Be a Lady
[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]La naissance ? Jane ne s’en souvient pas, il n’y a plus que ses parents et les gens présents qui s’en souviennent et qui pourront le raconter à la jeune femme qu’elle est devenue pourtant, elle est bien née, un vingt-cinq mars alors que la neige n’était pas encore totalement partie du domaine des Armstrong. Pas tout à fait, même s’il faisait froid, Jane Louise Armstrong eut la chance de venir au monde à terme et dans de bonnes conditions mêmes si sa mère Lady Cecily dut se reposer de longues semaines pour se remettre totalement de ses couches. Les premières. Dame de compagnie de Marguerite Tudor, cette douce femme avait un amour maternel à donner. Si Jane n’a pas connu la cour longtemps au profit du domaine de ses parents à la frontière de l’Écosse, elle n’en était pas plus affectée que cela. Non, même qu’elle eut la chance un an plus tard d’être l’heureuse sœur aînée de la petite Margaret venue au monde un an et quelques mois après Jane. Si la première-née ne savait pas le secret qui entourait Margaret à l’époque, elle a toujours été élevée dans le mépris de cette dernière. Pourquoi ? Elle ne le savait pas, mais son père la félicitait d’un tel comportement à l’égard de sa cadette uniquement. Ce que sa mère ne pouvait réprimer, elle semblait comme impuissante face à son mari. Pourtant, c’est au rythme de précepteurs et de la lecture de livres ou encore par l’apprentissage du maniement de la harpe que Jane grandit, apprennent tout ce qu’il fallait savoir pour être une Lady digne de ce nom, comme l’était sa mère sans doute. Et c’est ainsi qu’elle vécue jusqu’à ses six ans. Avant que le Roi Jacques V ne vienne transformer leur quotidien et révéler une triste vérité que Jane ne connaissait pas et une heureuse nouvelle pour Margaret.
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[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]Le roi venait visiter leur domaine et prendre du repos après une chasse. Jane n'arrivait pas à en croire ses oreilles, alors qu'elle regardait le cortège royal franchir la porte du domaine et que son père l'appelait par le biais de divers serviteurs. Elle descendit aussi rapidement qu'elle le put à la porte d'entrée, serrant la main de son paternel dans la sienne, gratifiant le monarque d'une révérence digne d'une petite fille de six ans désormais. C'était le jour de l'anniversaire de Margaret et elle ne lui avait pas souhaité comme de juste. Comme tous les ans depuis qu'elle savait parler. Son père lâcha sa main, partant avec Sa Majesté faire le tour du propriétaire. Jane n'eut de cesse d'être éblouissante en ce jour éclipsant presque l'anniversaire de Margaret. Elle était cultivée, mais ne maitrisait pas encore l'art de la conversation comme une Dame de la cour. Certaines venues eurent tout le loisir de lui en apprendre quelques subtilités. Alors que Cecily se faisait discrète, presque introuvable et ce n’était pas pour dire que la venue du roi la dérangeait, non, c’était la nouvelle de la reconnaissance de Margaret par son père le Roi qui perturbait la femme de maison. Oui et cela Jane eut de la peine à la comprendre, c’est une autre dame qui dût lui expliquer longuement ce que voulait dire enfant illégitime, ou reconnaissance en illustrant ses propos. Jane n’était pas furieuse, mais elle envisageait la compréhension de certaines choses désormais. Pourquoi le mépris de son père envers Margaret et la gêne de sa mère en ce jour. Jane était éclipsée au profit d’une princesse d’Écosse, mais d’une bâtarde que sa mère avait portée. Pourquoi fait-il que cette tare s’abattre sur leur famille si paisible, sans Margaret tout aurait été plus simple, vraiment plus simple… «
Père » avait-elle demandé une fois son père plus seul que s’il était en compagnie du roi. «
Margaret va-t-elle repartir avec Sa Majesté ? » La voix de Jane était pleine d’espoir de pouvoir profiter de sa mère à elle seule, mais la seule réponse qu’elle eut fut le rire de quelques messieurs et une tape paternelle sur le haut de son crâne avant qu’une servante ne la reconduise dans sa chambre pour le coucher.
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«
Jane ! » Assise devant sa harpe, alors que son percepteur venait de partir, la petite Armstrong de sept ans se leva pour répondre à l’appel de son paternel. Jane était vraiment à l’écoute de ce qu’on lui disait. Et ce fût cependant surpris qu’elle arrive dans le salon où son père semblait recevoir quelques invités. Une famille sans doute puisqu’il y avait deux parents et deux enfants. Un garçon bien plus âgé qu’elle et l’autre qui devait avoir sensiblement son âge. « Approche mon enfant ». Son père semblait très fière de pouvoir la montrer ainsi à des invités. Depuis la visite du Roi, les Armstrongs avaient hérité de terres et de titres de noblesse. Ce qui aidait Jane dans un mariage futur. «
Laisse-moi vous présenter au Baron et à la Baronne Murray, ma chère enfant. Baron, ma fille ainée Jane. » La petite fille s’enchaina, sur une petite révérence conne lui avait appris, sa mère, alors que le Baron présentait lui-même ses enfants. «
Stephan et William, mes héritiers. » Jane porta son regard sur l’aîné, puis sur le cadet. Et très franchement, elle ne penserait pas que cette rencontre aurait une suite amicale et bien plus encore.
Be a Beautiful Devil
[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]Le roi est mort, vive la reine Mary. Voilà ce qui flottait aux lèvres de tous les habitants de l’Écosse. Car Jacques V était parti, désormais, il était loin, un souvenir, celui d’un roi. Mais les Armstrong en gardaient pourtant un souvenir bien vivace, celui de Margaret, sa fille bâtarde qui avait dû rester chez eux malgré tout, qui avait dû être un boulet au pied de Lord James durant des années. À la mort du roi, Jane avait huit ans. Et sa mère avait bien précisé qu’elle voulait prier la mort du roi, même si elle priait aussi pour la mort d’un amant. Jane ne le savait pas trop, elle savait juste que quelque chose avait changé chez sa mère, elle semblait plus distante. Avait-elle pris une décision en ce qui concernait les mauvais comportements de Jane envers Margaret ? Peut-être, mais ce n’était pas une vraie raison pour rester cloitrer dans sa chambre des jours durant. Jane ne comprenait pas vraiment ce qui se passait, mais elle était jeune, elle pensait que ceci était de la faute de Margaret. À qui la faute sinon ? Jane était sage, et Margaret était l’image même du fruit du démon, alors ça ne pouvait pas être envers l’aînée que Lady Cecily en avait du moins… Ce n’était rien de tout cela, la vérité était bien plus terne et peu réjouissante, car c’était finalement le dernier jour de Noël qu’elle allait passer avec sa mère. Le dernier. Car au lendemain de ce dernier, la dame des lieux annonçât à ses filles qu’avec l’accord de Lord James, son époux, elle se retirait au couvent… La nouvelle n’eut l’occasion que de briser le cœur de Jane en millions de petits morceaux pour le remplacer par un cœur plus dur… Comme le marbre.
***
«
Mère, vous n’êtes pas obligée d’y aller n’est-ce pas ? » Jane pleurait à chaudes larmes devant la porte du carrosse qui allait emmener sa douce maman dans un couvent, le roi était mort depuis un mois, et Lady Cecily avait fait son choix. Celui de partir et de devenir une femme de Dieu, de prier et d’excuser ses pêchés auprès du créateur. Jane était très pieuse, elle le comprenait très bien, mais elle ne pouvait pas l’envisager, elle n’avait que huit ans après tout. Sa mère était son héroïne, malgré tout. Malgré Margaret, elle était son modèle de femme. Elle ne pouvait pas la voir partir. Jane pleurait, même si ce n’était pas vraiment digne d’une petite fille de sans rang, mais elle était prise par une tristesse sans nom, elle n’arrivait pas à expliquer tout ceci. Pourtant, cette femme qui l’avait mise au monde la serra contre elle une dernière fois. «
Jane, mon enfant, comprenez qu’il y a des choses devant lesquels nous devons nous faire pardonner. Je ne puis rester et vivre dans le péché chaque jour. Ma fille, sachez que je vous aime et qu’ici ou bien ailleurs, mon amour sera toujours aussi tendre et sacré qu’il ne l’était durant toutes les fabuleuses années que nous avons passées ici. Vous comprenez n’est-ce pas ? » L’enfant approuva d’un petit signe de la tête, serra contre le cœur de sa mère, elle pouvait l’entendre battre, mais elle faisait simplement mine de comprendre, sa tristesse, elle commençait à voir d’où elle venait finalement. Tout cela, c’était la faute de Margaret, si elle n’avait pas existé, tout ceci n’aurait pas été arrivé. Toujours et encore elle… Lady Cecily l’embrassa sa première née sur le front avant de monter dans la voiture qu’il l’emmènerait loin. Mais Jane retournait s’accrocher à la main d’une gouvernante désignée pour remplacer la dame à partir d’aujourd’hui. Jane ne l’aimerait jamais et elle allait lui rendre la vie dure à elle aussi… Une fois le carrosse disparu au loin, Jane lâcha la main de la gouvernante, remontant en courant vers un endroit où se trouvait surement sa demi-sœur. Arrivant dans la même pièce qu’elle, elle lui jeta un livre au visage. «
Tout ça c’est de ta faute si mère est partie, c’est toujours tout de ta faute erreur de la nature ! » Et désormais, Jane se jura de lui rendre la vie encore plus dure, car elle ne méritait que cela après tout. Fille de roi ou non, elle n’avait pas de scrupule en ce qui pourrait la concerner.
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[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]Elle marchait doucement aux côtés de Stephan Murray, d’un geste las, accroché à son bras. Quinze ans, c’était le bel âge, son père n’avait de cesse de chercher un mari convenable à Édimbourg ou encore dans leur domaine, mais elle avait troqué la frontière écossaise pour les Highlands durant un mois entier. Laissant Margaret seule dans leur domaine. Jane avait bien du mal à rester dans le même manoir qu’elle, le même château malgré les nombreuses demandes de sa mère de pardonner à la bâtarde du Roi. Décidément, Jane n’y arrivait pas. Elle avait tenté en vain, mais le départ de sa mère pour le couvent il y a de cela six ans avait rempli son cœur d’une pierre incassable dès lors que l’on parlait de Jane. «
La route de demain ne sera pas trop fatigante Jane ? » Elle releva ses yeux vers le jeune homme de cinq ans son aîné. Non, tout devrait aller, Jane se savait sur le retour et son séjour chez les Murray n’avait été que trop court à son goût, mais cette pause dans ses élans de méchanceté avait fait un bien fou à son imagination et apaiser sa colère pour un temps. «
Je ferais un arrêt entre deux chez des cousins, mais c’est aimable de t’en inquiéter Stephan. Vraiment, ton attention me touche. » Elle sourit sincèrement, pensant que malgré son rang, Stephan Murray aurait pu faire un époux plus que convenable. Parce qu’elle l’aimait, beaucoup. Beaucoup trop pour une simple amitié. Mais c’était compliqué… Trop compliqué, car William, le cadet n’était pas en reste non plus avec ses longs cheveux ébène et son air d’enfant permanent. Jane n’aimait pas cette situation, où personne des deux Murray ne se déclaraient de quelque chose, peut-être que le rang de la demoiselle jouait énormément pour cela, mais ce n’était pas plus mal. Elle sourit une seconde fois alors que William arrivant à leur hauteur tendit le bras pour qu’elle le prenne. Jane lâchât sans peine celui de Stephan qui fit la moue malgré tout, mais William eut le dédain d’accorder un clin d’œil moqueur à son grand frère, alors qu’elle riait de bon cœur, les cheveux étaient près, Jane allait devoir rejoindre sa maison, son chez-soi et retrouver la tare de Armstrong… Encore une fois et pour combien de temps, elle ne le savait pas.
***
La journée avait commencé pour le mieux aujourd’hui. Vraiment trop bien peut-être. Jane avait eu le loisir de remplacer le pavot en grain par du poivre moulu sur le pain du goûter de Margaret et son père l’avait gratifié d’une tape sur l’épaule alors qu’un messager arrivait par la grande porte de leur domaine. Là, il faisait beau malgré tout, malgré la présence de Margaret dans leur dos. Jane venait d’avoir seize ans, il y a quelques mois de cela et on la promettait déjà à un grand avenir marital. Bientôt elle serait l’épouse d’un homme puissant et la naissance de Margaret ne serait plus qu’une poussière dans son paysage. Pourtant, c’est sa demi-sœur que le coursier demanda à son père. Qui pouvait envoyer des missives à elle… Qui ? Hormis leur mère peut-être. «
Va la chercher, Jane » annonçait son père avec dédain. Mais la jeune femme s’exécuta rapidement, remontant jusqu’à un endroit où elle trouverait le fruit de l’adultère royal. «
Margaret, père te demande. » dit-elle froidement, alors qu’elle tournait déjà le dos, retournant auprès de Lord James. Jane n’était jamais trop enchantée d’adresser un mot à Margaret et souvent, les repas se faisaient dans le silence. Trop souvent. Mais quand la fille bâtarde du roi Jacques V s’avançât vers le messager, elle parcourut rapidement la missive, avant de se retourner sur Jane, toujours aussi sage qu’une image. «
Marie de Guise m’invite à rejoindre la Cour. » Jane serra fortement les pans de sa robe, en souriant d’amertume. «
Et son entourage personnel en plus de cela. » Dans un bruit fort peu féminin, Jane hurla avant de rejoindre le château et de parcourir les couloirs comme une furie. Excédée par tant d’attention de la part de la régente. La naissance de Margaret ne l’avait-elle pas déshonoré elle aussi ? Comment pouvait-elle lui demander d’être aussi proche d’elle ? D’un pas plus que décidé, Jane s’empara de coupe-papier avant de rejoindre les appartements de sa sœur. Passant tout tissu qui se trouvait dans la pièce sous la lame. Draps, oreillers, robes, tout y passa dans un génocide de soie, lin ou coton, elle se fichait de tout. Elle aurait bien le loisir d’avoir de nouvelles toilettes à la cour n’est-ce pas ? «
Va au diable », hurla-t-elle à sa cadette, lançant quelques morceaux de tissus précieux par les fenêtres. Montrant bien, que le peu de patrimoine qu’elle avait ici, n’était plus qu’un tas de poussières et de lambeaux bon à jeter.Lettre de Margaret pour aller à la Cour *
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D’ennui, Jane lisait dans un fauteuil face au feu de cheminée du salon familial. Elle venait d’avoir dix-huit ans et la traitrise des Murray à son égard l’avait éloignée de son but, celui de rencontrer un époux puissant. Car ces deux hommes avaient eu le charme et l’éloquence pour la prendre tout entière psychologiquement parlant, elle n’arrivait que rarement à ne pas voir William à l’embrasure d’une porte. Mais au moins, depuis deux ans, elle goûtait à la liberté depuis le départ de Margaret pour la Cour d’Écosse. D’un geste rageur, elle lança son livre contre le mur. La garce. Jane posa ses mains contre ses tempes, déjà deux ans que cette bâtarde de roi vivait la grande vie à la cour d’Écosse et qu’elle, elle croupissait près de la frontière anglaise dans ce château familial dont elle ne pouvait plus voir les souvenirs en peinture. Les endroits préférés de sa mère, les rires de son père quand elle faisait correctement une récitation de harpe. Les petits malheurs qu’elle faisait à Margaret, comme mettre de la farine dans son lit ou sur ses vêtements noirs à chaque fois qu’elle passait à côté d’elle dans un couloir. Lui pincer le bras jusqu’à ce qu’elle en ait des bleus. Verser le reste d’un pot de chambre dans ses draps. Tout était passé pour Margaret, tout. Et là, Jane s’ennuyait. «
Madame, votre père est arrivé. » D’un geste rapide, elle se leva sans faire de convenance, relevant le bas de sa robe pour courir, jusqu’à l’entrée de la demeure des Armstrong, en hurlant joyeusement à l’adresse de son paternel de retour après quelques mois d’absences. «
Père, vous enfin, vous voilà ! » Elle sauta sur les avant-bras de son père, avant qu’il ne la serre contre lui. «
Vous avez des nouvelles de mère, dites-moi, comment se porte t’elle, vous avez bien prit le temps d’aller la visiter n’est-ce pas ? » Jane était toujours inquiète en ce qui concernait sa mère, c’était une personne importante, usée par les méfaits de la vie et usée par Margaret, une des victimes de cet enfant adultère. James posa une main sur le haut du crâne de sa fille. «
Elle va bien ne t’inquiètes pas de cela, Jane, elle est très fière de toi et de l’enfant. » Son père n’appelait jamais Margaret par son prénom, jamais à la maison du moins. « Je vois » dit-elle peinée, alors que son père lui tendait une enveloppe cachetée d’une famille dont le sceau lui était inconnu… Tout du moins, encore aujourd'hui, et par le voyage qu’elle avait dû faire. «
C’est pour toi mon enfant, ouvre là donc. » Le regard pétillant et les gestes vagues par des mains moites d’excitation, elle ouvrit et lut la lettre qui lui était adressée. La sienne de lettre. «
Une convocation pour peut-être devenir l’une des dames de compagnie de Lady Renwall. Oh père, vous n’auriez pas du. » Car elle savait que son père avait dû la recommander, chaleureusement, car depuis le mariage de Stephan, elle était inconsolable et depuis les fiançailles de William, elle était également. Mais elle sait que leur manque de rang n’aurait conduit à rien, rien du tout malgré les avances du cadet des Murray à son égard… Jane se signa, elle était tellement heureuse qu’elle n’arrivait pas à croire la chance que son père lui offre sur un plateau d’argent. «
Je ne saurais vous décevoir père ! » dit-elle en se serrant contre lui, oubliant la vie injuste qu’elle avait menée jusqu’à lors, sa vie allait prendre un nouveau tournant.
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[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]«
Madame, préférez-vous les rubans pourpres ou les rubans violines pour vos cheveux ce matin ? » Jane était aimable, alors que la Renwall sirotait tranquillement son sirop de cassis et un thé au citron. Bien que l’heure ne soit pas des plus tardives, Jane attendait un geste, un mot de la dame qu’elle servait pour être certaine de son choix. Elle était certes très maternelle, mais aussi très exigeante avec les personnes qui la servaient. Alors en tant que lady of the privy chamber, la demoiselle savait pertinemment que la grande dame qu’elle servait n’était disponible qu’après sa première tasse de thé et quand elle avait dans le ventre, au moins trois ou quatre scones à la confiture de roses, ses préférés. Dans l’entourage de Madame Renwall, Jane était assez importante sans pour autant être indispensable… Elle n’était dame de compagnie que depuis trois ans, mais elle était dans l’intimité très privée de sa maîtresse que depuis six mois seulement. Ce revirement de situation l’avait réjoui, car dans le fond Jane passait encore un échelon dans la société, sous peu, elle n’aurait plus qu’à demander l’accord de Madame pour trouver un époux avec son appui. Quelqu’un de puissant et de fidèle qui ne la trahirait jamais et qui serait purement catholique. Dieu sait que si ce n’était pas le cas, Jane ne voudrait jamais de cette alliance. «
Nous mettrons des perles aujourd’hui Jane, vous pouvez disposer. » Jane s’inclina un peu, reculant de quelques pas avant de tourner le dos et de revenir dans l’antichambre de la Renwall. Cherchant dans les coffrets les perles qu’elle aimait tant pour parer Joanna Renwall de ces merveilles. Jane aimait les perles, mais elle ne pouvait pas encore se le permettre, malgré ses titres, elle évitait d’attirer l’attention quand Margaret n’était pas dans les parages, elle évitait d’être une garce en l’absence de sa demi-sœur. Jane s’observa dans un miroir, les perles dans un coffret d’argent, sa robe argentée à la dentelle de calais couvrait ses chevilles avec raffinement, et sa taille était serrée divinement par un corset. Elle avait de la peine à respirer, mais il fallait au moins cela pour attirer un époux convenable. «
Jane » L’appela sa maîtresse. La nommée prit la brosse posée sur un guéridon, repassant une énièmes fois la porte de la chambre de la Renwall. Encore une matinée complète serait dédiée à la coiffure à au choix de la robe qu’elle porterait pour les promenades de l’après-midi. Mais ce n’était pas un labeur comme celui de faire la guerre ou bien de labourer un champ par trente degrés au-dehors.
***
«
Baron Murray, on ne vous voit décidément pas assez à la cour. » Jonna Renwall s’exclamait de voir un vieil ami dans un endroit qu’il n’affectionnait pas véritablement. Mais c’était tout l’art de ma famille Murray, il aimait rester dans les Highlands, c’était un ami de la famille. Jane le savait, elle avait passé quelques semaines dans leur château à l’autre bout de l’Écosse quelques étés durant sa jeunesse, mais ce n’était pas le père que Jane appréciait. Plutôt les deux fils qui se tenaient aux côtés de leur paternel. Autant dire qu’elle évitait les regards instants de William sur elle. À la droite de sa maîtresse, Jane tentait de fondre dans la masse des autres dames de la Renwall. Mais rien n’y faisait, elle avait mis encore de plus belle parues pour surpasser celle de Margaret qu’elle pourrait croiser d’une minute à l’autre. Et encore une fois, la demi-sœur de la bâtarde de feu le roi était éblouissant, mais elle n’était que dans l’entourage d’une dame, pas dans celui de la Reine douanière. «
Cela va de soi, les obligations Madame, laissez-moi vous introduire mes deux fils […] »
Stephan et William, oui on le sait ! Pensât Jane en jetant un regard vers l’extérieur, malgré le mauvais temps légendaire de l’Écosse, il faisait extrêmement beau aujourd’hui. Et une chance qu’il faisait beau, car sinon, elle ne se trouverait pas sous des arcades dans les jardins du château. Une chance qu’il y ait de l’air, son corset la serrait bien trop fort pour qu’elle reste à l’intérieur sans s’éventer à l’aide d’un éventail. «
[…] William cherche un parti convenable, suite au décès de sa fiancée » Jane déglutit avec déplaisir. Un parti… convenable. ET la pauvre femme qu'il devait épouser, morte ? Elle accordait un petit regard désespéré, mais en colère à William, le cadet… Un parti convenable, elle empoisonnerait la prochaine pour sure.
***
Jane riait de bon cœur, une belle moquerie envers Margaret qui passait dans un couloir du château accompagné de quelques personnes. Alors qu’elle passa à sa hauteur Jane ajoutât deux dames qui l’encadraient : «
Regardez, même les corbeaux pleurent tant de médiocrité. » Elle montra du bout de son éventail les quelques oiseaux posés sur le rebord opposé des fenêtres du château. Le croassement était lugubre, voire macabre… Trop à son goût, mais Jane laissa ses craintes de côté pour prendre plaisir à maltraiter publiquement sa cadette. Elle se tourna d’un geste calculé, vers le groupe où Margaret évoluait. S’avançant lentement d’un pas calculé, mais gracieux. «
Si vous voulez bien me laisser quelques instants avec ma tendre cadette je vous prie. » Dit-elle courtoisement aux groupes de dames entourant sa demi-sœur. «
Savez-vous Margaret, que père a rencontré mère au couvent il y a quelques semaines. » Elle s’arrêta pensive. «
Oh, je vous prie de m’excuser, que mon père. Mais revenons-en au sujet, elle ne demande pas même ne serait-ce qu’un signe de vie de votre part. N’est-ce pas dommage pour un enfant aussi important que vous ? » Elle était tranchante, mais courtoise, comme si elle parlait de la pluie et du beau temps. «
Mais je vous prie de m’excusez de ma curiosité, mais avez-vous ne serait-ce que fait votre devoir d’enfant en demandant à notre Reine douanière ne serait-ce qu’une après-midi pour aller la voir et expier vos pêchés ? » Celui d’être née était tout bonnement plus que sous-entendu dans la bouche de Jane. «
Vous devriez, Margaret. » Dit-elle en lui tournant le dos, reprenant sa route vers les appartements de Joanna Renwall.
***
«
Jane, attends. » La demoiselle serrait contre elle le tissu mauve de sa robe, le relevant légèrement pour avancer plus vite qu’à son habitude. Madame Renwall était aux tables de jeux et en chemin pour la rejoindre une fois apprêtée, Jane avait eu le malheur de croiser William Murray. Cette malheureuse entrevue qui aurait pu passer inaperçue si Jane ne l’évitait pas depuis son arrivée à la cour avec son frère et son père. Elle y mettait un point d’honneur alors que les Murray et les Armstrong étaient des familles qui s’appréciaient. Le tout étant de notoriété publique. Mais Jane n’était pas prête, pas encore malgré les années… Tout était derrière eux. Stéphan, William et les amours de jeunesse, c’était loin, comment une future marquise pouvait être la femme d’un baron et inversement, le rang était important, Jane avait besoin de s’élever pas de redescendre avec le titre des Murray. Elle devait au moins être l’épouse d’un Duc pour réussir à supplanter Margaret. «
Cesse ce jeu, William. C’est malsain ! » Dit-elle en se retournant vers lui, alors que le jeune homme posait sa main sur son épaule la forçant à se retourner. «
Cesser quoi ? Le fait que tu me fuis depuis mon arrivée à la cour ? Jane très franchement, tu pensais que cette situation allait pouvoir durer, nous étions amis enfant… » «
Et aujourd’hui des étrangers William, je te le dis et te le répète, je ne veux plus avoir affaire à toi, ou encore à ton frère. Vous… Vous êtes de plus basse naissance que moi et j’ai besoin de plus que ça. » Le brun souffla d’un soupir exaspéré que Jane n’eût jamais pu entendre un tel cri de tristesse et de colère mêlé l’un à l’autre. «
Encore à cause de Margaret, tu es stupide Jane. » D’un vif geste, d’un sentiment de fierté mal placer, c’est la main de Jane qui atterrit dans un claquement sourd sur la joue du fils Murray. «
Ça suffit », souffla-t-elle. «
Tu n’es même pas en mesure de comprendre ce que ça représente pour moi, William, pas en mesure de savoir que cette garce de bâtarde m’a voler. Ma jeunesse et l’amour de ma mère ! Alors, tais-toi ! » Elle pinçait ses lèvres de contrariété, encore heureux qu’ils fussent seuls dans un couloir désert, mais sa voix était tellement faible, que Jane sentait sa lèvre s’ouvrir au fur et à mesure qu’elle la mordait pour ne pas hurler sur William. Mais il s’écarta, surement à contrecœur, et Jane continua sa route aussi vite qu’elle ne le pouvait jusqu’à ses appartements, s’écroulant contre la porte de sa chambre, elle n’arrivait pas à comprendre pourquoi. Pourquoi il venait la voir après tout le mal que lui et son frère lui avaient fait. Comment il pouvait la regarder enfance après avoir joué avec son cœur de la sorte.