força son regard afin de trouver un endroit où s’abriter le temps que la tempête se calme, perçant le rideau d’eau qui s’épaississait à une allure fulgurante. Quand soudain, elle crut discerner dans la pénombre une solution à leur problème.

« Lorenzo ! Regardez ! s’écria Anne en pointant l’horizon de son doigt.Je crois voir une grotte par ici ! »

Anne n’attendit pas une seconde de plus et défiant toute prudence, elle se propulsa à terre avant que l’italien n’ait pu esquisser un geste. Elle se réceptionna maladroitement au sol et sa robe fut couverte de boue. Mais elle n’en avait cure, de toute manière, sa toilette était déjà salie depuis qu’elle avait dégringolé de l’arbre. Elle pataugea dans l’eau de pluie jusqu’à afin atteindre l’objet de sa recherche. Il s’agissait en effet d’une grotte, ses yeux ne l’avaient pas trahie. Elle y pénétra lentement, retirant son capuchon dont sa chevelure jaillit comme une cascade de lumière.

« Regardez Lorenzo ! s’enthousiasma Anne alors que ce premier venait de la rejoindre. C’est une grotte. »

Elle s’enfonça un peu plus dans la cavité, mais son regard ne parvenait à distinguer quoi que ce soit dans la pénombre. Elle se baissa alors et attrapa entre ses doigts une pierre qu’elle jeta au loin. Le son du cailloux heurtant la roche ne se fit entendre que bien plus tard, confirmant à la blonde que la grotte s’enfonçait plus loin dans les entrailles de la terre. L’appel de l’aventure fit scintiller le regard de la jeune fille.

« Cette cavité a l’air immense, apprit-elle à Lorenzo, puis son ton se fit plus exalté. Croyez-vous qu’elle pourrait abriter des fées ? Ou encore des dragons ? »


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MessageSujet: Re: I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford  I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford Icon_minitimeLun 29 Juil - 23:26

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- J’étais partie en promenade dans la forêt et je me suis établie sous cet arbre pour manger un peu et lire. Quand soudain, j’ai lu dans mon roman que le personnage avait parlé aux anges et que son souhait avait été exaucé. Je me suis alors dit que je pourrais très certainement faire la même chose. Je suis montée dans l’arbre pour trouver les anges dans le ciel. Malheureusement, les nuages voilaient l’horizon. Je me suis hissée un peu plus pour être sûre qu’ils entendent ma prière mais une branche moins solide a cédé sous mon poids et je suis tombée. Je peux cependant remercier le ciel que mon vœu ait été exaucé... Vous êtes là maintenant.

Son cœur rata un battement en entendant la confession d’Anne. Si elle ne partageait ne serait-ce qu’un dixième des sentiments qu’il éprouvait pour elle, il pouvait se targuer d’être l’homme le plus heureux de la terre. C’était la première fois qu’il rencontrait quelqu’un comme elle, aussi pure, aussi dénuée de mauvaises intentions. Tout dans son cœur semblait parfaitement blanc, limpide, sans aucune tâche de gris ou de noir. Il n’aurait jamais pensé pouvoir être touché par une âme aussi parfaite, et si on le lui avait suggéré quelques mois auparavant, il aurait sans doute répondu qu’une demoiselle comme cela n’aurait pas assez de caractère. Lorenzaccio était homme à aimer les femmes piquantes, dont les résistances sont difficiles à vaincre.

Sa dernière idylle italienne avait eu lieu juste avant son départ de Rome. Elle s’appelait Lucia, provenait d’une famille de la haute noblesse romaine, une femme magnifique qu’il s’était employé à conquérir pendant de longs mois. Il la voulait parce qu’elle l’impressionnait, elle avait un caractère bien trempé, des sautes d’humeurs qui mettaient tout le monde à ses pieds. Lucia était l’exact opposé d’Anne, comme le mal et le bien sont contraires. Aux traits pointus et acérés de l’une s’opposaient les courbes douces du visage de l’autre. A la répartie acerbe de la première, la gentillesse et la candeur de la seconde. Pourtant, Anne l’avait touché bien plus profondément. Et si au début son seul objectif était de la séduire afin de l’avilir, comme beaucoup d’autres de ses conquêtes, il se refusait maintenant à continuer, par peur de tâcher son innocence immaculée. Lorenzaccio s’était fait prendre à son propre piège, et s’il voulait ne pas lui faire de mal, il lui faudrait taire les sentiments qui étreignaient son cœur.

- Où étiez-vous donc tout ce temps ? Vous est-il arrivé des malheurs ?

Comme il le craignait, elle lui demandait la raison de son absence. Il hésita, ne pouvant lui dire la vérité, et finit par trouver un petit mensonge passe partout.

- Pas plus que d’habitude. J’avais quelques affaires à régler pour le Pape, j’ai été très occupé ces dernières semaines.

Un sourire convainquant accompagna sa réponse. Heureusement, avant qu’Anne ait le temps de mettre en doute sa parole, celle-ci s’exclama qu’elle venait d’apercevoir une grotte. Lorenzaccio se redressa un peu sur son cheval pour l’apercevoir à son tour et dirigea la monture vers l’endroit qu’elle indiquait de la main. Il n’eût pas le temps de réagir lorsqu’elle se propulsa à terre, massacrant définitivement sa toilette. L’italien n’eut d’autre choix que descendre de la monture à sa suite, avec moins de précipitation, et de la suivre en tirant sur les reines de César, pataugeant dans la boue pour enfin entrer dans la cavité.

- Regardez Lorenzo ! C’est une grotte.  
- Je vois ça, sourit-il tout en laissant ses yeux s’adapter à la pénombre, renforcée par le ciel presque noir et la proximité des arbres.

Une fois chose faite, le jeune homme se mit à inspecter l’endroit où ils se trouvaient, jusqu’à repérer ce qui lui sembla être de gros sacs dans une cavité plus petite. S’en étant approché, intrigué, il ouvrit un sac pour y découvrir des torches déjà prêtes à l’emploi, ainsi que des briquets d’amadou.

- Cette cavité a l’air immense. Croyez-vous qu’elle pourrait abriter des fées ? Ou encore des dragons ?

Lorenzo eut un sourire en l’entendant : elle ne changerait jamais. Il ne la trouvait pourtant pas ridicule, lorsqu’elle parlait de lutins ou d’elfes, ou d’une autre créature peuplant son imagination, loin de là. Simplement touchante. Il ignorait pourquoi elle en avait été rendue à garder ce monde qui aurait du rester derrière elle avec son enfance, et aurait aimé le découvrir, qu’elle lui fasse part de son passé. Ou bien qu’elle lui fasse une petite place dans cette contrée merveilleuse et heureuse, là où elle vivait.

- Je n’en sais rien, c’est bien possible, très chère.  Ce dont je suis certain, c’est que nous avons affaire à un repère de contrebandiers. Et je pense qu’ils ne seront pas contre l’idée que nous leur empruntions une torche.

Se saisissant d’un briquet qu’il battit afin d’obtenir une flamme, Lorenzaccio put allumer une torche, leur rendant visible une partie de la grotte, qui semblait s’enfoncer plus loin, probablement sous terre. Jetant un coup d’œil à Anne, un éclat attira son regard, et un sourire étira ses lèvres lorsqu’il comprit d’où il provenait.

- Vous portez le médaillon… Vous avez donc aimé mon présent.

Plusieurs semaines auparavant, avant de disparaître aux yeux de la jeune fille, l’italien lui avait fait cadeau d’un écrin, qu’il avait fait amener d’Italie, connaissant son goût prononcé pour les objets mystérieux. Il s’agissait d’une petite boîte ovale, entièrement sculptée et peinte dans des tonalités violettes, décorée à la feuille d’or, ainsi qu’à l’aide de perles et de pierres précieuses. Pour qu’elle s’ouvre, il était nécessaire d’en posséder la clef, une petite merveille de précision et de finesse, elle-même entièrement sculptée et faite en or. Lorsqu’on la tournait dans sa serrure, le couvercle se soulevait, pour laisser apparaître minuscule un automate, un couple dansant, dont le cavalier s’inclinait ensuite. Le tout avait été minutieusement doré et peint. Pris de timidité, Lorenzaccio lui avait fait porter le cadeau en recommandant de ne pas dire de qui il provenait, accompagné d’un simple billet portant les mots « Pour enfermer vos secrets. » Afin de ne pas perdre la clef, elle avait été suspendue au bout d’une chaînette, qui reposait maintenant autour du cou blanc d’Anne.

Dans le but de masquer sa joie, Lorenzaccio se tourna vers César, et s’approcha de lui afin de l’attacher à une branche près de l’entrée de la grotte, afin que le cheval puisse rester au sec tout en l’empêchant de s’éloigner. Pour ce faire, il coinça sa torche entre deux pierres, et entreprit de nouer les reines. Tout en faisant, il entendit Anne qui s’éloignait, sans doute brûlant d’impatience d’aller explorer la grotte.

- Anne, ne vous éloignez pas trop, c’est peut-être dangereux !

Il avait sans doute tendance à la couver un peu trop, de temps à autre mais pour une fois, cela était justifié. En effet, le jeune homme fit quelques pas à sa suite, alors qu’elle avait déjà disparu dans l’obscurité, lorsqu’il l’entendit pousser un cri de frayeur. Se précipitant à sa suite, l’appelant, inquiet, il commit la même bêtise qu’elle, et glissa sur une pierre humide. Il perdit l’équilibre, surpris,  et fit une chute brutale dans une crevasse, se retrouvant dans la même situation que sa belle. Un peu sonné, il mit quelques secondes avant de se rendre compte qu’il se trouvait au fond d’une cavité juste assez profonde pour les empêcher de sortir, les parois lisses interdisant toute escalade. De plus, la torche s’était éteinte dans le filet d’eau qui reposait au fond de la crevasse. Il tâtonnait, n’osant se remettre debout de peur de bousculer Anne, ne sachant où elle se trouvait, cherchant à la localiser. Ils étaient dans de beaux draps, et à moins d’une intervention d’un quelconque lutin, Lorenzaccio ne pouvait prédire comment ils allaient s’en sortir.





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MessageSujet: Re: I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford  I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford Icon_minitimeMer 31 Juil - 15:12
Lorenzo était un homme d’action et Anne se plaisait à imaginer toutes les missions périlleuses dans lesquels il devait se retrouver et qu’il affrontait avec bravoure. Il faisait parti de ces gens qu’elle considérait comme de grands guerriers et si elle se fiait à ses lectures, ils étaient d’un courage sans précédent. Elle savait qu’il ne pourrait jamais rien arriver à Lorenzo, car il était un héros et que les héros ne pouvaient mourir. Durant plusieurs semaines, Anne n’avait cessé de se répéter cela afin de repousser la part morte d’inquiétude de son esprit. Elle avait été habituée à le voir régulièrement et sa soudaine disparition l’avait mise au supplice. Que n’avait-elle pas songé alors ! Lui était-il arrivé malheur ? Les missions se trouvaient-elles plus périlleuses en Angleterre qu’en Italie ? Serait-il parti dans son pays sans même la prévenir ?
Anne n’avait pu se résoudre à penser qu’il l’ait abandonnée aussi lâchement que son père et elle n’avait trouvé d’autres recours que de prier les anges. Et voilà qu’il se trouvait avec elle. Son vœu avait été exaucé et elle promettait désormais d’adresser la moindre de ses requêtes à ces petits êtres des cieux afin que ses souhaits se réalisent. Elle s’était trouvée d’autant plus soulagée lorsque l’italien lui apprit qu’il n’avait dû s’occuper que de quelques affaires, et au ton de celui-ci, il semblait qu’elles étaient sans grande importance.
Plus qu’un guerrier, Lorenzo était aussi un homme important et Anne s’en rendait compte un peu plus à chaque fois. Il était un envoyé du Pape, la figure la plus illustre de la religion à travers le monde. Qu’il se voit ainsi confier une mission par une aussi grande personnalité dénotait d’une puissance certaine et d’un grand pouvoir. Lorsqu’elle y songeait, Anne s’en trouvait fortement intimidée et elle ne comprenait toujours pas pourquoi une personne telle que lui avait cherché son amitié. Cependant, elle s’en félicitait intérieurement et elle souhaitait qu’il éprouve autant d’attachement pour elle qu’elle en ressentait pour lui.
Anne aurait tant aimé que les émotions soient une chose qu’on puisse communiquer à l’autre pour prouver l’intensité des sentiments à une personne. Elle pourrait alors faire lire son cœur à Lorenzo dans toute son intégralité.
Mais pour l’instant, elle s’enchantait de la présence de l’homme avec elle et elle s’en trouvait que plus joyeuse. Ils venaient de trouver une grotte, et si l’italien effectuait ses missions de son côté, aujourd’hui, c’était avec Anne qu’il allait vivre une aventure dont il avait sans aucun doute l’habitude. Le cœur de la blonde se gonflait de joie à cette seule pensée.
Pendant que Lorenzo était parti dans un côté de la grotte, Anne était toute à son exploration. Elle cherchait à percer de son regard l’obscurité tandis que ses yeux s’acclimataient peu à peu aux ténèbres qui les entouraient. Elle tentait de discerner quelques éclats de lumière qui auraient pu lui indiquer la présence d’elfes ou de petites fées dans ces souterrains. Quant au dragon, s’il y en avait un, ils ne parviendraient à trouver son antre que s’ils s’enfonçaient un peu plus dans les entrailles de cette cavité.
Mais pour l’heure, ce ne fut que la présence de Lorenzo qui se manifesta à elle pour lui indiquer que cet endroit n’était rien d’autre que le repère de bandits. Le regard d’Anne s’illumina à cette simple nouvelle. Des brigands ! Certainement ces lieux devaient-ils receler quelques trésors bien cachés.

« Des contrebandiers… » souffla la blonde avec enchantement.

Peut-être allaient-ils réellement vivre une grande aventure ! Anne en trépignait déjà d’impatience. Elle entendit soudain quelques cliquètements dans l’obscurité, avant que la lumière ne fuse d’une torche que Lorenzo venait d’allumer. Réchauffant l’air et illuminant la cavité, cette torche était une réelle trouvaille qui allait être leur plus grande alliée dans leur exploration de la grotte.

« Vous portez le médaillon… Vous avez donc aimé mon présent. »

Anne se retourna vers Lorenzo, incrédule. Mais elle ne tarda pas à comprendre que l’italien n’était ni plus, ni moins que le mystérieux expéditeur de cette boîte que la blonde pensait être empreinte de magie. Elle ne put empêcher le sourire radieux qui naquit bientôt sur son visage. A la venue de ce colis, Anne avait d’abord cru à une erreur, mais le messager avait été catégorique, ce paquet était pour elle. Elle avait bien songé à un présent de son frère, mais lorsqu’elle entendit que l’expéditeur se voulait anonyme, elle écarta rapidement cette idée. Elle avait alors usé de tous les moyens pour faire parler le pauvre homme mais pas une seule information n’avait filé. Anne avait donc dû s’avouer vaincue à regret, d’autant que la note sur le billet était des plus énigmatiques.
Quels n’avaient pas été sa joie et son enchantement de voir déballé de sa boîte un magnifique écrin. Il était si merveilleusement sculpté que la jeune fille croyait qu’il avait été confectionné par les mains expertes des anges. Tout n’était que pierreries, fine dorures et perles chatoyantes assemblées avec une minutie saisissante. Anne était restée sans voix devant cette merveille de création, dont les couleurs lui évoquaient les teintes violettes que Philippa utilisait pour peindre les champs de lavandes de sa douce Italie. Faite d’or, une clef accrochée à une chaînette était jointe au paquet. Elle s’était alors empressée d’actionner le mécanisme de la boîte, dévoilant ainsi une couple de danseurs, se mouvant à la manière des automates. Le charme s’était immédiatement accompli sur son cœur de rêveuse. Depuis, elle ne quittait plus cette clef qu’elle portait constamment autour de son cou et chaque soir, elle ne manquait jamais d’admirer la danse de ses deux amoureux en rêvant de son auteur du cadeau avant de s’endormir.
Ainsi donc, c’était l’italien qui était à l’origine de ce présent descendu tout droit du ciel. Elle sentit son cœur battre intensément plus fort au creux de sa poitrine. Ses mains se portèrent instinctivement au bijou qu’elle observa tout d’abord avec des yeux emplis de tendresse. Et tandis que Lorenzo avait le dos tourné, occupé auprès de son cheval, elle déposa un doux baiser sur la clef avant d’effectuer une pirouette sur elle-même, folle de bonheur.
Portée par l’allégresse que suscitait en elle une telle découverte, elle décida d’entamer l’exploration des lieux et elle s’engagea sans prendre garde, se faisant happer par l’obscurité. Ses doigts parcouraient la roche humide, avançant prudemment dans la grotte. Quand tout à coup, l’alerte de l’italien la fit brusquement se retourner et son empressement provoqua sa glissade. Anne poussa un cri de frayeur en sentant le sol se dérober sous ses pieds. Sa glissade ne prit fin que lorsqu’elle atterrit au fond d’une crevasse. La chute avait été si brutale qu’elle eut besoin de plusieurs secondes avant de reprendre conscience. Un temps précieux qu’elle ne put mettre à profit pour prévenir Lorenzo des dangers de cette cavité. Elle eut tout juste le loisir de voir la torche providentielle s’éteindre dans l’eau qui contenait la cavité. Ses yeux cherchaient une quelconque lueur à laquelle se raccrocher, mais tout n’était que ténèbres insondables autour d’eux dont ils étaient les malheureux prisonniers.

« Lorenzo, vous allez bien ? » s’enquit Anne alors que ce dernier n’avait plus prononcé une parole depuis sa chute.

Evoluant à tâtons, la jeune fille se traîna sur le sol, jusqu’à ce que sa main rencontre enfin ce qui devait être le bras de l’italien. Ses doigts refermèrent leur prise afin de ne pas perde sa trace et elle fit de son mieux pour ramper jusqu’à Lorenzo à l’aide de son seul coude libre. Pour la première fois, Anne était peu rassurée par la situation et l’obscurité l’opprimait, surtout de se savoir ainsi piégée par la roche. Ils n’avaient manifestement aucun moyen de se sortir de cet embarras dans lequel elle les avait plongés. Les larmes montèrent immédiatement aux yeux de la blonde.

« Pardonnez-moi Lorenzo. » hoqueta Anne tandis que les larmes dévalaient ses joues. « Je n’aurai pas dû m’aventurer seule. Tout est de ma faute… »

En cet instant, la blonde se sentit pitoyable. Elle les avait tous les deux conduits dans une situation dont ils n’étaient pas sûrs de réchapper. Lorenzo devait tellement lui en vouloir et les pleurs d’Anne s’intensifièrent à la seule idée que sa colère et sa déception soient dirigées contre elle. En rien elle ne voulait déplaire à cet homme qu’elle aimait.
Mais tandis qu’elle sanglotait, son esprit était tout affairé à chercher par tous les moyens une issue. Elle essayait de se remémorer tous les livres qu’elle avait lu, se demandant si l’un de ces héros ne s’était pas déjà retrouvé dans pareille situation et quelle solution il avait bien pu trouver. Elle eut cependant beau se creuser la tête, rien ne lui vint.
D’ordinaire, il y avait toujours la venue providentielle d’un ami qui arrivait pour secourir le héros en danger, malheureusement, personne ne viendrait les trouver dans cette grotte, perdue en plein milieu de la forêt et piégés par l’orage.

« Les anges pourront peut-être nous accorder un nouveau souhait… » proposa timidement Anne, ayant calmé ses pleurs. « Croyez-vous qu’ils puissent accomplir un autre miracle aujourd’hui ? »

Quand tout à coup, des bruits de pas leurs revinrent de la surface et l’écho lointain d’éclats de voix. Anne étouffa une exclamation de surprise et se redressa immédiatement sur ses genoux, guettant un mouvement à la surface.

« Pensez-vous que cela puisse être des lutins ? » interrogea la jeune fille, alors que tout ce tapage n’annonçait certainement rien d’autre que le retour des bandits dans leur repère.


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MessageSujet: Re: I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford  I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford Icon_minitimeJeu 8 Aoû - 17:14

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- Lorenzo, vous allez bien ?

Le jeune homme s’était joliment amoché pendant sa descente, il s’était en effet réceptionné sur la main droite, son poignet le faisait souffrir, et comble du malheur, il s’était entaillé la paume sur une pierre tranchante. Fort heureusement, il s’était entraîné pendant des années à manier l’épée de la main gauche en prévision de ce genre de situation, comme certains autres combattants, chose qu’il avait d’ailleurs appris à utiliser à son avantage au combat. Et même si sa poigne était moins sure de la main gauche, cela ne le gênerait donc pas outre mesure une fois qu’il aurait reçu les soins nécessaires. S’aidant de sa main valide, il s’était assis, la voix d’Anne, inquiète, l’ayant sorti de sa torpeur, alors qu’il était toujours un peu sonné par la chute. Il sentit ses petits doigts se refermer sur son bras gauche, et il l’aida à se rapprocher en passant son autre bras derrière sa tête.

- Oui, je n’ai rien, mentit-il. Et vous ? Êtes-vous blessée ?

En guise de réponse, la jeune fille se mit a pleurer. Dans un premier temps, Lorenzaccio pensa que c’était à cause de la chute, qu’elle s’était fait mal, mais il n’en était rien, ce qu’elle lui apprit lorsqu’elle s’inculpa elle-même de les avoir menés dans l’embarras. Lorsque ses sanglots redoublèrent, l’italien se trouva bien désemparé : il n’avait aucune idée de la conduite à adopter. Si il pouvait se targuer de bien connaître les femmes, il n’avait jamais su quoi faire devant une jeune demoiselle pleurnichant. Il se contenta donc de l’attirer contre lui, afin de pouvoir passer son bras libre autour de ses épaules, en conservant toutefois une distance pudique, de peur qu’elle ne le trouve trop insistant.

- Ce n’est pas de votre faute, Anne, vous ne pouviez pas vous douter qu’il y avait une crevasse ici. Il n’y a rien à pardonner, je vous assure !

Il ne trouva rien de plus à ajouter, et se contenta de lui murmurer de se calmer, tout en caressant ses cheveux pour la rassurer. Il n’aurait pas pensé une seule seconde à accuser Anne de leur malchance, et c’est plutôt lui qu’il maudissait. Il n’avait pas suffisamment fait attention à elle pour l’empêcher de partir devant seule, et si il avait été plus prudent, rien de tout cela ne serait arrivé. Le jeune homme n’avait plus qu’à trouver une solution, et vite : il voulait sortir la jeune fille de cette situation le plus rapidement possible. De plus, il devait bien s’avouer que si il parvenait, il passerait sûrement pour un héros à ses yeux, et cette idée lui plaisait bien. Cependant, il ne voyait rien qui puisse les aider, personne ne savait où ils se trouvaient, et il doutait que quiconque vienne à passer dans ce coin perdu de la forêt.

- Les anges pourront peut-être nous accorder un nouveau souhait… Croyez-vous qu’ils puissent accomplir un autre miracle aujourd’hui ?

L’italien sourit en l’entendant, il se serait moqué de n’importe qui d’autre en entendant cette idée saugrenue. Mais avant qu’il ne puisse répondre, des éclats de voix se firent entendre. Surpris, Lorenzaccio fronça les sourcils et se concentra dessus, se rendant compte qu’ils se faisaient de plus en plus nets, jusqu’à se trouver tout prêt, à l’entrée de la grotte, probablement.

- Pensez-vous que cela puisse être des lutins ?

Lorenzaccio posa un doigt sur les lèvres d’Anne, pour lui signifier qu’il fallait se taire. La situation leur promettait maintenant un échappatoire, mais elle devenait également beaucoup plus dangereuse : les voix appartenaient sans nul doute aux contrebandiers, qui possédaient sûrement des armes. Il se leva et l’entraîna avec lui de son bras valide.

- Ma chère, ce sont les brigands qui reviennent à leur repère. Ils ont vu César, ils savent donc que nous sommes là et vont sans doute essayer de nous faire du mal. Alors je veux que vous fassiez tout ce que je vous dit de faire.

Il avait articulé en ne faisant presque aucun bruit, s’étant rapproché d’Anne. Ses prunelles habituées à l’obscurité avaient tôt fait de repérer ce qui lui semblait être un début de cachette : une petite cavité creusée dans la paroi lisse, près d’eux. Il y entraîna Anne promptement, la poussant au fond du petit espace afin qu’elle court le moins de risques de se faire repérer. De longues minutes s’écoulèrent, ne laissant entendre que le bruit de leurs deux respirations et la conversation qui se déroulait au dessus d’eux.

- Ils nous a volé une torche, ce salopard. Il a du entrer dans la grotte, il pourra pas aller loin, on va lui faire la peau pour pas qu’il vole le magot. Ça doit être un noblaillard, vous avez vu l’harnachement du cheval ?

Comme il le pensait, les braconniers allaient descendre dans la cavité, par deal laquelle se prolongeait sans doute la grotte en un tunnel qui menait à leur butin. Une soudaine lueur provenant du haut lui apprit qu’ils avaient allumé des torches, ce que confirma un bruit de pas venant vers la crevasse ainsi que la soudaine apparition d’une échelle de corde qui se déroula à quelques pas d’eux, ainsi que des brigands qui ne tardèrent pas à en descendre. Sans même s’en rendre compte tant il était concentré sur la bande, Lorenzaccio avait placé son bras invalide devant Anne en un geste protecteur, comme pour se placer entre elle et les braconniers, tandis que sa main gauche se portait à la garde de son épée, prêt à la dégainer en cas de danger. Il dénombra quatre hommes, bien trop pour qu’il les batte, le combat serai trop inégal. Fort heureusement, ils passèrent sans les apercevoir, s’engouffrant dans un tunnel qui s’enfonçait dans les profondeurs de la roche. L’ambassadeur attendit quelques longues minutes avant de se décider à bouger, sortant de la cavité dans laquelle ils s’étaient dissimulés. Il posa de nouveau un doigt sur ses lèvres pour signifier à Anne de ne faire aucun bruit : un guetteur était sans doute posté à l’entrée de la grotte.

Lentement, le jeune homme gravit l’échelle de corde avant Anne pour pouvoir parer à toute éventualité. Son poignet le lançait, et il du serrer les dents pour réussir à attraper la corde et la garder entre ses doigts endoloris. Une fois arrivé en haut, il comprit qu’il avait bien fait de passer devant : effectivement, un des hommes se trouvait devant l’entrée, leur tournant le dos, veillant à ce que personne ne vienne déranger ses comparses. Tout en aidant la jeune fille à se hisser près de lui et en lui intimant une nouvelle fois le silence, il réfléchit à un moyen d’agir. L’attaquer de front serait une mauvaise idée, l’italien se résolut donc à dégainer son épée en silence, et s’approcha à pas de loup de l’homme. Il brandit son arme, et lui asséna un coup derrière la tête avec le plat de la lame. Ce fut efficace : le guetteur tomba à terre, assommé. Lorenzaccio s’accroupit à côté de lui pour vérifier qu’il ne lui avait pas fait trop de mal, et fit remarquer :

- Ce n’est pas très honorable, certes, mais le bruit des épées aurait attiré les autres, et je n’aurais pas donné cher de notre peau, dans ce cas.

Puis il se releva, et alla décrocher l’échelle de corde afin que les autres ne puissent pas remonter, avant de détacher son cheval, et de se tourner vers Anne.

- Dépêchons nous de partir. Si celui-là se réveille, je crains qu’il ne puisse aider ses comparses à remonter, et qu’ils ne se lancent à notre poursuite car nous avons découvert leur repère. Il nous faut revenir à Londres au plus vite.

Les contrebandiers avaient laissé leurs cheveux près de l’entrée également. Lorenzaccio choisit le meilleur d’entre eux, une bête tout de même très mal entretenue, le détacha, et tenta de l’amadouer en flattant son encolure. Voyant que l’animal semblait obéissant, il se tourna vers Anne :

- Vous prendrez César, je lui fais confiance, il sera docile. Puis il s’expliqua : Nous aurons plus de facilité à galoper si ils nous rattrapent avec deux chevaux, c’est pourquoi je leur emprunte celui-ci.

Puis, sans plus de cérémonie, il hissa Anne sur la selle de sa monture, comme il l’avait fait tout à l’heure, avant de monter lui-même sur le cheval qu’il venait de voler, et de se mettre en route. Discipliné, César se mit au pas à la suite de son maître, emportant Anne sur son dos. Dehors, la pluie tombait avec encore plus de force qu’avant, malgré l’épais feuillage des arbres, ce qui rendait la vision limitée à quelques mètres. De plus, Lorenzaccio ne savait pas trop comment s’orienter, il connaissait mal les bois et savait seulement que si ils parvenaient à en sortir, ils trouveraient une route menant à plusieurs villages aux alentours et de là, ils pourraient sans doute rejoindre Londres. Alors il avançait un peu au hasard, et ne se rendit compte qu’il était vraiment perdu seulement quand la luminosité commença à baisser. Il réfléchit un moment : il était parti en fin d’après midi, il était effectivement plausible que le Soleil commence à se coucher et l’heure devait tourner autour de dix-huit heures. La situation se compliquait encore : avec une pluie pareille, mieux valait ne pas se trouver en forêt de nuit, car ils risquaient de patauger dans la boue pendant des heures sans pouvoir retrouver leur route, et il n’apercevait aucun chemin de là où il se tenait. Et puis il y avait son poignet, qu’il tentait de maintenir droit contre lui et qui le gênait.
Une demi-heure plus tard, alors que la nuit était définitivement tombée sur la forêt, Lorenzaccio s’arrêta, et dut s’avouer vaincu et totalement perdu. Puis il se tourna vers Anne, dont le cheval s’était immobilisé à côté du sien.

- Je crois que nous sommes perdus, constata-t-il enfin, bien que cela n'ait pas grande utilité.






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MessageSujet: Re: I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford  I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford Icon_minitimeMar 13 Aoû - 2:17
Le cœur gonflé d'espoir, Anne observait les hauteurs de la caverne, essayant de discerner l’éclat d’un petit être de la forêt qui serait bravement venu à leur rencontre. Mais nulle présence de lutins dans la dangereuse obscurité. Anne resta muette de stupéfaction lorsque Lorenzo appuya son doigt sur les lèvres de la jeune fille pour la faire taire. L’avait-elle froissé par quelque parole ? Il l’avait pourtant assurée du contraire il y a quelques instants.
Mais aussitôt l’italien répondit à sa question muette en lui apprenant que c’était sans nul doute les brigands qui étaient revenus dans leur repère. Le regard de la blonde s’illumina d’un coup et elle se mordit la lèvre inférieure pour retenir un petit gloussement d’excitation. C’était décidément une fabuleuse aventure qu’elle vivait avec Lorenzo ! Elle n’aurait voulu céder sa place à personne d’autre, même s’ils se confrontaient à de grands périls. Toute son enfance, elle avait rêvé d’aventures et aujourd’hui, elle avait l’immense chance d’en vivre une.
Mais soudain, l’alerte du jeune homme la faillit frémir. Leur faire du mal ? Ainsi ils pourraient donc être en danger … de mort ? Comme un ballon qu’on dégonfle, son excitation s’éteignit. La peur se propagea en elle, mais elle songea qu’elle se trouvait avec Lorenzo. Il était un héros, il ne pouvait donc pas mourir et il les sauverait de cette situation. C’était l’évidence même pour la jeune fille.
Elle hocha donc docilement la tête quand il lui dit de suivre toutes ses directives. Elle fut surprise quand il la poussa mais elle se rendit bien vite compte que c’était pour la mener jusqu’au fond d’une petite cavité. Elle ne dit mot et s’astreint au silence même lorsqu’une douleur aiguë la lança dans l’épaule gauche. La peur de la chute passée, la douleur se rappelait désormais à elle. Une toute autre souffrance se fit sentir à sa jambe droite. Pendant que Lorenzo avait son regard levé vers la présence des bandits, Anne releva légèrement son jupon pour aviser qu’elle s’était entaillée la cuisse et qu’elle saignait. Certainement s’était-elle écorchée durant la chute sur une pierre tranchante. Elle mordit la langue pour ne pas gémir de douleur. Il fallait qu’elle soit brave pour Lorenzo et que surtout, elle ne parle pas. Même pas un simple murmure ne s’échappa de ses lèvres.
De longues minutes s’écoulèrent sans que rien ne se passe. La blonde ne faisait même pas attention aux voix qui leur revenaient de la surface, son esprit uniquement dirigé sur la source de la douleur. Les larmes lui montèrent bientôt aux yeux.
Enfin, Lorenzo se rappela à elle et il la tira de l’alcôve. Elle serra les dents pour ne montrer aucun signe de douleur alors que sa jambe et son épaule la faisait souffrir. Toujours silencieuse, elle le suivit quand il se dirigea vers une échelle qui venait de leur être offerte. Elle ne se posait aucune question, cédant à la confiance aveugle que l’italien lui inspirait. Elle aurait très bien pu évoluer les yeux bandés sans douter une seule fois de lui.
Elle eut cependant un moment d’hésitation quand elle se retrouva au pied de l’échelle. Puis faisant fi du mal que cela allait lui procurer, Anne monta lentement, se mordant la lèvre jusqu’au sang pour rester muette. Elle ne put cependant retenir un léger soupire de soulagement lorsqu’enfin son calvaire prit fin. Elle fut bien heureuse lorsque l’italien l’aida à se hisser au sommet. Elle s’avança à sa suite, évoluant dans ses pas et faisant tout pour qu’aucun bruit d’étoffe froissée ne soit audible pour les contrebandiers. Elle l’observa en silence dégainer son épée. Durant un bref instant, elle crut au pire, mais elle fut soulagée de constater qu’il n’avait fait que l’assommer. Les yeux brillants d’admiration, elle l’écouta lui expliquer chacune de ses actions tandis qu’il décrochait l’échelle et préparait les chevaux.

« Vous prendrez César, je lui fais confiance, il sera docile. »

Anne hocha la tête en signe d’assentiment. Lorenzo la hissa immédiatement sur la selle de sa monture et n’attendant pas un instant de plus, il monta lui-même sur le dos d’un des chevaux des bandits. Elle risqua un rapide coup d’œil à sa jambe endolorie et s’effraya de constater que le sang coulait toujours dans une grimace. Les destriers se mirent au pas affrontant la tempête qui faisait toujours rage au-dehors. Anne rabattit de sa main valide la capuche de la cape de l’italien sur sa tête. Mais cela ne l’empêcha pas au bout de quelques minutes d’être déjà trempée jusqu’aux os. Au travers des feuillages et du rideau de pluie, la blonde avait le plus de mal rester fixée sur la silhouette de Lorenzo. La visibilité était des plus mauvaises et Anne commençait à se demander comment ils pourraient s’en sortir, d’autant que la nuit était en train de poser son voile sur la forêt. Elle le suivit cependant sans rien dire.
Finalement, le cheval de Lorenzo s’immobilisa et César avec lui.

« Que se passe-t-il ? » s’enquit alors Anne.
« Je crois que nous sommes perdus. »

La vérité que la jeune fille voulait se cacher tomba comme une évidence. Ils étaient définitivement perdus au milieu de cette forêt et en plein cœur d’une pluie déchaînée. Mais même si leur situation paraissait des plus précaires, la jeune fille était rassurée par la présence de l’italien. Peu importait qu’ils passent la nuit dans la tempête tant qu’elle se trouvait à ses côtés.

« Tout n’est peut-être pas perdu… les anges pourraient nous venir en aide. » se risqua-t-elle à proposer en levant le bout de son nez vers le ciel.

Mais alors qu’elle avait les yeux rivés dans les nuages à chercher l’éclat d’un de ses êtres des cieux, un violent éclair déchira l’horizon. La foudre si proche et si violente que l’espace d’un instant, elle illumina toute la sylve, causant la frayeur des deux chevaux. Mais si Lorenzo était parvenu à calmer sa monture, Anne ne put en faire autant. Alors que le cheval se cabrait dans un hennissement strident, la jeune fille s’accrocha de toutes ses forces aux brides afin de ne pas tomber. Elle ne put retenir un gémissement de douleur alors qu’elle forçait sur son épaule endolorie. César partit ensuite dans une embardée folle, emmenant Anne avec lui sur son dos. Il galopa à toute allure, bifurquant entre les arbres, s’élançant dans les bois dans des directions confuses. Chaque nouvel éclair le plongeait dans un état de stupeur qui le faisait se cabrer et fuir de tous les côtés. Anne continua de s’accrocher désespéramment à l’animal apeuré mais elle sentait ses forces faiblir. Elle tentait vainement d’apaiser la bête, mais rien n’y faisait. Une fois de plus fut soudain une fois de trop. Alors que César s’était de nouveau redressé sur ses pattes arrières, Anne fut expulsée de selle. Elle atterrit durement sur le sol et rampa aussitôt dans la boue pour ne pas être écrasée par les sabots du cheval. Elle eut tout juste le temps de faire une roulade sur le côté pour éviter un coup furieux tandis qu’il repartait au galop.

« Non ! Reviens ! » hurla-t-elle en levant le bras vers lui mais son cri fut couvert par le mugissement du tonnerre.

Anne se releva, s’empêtrant dans sa robe pour courir à la suite du cheval mais sa silhouette s’effaça bientôt, la laissant seule au cœur de l’orage. Elle sentit soudain l’angoisse monter en elle. Elle se tourna dans tous les sens, cherchant la venue de Lorenzo ou du cheval pour la rassurer. Mais ce n’était que les ténèbres qui l’entouraient, les éclairs et la pluie. A chaque coup de tonnerre, elle croyait voir des ombres maléfiques autour d’elle, prêtes à fondre sur la jeune fille. Poussant un hurlement, elle se mit à courir à toutes jambes au mépris de son mollet blessé, fuyant un quelconque démon à ses trousses. Elle avait remonté ses jupons et jetait des regards terrifiés derrière elle. Elle voyait les affreux succubes à sa poursuite et ses larmes de terreur se mêlaient aux gouttes glaciales qui fouettaient son visage.
Quand soudain, elle trébucha alors qu’elle avait le dos tourné. Elle dévala la pente, roulant dans la boue sur plusieurs mètres. Elle finit sa chute la tête la première dans une flaque. Elle se redressa sur le seul bras qui ne la faisait pas souffrir et recracha l’eau sale qui s’était insinuée dans sa bouche.

« Lorenzo… » hoqueta-t-elle, les yeux brûlants de larmes.

Il était le seul à être en mesure de calmer son esprit terrorisé. Elle continua de l’appeler dans une lente litanie, allongée dans la boue. Elle ne bougeait pas, tétanisée par la peur. Son corps frémissait seulement quand le tonnerre faisait trembler la terre.
Un hennissement lui revint soudain et elle se redressa d’un bond. Scrutant l’horizon, elle vit paraître devant ses yeux la haute silhouette d’un cheval. Un souffle de soulagement déferla en elle et elle s’élança vers le cavalier, certaine qu’il s’agissait de Lorenzo.

« Oh Lorenzo j’ai cru que je ne vous retrouverai jamais ! »

Elle était presque à la hauteur de Lorenzo, lorsque la silhouette de la bête se dédoubla, laissant apparaître un nouvel arrivant. Anne fronça les sourcils. L’italien avait-il trouvé de l’aide ? Et soudain les ombres se précisèrent.
Ce n’était pas Lorenzo.

« C’est le cas. » déclara l’un des deux cavaliers avec un large sourire dont elle se méfia aussitôt.

La blonde eut un mouvement de recul et porta la main à la clef à son cou, priant silencieusement le retour de Lorenzo.

« Qu’est-ce qu’on a là ? » demanda le second homme mielleusement en faisant tourner sa monture autour de la blonde à la manière d’un prédateur.

Anne avisa soudain qu’il avait un bandage à la tête. Etait-ce le bandit que l’italien avait assommé un peu plus tôt ? Elle recula encore quand le premier homme descella et s’approcha d’elle. Elle voulut partir en courant, mais l’homme au bandage mettait pied à terre à son tour.

« Qu’est-ce que vous voulez ? » demanda-t-elle d’une voix tremblante.

Elle se retourna brusquement quand elle sentit que sa cape glissait de ses épaules. Le premier bandit prit une mèche blonde d’Anne entre ses doigts et l’observa, comme s’il l’estimait. Puis quelque chose parut accrocher son regard.

« Qu’est-ce que tu as là ? »

Joignant le geste à la parole, le bandit approcha sa main du cou de la jeune fille. Il indiquait manifestement le pendentif qu’elle portait. La colère monta soudainement en elle lorsqu’elle comprit qu’il chercherait certainement à lui dérober le bijou. C’était un présent de Lorenzo et elle ne comptait pas se le faire enlever, aussi elle frappa l’homme en plein ventre de ses maigres forces. Le coup n’avait pas été puissant mais il avait tout de même pour effet de le faire reculer un peu.

« Garce ! » cracha-t-il sur un ton venimeux. « Tiens-là. »

Anne n’eut pas le temps d’esquisser un mouvement que l’homme au bandage l’immobilisa dans ses bras, faisant mauvais parti de son épaule blessée. Elle se mit à hurler, autant à cause de la douleur que pour implorer de l’aide. Elle se débattit de toutes ses forces et le bandit qui la maintenait dut mettre sa main devant sa bouche pour la faire taire. Quant au premier, il arracha violement le collier du cou de la blonde. Furieuse, elle mordit à pleine dents les doigts du contrebandier jusqu’à ce que le goût métallique du sang emplisse sa bouche. Il hurla et relâcha momentanément sa prise. Ne cherchant plus qu’à retrouver son bien, elle se jeta sur le voleur. Elle le frappa, le griffa, mais sans grand succès, si bien qu’il n’eut besoin que d’une main pour la tenir en respect. Il lui asséna ensuite une gifle magistrale qui fit bourdonner ses oreilles. Elle s’écrasa dans la boue, sonnée.

« On l’emmène. On lui réglera son compte un peu plus tard. »
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MessageSujet: Re: I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford  I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford Icon_minitimeSam 17 Aoû - 2:13

I can't unlike you, sorry.

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Lorsque le premier éclair frappa, il effraya les chevaux, et Lorenzaccio lui-même sursauta, car rien ne laissait prévoir l’orage. Les deux bêtes, mortes de peur, s’emballèrent, et la monture du jeune homme se cabra même, si bien qu’il eut toutes les peines du monde à le maîtriser. Lorsqu’il vit César partir à toute vitesse, lui enlevant sa belle, il força encore sur les rênes, et lança son destrier au triple galop à sa suite, espérant les rattraper. Mais il les avait perdu de vue depuis trop longtemps, et les coups de tonnerre faisaient bien trop de bruit pour que l’italien puisse penser les repérer à l’oreille.

- Anne ! hurla-t-il dans l’espoir qu’elle l’entende.

Il s’époumona ainsi pendant de longues minutes, maintenant au trot, tentant de percer l’épais feuillage sombre, sans succès. Errant, sans savoir où la chercher, il tentait vainement de se rassurer en se disant qu’elle était avec César : il savait que le cheval chercherait à revenir vers lui, son maître, ou bien à Londres, dont il connaissait plus ou moins le chemin du retour pour s’être souvent rendu dans la forêt. L’italien imaginait la pauvre Anne, seule dans cette forêt humide : elle devait mourir de peur, imaginer des êtres maléfiques derrière chaque buisson, telle qu’il la connaissait. Il s’en voulait à mort de ne pas être monté sur le même cheval qu’elle : il se serait sans doute blessé lorsque César s’était cabré, mais peut-être ne seraient-ils pas dans la même situation.

Un éclair d’espoir le traversa toutefois lorsqu’il vit de loin un cheval venir au trop vers lui : pas de doute, il s’agissait du sien, il aurait reconnu entre mille ce martèlement caractéristique des sabots de la bête sur le sol détrempé. Mais son soulagement se transforma tout à coup en panique lorsqu’il s’aperçut que la selle était vide : César avait manifestement semé Anne, qui avait du tomber. Le jeune homme avança à la rencontre de son fidèle destrier, et lui flatta tout d’abord l’encolure afin de le calmer, car il était manifestement dans un état de stresse. Puis, faisant fi de la douleur que lui causait son poignet, il empoigna fermement les rênes de César, et mit sa monture au trot. Rongé par l’inquiétude, il l’appelait, parcourant les bois, désespérant de la retrouver, quand soudain, des éclats de voix proches le stoppèrent net. Il ne parvenait pas à distinguer ce qui se disait, mais s’approcha, à tout hasard.

-  On l’emmène. On lui réglera son compte un peu plus tard.

Ce qu’il vit le surprit et le choqua tellement qu’il resta sans voix pendant quelques secondes. Anne, couverte de boue, qu’un homme relevait sans ménagement, osant poser ses mains sales sur ses petits bras délicats. Son sang ne fit qu’un tour, et la colère, brûlante, terrifiante, s’immisça en lui. La jolie blonde semblait totalement sonnée, et il en déduisit qu’ils l’avaient frappée ; la liste de leurs méfaits ne faisant que s’alourdir, et si ils étaient déjà condamnés à mort dans l’esprit du jeune homme, ils l’étaient doublement à présent qu’il avait fait ce constat.

- Ne la touche pas.

César avait parcourut la distance qui séparait son maître des brigands, et avait lancé l’ordre d’un ton froid, sans appel. Il se tenait face à eux, glacial, un rictus mauvais dessiné sur le visage, les yeux emplis de la folie qui l’envahissait lorsque la fureur prenait le dessus.

- Si tu la veux, va falloir venir la chercher, ricana l’un des malfrats.

Répondant au défi qui lui était lancé, Lorenzaccio descendit promptement de cheval, et dégaina sa longue épée de la main droite, ignorant la douleur. Il semblait presque en transe, son poignet était réparé par la haine qui le dévorait, ses prunelles gelées voyageant des contrebandiers à Anne qui reprenait doucement conscience, augmentant sa rage à chaque aller-retour. Une lueur folle illuminait son regard : il avait besoin de les tuer. Il allait leur faire payer le simple fait d’avoir posé les yeux sur elle et pensé à mal, ce qui était impardonnable.

L’homme qui tenait Anne la poussa vers son compagnon, qui l’agrippa fermement, et sortit à son tour son épée. Le duel était engagé, les adversaires se toisèrent, l’air on ne peut plus sérieux. Ils se jaugeait l’un l’autre, en se déplaçant toujours très légèrement, attendant que l’autre passe à l’attaque. Enfin, l’opposant de l’italien se décida, et porta un coup, habilement esquivé par ce dernier. Désormais, la véritable bataille se livrait, et les attaques se suivaient, silencieuses. On n’entendait plus que le tonnerre, et les lames s’entrechoquant dans des crissements stridents. Avec son poignet blessé, Lorenzaccio était désavantagé, mais la fureur le portait, et il le désarma bientôt, le menaçant de la pointe de son fer, qu’il dirigeait vers sa gorge.

- Relâche la demoiselle, ou je le tue, proféra-t-il en direction du malandrin qui retenait toujours Anne.

Celui-ci ne se fit pas prier, et la poussa en avant. Le jeune homme lui fit signe d’avancer, attendant qu’elle se trouve derrière lui, hors d’atteinte des malfaiteurs. Puis un sourire mauvais envahit son visage, et il trancha la gorge de son adversaire d’un coup vif, imprévisible. Certes, il manquait à sa parole, il n’était pas un homme d’honneur. Mais il ne l’avait jamais été, et quiconque aurait cru pouvoir le changer aurait été bien sot d’y croire. Le sang gicla, salissant les vêtements de Lorenzaccio déjà poussiéreux et trempés. Il se précipita vers le compagnon du cadavre qu’il avait laissé choir à terre, avec qui il n’échangea que quelques coups avant de lui enfoncer son épée dans le cœur jusqu’à la garde. Lorsqu’il retira son arme et que le corps sans vie tomba lourdement dans la boue, il parut enfin se calmer. L’épée à la main, il essuya du dos de la main le sang qui coulait le long de sa joue et qui n’était pas le sien. La bête féroce en lui s’était réveillée, et avait fait deux victimes, ce jour là. Lorenzaccio aurait pu ne rien regretter, mais à vrai dire, il avait honte d’avoir montré son côté le plus noir à Anne. Tuer ces deux hommes lui avait paru facile, comparé au fait d’affronter son regard, et il du rassembler tout son courage pour se retourner et lui faire face. Comme il s’y attendait, la jeune femme semblait réellement choquée. Il rangea son épée, et fit quelques pas vers elle, craignant qu’elle ne s’enfuit à toutes jambes.

- Je suis désolé, et je… commença-t-il, avant de s’interrompre.

L’italien venait de s’apercevoir qu’une tache de sang grossissait à vue d’œil sur la robe de sa belle, sur sa cuisse, plus précisément. De plus, elle était très pâle, et semblait fébrile. Craignant qu’elle ne s’évanouisse, il se précipita vers elle pour la soutenir.

- Anne, vous êtes blessée !

Ce n’était pas l’intervention la plus intelligente qu’il aurait pu faire, car elle devait bien s’en douter. II fallait faire vite, car elle perdait visiblement beaucoup de sang, aussi, il se dépêcha de la mener là où il avait laissé les chevaux, pour ne trouver que César, l’autre bête s’étant sans doute enfuie.

- Je vous ai promis de vous sortir de là, et je le ferai, si vous acceptez de me faire encore confiance.

Sur ces mots, il la hissa sur son destrier, avec toute la délicatesse dont il était capable de faire preuve, avant de se jucher devant elle, et de glisser ses bras fins autour de son torse.

- Accrochez-vous aussi fort que vous le pouvez, ce ne sera pas long, je vous le promet.

Sur ce, l’ambassadeur lança sa monture au galop, afin de rejoindre un petit chemin de forêt qu’il avait repéré lorsqu’il était à la recherche d’Anne. Une fois sur le sentier, il accéléra encore, se retournant de temps à autre afin de vérifier que sa protégée ne glissait pas de selle. Ses suppositions s’avérèrent juste : l’allée débouchait sur une route, plus large, qu’il emprunta à droite, voyant au loin des toits de maison, où il pensait pouvoir trouver refuge. En y parvenant, le jeune homme reconnu un hameau sur la route de Londres, mais qui se trouvait beaucoup trop loin pour qu’il songe à y parvenir avant que sa belle ait perdu trop de sang. Lorsqu’il dépassa les premières maisons, il mit César au trot, et s’arrêta devant une auberge, devant laquelle il descendit de monture, avant d’aider sa cavalière à faire de même. Elle semblait encore plus faible et hagarde qu’auparavant, et Lorenzaccio la soutint pour arriver jusqu’à la porte, qu’il poussa. A les voir arriver ainsi, couverts de sang, de boue, de poussière, et trempés jusqu’aux os, plusieurs clients s’arrêtèrent de discuter pour les observer, l’air incrédule.

- Je… commença Lorenzaccio, hésitant, s’adressant à la tenancière.

Puis il reprit bientôt contenance, ayant trouvé un beau mensonge à lui fournir, qui ferait paraître sa présence avec elle moins suspecte, car tous devaient croire à un enlèvement ou à la fuite d'un jeune couple en mésalliance.

- Mon épouse et moi-même nous rendions à Londres, mais le tonnerre à fait fuir son cheval, elle est tombée et est blessée. Nous ne pouvons continuer notre route, auriez-vous une chambre pour la nuit ?
- Bien sûr, répondit la femme avec une certaine méfiance, après avoir consulté son mari du regard.

Elle les précéda dans l’escalier qui menait au premier étage de l’établissement, l’italien la suivant en portant la jeune blonde dans ses bras, car elle était trop faible pour monter les marches, une lourde clef à la main, qu’elle utilisa pour ouvrir une petite chambre, meublée modestement d’un lit, d’un fauteuil, d’une table et de deux chaises, mais propre et bien tenue. En entrant, le jeune homme déposa immédiatement Anne sur le lit, avant de retirer ses gants ensanglantés, sans pour autant se préoccuper de l’état de sa paume, ou encore moins de son articulation. L’aubergiste se pencha sur la jeune fille avec un « Pauvre petit » attendri, tandis que l’ambassadeur retirait la ceinture à laquelle pendait sa lourde épée, qui l’encombrait, et la déposait sur la table.

- Auriez-vous de quoi  soigner mon épouse ? demanda-t-il à leur hôte.
- Bien entendu ! s’exclama celle-ci. Elle a également besoin d’un repas chaud, pour reprendre des couleurs, et je peux vous procurer des vêtements secs, ou vous attraperez la mort !

Sur ces paroles, elle sortit de la pièce, et Lorenzaccio profita de son absence pour allumer un feu dans la cheminée, qui réchauffa aussitôt l’atmosphère. Lorsque la tenancière revint, elle aida Anne à passer une chemise de nuit propre et sèche, tandis que l’ambassadeur enfilait les vêtements de son mari, un pantalon et une chemise, légèrement trop larges, derrière un paravent fort providentiel. Puis elle s’éclipsa, les laissant seuls, une bassine d’eau chaude et du linge près du lit, un plateau supportant de la nourriture sur la table. Hésitant, le jeune homme finit par se décider à aller s’assoir près de la jeune fille, toujours allongée.

- Je sais que ce que je vais vous demander n’est pas facile, mais accepteriez-vous de me laisser panser votre blessure ? Sans soins elle risque de ne pas se refermer, et de s’aggraver encore.

Il guetta son assentiment, puis, avec toute la pudeur possible, releva le tissu de la robe sur la blessure ouverte. Certes, il avait déshabillé de nombreuses femmes, et l’aurait sûrement fait en d’autres circonstances avec une autre à ce même instant sans le contretemps qui l’avait finalement conduit à atterrir dans cette auberge. Mais la vue de la peau laiteuse de la cuisse d’Anne lui causa une étrange gêne, un trouble qu’il n’aurait su expliquer. Il avait l’impression de regarder là où ne fallait pas, de se montrer trop insistant, il craignait de l’effrayer. Certes, il aurait bien voulu goûter aux charmes de la jeune femme, cependant, il savait qu’il l’aurait fait avec un sentiment de culpabilité sur le cœur, sans pouvoir se l’expliquer. La vérité était qu’il n’aurait jamais osé porter le moindre doigt doté de mauvaises intentions sur sa bien aimée, aussi tentant que cela puisse être. En silence, il nettoya la plaie, avant de la bander avec soin, en veillant à ne pas lui faire mal, avant de rabattre bien vite le pan de la chemise de nuit sur sa jambe. Osant enfin respirer, il trempa un linge dans l’eau chaude, pour ensuite le passer sur le visage tâché de boue de sa belle de sa main valide, dans le but de le nettoyer, lui souriant, heureux de partager ce moment avec elle.

- Voilà, ma chère, vous êtes resplendissante ! sourit-il en la dévorant du regard.

A vrai dire, elle a encore de la boue collée dans ses cheveux mouillés, mais qu’importe, pour lui, elle est plus belle à chaque fois qu’il lève les yeux sur ses traits fins et sa chevelure de lin. Puis il soupira, et saisit l’une de ses petites mains blanches entre les siennes, sans penser à la coupure qui ornait sa paume.

- Je suis vraiment désolé que vous ayez eu à subir tout cela, et surtout à voir ce que vous avez vu. Je comprendrai si vous ne vouliez jamais plus me revoir, chère Anne. Je vous raccompagnerai à Londres demain matin, et si vous le souhaitez, nous ne nous reverrons plus.

Même si cela lui fendait le cœur, il devait admettre que ses actions avaient été fort répréhensibles, un assentiment de la part de la jeune fille ne l’aurait pas surprise. En silence, il guetta sa réaction, le cœur battant la chamade, alors qu’on entendait plus dans la petite chambre que le bruit du feu qui crépitait joint à celui de la pluie battant les carreaux.







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MessageSujet: Re: I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford  I can't unlike you, sorry. • Anne Stafford Icon_minitimeLun 19 Aoû - 19:28
Face contre terre, Anne ne parvenait à reprendre pleinement ses esprits. Elle était trempée, recouverte de boue et de sang, embourbée dans sa toilette imbibée d’eau. Elle ne savait plus très bien où elle était, ne sentant sur sa peau que la morsure de la pluie. La douleur reflua soudain en elle et lui fit perdre tous ses repères. Elle gémit alors, tant à cause de sa blessure à la jambe, que celle à son épaule et à sa joue, qui se propageait dans tout son visage. Elle sentait sa joue pulser intensément, encore brûlante d’avoir été frappée.
Les oreilles bourdonnantes, des voix lui revinrent et semblèrent très lointaines, couvertes par le mugissement de la tempête. Quand soudain, elle se souvint. Les bandits !
Un frisson de panique lui parcourut l’échine et un sanglot agita son corps endolori, figeant une expression de peur et de désespoir sur les traits de la jeune fille. Qu’allaient-ils lui faire désormais ? Pour avoir de nombreuses fois été mise en garde, elle pensa connaître la réponse à cette terrible question. La terreur s’empara d’elle et elle se mit à ramper dans la boue, rassemblant bravement ses forces déclinantes pour échapper aux brigands. Cet effort apporta un tel lot de souffrance à Anne, qu’elle crut bien défaillir, gémissant et pleurant des larmes qui venaient se perdre dans le torrent de la pluie. Anne porta la main à son cou, mais la clef n’y trônait plus. Destituée de son bien le plus précieux, elle se sentait totalement perdue.
Désespérée, elle se mit à prier les anges d’une voix tremblante et suppliante.

« Je vous en supplie. Faites que Lorenzo revienne... »

Totalement meurtrie, elle ne se défendit même pas contre le brigand qui la souleva sans ménagement. Les anges l’avaient abandonnée. Un cri ne parvint même pas à franchir ses lèvres ensanglantées alors que la douleur se faisait de plus en plus vive. Elle arrivait tout juste à murmurer une faible litanie pour implorer la venue de l’ambassadeur italien. Progressivement, elle sentait ses forces défaillir. Le contrebandier la mit debout, la tenant par les bras comme une poupée de chiffon. Il allait la mener jusqu’à son cheval quand tout coup, un miracle se produisit.

« Ne la touche pas. »

Anne releva le regard et ce qu’elle vit la remplit d’espoir. Lorenzo se tenait là, dressé fièrement et dans toute sa hauteur sur son destrier, César. La terreur qui l’habitait jusqu’à présent se transforma bientôt en soulagement. Elle ne craignait plus rien aux côtés de l’homme qu’elle aimait. Il la protégerait comme il le faisait toujours. Ils étaient saufs. Son bonheur de le voir était tel qu’elle ne se méfia même pas de l’expression inquiétante qui était peinte sur son visage, ni de ton glacial qu’il avait employé. Mais il sembla qu’elle n’était pas la seule à ne pas craindre le regard revanchard de l’italien. Le bandit qui la tenait lui répondit avec un tel dédain que Lorenzo descendit de son cheval.
Ses entrailles se nouèrent lorsqu’elle le vit dégainer son épée et mettre au défi son adversaire. Le malfrat poussa aussitôt Anne, qui fut immédiatement réceptionnée par le second bandit.  Elle se mit à craindre pour la vie de Lorenzo et ce fut avec des yeux angoissés et terrorisés qu’elle observa la scène qui se déroulait devant elle. A peine les lames commencèrent à tinter, qu’Anne fut prise d’un vertige et s’affaissa au sol, maladroitement tenue d’un bras par le bandit.
Lorsque ses sens s’éclaircirent enfin, ce ne fut que pour voir Lorenzo, tenant en respect de son épée le mécréant. Elle n’eut pas le loisir de comprendre plus à la situation qu’elle se fit pousser en avant. Elle trébucha, tomba à quatre pattes dans la boue et allait se relever lorsqu’un éclat doré accrocha son regard. Elle tendit la main et se saisit de l’objet qui n’était ni plus ni moins que la clef qui pendait à la chaînette d’or. Se pouvait-il que le bandit l’ait faite tomber par mégarde tandis qu’elle l’avait frappé et griffé ? Peu lui importait, elle venait de retrouver son trésor inestimable. Malheureusement la chaîne était brisée et pour ne pas la perdre à nouveau, elle la glissa dans sa besace, qui par chance était restée intacte. Puis suivant les consignes muettes de Lorenzo, elle partit se poster hors d’atteintes des deux contrebandiers d’un pas mal assuré.
Son souffle était court et son cœur battait la chamade alors qu’elle craignait pour le dénouement de cette situation. Les bandits allaient-ils les laisser partir sans rien faire ? Anne avait bien peur qu’ils ne se lancent à leur poursuite sitôt qu’ils auraient tourné le dos. Cependant, il y avait bien une éventualité à laquelle la blonde ne s’attendait pas et qui se déroula sous ses yeux terrorisés. Les choses se passèrent soudain très vite. Lorenzo trancha la gorge du malfrat, manquant à sa parole. Anne étouffa un cri d’horreur, planquant ses mains contre sa bouche alors que l’italien se jetait maintenant sur son second adversaire, le tuant avec tout autant de rapidité. Le deuxième cadavre s’écrasa dans la boue, non loin de celui de son comparse, mêlant leur sang à la pluie. Tétanisée, son regard s’abîma dans la contemplation sordide des corps sans vie, leurs visages figés dans une expression de frayeur.

« Pourquoi avez-vous fait cela Lorenzo ? » souffla Anne, incrédule et sanglotante.

Mais Lorenzo se retournait déjà vers la blonde. Malheureusement, elle ne put entendre l’intégralité de ses paroles car un nouveau vertige l’étreignit et le monde vacilla autour d’elle. Il ne fallut à l’ambassadeur pas plus de quelques pas pour briser la distance qui les séparait et il la soutint pour pas qu’elle ne tombe. La douleur la brûlait de toute part et elle devait lutter pour ne pas sombrer dans l’inconscience. Avait-elle perdu autant de sang que ça ?
Malgré ce virulent combat intérieur, elle ne comprit pourquoi l’instant d’après, elle était déjà en face de César.

« Je vous ai promis de vous sortir de là, et je le ferai, si vous acceptez de me faire encore confiance. »

Fermement accrochée au bras de Lorenzo, elle observa son visage humide et sa mine inquiète. Pouvait-il avoir réellement avoir tué ces deux brigands ? La blonde ne lui répondit que pas un faible hochement de tête, ne se sentant pas la force de prononcer le moindre mot. Une fois plus, le jeune homme la jucha sur la selle avant de lui-même se hisser. Faiblissant à vue d’œil, Lorenzo fut obligé de glisser lui-même les bras de la jeune fille autour de sa taille pour qu’elle ne tombe pas. Elle tenta tout de même de rassembler le peu d’énergie qui lui restait pour s’accrocher le plus fermement qu’elle le put à l’italien, faisant fi de son épaule endolorie. Elle laissa reposer sa tête sur contre le dos du cavalier, fermant les yeux. Puis ils partirent au galop au cœur de la tempête, laissant le terrible massacre derrière eux.
Ce fut presque un miracle qu’Anne ne chute pas alors que sa conscience chavirait de plus en plus. Elle ne savait plus depuis combien de temps ils galopaient, se focalisant sur le martèlement des sabots du cheval pour se tenir éveillée. Elle tremblait toujours, tant à cause du froid que du choc.
Quand enfin, la bête s’immobilisa et Lorenzo lui fit regagner la terre ferme. Il guida jusqu’à l’intérieur d’une petite auberge. Avaient-ils regagné Londres ? Sa sœur devait très certainement s'inquiéter de son absence. Elle n’entendit que d’une oreille absente le récit du jeune homme, son esprit s’éveillant seulement lorsqu’il la présenta comme son épouse. Anne aurait pu s’en réjouir si la douleur ne la submergeait pas. Puis l’instant d’après, elle se retrouva dans les bras de Lorenzo, devant une porte que la tenancière était en train d’ouvrir sans qu’elle ne comprenne pourquoi elle était arrivée là, une fois de plus soumise à l’une de ses absences, les sens considérablement altérés.
Sitôt ayant pénétrés dans la chambre, l’italien la déposa dans le lit. Autour d’elle, la femme et l’italien conversaient et s’agitaient, jusqu’à ce que cette première quitte la chambre. Elle revint presque immédiatement. Elle délesta Anne de sa besace qu’elle posa au bas du lit, lui enleva ses habits trempés et salis, avant de la revêtir d’une chemise de nuit proche et sèche. La jeune fille laissa échapper un gémissement lorsque la femme fit bouger son épaule gauche, puis elle quitta de nouveau la chambre, qu’un feu venait réchauffer. Pourtant Anne avait déjà chaud, et cependant elle tremblait, frissonnante… fiévreuse ?
Elle rouvrit ses paupières alourdies pour voir Lorenzo s’asseoir à ses côtés. Elle écouta ses paroles qui lui revenaient, lointaines avant de hocher lentement la tête à sa question. Si les circonstances avaient été autres, la blonde aurait certainement été gênée par une telle situation mais aujourd’hui, ce n’était pas le fait de laisser sa cuisse visible aux yeux d’un homme qui rendait son corps brûlant. Elle risqua un œil sur sa blessure et constata qu’elle était bien plus ouverte que la dernière fois qu’elle l’avait vue au départ de la caverne. Certainement la plaie s’était-elle élargi tandis qu’elle avait couru. Ses yeux la piquaient et ils pleuraient d’autant plus face au supplice qui était soumis à sa jambe. Elle dut se mordre la lèvre pour qu’elle ne se mette pas à gémir à cause de la douleur. Quand enfin, les soins de l’italien prirent fins qu’elle s’accorda à pousser un soupire de soulagement. Il s’employa par la suite à nettoyer son visage tâché de boue. Elle le contemplait, son visage, son sourire et ses mains qui avaient pourtant tué. Mais elle ne pouvait s’empêcher de l’admirer.
Elle lui rendit un pâle sourire lorsqu’il lui assura qu’elle était resplendissante. Néanmoins, dans l’état dans lequel elle se trouvait, elle doutait bien de ses paroles. Soupirant soudain, il lui prit la main droite dans les siennes.

« Je suis vraiment désolé que vous ayez eu à subir tout cela, et surtout à voir ce que vous avez vu. Je comprendrai si vous ne vouliez jamais plus me revoir, chère Anne. Je vous raccompagnerai à Londres demain matin, et si vous le souhaitez, nous ne nous reverrons plus. »

Anne l’écouta parler, son visage se décomposant progressivement, jusqu’à ce qu’il prononce la phrase fatale. Ses yeux s’emplirent aussitôt de larmes et elle commença à sangloter.

« Pourquoi me dîtes-vous une chose aussi chose aussi affreuse Lorenzo ? » hoqueta Anne, désemparée. « Ne tenez-vous donc plus à moi ? »

Elle ne pouvait tout simplement pas supporter de devoir subir la perte d’une nouvelle personne qui était chère à son cœur et certainement pas l’italien. Qu’importait quels fussent ses crimes, elle l’aimerait quoi qu’il arrive même si cet amour n’était jamais partagé. Il n’avait apporté à ce jour que de la gaieté dans sa vie et plus les jours s’écoulaient, plus en sentait qu’il lui devenait indispensable. Elle avait tant souffert lorsqu’il avait mystérieusement disparu ces précédentes semaines. Elle avait eu la sensation de revivre le terrible abandon de son père et son âme saignait déjà à la seule pensée qu’il la rejette. Pourquoi donc ne voulait-on pas d’elle ? Que faisait-elle de mal ?

« Je vous pardonnerai toujours Lorenzo, vous la savez… mais je vous en prie, ne me laissez plus jamais seule. » implora Anne, des larmes brûlantes dévalant ses joues. « Je veux plus qu’on me laisse seule… »

Ses derniers mots moururent dans un sanglot. Elle serra encore plus la main de l’italien et ce fut en voyant une fugace grimace de douleur passer sur son visage qu’elle se rendit compte du mal qu’elle lui infligeait. Elle retira sa main de celles du jeune homme et observa ses doigts recouverts d’un sang qui ne lui appartenait pas. Elle se redressa immédiatement sur le lit, et au mépris de son épaule, elle prit les mains de Lorenzo dans les siennes, les étudiant avant de constater avec horreur que sa paume droite était ouverte. S’était-il donc battu alors que sa main était mutilée ?

« Lorenzo, votre main… » s’horrifia la blonde. « Il vous faut la soigner. »

Le fait de voir ainsi l’homme qu’elle aimait blessé lui donna la force nécessaire afin de puiser encore un peu dans l’énergie déclinante qui lui restait. Elle attrapa le linge trempé dans l’eau chaude et posa doucement la main du jeune homme au creux de sa paume.

« Laissez-moi prendre soin de vous maintenant. »

Avec toute la délicatesse dont ses doigts frémissants de fièvre étaient capables, elle commença à nettoyer la plaie de Lorenzo. C’était presque un geste machinal qu’elle faisait là. Elle vivait depuis plusieurs années auprès de sa sœur Catherine et de toute la petite tribu qui l’entourait. Il n’était donc pas rare que la blonde ait parfois été amenée à soigner les blessures de ces fougueux petits anges. Elle se mit même à fredonner une petite comptine qu'Anne chantait aux enfants pour les rassurer ou les aider à s'endormir. Mais c’était avec une toute autre affection que la jeune fille s’occupait de laver la plaie de l’ambassadeur et qu’elle la pansait délicatement. Celle de l’amour.

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