Diane Tyburn

« Au milieu du chemin de notre vie, ayant quitté le chemin droit, je me trouvai dans une forêt obscure. » Dante, Le Paradis Perdu. TON PERSONNAGE PRÉNOM & NOM Diane de Breuil, épouse Tyburn. AGE 36 ans. DATE DE NAISSANCE 19 juin 1518. ORIGINE Française, elle est née à Caen, dans le duché de Normandie. SITUATION FAMILIALE Mariée, autrefois mère. MÉTIER Comtesse douairière du Westmorland. GROUPE Noblesse Anglaise. CRÉDITS Tumblr & Eden Memories. LE JOUEUR PSEUDO Thelma. AGE 17 ans. OU AS-TU CONNU LE FORUM? Ici le nouveau visage de Mary Grey ^^ TON AVATAR Eva Green *.* VOTRE PERSONNAGE EST-IL HISTORIQUE OU FICTIF? Fictif. VOULEZ-VOUS ÊTRE PARRAINÉ? Négatif, boss rider, je connais la maison

▬ QUELLE EST VOTRE RELIGION ET QUE PENSEZ-VOUS DES CHANGEMENTS RELIGIEUX DU PAYS? Aux yeux du monde, j'ai poussé un grand cri de soulagement lorsque Mary Ière, en digne fille de Catherine d'Aragon, a exprimé son désir de restaurer la religion catholique en Angleterre. Enfin, la vraie foi s'imposerait, après ces années d'obscurantisme protestant ! Seulement ceci, comme a peu près tout ce qui me concerne de loin, n'est que vaines apparences. Mon coeur et mon âme vont à la religion réformée, au protestantisme de Luther, sans doute l'une des rares choses que m'aura transmis mon père. Je tiens à ma tête, alors je mens, comme je sais si bien le faire, mais la vérité est que j'ai été protestante, que je le suis toujours, et que je le resterai à jamais. Quoi qu'il advienne.

▬ QUE PENSEZ-VOUS DE LA NOUVELLE REINE D'ANGLETERRE? Mary Tudor n'est pas seulement la fille de sa mère, à mon sens elle tient davantage de sa grand-mère maternelle que de la douce souveraine Catherine. Le sang d'Isabelle de Castille coule dans ses veines, et c'est aux protestants de faire les frais de sa haine, comme les juifs et les musulmans ont été victimes de celle de la reine très Catholique des Espagnes. C'est une femme de tête, prétendre le contraire serait erroné, seulement elle a un immense défaut pour moi : elle est catholique. Pis, elle est a moitié espagnole. Et, de mieux en mieux, la voilà qui épouse un Habsbourg. Je crains le pire pour la prochaine étape : un enfant ? Le petit-fils de Charles Quint sur le trône ? L'Angleterre, bastion de l'Empire espagnol ? Il faut s'attendre à tout !

▬ QUE PENSEZ-VOUS DE JANE GREY? Qui ça, la reine de neuf jours ? Qui a eu l'idée stupide de la mettre sur le trône, aussi ? Il était évident qu'elle flancherait ; sans doute cette douce colombe aurait été une noble dame formidable, mais il faut un peu plus que cela pour régner. Évidemment, je ne suis pas masochiste au point de lui préférer Mary Tudor, au contraire : j'aurais aimé qu'elle reste en place, mais c'était clair qu'elle n'en avait ni la force, ni le talent, ni le courage. Jane Grey avait beau être la petite nièce d'Henry VIII, elle n'était pas née pour régner. Une seule personne est, à mes yeux, apte à remplacer Mary Ière à la tête de l'Angleterre : Elizabeth, la fille d'Anne Boleyn. La voilà, la vraie reine.

▬ AGISSEZ-VOUS DANS L'OMBRE POUR VOTRE CAUSE OU VOTRE FOI, SI OUI QUE SERIEZ-VOUS PRÊT A FAIRE ? L'ombre, c'est moi. Si je n'agissais pas dans l'ombre, je ne serais pas moi. Je vis dans l'ombre depuis toujours, l'ombre est mon arme, mon amie, elle me comprend, m'accueille, me connaît. Il n'est de meilleure cachette, ni de plus efficace défense. L'ombre a été avec moi face à mon père, face au monde, face au parlement du Westmorland, l'ombre m'a soutenue dans mon accès au pouvoir. Pour ma cause, pour la foi protestante, pour tout, j'agis et j'agirais dans l'ombre : je ne sais rien faire de mieux.

The Tragedy of the Commons

"- Diane... Diane, j'ai peur...
- Calme-toi, Eloïse, il va nous entendre.
- Il ne peut pas, il est trop loin.
- Calme-toi quand même.
- Tu n'as pas peur, toi ?"

La fillette s'abstint de répondre. Bien sûr qu'elle avait peur. Quelle fillette de six ans n'aurait pas eu peur ? Allongée dans le noir aux côtés de sa soeur, elle était tétanisée de peur, mais contrairement à elle, elle savait déjà se contrôler. Voilà pourquoi Mère compte sur moi davantage que sur Eloïse. Le silence devint pesant, troublé uniquement par les battements de coeur des deux petites filles, et par les hurlements qui se répercutaient contre les murs du château, hurlements qu'elles entendaient depuis leur naissance et auxquels elles n'étaient toujours pas habituées. Les supplications d'une femme. Les injures d'un homme. Les pleurs, les cris, les coups. Il est des éléments du quotidien auxquels on ne se fait jamais.

La famille de Breuil était maîtresse d'une bonne partie du duché de Normandie depuis déjà plusieurs générations, une ancienneté dont l'actuel comte, Arthur de Breuil, n'était pas peu fier. Il vantait les mérites de ces ancêtres avec une ardeur telle qu'il aurait pu devenir un politicien doué si il n'avait pas eu les yeux tournés davantage vers le passé que vers l'avenir. Lui qui s'évertuait à expliquer au premier venu les gloires acquises par la famille depuis les premières croisades avait bien des difficultés à comprendre son temps, et plus encore à agir en visionnaire. Seule l'amitié que lui portait le souverain François Ier l'avaient tiré de bien des mauvaises passes. Mais ces défauts n'auraient eu aucun effet, aux yeux de Diane, s'il n'y avait eu le problème de sa mère.

Éléonore de Poitevin était une femme jugée trop naïve par ses pairs, défaut qui l'avait menée loin. Issue d'une famille noble mais ruinée, c'est sans le sou qu'elle quitta sa natale Provence pour Caen, où elle eut la chance - inouïe, aux yeux de certains - d'épouser le fils aîné du comte de Breuil. Un excellent parti, qui ferait d'elle, la provinciale désargentée, une dame d'excellente qualité. Tout serait allé pour le mieux si le futur comte n'avait emmené immédiatement sa jeune épouse à Paris, pour la présenter à son grand ami, le Roi François. La naïveté de la jeune femme eut raison de sa bien pâle réputation : elle fut la maîtresse du souverain assez longtemps pour être mise au ban de la bonne société, assez longtemps pour que son mari s'en souvienne toujours, mais trop peu de temps pour rester dans les annales et jouer d'une éventuelle image sulfureuse. Sur toute la ligne, elle avait perdu, et cela, son mari n'était guère prêt à lui pardonner.

Deux fillettes étaient nées de leur union, devenue bien triste : les jumelles Diane et Eloïse. Les filles du comte, assurément : elles avaient ses cheveux de jais, ses prunelles claires, et comme leur père avait gardé leur mère enfermée de longs mois durant, aucun doute n'était permis. Aucun fils ne vint, mais assez étrangement, Arthur de Breuil s'en souciait peu, trop occupé à faire payer à sa femme le prix de sa trahison. Et depuis, à chaque nuit tombée, les cris de la malheureuse Éléonore retentissaient contre les pierres froides du château, sous les coups d'un époux violent, rancunier à la folie.

Un énième cri retentit, faisant sursauter Diane. L'instant d'après, elle sentit la main de sa soeur glisser le long de son bras.

" - Diane, je crois qu'il devient fou. Il va la tuer, Diane, il va tuer Mère !
- Non, non, ne t'inquiètes pas, ça va passer...
- Il va la tuer, je te dis ! Et nous, juste après !"

Les jumelles entrelacèrent leurs doigts. Plongées dans la plus totale obscurité, Eloïse se plaqua contre sa soeur. Diane refoula un sanglot. Pas de ça maintenant. Surtout pas. Au loin, les plaintes de faiblissaient pas. Pire, elles allaient crescendo. Pourquoi une telle injustice ? Pourquoi leur mère était-elle ainsi soumise à sa brute odieuse de mari ? Sa faute justifiait-elle un tel traitement ?

" - Tu sais ce que les domestiques ont dit, ce matin ?" La voix d'Eloïse n'était plus qu'un murmure brisé. "Il l'a attachée au mur. Avec des chaînes. Comme...
- Un animal," acheva Diane.

Et à nouveau, le silence. Depuis toujours, les jumelles y étaient murées. Les ordres étaient clairs : ce qui se passait la nuit au château ne devait pas se savoir, jamais, sinon elles subiraient le même sort que leur mère. Alors elles se taisaient. La douce Eloïse était de ces personnes qui avaient besoin de parler et d'être entendues, de ces âmes sensibles et tendres à qui une confidente était nécessaire : ce dernier rôle, c'était Diane qui le jouait. Déjà, elle était forte, plus forte que sa soeur, parce-qu'elle parait les coups et continuait à avancer. Sa mère espérait beaucoup d'elle, la fillette en était déjà consciente, comme si la malheureuse mère avait compris le potentiel de sa toute jeune fille. Tu es mon seul espoir, Diane, lui disait-elle. Toi seule peut me sortir de là, toi seule en a la force.

Eloïse tremblait de plus en plus fort. En soupirant, Diane se dégagea de ses couvertures et les abattit sur le corps fluet de sa jumelle. Certes, ces tremblements n'avaient rien à voir avec le froid, mais un minimum de chaleur supplémentaire ne ferait aucun mal à la fillette. Du coin de l'oeil, Diane constata que dans l'âtre, les braises se faisaient mourantes. Si elle avait su allumer un feu, elle aurait essayer de les raviver, mais c'était là le travail des domestiques. Le château de la famille de Breuil en comptait assez pour pouvoir allumer les feux de chaque cheminée, même de celles des pièces inhabitées.

C'était une bâtisse immense, bâtie sur une butte qui surplombait Caen, construite au XIVème siècle, d'où on distinguait au loin non seulement le chef-lieu normand, mais aussi ses lieux illustres, les ruines du château de Guillaume le Conquérant ou les grandes abbayes bâties sous son ordre. Depuis l'instant où elles avaient vu le jour, les jumelles n'avaient jamais quitté les lieux. Leur père faisait des aller-retour entre le pays normand, Paris et les châteaux de la Loire, mais ne menait avec lui ni femme, ni filles, une aubaine pour son épouse qui trouvait là des semaines de doux répit. Elle aimait profondément ses deux filles, qui le lui rendaient bien, et si elle pouvait manquer de jugeote, elle avait cerné sans le moindre accroc les personnalités bien dissemblables de ces demoiselles qui se ressemblaient tant. A Eloïse étaient réservés les surnoms affectueux, les câlins, les baisers, les cajoleries. Un observateur inattentif aurait noté avec désarroi sans doute que la dame de Breuil n'avait d'yeux que pour Eloïse et délaissait complètement Diane, mais rien n'était plus faux. Eloïse, par bien des égards, était comme sa mère, et si celle-ci prenait soin de la mettre en garde par ses propres expériences, elle avaient la même douceur, le même besoin d'affection, leur charmante naïveté et leur côté sensible et généreux étaient similaires. Diane était différente, elle tenait davantage de son père : moins rêveuse, moins idéaliste, plus mesurée, plus terre-à-terre, plus réaliste. Plus dure, aussi. Eloïse comme Éléonore avaient le coeur tendre, face à elles Diane était plus froide. Contrairement à sa mère et à sa soeur, elle était capable d'encaisser et d'avancer sans baisser les yeux, et ne s'écroulait jamais. De cela, la dame de Breuil était consciente, et si elle réservait ses gestes d'affection pour Eloïse, elle se reposait presque entièrement sur Diane. Eloïse était incapable d'assumer ce que Diane assumait. A Diane, la mère de famille parlait ouvertement, sans pudeur, sans faux-semblants. Elle lui disait ce qu'il en était, la pure et simple vérité, et quand elle lui disait qu'elle seule pouvait les sortir de cet Enfer, Diane la croyait sur parole.

Les deux demoiselles de Breuil connaissaient bien mieux leur mère que leur père, et tout autant l'armée de domestiques et de précepteurs destinée à faire d'elles des femmes du monde, des vraies. A leur père ou à leur mère, à qui devaient-elles cela ? Mystère. Toujours était-il que les jumelles avaient la chance extrême de recevoir l'éducation la plus poussée possible : lecture, écriture, langues, et même des notions d'algèbre, puisqu'en l'absence d'héritier mâle à Arthur de Breuil, il faudrait bien qu'une de ses filles prenne la relève. Diane savait que la question de succession du comté était un réel problème pour leur père : elles ne pouvaient hériter directement, étant de sexe féminin, mais sans doute existait-il un moyen de conserver la lignée d'Arthur à la tête de leurs terres de Normandie ? Cette question revenait sans cesse aux lèvres des habitants du château, sans que quiconque puisse y apporter la réponse. Dans tout ce qui leur avait été enseigné, et ce qui leur restait encore à apprendre, Diane savait qu'il y avait un point sur lequel son père était particulièrement insistant : celui de la religion. Arthur de Breuil avait adhéré d'entrée au mouvement du rebelle moine allemand, Martin Luther, et prônait sa parole avec force, vigueur et enthousiasme. Hors de question pour lui que ses filles soient baptisées et élevées selon d'autres préceptes que ceux, rigoureux et sévères, du protestantisme. Eloïse s'y pliait sans chercher à comprendre ; mais non seulement Diane s'y pliait, mais en plus elle y adhérait. Trouvait-elle un écho dans ces idées de réforme ? Ou était-ce là son seul moyen de se rapprocher d'un père tant haï ?

Une nouvelle supplique déchira l'air. Diane sentit une bile amère lui envahir la bouche : tout cela était trop injuste. Trop cruel. Sans sans rendre compte, elle serra les poings... Et avec, les doigts d'Eloïse, demeurés dans sa paume.

" - Aïe ! Diane, tu me fais mal !
- Désolée," souffla l'intéressée en desserrant sa prise. Elle avait le souffle court et la voix rauque, chose qui n'échappa guère à sa jumelle : lorsque le comte de Breuil se mettait en colère, c'était ainsi qu'il agissait.
" - Qu'est-ce qui t'arrive ? Tu ne vas pas faire comme lui, n'est-ce pas ? Diane !
- Il paiera pour ce qu'il nous fait. Je te le promets."

Un nouveau silence, bien plus pesant que tous les précédents.

" - Dans la Bible, le Seigneur Jésus dit que la vengeance n'est pas une solution. Si on te frappe la joue droite, tend la joue gauche.
- Ce n'est pas de la vengeance, Eloïse. C'est de la justice."

Les fillettes se turent. Combien de temps restèrent-elles allongées dans le noir, côte à côte, bercées par les hurlements de leur mère, les injures de leur père ? Elles finirent de toute façon par s'endormir. Lorsque les servantes vinrent les réveiller le matin, elles ne les virent guère différentes de la veille. Et pourtant, en Diane, un changement s'était produit, sur lequel sa soeur n'avait aucune emprise : une promesse, faite à Eloïse, à Éléonore de Breuil, mais surtout à elle-même. Une promesse qui allait, elle ne le savait pas encore, tout changer.


Le ciel était clair et dégagé de tout nuage, son bleu était si pâle qu'il en faisait mal aux yeux. Le vent était glacial, coupant, redoutable, et Diane rabattit l'épaisse capuche de son manteau noir sur son visage pour se protéger. A sa droite, Eloïse, toute de noir vêtue aussi, en avait fait autant.

"Me diras-tu jamais comment tu t'y es prise ?" Murmura Eloïse, rompant le silence.

Diane eut un mince sourire. "Jamais. Cela ne concerne que moi et Henri, personne d'autre.
- Mère sait.
- Oui, mais toi, tu ne sauras pas, en tout cas pas par moi."

Eloïse s'arrêta brusquement au milieu du chemin : "pourquoi ? Pourquoi me laisses-tu toujours de côté ? Pourquoi ne me dis-tu jamais rien ?
- C'est mieux ainsi, Eloïse, crois moi, c'est pour te protéger...
- Oh, arrête ! Me protéger ? Ne me parle pas comme si j'étais une enfant, nous avons le même âge. Pourquoi toujours me mettre à l'écart ? Je suis ta jumelle, que diable ! C'était notre père ! Et je connais Henri tout autant que toi !"

Tu te trompes, Eloïse. Avant, peut-être, oui, mais plus maintenant. Diane jeta un regard en arrière. Henri était là, avec leur mère. Au loin, on distinguait la tombe d'Arthur de Breuil. L'enterrement avait été rapide, sans personne d'autre que la veuve du comte, ses filles, Henri Cleutin d'Oysel et le neveu d'Arthur de Breuil, Guillaume. Le fiancé d'Eloïse. Diane eut un soupir, consciente qu'à présent, un fossé la séparait de sa soeur... Laquelle soeur attendait une réponse à ses allégations. Elle soupira.

" - Je ne peux rien te dire, Eloïse, pas encore. Un jour, peut-être, mais pas aujourd'hui.
- Demain ?"

Diane sourit. Quinze ans, et sa soeur était encore une enfant. Elle même ne l'était plus du tout. Elle ne l'avait jamais été tout à fait, puisque l'on s'était toujours comporté avec elle comme si elle était une adulte, à présent elle en était vraiment une. D'âme et de corps. C'était une sensation étrange et extraordinaire.

" - Au moins, je sais une chose : tu es bien impliquée. Jusqu'à quel point, c'est là que le bas blesse.
- Tu sauras tout un jour, je te le promets. Mais pas tout de suite. Laisse-moi le temps de digérer ce qui s'est passé.
- Tu sais que Guillaume va hériter du comté ?
- Et toi aussi, parallèlement."

Eloïse rougit. Ç’avait été l'accord trouvé pour que la lignée d'Arthur de Breuil ne soit pas complètement écartée de Caen : leur cousin Guillaume, issu d'une branche mineure de la famille, serait l'héritier, mais seul un mariage avec l'une des filles de la branche majeure garantirait sa position. Immédiatement, feu le Comte Arthur avait proposé Eloïse, comme si il sentait en Diane quelque chose de différent, de dangereux.

Dangereuse, elle l'était, et désormais elle le savait. Eloïse et elle arboraient toujours leurs épais cheveux noirs et lisses, leur teint d'albâtre, leurs grands yeux clairs. Elles se ressemblaient à première vue, mais les confondre était impossible. Eloïse était la candeur incarnée, elle était le cygne blanc, Diane le cygne noir. Là où les yeux d'Eloïse n'étaient que douceur, ceux de Diane brûlaient d'un feu glacé qui forçait ceux qui les croisaient à s'en détourner... Pour s'y plonger à nouveau. Elle avait ce pouvoir étrange, qui attirait l'oeil et le détournait à la fois ; lorsqu'elle entrait quelque part, les regards étaient rivés sur elle, lorsqu'elle parlait, chacun se taisait. Un bien mystérieux pouvoir, qu'elle commençait à maîtriser. Cleutin d'Oysel en avait fait les frais récemment, il était le premier mais assurément pas le dernier. Pour la première fois de sa vie, elle s'était sentie puissante, en contrôle. C'était elle qui avait tiré les ficelles de cette partie d'échecs à l'échelle familiale, et qui avait éveillé en elle un désir sourd, mais bien présent, d'aller plus loin. Lorsqu'on a goûté au pouvoir, il est difficile de s'en passer ensuite.

C'était peut-être cela qui, lorsqu'elle y réfléchissait, l'éloignait le plus d'Eloïse. Sa jumelle avait été sur-couvée, surprotégée, maintenue dans une sorte d’ignorance à laquelle elle-même avait échappé. Diane soupira. Au fond, elle n'avait aucun mépris pour sa soeur, mais une certaine pitié, non dénuée d'envie. On le l'avait jamais laissée être une enfant, elle. Dès ses premiers pas, elle avait été adulte. La brise redoubla brusquement, et au loin, le hurlement d'un chien se fit entendre. Diane détacha son regard des traits de sa jumelle et contempla le paysage d'hiver qui s'étendait devant elles. Une étendue blanche et neigeuse, qui craquait doucement sous le pied, aussi lumineuse et austère que l'était le ciel. La jeune femme savait que ce soleil glacé ne brillerait pas longtemps dans le ciel : elle connaissait sa Normandie, bientôt les pluies feraient dévaler la neige, les nuages gris masqueraient l'astre diurne, et lorsqu'ils se seraient éclipsés, ils laisseraient place au printemps. Aucune raison pour que les saisons diffèrent de leur cycle habituel. Une stabilité rassurante, songeait Diane, pour moi qui ait changé si vite en si peu de temps que je peine à me reconnaître. C'était en tout cas ce qu'elle pensait.

Mais cela aussi, c'était faux, et au plus profond de son coeur, elle le savait. Toute sa vie avait convergé vers ce moment où elle avait enfin pesé dans la balance. En âme et conscience, elle s'était donnée à Cleutin d'Oysel dans un pur but de marchandage. Son corps contre la libération de sa mère. Sa virginité contre l'enfermement de son père. Henri avait cédé, Arthur enfermé et battu, Éléonore libérée, et c'était Diane qui avait orchestré la machination. Enfin, elle avait levé le voile sur ce mot si mystérieux, qui pouvait tout et rien signifier : le pouvoir. C'était donc cela que le pouvoir ? Cette sensation délicieuse, grisante, d'être invincible, de contrôler, de maîtriser enfin la barque de sa propre destinée et de la guider vers de nouveaux cieux ? En cet instant, la jeune fille aurait tout donné pour ressentir cela encore une fois. Elle jeta un regard en arrière, vers la tombe de son père, mort des mauvais traitements qu'il avait subi. Diane ne le plaignait pas, il avait eu ce qu'il méritait. Jamais plus sa mère n'aurait à souffrir, jamais plus Eloïse n'aurait peur, jamais plus leurs nuits seraient ponctuées de hurlements et d'interminables suppliques. Éléonore avait vu juste, son salut était venu de Diane.

Une vie pour une vie. Ma dette est payée.

" - Qu'allons nous faire, à présent ?
- Toi, tu deviendras l'épouse de Guillaume, la dame de Caen, tu porteras ses enfants et tu connaîtras une vie longue et prospère." Diane eut un sourire moqueur. "Si évidemment tu ne meurs pas en couches, de la première fièvre passée, d'une résurgence de la suette, de la peste ou de toute autre calamité sympathique que le Seigneur a une fâcheuse tendance à nous envoyer..."

La tape qu'Eloïse lui assena sur l'épaule la fit taire, et rire.

" - Monstre !" S'amusa sa jumelle. "Je suis moins solide d'âme que toi, mais nous sommes de même chair, je te signale. Je ne suis encore jamais tombée malade.
- Prie pour que cela n'arrive pas, et avec un peu de chance, Dieu entendra tes prières. Il a bien fini par entendre les miennes," soupira Diane en indiquant du menton la tombe de leur père, faisant taire par ce geste les rires de sa soeur.

" - Tu sais ce qu'on dit des parricides, Diane ?
- Je me fiche bien de ce qu'on dit tout court," grogna-t-elle. Mais Eloïse fit comme si elle n'avait rien entendu, et poursuivit.

" - Ils sont maudits. Les plafonds se précipitent seuls sur leurs têtes, ils connaissent des souffrances telles qu'ils en viennent à supplier Dieu de les tuer. Diane, c'est le pire crime qui soit !
- Je suis là, non ? Aucun plafond ne m'est encore tombé dessus, et si un jour il en vient un, ce dont je doute, j'aurais assez de forces pour m'en dégager. Je respire, je vis, je te parle. Dieu sait peut-être ce que j'ai fait, mais il sait aussi qui il était, et ce qu'il avait fait. Dieu est pardon, n'est-ce pas toi qui répétait ça à l'envi, fut un temps ?
- Dieu refuse la vengeance, Diane. J'ai peur pour toi.
- Tu n'as aucune raison d'avoir peur. Je te l'ai dit une fois, il y a bien longtemps : ce n'est pas de la vengeance, mais de la justice. Qui sème le vent récolte la tempête."

Désireuse de mettre un terme a cette conversation, Diane embrassa rapidement la joue de sa soeur et pivota vers le château, marchant vite vers les hautes portes sans se retourner, et plantant Eloïse seule, chose qu'elle n'avait encore jamais fait. Mais Eloïse devrait, tôt ou tard, apprendre à vivre seule, sans sa soeur pour la protéger. Ses propres paroles résonnaient contre les parois de son crâne comme autant d'échos. Qui sème le vent récolte la tempête. Ainsi soit il.


Diane fit signe à sa mère que le bateau qu'elle allait emprunter était déjà à quai, prêt à mettre les voiles vers l'Angleterre. Étrange, cette sensation au creux de son être : un brin d'excitation, une dose de désir d'aventure, un peu de peur aussi, et beaucoup d'impatience. L'Angleterre, ce n'était pas seulement l'inconnu, c'était sa destinée, c'était ce que qu'elle faire de sa vie avec son passé, son présent et son avenir. Elle avait hâte, très hâte. Elle n'était pas naïve, jamais elle ne l'avais été, elle savais pertinemment que le parcours qui l'attendait serait semé d'embûches, mais pour rien au monde elle n'y aurais renoncé. Elle avait une envie folle de voir ces obstacles que elle ne connaissait pas encore se dresser face à elle et tenter de l'empêcher d'atteindre son but, et une envie plus folle encore d'abattre ces obstacles et de poursuivre sa route. Depuis le début de la matinée, son sourire joyeux n'avait pas déserté son visage encore juvénile. Ce futur qu'elle avait tant espéré était là, à quelques mètres d'elle, tout proche de ses doigts. Pour un peu, elle l'aurait saisi à deux mains comme un tissu, et se serait enroulée dedans pour ne jamais plus en sortir. De loin, elle vit les silhouettes de sa mère et de sa soeur se hâter dans sa direction. Le soleil de ce mois de mai dardait ses rayons vers le plus vaste port de Normandie, faisant scintiller les eaux sombres, les bijoux précieux, l'anneau d'or glissé à l'annuaire gauche d'Eloïse. Le sourire de Diane s'élargit. Son affection pour sa soeur restait inchangée, mais pour rien au monde elle ne l'enviait. Certes, Guillaume était un gentil jeune homme, et beau, par dessus le marché. Certes, il aimait Eloïse avec cette adoration distante qui n'était pas sans évoquer l'amour courtois prisé par le Moyen-Âge. Certes, il était riche, titré, promis à un bel avenir. Il avait tout pour plaire, et comblerait Eloïse de bonheurs.

Tout celà était, aux yeux de Diane, bien trop beau. Trop lisse, trop parfait. Trop facile, aussi : Eloïse s'était pliée sans sourciller à la décision familiale, une chose que jamais Diane n'aurait acceptée. Nul ne choisirait son destin à sa place. Mon sort ne résistera pas à ma volonté, j'en fais le serment.

" - Toutes vos affaires sont-elles déjà à bord, mon enfant ?
- Toutes, Mère. Il ne manque plus que moi, et je serais prête à partir.
- Pas encore, Diane, il vous manque ceci." De la doublure de son manteau léger, Éléonore sortir une lettre soigneusement pliée. Sa fille l'interrogea du regard. "Pour la reine Anne.
- Je croyais qu'elle était déjà au courant de ma venue. Ne la lui avez vous pas annoncé par courrier ?
- Si, évidemment, mais je tenais à lui renouveler mes sentiments distingués. C'était la femme la plus exceptionnelle qu'il m'ait été donné de rencontrer, et c'est un immense honneur pour moi de vous savoir à ses côtés."

Diane opina. Anne Boleyn, la nouvelle reine consort d'Angleterre, la seconde épouse d'Henry VIII. Dieu qu'elle en avait entendu parler ! Toute son enfance, sa mère lui avait parlé de cette jeune femme mince, au teint mat et aux cheveux sombres, que nul ne qualifiait de beauté mais que chacun dévorait des yeux. Ses yeux noirs, racontait Éléonore, étaient immenses et sublimes. Ils charmaient même les plus réticents. Lorsqu'il était venu aux oreilles de la dame de Breuil que Lady Boleyn avait écarté la fille des rois d'Aragon et de Castille - des souverains les plus puissants de la Terre - pour s'asseoir à sa place sur le trône d'Angleterre et s'allonger à sa place dans le lit du roi, elle n'avait pas été étonnée. C'était un destin à sa mesure. De mère en fille, Diane avait, elle aussi, une profonde admiration pour cette femme que sa mère avait rencontré à la Cour de France, et qu'elle ne connaissait pas. Elle aspirait à un similaire destin : elle, une noble demoiselle d'Angleterre, avait évincé une Trastamare dont elle portait à présent la couronne. Et comme elle n'avait point oublié son amie Éléonore de Breuil, elle lui avait assuré qu'à son côté, sa fille serait en parfaite sécurité.

" - N'oublie jamais, Diane, si tu as l'ambition de parvenir aux positions les plus enviées de ce monde, tu ne dois faire aucune faute. Les crimes s'effacent avec le temps, mais les erreurs ne pardonnent pas. Avant tout, préfère l'ombre à la lumière, tes manquements y seront plongés dans les ténèbres. Essaie de ne jamais tomber et si cela t'arrive, relève toi et ne pleure pas d'être tombée. Promets-moi de ne jamais pleurer, et de ne jamais regretter, tu m'entends, Diane ? Les regrets ne sont que du temps perdu, emploie ce temps plus utilement, pour te redresser et faire chuter la vie. Soit prompte à changer, sois souple. Ne t'éloigne pas du bien si tu le peux, mais entre dans le mal en cas de nécessité. Renie tes principes, tes amis, tes amants, renie ta soeur, ton père, renie moi s'il le faut, j'ai mal mais j'y consens. Mais ne sois jamais infidèle à toi-même, je t'en conjure. Me promets-tu cela, Diane ?
- Je vous le promet, Mère."

Your Body is a Battleground

Ici cher membre, vous allez devoir nous raconter votre histoire, nous désirons tout savoir de vous, de votre naissance jusqu'à aujourd'hui. Prenez garde aux évènements historiques que vous évoquerez, si vous avez des doutes consulté les annexes ou Wikipédia. La rédaction de l'histoire pourra être de la forme que vous désirez, RP, journal intime … La seule exigence que nous réclamons, c'est que tout cela soit fait en un minimum de 45 lignes. (texte à effacer)


Ici cher membre, vous allez devoir nous raconter votre histoire, nous désirons tout savoir de vous, de votre naissance jusqu'à aujourd'hui. Prenez garde aux évènements historiques que vous évoquerez, si vous avez des doutes consulté les annexes ou Wikipédia. La rédaction de l'histoire pourra être de la forme que vous désirez, RP, journal intime … La seule exigence que nous réclamons, c'est que tout cela soit fait en un minimum de 45 lignes. (texte à effacer)


Ici cher membre, vous allez devoir nous raconter votre histoire, nous désirons tout savoir de vous, de votre naissance jusqu'à aujourd'hui. Prenez garde aux évènements historiques que vous évoquerez, si vous avez des doutes consulté les annexes ou Wikipédia. La rédaction de l'histoire pourra être de la forme que vous désirez, RP, journal intime … La seule exigence que nous réclamons, c'est que tout cela soit fait en un minimum de 45 lignes. (texte à effacer)


Ici cher membre, vous allez devoir nous raconter votre histoire, nous désirons tout savoir de vous, de votre naissance jusqu'à aujourd'hui. Prenez garde aux évènements historiques que vous évoquerez, si vous avez des doutes consulté les annexes ou Wikipédia. La rédaction de l'histoire pourra être de la forme que vous désirez, RP, journal intime … La seule exigence que nous réclamons, c'est que tout cela soit fait en un minimum de 45 lignes. (texte à effacer)

Here Come the Vultures

Ici cher membre, vous allez devoir nous raconter votre histoire, nous désirons tout savoir de vous, de votre naissance jusqu'à aujourd'hui. Prenez garde aux évènements historiques que vous évoquerez, si vous avez des doutes consulté les annexes ou Wikipédia. La rédaction de l'histoire pourra être de la forme que vous désirez, RP, journal intime … La seule exigence que nous réclamons, c'est que tout cela soit fait en un minimum de 45 lignes. (texte à effacer)


Ici cher membre, vous allez devoir nous raconter votre histoire, nous désirons tout savoir de vous, de votre naissance jusqu'à aujourd'hui. Prenez garde aux évènements historiques que vous évoquerez, si vous avez des doutes consulté les annexes ou Wikipédia. La rédaction de l'histoire pourra être de la forme que vous désirez, RP, journal intime … La seule exigence que nous réclamons, c'est que tout cela soit fait en un minimum de 45 lignes. (texte à effacer)


Ici cher membre, vous allez devoir nous raconter votre histoire, nous désirons tout savoir de vous, de votre naissance jusqu'à aujourd'hui. Prenez garde aux évènements historiques que vous évoquerez, si vous avez des doutes consulté les annexes ou Wikipédia. La rédaction de l'histoire pourra être de la forme que vous désirez, RP, journal intime … La seule exigence que nous réclamons, c'est que tout cela soit fait en un minimum de 45 lignes. (texte à effacer)


Ici cher membre, vous allez devoir nous raconter votre histoire, nous désirons tout savoir de vous, de votre naissance jusqu'à aujourd'hui. Prenez garde aux évènements historiques que vous évoquerez, si vous avez des doutes consulté les annexes ou Wikipédia. La rédaction de l'histoire pourra être de la forme que vous désirez, RP, journal intime … La seule exigence que nous réclamons, c'est que tout cela soit fait en un minimum de 45 lignes. (texte à effacer)