Lucrezia Vaughn

" Il existe des circonstances où le mensonge est le plus pieu des devoirs. " TON PERSONNAGE PRÉNOM & NOM Lucrezia - Ahlem - Vaughn AGE 27 ans. DATE DE NAISSANCE 27/05/1526 ORIGINE Espagnole. SITUATION FAMILIALE Veuve d'Arthur Vaughn. MÉTIER Aucun. GROUPE Etrangers. CRÉDITS Bazzart. LE JOUEUR PSEUDO Tsuu. AGE 16. Bientôt 17. OU AS-TU CONNU LE FORUM? C'est Lyra qui m'a traînée ici. Héhéhé. ~ TON AVATAR La magnifique Freida Pinto. VOTRE PERSONNAGE EST-IL HISTORIQUE OU FICTIF? Moitié moitié. Lulu a peut-être existé, allez savoir, mais en tout cas son père & son histoire & celle de sa grand-mère et tout le reste est bien historique ! VOULEZ-VOUS ÊTRE PARRAINÉ? Ah bah pourquoi pas hein. J'aime qu'on me chouchoute & qu'on prenne soin de moi. ... C'est bien ça d'être parrainé, non ?

▬ QUELLE EST VOTRE RELIGION ET QUE PENSEZ-VOUS DES CHANGEMENTS RELIGIEUX DU PAYS? Je suis musulmane. Depuis ma naissance. Depuis toujours, bien que j'aie été baptisée. Il en a été de même pour ma grand-mère, et puis pour mon père. L'un comme l'autre ont agi en catholiques irréprochables, du moins en apparence, avec des passages à la messe, diverses prières... Puis, à l'abri des regards, il en était tout autre. Leurs prières étaient bien différentes de celles qu'ils faisaient voir et partageaient avec leur entourage. Bien que, pour ma grand-mère, qui entra dans un couvent... Eh bien, disons juste qu'elle eut bien plus de mal à pratiquer sa religion initiale même dans le plus grand secret que mon père et moi. Très jeune, il m'apprit ce que j'avais à faire. Prier le matin, en milieu d'après-midi, en fin d'après-midi et enfin le soir. Ne pas manger certaines choses, bien qu'en public, je ne pouvais me permettre de les décliner. Jeuner quelques jours par an, lorsque je n'avais pas à sortir de la maison, ou alors prétexter qu'il s'agissait simplement là du carême, ou d'un jeun que je faisais de mon plein gré uniquement pour expier certains de mes pêchés. En bref... Pratiquer ma religion, mais dans le plus grand des secrets. Et braver certaines de ses doctrines lorsqu'aucun autre choix ne se présentait à moi. Par exemple... Mon mariage eut lieu dans une Eglise. Ce fut un mariage catholique. Mais, en bref... Je suis d'ores et déjà habituée aux changements de religion, et aux religions imposées surtout, à tout un pays. En Espagne, mon peuple a dû abandonner ses us et coutumes pour des rites qui n'étaient pas le sien. Le fait que l'Angleterre décide d'en faire de même ne me fait ni chaud ni froid, et ne change strictement rien à ma vie, ni à ma petite comédie perpétuelle. Comme toujours, je poursuis mon manège de fervente catholique, et puis, personne ne semble avoir de doute sur ma foi. Je me sens donc... Très peu concernée. Bien que je compatisse tout de même avec ceux qui, désormais, se retrouvent forcés à agir de la même manière que moi.

▬ QUE PENSEZ-VOUS DE LA NOUVELLE REINE D'ANGLETERRE? Mary Tudor... Mon père étant le fils ''bâtard'' du roi Ferdinand d'Aragon, qu'il eut avec la princesse de Grenade, ma grand-mère, devenue sa maîtresse après la chute du royaume... Il est le frère de la défunte Catherine d'Aragon. Mary est donc ma cousine. Ou du moins, ma demi-cousine. Qui n'a jamais cherché à me connaître. Ni à me parler. Ni à prendre de mes nouvelles. Ma vie ? Elle ne s'en est jamais souciée. Mais, il est vrai qu'il y a tout de même un fossé entre cette reine et moi, princesse d'un pays rayé de la carte, et d'un peuple dispersé dans tous les recoins de l'Europe. Enfin. Tout cela pour dire que je n'en pense rien. Bon, il est vrai que je porte tout de même une certaine rancune envers elle. Et envers toute la famille régnante d'Espagne, et ses descendants. Les uns comme les autres, tout en menant une vie oisive, nous ont retiré tout ce que l'on possédait avant de nous jeter aux oubliettes comme on le ferait à de vulgaires poupées.

▬ QUE PENSEZ-VOUS DE JANE GREY? Cette pauvre Jane... Je ne l'ai connue que de nom. On disait d'elle qu'elle était une bonne reine, tolérante. Mais voilà, un complot contre Mary se paie un jour ou l'autre. Et puis... Il faut avouer que cette dernière ne semble pas plaisanter avec la religion. Rien d'étonnant qu'elle ait agi ainsi envers une protestante. Jane a tout de même assumé sa religion jusqu'au bout, même sur l'échafaud et... Ce simple détail à mes yeux est une preuve de courage. Et d’insouciance par la même occasion. Je pense Dieu être suffisamment miséricordieux pour pardonner à ses fidèles de cacher leur foi afin de garder la vie sauve. Elle aurait pu en faire de même, peut-être les choses se seraient-elles passer autrement... Bien que, il est vrai, le complot contre Mary a été, je pense, l'acte de trop. Et la véritable raison de son exécution.

▬ AGISSEZ-VOUS DANS L'OMBRE POUR VOTRE CAUSE OU VOTRE FOI, SI OUI QUE SERIEZ-VOUS PRÊT A FAIRE ? Il est vrai que j'agis dans l'ombre, pour ma cause... Mais cette cause est bien complexe. Tout d'abord, il y a les terres de mes ancêtres dont ces derniers ont été chassés, traités comme de la vermine pour ceux qui ont eu la folle idée d'y rester malgré tout... Dont les ressources ont été pillées. Nos ressources. Les miennes. Grenade me revient de droit. Et pourtant, j'y ai été traitée comme une étrangère. On me regardait de travers, on me jetait quelques remarques déplaisantes ici et là. Sur mes propres terres ! N'est-ce pas là la plus grande des injustices ? Et puis, la religion... Nous avons été forcés d'en changer. Abandonner la religion musulmane, du moins en apparence, pour la religion catholique. Et bien que je pratique encore cette dernière aujourd'hui dans le plus grand des secrets, je ne peux en respecter toutes les règles pour autant... A vrai dire, les tâches dont je m’accommode doivent tout juste suffire à Dieu pour me pardonner de ne pas la pratiquer au grand jour et de l'assumer. En bref... Je compte bien faire payer à ma famille paternelle ce qu'elle a fait subir et à mon peuple et... A nous. Tout d'abord, je me ferai reconnaître. Je m'arrangerai pour recevoir les honneurs dus à mon rang. Et par la suite... Peut-être que... Par je ne sais quel petit tour de passe-passe, je pourrais arriver à faire renaître Grenade de ses cendres. Sans l'aide de l'Angleterre, actuellement trop proche de l'Espagne, évidemment, deux pays aussi catholiques l'un que l'autre. Mon dernier recours est l'empire Ottoman, qui ne cesse de gagner en puissance et qui est en guerre perpétuelle contre l'Occident. Jouer un double jeu... Me faire reconnaître en Angleterre, mais aussi chercher à conclure une quelconque alliance avec l'empire Ottoman... A vrai dire, les choses sont encore floues dans mon esprit. Mais une chose est sûr : je ne compte pas rester de marbre et je suis bien décidée à récupérer ce qui me revient de droit.

Arabian Nights

« Vois-tu, Ahlem, le couvent dans lequel séjourne désormais ta grand-mère était jadis son palais. Ses appartements. Cette cour, elle y a passé son enfance. Il aurait dû en être de même pour toi. » La dynastie des Nasrides... Ses beaux palais, ses richesses... Ils lui ont tout pris. Ils nous ont tous pris. Mon père ne leur a jamais pardonné, et ma grand-mère non plus. Aixa, la très belle et unique fille du calife Az-Zughbi, a été enlevée puis baptisée Isabel après la prise de Grenade, par le roi Ferdinand d'Aragon en personne. Et cet... Homme. Bien que je doûte fort qu'il en ait été un, à en juger par son comportement... Cet homme en a fait sa maîtresse, durant de longues années. De cette union est né mon père, Miguel. Unique héritier du trône de Grenade bien que le royaume ait disparu, et fils illégitime du roi d'Espagne. Si, durant les premières années de sa vie, il eut droit à un traitement digne d'un prince ou du moins d'un prince bâtard, les choses se détériorèrent au fur et à mesure que le temps passait, et que le roi se lassait de la mère. Peu à peu, on éloigna Isabel et son fils. Surtout son fils. L'une des anciennes dames de compagnie de ma grand-mère, toujours fidèle à sa princesse, décida de prendre l'éducation du jeune homme en main. Fervente musulmanne, elle lui apprit à dissimuler sa foi et à agir en catholique modèle, en apparence du moins. Elle lui enseigna l'arabe, elle lui apprit à être fier comme un lion... Mais aussi à couver une certaine rancune envers la famille royale espagnole. Cette famille qui ne voulait pas de lui. … Et qui n'a jamais voulu de sa fille non plus.

A l'âge de quinze ans, mon père ainsi que ma grand-mère furent définitivement écartés de la cour. Ma grand-mère entra alors au couvent... Et mon père fut fait chevalier de Grenade. Chevalier de Grenade. Tout ce que l'on offrit à son fils. Tout ce qu'on lui offrit, aussi. Rien de plus. Et puis, ils furent jetés aux oubliettes.

« N'oublie pas, ma fille, que cette terre t'appartient. Tout ce que ces infidèles possèdent ici... Est à toi. Seulement à toi. » Mon père n'a cessé de me le répéter depuis mon plus jeune âge. Que j'étais une princesse. Que j'étais sur mes terres. Que tout cela m'appartenait. Et qu'un jour ou l'autre, je me devais de leur reprendre. Que j'étais une princesse, et que peu importe ce qu'ils pouvaient me dire, je ne devais guère m'en soucier. Être fière, garder la tête haute... Et avoir un comportement digne d'une jeune fille de mon rang bien que lui seul ainsi que quelques partisans, des descendants de notre peuple, me reconnaissent en tant que telle.

Tenter de chasser une princesse de son pays... On croirait assister à une mascarade, non ? Et pourtant, c'est ce que l'on tenta de faire. Nous mettre à la porte, mon père et moi, ainsi que bien d'autres musulmans. Nous forcer à pratiquer une religion qui n'est pas la nôtre. Puis nous traiter comme des chiens galeux, des intrus, des pestiférés après que l'on ait résisté et que l'on soit resté. Se faire chasser de cette manière de notre Andalousie bien-aimée... Forge un certain caractère, il est vrai. Et une haine viscérale envers ceux qui en sont à l'origine.

Mon père m'a appris à les détester. A les haïr. Ils ne nous reconnaissaient pas. Ils nous avaient rejetés. Et ils se souciaient peu de notre survie. Puis ils régnaient sur nos terres, alors oui, j'avais toutes les raisons du monde pour ne pas les porter dans mon cœur.

Le peuple espagnol... Ce dernier ne m'a guère traitée mieux. Des moqueries, des remarques... Il faut dire que mon teint de peau m'a toujours empêchée de passer inaperçue. Tout comme ma forte ressemblance avec ma grand-mère. Et puis, même ma mère était une espagnole musulmane, alors... Oui, je suis plutôt ''typée'' on va dire. Sans oublier que mon prénom non musulman, Lucrezia, sous lequel les gens me connaissent... Tend à faire rire. Pour la simple et bonne raison que, l'autre Lucrezia de l'histoire, Lucrezia Borgia, possédait de beaux cheveux blonds et une peau laiteuse. Ma peau est légèrement dorée, mes cheveux sont aussi noirs que la nuit. Nous n'avons aucun point en commun, au contraire même, je pense être son opposé.

Et puis, cette dernière avait droit à bien des honneurs, contrairement à moi. A un mariage très important, contrairement au mien. Mon mari... Mon mari n'était pas du pays. Nous ne le connaissions pas. Depuis très jeune, je me voyais mariée avec l'un des fils des amis de mon père. Ils étaient musulmans, ils me reconnaissaient comme étant leur princesse... Cela allait de soi. Et pourtant, lorsqu'Arthur demanda ma main, mon père ne la lui refusa pas. J'avais alors treize ans.

Je rendais régulièrement visite à ma grand-mère, au couvent. Ma mère est morte en couche, et ma grand-mère était donc la seule figure féminine qu'il me restait. Et puis, ce couvent se trouvait dans un ancien palais Nasride alors... Je me plaisais à le visiter, imaginant qu'elle aurait été ma vie entre ses murs si rien de tout cela n'avait eu lieu. Puis un jour... Un jeune homme de près de deux ans mon aîné vint à ma rencontre. Un catholique. Mon père m'avait appris à me méfier d'eux, ce que je fis tout d'abord avant de baisser légèrement ma garde... Car aucune remarque sur mon teint de peau ne venait, ni sur mes origines apparentes, rien. Au contraire, il était d'une gentillesse sans pareille ! Il me proposa même de porter mes affaires, puis de me raccompagner sur le chemin du retour.

Et pendant quelques semaines, à chacune de mes visites au couvent, je le retrouvais sur mon chemin. Nous discutions un peu, mais pas plus. Du moins, de mon point de vue, il ne s'agissait là que de quelques paroles échangées avec un inconnu que je ne reverrais sûrement plus le mois à venir. Mais je compris bien rapidement que du sien, les choses n'étaient pas perçues de la même manière.

Un mois plus tard, jour pour jour, il vint demander ma main à mon père. Me raccompagner lui avait surtout servi à connaître le chemin de notre demeure. Et si au départ, mon père la lui refusa, il finit par céder. Sûrement parce qu'il s'était dit qu'il valait mieux me confier à un homme bon, qui promettait de faire de moi la plus heureuse des femmes, qu'à un espagnol lambda qui me traiterait comme une esclave. Il disait m'aimer, et il insista tellement... Qu'il finit par atteindre son but. Pour tout vous dire, je... Je n'étais pas très enchantée par cette perspective. Je n'avais que treize ans, je ne voulais pas quitter mon père, je ne voulais pas quitter mes jardins, notre maison... Je ne voulais pas. Et puis, me marier... Cela m'effrayait bien trop.

Mais mon père insista, encore et encore. Il me rappela de nouveau ce qu'avait fait le roi Ferdinand à ma grand-mère, s'il s'agissait là de ce que je souhaitais pour mon avenir... Qu'une fois mort, il n'y aurait personne pour veiller sur moi. Et qu'au milieu de toutes ces bêtes, en son absence, Arthur serait mon protecteur. Évidemment, je finis par me plier à ses exigences. Je ne pouvais en faire autrement de toute manière. Il était mon père, je l'aimais et je ne voulais pas le contrarier. Même si... L'idée d'un mariage me semblait si mauvaise, mon dieu. Je me voyais d'ores et déjà cloitrée dans une maison, ne pouvant faire un pas au dehors sans avoir l'autorisation de celui qui allait être mon époux, ayant perdu toutes mes libertés. Et ma liberté, j'y tenais. Car mon père m'éduqua, certes, comme une princesse... Mais comme une princesse farouche, indépendante et pleine d'esprit. Parce qu'une poupée qui ne servirait qu'à la décoration ne l'intéressait point. La seule héritière de la dynastie était une femme, alors autant s'en accommoder !

En fin de compte, Arthur ne l’altéra point, cette liberté qui m'était si chère. Au contraire, même.

Arthur... Il n'avait nullement menti. Il m'aimait, il m'aimait vraiment. Et il me le montra très rapidement, en attendant deux longues années avant de célébrer nos noces. J'étais bien trop jeune, il fallait donc patienter, ce qu'il fit sans rechigner alors même que nous partagions le même lit. Jamais il ne posa sa main sur moi durant cette période. Enfin bref... Nous vivions dans une grande maison, en compagnie de son frère cadet, non marié. Et... Arthur me traitait, comme il l'avait promis à mon père, comme une princesse. Même lorsqu'il n'avait que peu d'argent, il mettait un point d'honneur à me couvrir des plus beaux tissus. Et puis, il m'offrait divers présents. Tout ce que je désirais, je l'avais. Il ne me refusait jamais rien. Puis, lorsque Catherine d'Aragon, ma tante... Bien que je ne l'ai connue que de nom. Bref, lorsqu'elle lui offrit une somme assez conséquente... Alors ses petites attentions envers moi redoublèrent. Il me rendait heureuse, oui. Et puis, j'avais tout de même la chance d'avoir un mari peu âgé, jeune et beau. Et surtout, qui m'aimait, ce qui n'était pas le cas pour grand monde.

Mais le bonheur que lui m'offrait... Son frère me le retirait. Son frère... Je l'ai toujours trouvé étrange, dès mon premier jour en sa compagne. Et le fait que nous vivions ensemble sous le même toit ne m'a jamais rassurée. Au départ, je me dis tout de même qu'il ne devait s'agir là que de mon imagination, que j'étais bien trop méfiante... Mais je me rendis compte bien rapidement que non. Mes inquiétudes étaient bel et bien fondées.

Ses sourires étranges... Et puis son regard. Son regard sur moi, ses yeux qui me déshabillaient sans cesse et sans gêne... C'était si... Désagréable. Et sa fausse gentillesse, dont je pouvais bien me passer... Non, je ne l'aimais pas. Et j'avais toutes les raisons du monde pour le faire, d'ailleurs.

Si Arthur attendit que j'atteigne mes quinze ans, lui n'attendit pas. Mais surtout, il osa poser ses sales pattes sur moi... Alors que j'étais la femme de son frère aîné. La toute première fois, j'eus simplement droit à quelques mots, quelques remarques alors qu'Arthur était absent. Des remarques qui s'apparentaient à celles auxquelles j'étais confrontée de la part de certains espagnols, n'arrivant pas à être satisfaits des prouesses de leurs femmes et voyant en moi une maîtresse idéale entre autres grâce à mon exotisme et à mon teint de peau qui, d'après eux, fait de moi une esclave et donc une bonne femme sur laquelle ils peuvent avoir tous les droits. En clair, que ma beauté n'a pour but principal que de les satisfaire, un point à la ligne. Y étant d'ores et déjà bien habituée, je pris alors pour décision de l'ignorer. L'ignorer, simplement, parce qu'il ne valait pas mieux. Il était ridicule, il ne méritait pas que je perde mon temps à lui répondre.

Mais vint le jour où ce fut sa main qu'il posa sur moi. Et un autre où, finalement, il m'attire dans la chambre, encore une fois en l'absence d'Arthur qui partait travailler. Il partait travailler afin de m'offrir tout ce que je souhaitais. Afin de faire en sorte que je ne manque de rien. Afin de me rendre heureuse, sans savoir qu'au même moment, son frère s'amusait à détruire tout ce qu'il entreprenait.

Je n'avais alors jamais eu pareil expérience avec un homme. Il s'agissait là de ma toute première fois. Et elle fut plutôt douloureuse, et désagréable. Je me rappelle encore l'avoir griffé, pour l'empêcher de déchirer ma robe. Puis pour empêcher ses mains de s'aventurer bien trop loin. Et je me souviens surtout de sa main qui, lorsqu'elle cessa de cavaler sur mon corps, m'infligea une violente gifle pour que je cesse de me débattre. Mais mon père m'avait appris à ne jamais rien cesser, et surtout pas de me battre.

Le soir, une fois Arthur rentré... Je ne pus lui en toucher un mot. Pour la simple et bonne raison que... Son cher frère menaçait de nous dénoncer, mon père et moi. Car oui, je pratiquais librement ma religion en compagnie d'Arthur. Il savait tout, et il n'avait rien contre cela. Mais son frère... Pour son frère, les choses étaient différentes. Son frère, en fait, me traitait justement comme une esclave, comme les hommes dont m'avait parlé mon père, comme ceux qu'il m'avait demandé d'éviter en épousant Arthur... Et pourtant, ce fut justement avec une telle énergumène que je dus vivre.

Arthur ne pouvait avoir descendance. Mais à l'âge de vingt ans, je me rendis compte que je portais un enfant... Et ce n'était pas le sien. Car... Non, son frère n'avait jamais cessé. Aussi fréquemment qu'Arthur, il me forçait à partager sa couche. Mais de manière telle que je ne puisse tomber enceinte. Bien qu'il lui arrivait, à certains moments, de prendre des risques. Et un jour, ces risques finirent par porter leur fruit. J'étais enceinte.

Il... Dieu doit encore m'en vouloir, de m'être débarrassée de cet enfant mais... Il était hors de question que je le garde. L'idée de porter sa progéniture entre mes entrailles me donnait des hauts le cœur. Alors, je pris certaines mesures... Et lors de ma convalescence, je fis simplement croire à Arthur que j'avais quelques soucis de santé. Le pauvre, je me souviens encore de sa mine paniquée, à courir à droite et à gauche, inquiet à l'idée que cette ''maladie'' ne me soit fatale.... Je regrette encore de lui avoir menti durant toutes ces années. Mais, lui raconter ce que me faisait subir son frère... Et détériorer la condition de mon père qui n'était déjà pas très bonne... Puis, je n'ose imaginer ce qu'il aurait pu lui faire en sachant ce qui se tramait. Je pense que tout comme ce dernier avait tenté de m'ôter toute dignité, il lui aurait simplement ôté... La vie.

Je vécus près de quatorze ans en sa compagnie, avant qu'une forte fièvre ne l'emporte. Certes, si je n'ai jamais aimé Arthur passionnément, comme un amant... Je pense que je l'ai tout de même aimé comme un mari. Enfin... Je n'aurais pas pu espérer mieux que lui. Il était bon avec moi, et ma condition l'inquiétait bien plus que la sienne. Il faisait de mon bonheur sa priorité. Vivre jusqu'à ma propre mort en sa compagnie ne m'aurait pas dérangée. C'est vivre en compagnie de son frère qui me posait problème.

C'est à vingt-sept ans que je devins veuve. Veuve, et sans enfants. Libre comme l'air. Je découvris rapidement que tout l'héritage était destiné uniquement à sa petite sœur et à moi. Son frère n'eut droit à rien. Je me rappelle encore du regard noir qu'il lui avait jeté lorsque ce dernier était venu lui rendre visite. Il est vrai que je n'ai aucune preuve de cela mais... Je pense qu'Arthur... A tout découvert peu avant sa mort. Je me rappelle encore de toutes ses excuses. Il me suppliait de lui pardonner de ne pas m'avoir protégée, et de ne pas m'avoir rendue heureuse comme il l'avait promis. Et j'avais beau lui répondre qu'il avait été bien au-delà de toutes mes espérances, il ne cessait pourtant de réclamer mon pardon. Ce que je lui offris, au final, uniquement pour que son voyage dans le royaume des cieux lui soit plus paisible, mais je ne pense pas qu'il en ait réellement eu besoin. Contrairement à son frère.

Frère que je finis par fuir d'ailleurs, malgré mon deuil et mes larmes. Il fallait que je parte, aussi vite que possible. Un jour, lors de l'une de ses absences.. Je pris mes bagages et je partis pour l'Angleterre. Mon voyage était prévu depuis déjà quelques semaines. Disparaître, sans laisser de traces, après avoir tout de même adressé une lettre à mon père pour qu'il ait vent de ma destination... Et ce que je comptais y faire.

Sa sœur... Il avait une sœur, que je n'avais alors jamais rencontrée, ni connue. Uniquement de nom, à vrai dire. Lyra, qu'elle s'appelait. Et bien du monde disait qu'elle était morte. Mais, grâce à quelques pièces... Je finis par découvrir que non. Non, elle était bien en vie, mais sa voix... Sa voix n'était en rien semblable à ce qu'il m'en avait décrit. Et puis, à vrai dire... Bien que je ne pratique nullement ma religion en sa présence et que, comme avec les autres, je m'amuse à jouer mon éternelle comédie... J'ai tout de même la drôle d'impression que cette dernière ne me fait que très peu confiance. Bon, après tout, je suis une parfaite inconnue à ses yeux. Et une inconnue... Assez typée, dirons-nous. Rien d'étonnant à ce qu'elle se méfie... Et puis, Mary a du instaurer une certaine peur des étrangers dans le cœur de son peuple pour préserver son trône. ... Et puis peut-être qu'après tout il ne s'agit là que de mon esprit qui s'égare et qui se fait encore plus insensé qu'à l'accoutumée ?

Mary Tudor... Nouvelle reine d'Angleterre. Plutôt intéressant, n'est-ce pas ? Voilà que désormais, en plus de la famille régnante espagnole, je me retrouve rattachée par les liens du sang à la couronne anglaise. Qu'ils sont mignons, tous ensemble, à jouer à la tête de nombreux royaumes sans même se soucier de mon sort. Mais trêve de plaisanteries, il est temps qu'ils reconnaissent leur chère cousine à sa juste valeur, tous autant qu'ils sont. De toute manière, on ne peut défaire les liens du sang. Tôt ou tard, ils vont être forcés de les assumer.

Faire mon entrée à la cour. Eh bien oui, pourquoi n'entrerais-je pas à la cour ? Pourquoi n'y aurais-je pas ma place ? Et par la suite... Qui vivra verra. Tout est à point à qui sait attendre, et j'ai déjà bien trop attendu. Je pense qu'il est temps de passer à l'action. Maintenant qu'Arthur est mort – que son âme repose en paix -, je suis bien plus libre... Plus légère... Et puis, malgré mes vingt-sept ans, je ne porte que très peu de traces du temps qui passe que cela soit sur mon visage ou sur mon corps. Ma beauté, plutôt unique en ces terres, suscite la curiosité et pour certains, le désir. Une nouvelle union est toujours possible. Union dont, cette fois-ci, je serai en mesure de décider. Et qui, je le pense, sera bien plus basée sur le pouvoir et la richesse que sur quoi que ce soit d'autre, que Dieu me pardonne. Mais, il existe des circonstances où le mensonge et la malice sont le plus pieu des devoirs.