[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image] « Nous vivons et nous mourrons à n’importe quel âge. Nous pouvons avoir un an ou quatre-vingt-dix, la mort n’hésitera pas à nous prendre, telle la terrible Faucheuse qu’elle est. Notre naissance n’est pas le moment le plus édifiant de notre existence, non… Ce qui compte le plus dans une vie, c’est le moment où nous la prenons réellement en main. Les armes contre le cœur, nous pouvons ainsi braver la mort et ne pas rester les êtres faibles que nous sommes en naissant. »

Année 1527.

De vieilles pierres grises, un lac s’étendant à perte de vue, dont la surface noire était synonyme de légendes locales, pleines de monstres et de sorcières maléfiques, la lande rocheuse, aussi dangereuse qu’une pente rocheuse. L’est de l’Ecosse, c’était là que vivait la famille Beaton depuis de nombreux siècles, dans un vieux château aux nombreux courants d’air. Dans cette demeure, on pouvait voir marcher sur les sols de pierres et les plaines Sir John Beaton, 2ème Laird of Creich et Janet Hay son épouse. La famille était nombreuse et se composait de onze enfants, cinq garçons, six filles, tous en bonne santé.
Janet Beaton était la dernière des filles de la famille, rousse comme son père, elle avait un tempérament de feu. Garçon manqué, elle préférait suivre ses frères dans leurs jeux et à la chasse, plutôt que de parfaire son éducation féminine. Son père l’encouragea en ce sens.

« Père, regardez, j’ai atteint la cible, en plein milieu ! » Janet n’était qu’une enfant de huit ans, une petite rousse vêtue d’une robe de laine grise et de fourrure. Ses cheveux partaient dans tous les sens et avec son arc à la main, elle avait tout d’une petite sauvage. A ses côtés son père et ses frères riaient applaudissant leur petite sœur. La petite Janet avait un sale caractère et très rapidement, elle était parvenue à dompter ses grands-frères qui lui faisaient tous ses caprices et la laissaient faire ce qu’elle voulait, comme apprendre à se battre comme un homme.
Janet avait huit ans et contrairement aux fillettes de son âge, elle ne savait presque pas lire et écrire, puisqu’elle bafouait ses études, à la plus grande colère de sa mère, qui voulait bien un jour pouvoir marier cette enfant et si cela pouvait être avec un fils de grande famille, cela serait encore mieux. Actuellement, sa fille était à ses yeux pervertie par son propre mari et ses fils, qui faisaient tout pour faire d'elle, un homme accompli, plutôt qu'une femme.

Année 1532.

Sa demeure familiale était bien loin désormais. En 1528, son père était devenu le gardien du palais royal de Falkland et Janet dut quitter avec le reste de sa famille, sa chère campagne, pour la vie de cour. A partir de ce moment-là, sa mère prit en charge son éducation, voulant faire d’elle une parfaite jeune fille. Ses robes grossières, bien plus pratique pour faire du cheval et pour manier les armes, furent remplacées par des tissus beaucoup plus précieux et féminin, à la mode française. Ses sœurs avaient toutes suivies le mouvement et la plupart d’entre elles avaient trouvé un mari. Janet savait que c’était un mal pour un bien pour sa famille, mais elle détestait le raffinement qui l’entourait, tout ce qu’elle désirait, c’était retrouver la robustesse de ses terres pleines de mystères.
Elle fut contrainte d’apprendre à lire et écrire et pire encore d’apprendre la danse et le maniement des aiguilles. Pour ces arts, elle avait soit deux pieds gauches ou deux mains gauches selon l’exercice. Par chance, son père parvenait parfois à la soustraire de la rigidité de sa mère, pour l’emmener à la chasse ou s’entrainer en secret aux maniements des armes.
L’année 1532 marqua un nouveau tournant pour la famille, une fierté pour la mère, une honte pour sa fille Janet. Le roi James V jeta son dévolu pour sa sœur Elizabeth, son ainée et bien vite, elle devint sa maîtresse. Presque vendue comme du bétail, Janet était dégoutée de voir sa sœur se donner ainsi, attirant la honte sur sa famille, puisque le roi ne se marierait visiblement, jamais avec elle. Janet n’aimait pas cette sœur ainée qui avait toujours été trop belle et délicate à ses yeux, mais à partir de ce moment-là, elle lui fit pitié. Quelques mois après le début de cette relation, Elizabeth tomba enceinte, apportant de nouveaux avantages à la famille, puis en l’année 1533, une petite fille, qu’on prénomma Jane vint au monde.

Janet avait quatorze ans, ses longs cheveux roux, toujours aussi désordonnés, cascadaient dans son dos, tandis qu’elle se penchait sur le berceau de la fillette. L’enfant à peine née avait déjà de nombreux cheveux bruns, comme son père et sa mère. Le bébé était mignon, mais Janet n’eut aucun sentiment pour lui, sauf de la pitié. Sa sœur avait déjà été abandonnée par le roi et même s’il avait reconnu l’enfant, il parlait déjà de marier son ancienne maîtresse. Cette enfant, avec Elizabeth, serait sûrement plus tard, si elle survivait, une petite fille malheureuse, mais cela, elle n’avait pas à s’en soucier, Jane était une Stuart, pas une Beaton.

Année 1538.

Elle se trouvait à la chapelle, aux côtés de l’homme qui allait être son mari et qu’elle avait vu seulement deux fois dans sa vie. Quand elle avait rencontré ce James Crichton of Cranston Riddell, elle l’avait trouvé banal, sans intérêt, elle l’avait détaillé de haut en bas, cherchant chez lui l’archétype du vrai homme, mais il n’en était rien. Il voulait se faire passer pour un chevalier, mais il ne connaissait pas ses codes, ni l’honneur. Elle avait pu voir de la déception dans le regard de son époux. Elle ne s’habillait pas comme les autres femmes, préférant des tenues simples. Elle avait toujours ses cheveux en bataille, et en rien, elle n’était une lady.
Les Beaton, au fil des années étaient parvenus à s’élever, gagnant la confiance du roi. Janet avait été la dernière des filles à être mariées, mais ses parents n’avaient pas eu de problèmes pour le faire, malgré tous les défauts qu’elle représentait.
Sauvage, son mari ne serait pas déçu du voyage et très rapidement, Janet parvint à le dominer et à en faire ce qu’elle voulait. James l’avait ennuyé lors de sa nuit de noce, mais en ayant découvert les plaisirs du sexe, une flamme était née en elle. Son mari la décevait et bien ce n’était pas grave, elle trouverait d’autres hommes. En pleine journée, Janet ne se gênait pas pour aller retrouver le beau palefrenier dans les écuries, pour se laisser aller à quelques plaisirs intimes. Elle n’était pas heureuse, elle se sentait freinée dans sa vie, incomplète, loin de sa vie en compagnie de ses frères, qui lui avaient tant appris. Elle ne pouvait plus se battre, ni être une sauvageonne, elle n’avait d’autres choix, que d’être une misérable lady. Le plus grand bonheur que lui apporta le mariage, fut celui d’être veuve. James, le pauvre et fragile James était mort, suite à une chute de cheval, en sa compagnie. Personne ne sut ce qu’il s’était passé, personne ne saura qu’elle avait provoqué sa chute. Veuve en blanc, sans enfants, Janet avait que vingt ans et comme elle le désirait, elle retourna dans sa demeure familiale.

[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image] « Nous rencontrons, dans une vie, une seule fois l'amour. Il nous donne des ailes, nous formons avec lui une famille. Le conte de fée se construit, puis, un jour, l'amour se meurt et tout s'éteint à nouveau. »

Année 1540.

Son père ne lui avait pas laissé le temps de savourer son veuvage, qu’elle se retrouvait déjà devant l’autel, pour prendre pour époux Sir Simon Preston of Craigmillar Castle. Elle dut prendre une nouvelle fois un rôle qui ne lui plaisait pas, mais aussi être une noble épouse. Simon ne lui plaisait pas, mais comme il connaissait le tempérament de feu de son épouse, il n’hésitait pas à la frapper, pour la faire obéir et obtenir d’elle ce qu’il voulait. Janet n’était pas du genre à se laisser faire, il la frappait, elle le frappait et criait encore plus fort que lui. Elle avait appris à se battre et elle n’était pas une Beaton pour rien. Quand elle se rendait à la cour et auprès de sa famille, elle n’hésitait pas à arborer ses cicatrices, pour montrer à tous qui étaient Simon. Elle souriait et bafouait son second époux et parfois même, elle le trompait avec le premier homme, qui lui plaisait, qu’elle trouvait. Elle n’avait pas honte, contrairement au reste des Beaton, elle se sentait en marge. Sa sœur Elizabeth, après avoir mis au monde sa bâtarde, avait épousé un Stuart et avait eu d’autres enfants, puis ses autres frères et sœurs étaient tous rangés et avaient eu des enfants. Elle, elle n’avait surtout pas envie de tomber enceinte et dès que cela arrivait, elle prenait des boissons avortives, qu’elle créait elle-même, pour ne point donner d’héritiers à son mari. Janet prévoyait même de faire assassiner Simon, comme elle l’avait fait avec son premier mari, mais un évènement changea à jamais son existence.

Année 1543.

Comme à son habitude, pour fuir le château de son mari, Janet s’était enfoncée dans la lande, pour profiter de la nature et du bonheur d’être seule. Les cheveux au vent, elle portait une tenue d’homme, comme à chaque fois qu’elle partait. Dans son dos pendait son arc, qu’elle ne quittait jamais, quand elle arpentait ces dangereuses terres écossaises. Ici c’était la guerre et quand elle ne se faisait pas entre les pays, elle se faisait entre clans. Le roi était mort et le pays était chaque jour mis en danger par les Anglais.
Janet savait que le danger pouvait sortir de n’importe où, surtout quand il s’agissait d’un homme, qui la poursuivait au galop. Méfiante, elle poussa son cheval à aller plus vite, mais son animal, au bout d’un quart d’heure de course ralenti l’allure. Janet stoppa alors et attrapa son arc et une flèche, qu’elle brandit à l’encontre de l’homme.

« Tout doux beauté, je ne vous veux aucun mal. » Il était charmant avec ses cheveux noirs de jais et surtout il dégageait une allure sauvage.
« Je vous connais, vous les hommes et je me méfie d’autant plus. » Répondit-elle en bandant son arc.
« Oui, mais vous ne me connaissez pas. Walter Scott, du clan Scott, à qui ais-je l’honneur ? » Disait-il sans bouger d’un cil.
« Personne qui peut vous intéressez. » Elle rangea son arc et fit demi-tour, sans regarder l’homme, qui ne la suivit pas.

Ils se revirent, jouant le même jeu à chaque fois, lui la suivant, eux échangeant quelques mots et elle partant. Puis un jour, elle ne partit plus. Il était Walter Scott, chef d’un puissant clan écossais et elle Janet Beaton, épouse de Simon Preston, commençait pour la première fois à tomber amoureuse. Ils devinrent amant, sans aucune honte, Walter décida de l’afficher devant son clan, entraînant l’engrenage d’un terrible scandale, chez les Beaton, les Preston et les Scott. Femme adultérine, Simon, qui ne pouvait plus la supporter, voulait obtenir absolument le divorce. Il l’obtint rapidement, et pour que cela se fasse vite, il prôna la consanguinité. Enfin libre, Janet épousa en juin 1544, Walter Scott, elle était sa troisième épouse, il était son troisième mari.

Walter le premier, le petit David et le poupon Janet, qui trônait dans ses bras. Trois beaux enfants, tous en bonne santé. Ses enfants ne seraient peut-être pas des héritiers, mais Janet, qui s’était découverte une fibre maternelle faisait tout pour les protéger. Pour renforcer ses liens avec le clan Scott, elle avait fait marier l’une de ses sœurs ainées, Grisel, au fils de son époux. Ainsi, elle aurait toujours un point d’ancrage sur le clan, même en cas de perte de son mari. Janet était heureuse et pour une fois elle se sentait importante, elle était une chef de clan et secondait son mari dans sa tâche. Quand il partait en guerre, contre ses ennemis, elle était toujours là à ses côtés, portant l’armure et galvanisant les troupes. Pour la première fois, elle était amoureuse et s’investissait plus que jamais dans cette vie familiale. Cependant, Janet comprendra bien assez tôt, que le bonheur n’est jamais un acquis.

[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image] « La mort, sombre, funeste, implacable, elle peut prendre à tout moment nos proches, nos enfants, l'homme qu'on aimait. Le meurtre est furtif, honteux, l'acte brise en lui-même et il appelle à la vengeance. »

Année 1554.

Un hurlement se fit entendre dans la salle à manger du Scott’s Manor à Edimbourg. Le corps ensanglanté de Walter gisait sur la table, rapportait par ses hommes, qui racontèrent, qu’ils avaient été victime d'une escarmouche, par le clan Kerr, les ennemis de leur clan. Scott et Kerr s’opposaient depuis plusieurs générations, mais jamais les Scott n’auraient pu prévoir un assassinat public.
En découvrant le corps de son mari, Janet s’était jetée sur lui, en larme et hurlant, refusant que quelqu’un la touche. Elle pleurait son Walter, elle pleurait son amour pour lui, elle pleurait l’amant qu’on venait de lui prendre. Elle resta plusieurs heures, contre le corps de son mari, seule, brisée.
Ce ne fut que le lendemain qu’elle autorisa le prêtre de venir bénir son mari et elle amena dans la pièce son fils ainé Walter, pour lui montrer ce que les Kerr avait fait et pour lui promettre de venger, plus tard, son père. Walter lui avait donné cinq beaux enfants et ils étaient maintenant ses héritiers, depuis la mort de leur frère ainé. Quand on mit son mari dans un tombeau, Janet serra contre elle ses plus jeunes enfants, elle n’avait qu’un seul but maintenant, les aimer et venger leur père.


« Que comptes-tu faire maintenant ? » Grisel, sa sœur qui avait été aussi sa belle-fille au temps où elle avait épousé le fils ainé de Walter, lui aussi mort en cette même année. Les Scott étaient de retour dans leur château, attendant et se préparant pour une prochaine vengeance. Balayé par les vents du nord, le château avait une allure beaucoup plus sinistre, loin de l’atmosphère chaleureuse, du temps de Walter. Maintenant, elles étaient deux à partager le même fardeau.
« Attendre, me préparer et vivre, jusqu’à ce que tous les Kerr soient morts. » Les cernes autour de ses yeux étaient sombres, fruits de ses longues nuits sans dormir, mais ce soir, tout sera différent, ce soir, elle allait pouvoir vivre à nouveau.

Extrait d'une lettre écrite à Marie de Guise.

Votre Altesse Royale,

Je vous écris au nom de tout le clan Scott, vos loyaux serviteurs et protecteurs des frontières de l’est. Notre cher et regretté Sir Walter Scott a disparu tragiquement, assassiné, dans votre noble ville d’Edimbourg, tué d’une façon indigne de son rang, par des membres du clan Kerr. Notre famille n’a obtenue, jusqu’à maintenant, aucune justice, et pourtant le préjudice est grand. Mon fils n’est pas en âge de prendre la succession de son père et je me dois d’assumer seule cette charge. Notre clan peut connaître chaque jour mille périls et au vu de toute l’aide que nous apportons à la couronne écossaise et au nom de sa majesté, notre reine Mary Ière, nous désirons obtenir justice de la part de la couronne. Les Kerr ont frappé une grande et noble famille, ils doivent être punis pour cet acte, pour éviter que cela se reproduisent un jour. Ils sont une menace pour nous tous et même pour la couronne. Si vous ne pouvez exaucer votre souhait, nous serons dans l'obligation d'agir en notre nom...